Entre 8 et 9 milliards d’euros dépensés en matière d’action sociale et sanitaire, soit 7 % des dépenses publiques consacrées à ce secteur. C’est l’une des données fournies par l’Igas, dans une rare estimation chiffrée issue de son rapport sur l’action sociale et sanitaire des communes, à partir des situations de sept communes et intercommunalités ainsi que d’une dizaine de projets de métropoles (bloc communal).
Premier enseignement, toutes mènent des initiatives sociales et sanitaires qui vont au-delà de leurs compétences spécifiques prévues par la loi. Si l’ensemble des collectivités observées est confronté aux mêmes défis des difficultés d’accès aux soins, du vieillissement de la population et de la précarité d’une partie de leurs habitants, les priorités des publics ciblés, leur niveau d’engagement et leurs modalités d’action sont multiples. « Il en résulte quasiment autant de réalités que de blocs communaux », précisent les rapporteurs.
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Appels à projets
« C’est la capacité du bloc communal à nouer des partenariats qui apparaît déterminante pour conduire des politiques sociales adaptées aux besoins de la population », met en avant le rapport. Cette logique partenariale passe d’abord par l’inscription de ses actions dans des contractualisations avec l’État et les Départements. Celle-ci s’illustre par la multiplication des appels à projets. S’ils sont des vecteurs forts d’engagement des communes et des intercommunalités, le rapport met en garde sur le facteur de risque financier qu’il constitue pour elles, notamment en cas de mauvaise anticipation des enjeux et de désengagement du partenaire. Il note que la crise liée au Covid-19 a joué à cet égard un rôle de révélateur de la capacité d’engagement des blocs communaux dans le champ sanitaire, mais n’a pas été suivi d’intervention durable.
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Concernant les contractualisations, l’Igas émet deux préconisations principales :
- Redéployer les ressources. Pour l’heure trop mobilisées pour les étapes de diagnostics des appels à projets, ces dernières pourraient être davantage utilisées pour associer les habitants à l’identification des besoins et pour évaluer rigoureusement l’impact des services mis en œuvre, avant de décider de leur devenir.
- Inscrire ces projets de contractualisation dans les projets de territoires des communes et intercommunalités pour les situer au sein des priorités politiques municipales et les adosser à un cadre budgétaire pérenne.
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Coopération
Autre apport de l’étude, les rapporteurs observent que l’interdépendance entre le bloc communal, les services de l’État, les organismes de sécurité sociale et même les acteurs privés s’impose, mais que la coopération reste difficile. « À l’exception des métropoles, le bloc communal n’est pas armé pour répondre seul à la demande sociale d’une population qui perçoit la commune comme la première porte d’entrée du 'service public' et lui adresse des sollicitations nombreuses et de toutes natures », préviennent les rapporteurs. Les services et opérateurs de l’État et les organismes de sécurité sociale ont quant à eux besoin de ce bloc pour mettre en œuvre leurs politiques au plus près des bénéficiaires.
L’IGAS déplore que les relations entre blocs communaux et partenaires de cet « écosystème » soient encore trop tributaires des histoires locales, des convergences et divergences politiques, ainsi que des réseaux informels et des individualités aux postes clés. Une complexité qui peut engendrer selon le rapport des « dysfonctionnements » dans la mise en œuvre des dispositifs : « Les méconnaissances et les défiances entre acteurs peuvent conduire à des incohérences (..). On observe également différentes formes délétères de compétition et de concurrence », est-il observé, entraînant la multiplication des dispositifs auprès d’un même public ou provoquant au contraire la prise en charge limité d’un autre.
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Pour améliorer la coopération, l’Igas préconise :
- De concevoir les démarches de contractualisation et d’appels à projets avec plus de souplesse.
- D’accompagner et de former les élus et agents des communes et intercommunalités.
Rappel à l’ordre de la sécurité sociale
L’IGAS appelle de manière ciblée les organismes de sécurité sociale à s’engager plus fortement dans le dispositif France service et à faire plus d’efforts pour s’inscrire dans l’écosystème local. À cet égard, le rapport met en garde sur « le sentiment que peuvent avoir les responsables des communes de devoir pallier le désengagement de la sécurité sociale dans l’accueil du public » et « leur relative méconnaissance de l’action sociale des caisses ».
Alors que ce rapport de l’IGAS s’appuie sur une étude qualitative d’un nombre restreint d’exemples locaux, la DREES doit publier une autre enquête en 2025 pour quantifier les interventions des communes et intercommunalités du pays.
>>> Consulter le rapport dans son intégralité Tome 1 et Tome 2 <<<