Recevoir la newsletter

"La société civile doit avoir un droit de regard sur l’usage de l’argent public"

Article réservé aux abonnés

Amélie Lebreton, directrice du Pacte du pouvoir de vivre

[INTERVIEW] Saisissant au vol la promesse de François Bayrou de consulter les citoyens en amont de la préparation de la prochaine loi de finances pour 2026, les 65 organisations membres du Pacte du pouvoir de vivre entendent bien faire porter leur voix en faveur d’une fiscalité plus juste. Entretien avec Amandine Lebreton, directrice du collectif.

Imaginé en 2019 par Laurent Berger, alors secrétaire général de la CFDT, comme une réponse à la crise des Gilets jaunes, le Pacte du pouvoir de vivre constitue un regroupement d’organisations porteuses d’un « nouveau modèle de développement » avec comme objectif de développer la justice sociale et la transition environnementale. Il regroupe aujourd’hui 65 organisations parmi lesquelles ATD Quart-Monde, l'Uniopss ou le Secours catholique.

Quel est l’objectif de cette initiative ?

Amandine Lebreton : François Bayrou et Eric Lombard ont déclaré vouloir impliquer davantage les citoyens dans l’élaboration du prochain budget de l’Etat. En tant que collectif représentant la société civile constituée, nous avons choisi de profiter de cette opportunité pour présenter nos propositions pour la prochaine loi de finances. Nous avons travaillé sur ce sujet en responsabilité. Il existe un consensus entre nos 65 organisations-membres pour affirmer qu’il y a bien nécessité à réduire le déficit budgétaire. Mais nous estimons, en tant que représentant des acteurs de la transition écologique juste, du secteur associatif, de la santé, du travail, de la lutte contre la pauvreté ou des solidarités, qu’il est légitime que les citoyens que nous représentons puissent, par notre intermédiaire, aient un droit de regard sur l’usage de l’argent public.

Quels impacts a déjà eu le budget 2025 sur vos adhérents ?

Ils se sont fait sentir à deux niveaux : en premier lieu, ces coupes affectent les budgets dédiés à la transition énergétique, à la rénovation des logements ou aux solidarités d’une manière générale, alors qu’il s’agit là de sujets majeurs pour l’ensemble de la société. Ensuite, elles ont également impacté durement le secteur de l’économie sociale et solidaire (ESS) qui représente près de 14% de l’emploi en France. Le Mouvement associatif a d’ores et déjà dénoncé ces révisions budgétaires à la baisse qui ont eu pour conséquence d’obliger plusieurs associations à mettre la clé sous la porte faute de financements suffisants.

>>> A lire: Comment l’emploi pourrait servir de variable d’ajustement à un secteur associatif en crise

Votre initiative ne risque-t-elle pas de « court-circuiter » la parole d’autres acteurs de la société civile, comme le Conseil économique, social et environnemental ou l’ESS ?

Non. Le Premier ministre et le ministre de l’Economie et des Finances ont indiqué, par cette consultation citoyenne, vouloir ouvrir des espaces de dialogue pour débattre de la situation budgétaire. Le Cese en sera sans doute un autre auquel participeront d’ailleurs des organisations déjà membres du Pacte. Cela ne devrait pas entraver non plus l’action de la conférence des financeurs de l’ESS qui ne porte que sur ce secteur et dont les acteurs ont eux aussi besoin de peser sur les trajectoires du budget de l’Etat.

>>> A lire: Conférence des financeurs de l’économie sociale et solidaire, une première

Quelles sont les propositions que portera le Pacte du pouvoir de vivre ?

Nous avons beaucoup travaillé pour créer un consensus. Elles seront essentiellement de deux ordres : tout d’abord, en termes de dépense publique, nous sommes favorables à privilégier le « mieux de dépenses » au « moins de dépenses ». Encore une fois, nous ne remettons pas en question la nécessité d’avoir des comptes publics à l’équilibre, mais plutôt que de sabrer parfois arbitrairement, nous demandons un examen de toutes les niches fiscales ou de toutes les primes qui nuisent par exemple aux objectifs écologiques de la France, afin de savoir s’il n’y aurait pas lieu dans un premier temps, de s’y attaquer pour réaliser les économies nécessaires. Dans un second temps, nous militons aussi pour une révision de la fiscalité. Ces dernières années, on a accumulé les crédits d’impôts aux entreprises sans réels effets positifs sur la croissance ou l’emploi. On l’a constaté avec le CICE qui, au-delà d’un plafond de 20 millions d’euros, n’a plus d’effet sur l’investissement des entreprises. Autant flécher ces mesures vers d’autres secteurs d’activité ou vers les PME. Nous portons aussi le projet d’une réforme de l’impôt sur le revenu qui ne taxe pas suffisamment le patrimoine de telle sorte que les classes moyennes payent parfois plus d’impôts que les plus aisés. Pour nous, c’est également un sujet à creuser.

Avez-vous planifié un calendrier de rendez-vous avec Bercy ou Matignon ?

Pas encore. Nous avons sollicité Eric Lombard il y a un mois, mais pour l’instant nous n’avons pas encore reçu d’invitation de son cabinet.

Société

S'abonner
Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client abonnements@info6tm.com - 01.40.05.23.15