« Tous ensemble ». Rarement le slogan traditionnellement scandé dans la plupart des manifestations aura mieux convenu à la situation. Associations, institutions, ou fédérations, travailleurs sociaux, anciens enfants confiés ou professionnels et membres de la société civile, tous les acteurs concernés et engagés dans la protection de l’enfance seront présents afin, d’une seule et même voix, d’alerter sur la crise systémique et grandissante que traverse ce « système à bout de souffle », selon les mots de la Cnape (convention nationale des associations de la protection de l’enfance). Tête de file du mouvement, la fédération a appelé à une manifestation le 15 mai.
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Une union sacrée d’une ampleur exceptionnelle, puisqu’elle réunit plus de 70 organisations. Il n’en fallait pas moins pour dénoncer « les défaillances criantes » des politiques publiques destinées protéger les enfants en danger. Baptisé Collectif des 400.000, le groupement a été insufflé par la Cnape au lendemain des élections législatives de juin 2024, alors que les enfants protégés n’avaient « plus de ministre pour porter leur voix » rappelait le collectif le 23 septembre dernier. Soit deux jours avant une première mobilisation qui se voulait « historique », à la hauteur des dysfonctionnements pointés.
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Pour la deuxième édition, Paris et dans 8 grandes villes françaises (Bordeaux, Lille, Lyon, Mamoudzou, Marseille, Rennes, Strasbourg, et Toulouse) ont décidé de se mobiliser. Les revendications du collectif s’articulent autour de 4 urgences :
- Mettre fin aux listes « d’attente », en faisant en sorte que les mesures ordonnées par les juges soient mises en œuvre sans délai.
- Réinvestir dans la prévention en accentuant le soutien des familles en difficulté, afin d’éviter des situations dégradées susceptibles d’entraîner maltraitances et des mesures de protection « plus radicales » ;
- Améliorer les conditions de travail et la reconnaissance des professionnels, notamment en s’attaquant aux questions d’attractivité et de sous-effectifs.
- Assurer un accompagnement des jeunes majeurs sortants de l’aide sociale à l’enfance de façon systématique et continue.
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S’il souhaitent bien entendu se faire entendre des décideurs, les 400 000 poursuivent aussi l’objectif de porter leurs demandes sur la place publique, afin d’attirer l’attention de tous et de faire de leur cause une priorité nationale.
Le collectif entend faire de la manifestation un moment aussi « festif que revendicatif ». Rythmée par des prises de paroles libres de principaux concernés et de professionnels venus témoigner de la réalité vécue par les anciens jeunes suivis par l’ASE, la journée sera aussi ponctuée de moments symboliques et conviviaux. Comme à Paris, où des stands ludiques et interactifs pour sensibiliser à la situation des jeunes protégés, comptines pour enfants détournées, et autres montagnes de doudous sont prévues.
En ce qui concerne la capitale, le rendez-vous est fixé à 12h sur l’esplanade du souvenir-français, et débutera par un pique-nique géant, en présence de Thierry Beaudet, président du CESE.
Néanmoins, cette unanimité semble commencer à se fissurer. Le 14 mai, veille de la grand messe, l’UFAS-CGT, qui a contribué aux travaux du CESE et travaillé en lien avec la commission parlementaire sur la protection de l’enfance, a regretté des réclamations à ses yeux « loin d’être suffisantes au regard de l’ampleur des défaillances dénoncées par le récent rapport parlementaire » porté par Isabelle Santiago, rapporteure de la commission sur « les manquements des politiques publiques de protection de l’enfance. » Et déploré que l'une des « principales organisations d'employeurs » fasse partie du collectif, expliquant selon le syndicat l'absence de demande de revalorisation salariale.