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Une proposition de loi pour améliorer le sort des jeunes majeurs de l'ASE

Déposée le 13 juin à l'Assemblée, en même temps que le CESE remettait son rapport pour "prévenir les ruptures dans le parcours en protection de l'enfance", une proposition de loi propose de sécuriser le passage à la majorité des jeunes bénéficiant de la protection de l'enfance. Plutôt consensuel sur le fond, le texte porté par la députée Brigitte Bourguignon a été adopté en commission des affaires so, mais son avenir est l'objet d'un désaccord dans l'exécutif.

Ce mercredi 11 juillet, la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale a examiné et adopté la proposition de loi déposée le 13 juin par la députée Brigitte Bourguignon "visant à renforcer l'accompagnement des jeunes majeurs vulnérables vers l'autonomie". Soutenue par de nombreux acteurs de la Jeunesse et de la protection de l'enfance, ce texte entend s'attaquer aux difficultés rencontrées par les jeunes relevant de la protection de l'enfance au moment du passage à la majorité.

Dans son exposé des motifs, l'auteure de la proposition de loi constate que, aujourd'hui, près de 20 000 jeunes (20 900 selon un récent rapport du CESE, voir plus bas) bénéficient d'un "contrat jeune majeur" conclu avec le département afin de prolonger la prise en charge au-delà de leurs 18 ans et au plus tard jusqu'à 21 ans. Cependant, "ce dispositif présente un certain nombre de faiblesses".

Tout d'abord, il revêt un caractère facultatif. De ce fait, selon les départements, il n'est pas toujours proposé et ses critères d'accès varient. Autre constat : "lorsque les départements proposent un accompagnement à destination des jeunes majeurs, celui-ci est de plus en plus précaire puisque la majorité des contrats dure souvent moins de six mois", peut-on lire, toujours dans l'exposé des motifs. Enfin, troisième "faiblesse", le contrat jeune majeur s'arrêtant à 21 ans, il "ne permet pas aux jeunes concernés d'envisager sereinement l'avenir, en particulier la poursuite d'études supérieures".

Une exigence d'autonomie plus forte mais des ressources plus faibles

Saisi en avril dernier par le Premier ministre pour travailler sur la situation – notamment - des jeunes majeurs, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) souligne dans un rapport remis le 13 juin le caractère paradoxal de leur situation : "il leur est demandé plus d'autonomie qu'aux jeunes de leur âge alors qu'elles et ils ont moins de ressources (familiales, relationnelles, psychologiques, financières, sociales, etc)."

La députée à l'initiative de la proposition et le rapporteur du CESE, Antoine Dulin, partagent le même constat. Cette prise en charge défaillante constitue "un véritable gâchis économique au regard de l'investissement de la collectivité pour la protection de l'enfance (environ 10 milliards d'euros)", écrit le premier dans la note de synthèse de son rapport. Elle constitue également un "un non-sens éducatif et social, en termes d'insertion et de perte potentielle de motivation pour les jeunes mais aussi pour les professionnels", ajoute la seconde qui, outre son mandat de députée, est aussi présidente du Haut conseil du travail social.

Un suivi obligatoire au-delà de 18 ans

La proposition de loi prévoit, pour répondre aux problématiques soulevées, de rendre obligatoire la prise en charge des jeunes majeurs de moins de 21 ans en difficultés. Ces dépenses nouvelles seraient à la charge de l'Etat (article 1). Il donne la possibilité aux départements de prolonger la prise en charge par les services de la protection de l'enfance aux jeunes au-delà de leurs 21 ans et jusqu'à 25 ans, comme le font déjà certains, de manière volontaire. Quant à la date d'interruption de la prise en charge des jeunes tout juste majeurs par les services de l'aide sociale à l'enfance, le texte la fixe à la fin du cycle scolaire ou universitaire entamé avant la majorité, et non plus à la fin d'une année scolaire. Afin d'évaluer la situation du jeune majeur, la proposition de loi impose la tenue d'un entretien entre le jeune et son ancien référent, six mois après sa sortie du dispositif de l'ASE. Un amendement adopté en commission prévoit que deux autres entretiens aient lieu en amont de la majorité, à 16 ans et 17 ans, pour préparer ce "passage". Autre mesure importante : le texte fait des jeunes majeurs un public prioritaire dans l'accès à un logement social ou une place en résidence universitaire. Un amendement adopté en commission prévoit que les jeunes femmes en situation de "grossesse précoce" au moment du passage à la majorité soient prioritaires dans l'accès à une place en crèche.

Un texte consensuel mais à l'avenir incertain

Signé initialement par plus de 150 députés de la majorité, dont Yaël Braun-Pivet (présidente de la commission des lois) ou Barbara Pompili (présidente de la commission développement durable), le texte emporte le soutien de députés de l'opposition de droite comme de gauche. Son adoption en commission des lois était donc plutôt assurée. Reste à savoir s'il pourra être programmé dans le calendrier de l'Assemblée.

Pour l'heure, le président du groupe LREM, qui n'a pas signé la proposition de loi, n'a donné aucune date. Il semblerait qu'il attende que le gouvernement, partagé sur l'opportunité d'une telle loi, se positionne. Car cette proposition vient percuter son agenda de rentrée : la future "stratégie de lutte contre la pauvreté", dont la présentation a été finalement repoussée au mois de septembre, et la future "stratégie interministérielle pour la protection de l'enfance et de l'adolescence".

Moins médiatisée que la stratégie de lutte contre la pauvreté, cette dernière était également attendue pour le mois de mai. Mais, comme l'ont appris en plénière les membres du Conseil national de la protection de l'enfance (CNPE) le 27 juin dernier, sa présentation a été reportée à l'automne, "ce qui s'explique notamment par l'intégration de préconisations issues du rapport du CESE et d'éléments issus des débats de la dernière séance plénière", rapporte la CNAPE, fédération des associations de la protection de l'enfance, qui y siège.

Toutefois, l'exécutif semble vouloir limiter cette stratégie à la protection des enfants victimes de violences. Le sort des jeunes majeurs issus de l'ASE devrait donc s'insérer dans la stratégie de lutte contre la pauvreté. La proposition de loi de Brigitte Bourguignon, dont l'examen pourrait bénéficier d'une "fenêtre de tir" dans le calendrier législatif, début octobre, pourrait alors en être la première pierre législative. D'où le fait, selon certaines sources parlementaires, qu'elle recueillerait plutôt l'assentiment des cabinets d'Emmanuel Macron et d'Edouard Philippe.

Quoi qu'il en soit, in fine, si l'arbitrage de l'exécutif devait empêcher le groupe LREM de porter cette proposition de loi devant l'Assemblée, d'autres groupes politiques se seraient d'ores et déjà portés candidats pour le faire à sa place.

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