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Santé mentale : inquiétude autour du non-respect des droits des mineurs hospitalisés

Santé mentale : inquiétude autour du non-respect des droits des mineurs hospitalisés

Le CGLPL met en évidence le recours encore important à la contention et l'isolement, invitant ainsi le ministère de la Santé à prendre les mesures nécessaires pour infléchir cette situation.

Crédit photo vovan - stock.adobe.com
Un avis du CGLPL, publié au Journal officiel du 4 décembre 2025, alerte sur la situation des mineurs hospitalisés en psychiatrie, et insiste sur la nécessité de renforcer la protection à leur égard.

En 2017 déjà, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) alertait sur le nécessaire renforcement de la protection des mineurs hospitalisés en psychiatrie. Un avis du 6 octobre 2025, publie au Journal officiel du 4 décembre 2025, s'alarme de nouveau à propos des atteintes aux droits fondamentaux que ceux-ci peuvent subir. La plupart étant hospitalisés en soins libres, ils « se voient appliquer les mêmes restrictions à leurs droits et liberté que les adultes, alors que leur particulière vulnérabilité justifierait une adaptation de leur prise en charge ».

Le cadre juridique. En droit français, le placement du mineur dans ce type de structures peut se faire selon quatre hypothèses :

  • A l’initiative des titulaires de l’autorité parentale, après autorisation de l’intéressé et, en cas de désaccord, sur décision du juge aux affaires familiales.
  • Par la décision d’un magistrat intervenant au titre de l’assistance éducative, après avis médical.
  • Un représentant de l’Etat peut statuer sur l’admission du mineur, si celui-ci est atteint de troubles mentaux nécessitant des soins, compromettant la sûreté des personnes ou portant gravement atteinte à l’ordre public.
  • L’autorité judiciaire peut également intervenir, après une déclaration d’irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental.

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La protection de ces publics est assurée à la fois à l’échelle internationale, par la Convention internationale des droits de l’enfance (CIDE), et en interne par le code de la santé publique.

Une protection insuffisante. Malgré tout, cet arsenal juridique ne permet pas de faire respecter les droits des mineurs hospitalisés. Une situation imputable à plusieurs facteurs, notamment celui de la dégradation générale de l’état de la psychiatrie. Est également mis en cause l’absence d’offre de pédopsychiatrie libérale dans de nombreux territoires, en raison d’un manque de professionnels. Cela a ainsi pour conséquences d’hospitaliser certains enfants en pédiatrie, de les admettre dans des unités pour adultes ou dans des unités adaptées mais éloignées de leur domicile.

  • En outre, le CGLPL insiste sur des restrictions imposées aux enfants, sans justification vis-à-vis de leur état clinique.
  • A titre d’exemple, le contrôleur parle de la liberté d’aller et venir, mise à mal notamment lorsqu’ils sont en unités de soins pour adultes, où ils sont affectés dans des services fermés.
  • Par ailleurs, il met en évidence l’absence de respect de leur liberté individuelle, la rare formalisation du consentement au traitement ou encore l’abandon quasi total de la scolarité.
  • Sur ce dernier point, le CGLPL indique que, dans certains établissements, aucun enseignant n’intervient auprès des mineurs, qui sont alors en proie à un sentiment d’échec.

Recours massif à l’isolement et à la contention. Selon les dispositions légales, ces mesures sont interdites pour l’hospitalisation en soins libres, c’est-à-dire lorsqu’elle est initiée par le titulaire de l’autorité parentale ou le juge des enfants. Or celles-ci demeurent, exposant les mineurs « à des risques d’atteinte à leur intégrité physique et psychique, particulièrement quand il est mis en œuvre dans des chambres d’isolement dépourvues de bouton d’appel ».

  • Parmi les dérives les plus graves observées par le CGLPL, il est fait état de ruses dans l’utilisation des termes.
  • A l’image de « chambre de soins intensifs », qui trompe le patient et fait passer la contrainte pour un soin.
  • D’après les données recensées par le contrôleur, la durée moyenne d’isolement est inférieure à 20 heures, mais peut aller jusqu’à trois ou quatre jours (dans trois établissements).
  • Dans au moins une des structures visitées, un enfant de moins de 12 ans avait été isolé pendant une journée entière.
  • Les mesures de contention sont, au contraire, plus rares et sont généralement moins longues (moins de six heures).

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Le CGLPL invite ainsi le ministère de la Santé à prendre les mesures nécessaires pour que l’interdiction de l’isolement et de la contention en dehors du cadre légal soit respectée.

Instituer un statut unique pour les enfants hospitalisés en psychiatrie. L’hospitalisation en soins libres ne fait l’objet d’aucun contrôle par le juge. Ce dernier peut toutefois être saisi par le mineur si sa santé, sa sécurité ou sa moralité sont en danger. A noter que le magistrat ne peut pas effectuer de contrôle systématique et que le mineur n’est pas informé de sa possibilité de le saisir.

  • Une situation pointée par la Cour de cassation en 2022, où la nécessité d’instaurer une procédure de contestation de l’hospitalisation par le mineur avait été évoquée.
  • En outre, est pointé du doigt le fait qu’aucun texte ne prévoit la prise en compte du consentement du mineur admis en soins psychiatriques.

S’impose ainsi, selon le CGLPL, la création d’un statut du mineur hospitalisé en psychiatrie « pour remédier à ces dysfonctionnements qui placent la France en situation de constante violation de ses engagements internationaux en matière de protection des droits des enfants ».

  • Fondé sur le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant, il devra s’appliquer pour tout enfant de moins de 18 ans.
  • Lui sera garanti le droit de s’exprimer librement sur toute question l’intéressant, la prise en compte de son opinion au regard de son âge et de son degré de maturité, le droit d’être entendu dans toute procédure judiciaire le concernant, ou encore l’accès à l’assistance juridique et le droit de contester la légalité de sa privation de liberté lorsqu’il est hospitalisé contre sa volonté.
  • Son avis devra également être recueilli, quel que soit son âge.
  • L’autorité judiciaire sera également informée de toute hospitalisation complète d’un mineur non consentant et un contrôle devra être effectué au terme d’un délai inférieur à celui applicable aux adultes.
  • Le CGLPL indique également que ce statut devra répondre à l’exigence de préservation des liens entre l’enfant et sa famille, de respect des attributions des titulaires de l’autorité parentale, de protection du mineur contre toute forme de violence et de garantie du droit à l’éducation.

Ce nouveau statut imposera en outre la mise en place d’une politique globale pour permettre un accès à des soins de qualité : « Cela comprend notamment un seuil de présence médicale et soignante obligatoire, des installations appropriées, des activités et un accompagnement éducatif adapté, une protection de la vulnérabilité suffisante, la garantie du maintien des liens avec les proches et des conditions de contrôle juridictionnel réalistes. » Enfin, tout cela devra également s’accompagner d’un plan national de réhabilitation de la pédopsychiatrie.

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