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Formation pro : vers une individualisation du droit

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Fin du congé individuel de formation (CIF), compte personnel de formation (CPF) augmenté, possibilité de payer sa formation sans validation intermédiaire, "plan d'investissement compétences" pour les publics prioriaires... Muriel Pénicaud a présenté, ce lundi 5 mars, son "big bang" du système de la formation professionnelle.

Ce lundi 5 mars, la ministre du Travail a présenté les douze mesures qui constitueront le volet "formation professionnelle" de son futur projet de loi "pour la liberté de choisir son avenir professionnel", prévu pour passer en conseil des ministres vers la mi-avril.

Tandis que les partenaires sociaux ont négocié pendant presque trois mois, à partir d'une feuille de route imposée par le gouvernement, la copie qu'ils ont rendue le 22 février a suscité la déception de la ministre. Tout en reconnaissant un "vrai progrès" pour les droits à la formation des salariés, celle-ci a regretté en effet qu'ils ne se soient pas attaqués à la "complexité du système". Le projet de réforme, présenté aujourd'hui comme un "big bang", va donc au-delà des mesures envisagées par les partenaires sociaux, notamment sur la question de la structure et de la gouvernance du système général de la formation professionnelle.

Individualisation renforcée des droits

Du côté des droits, Muriel Pénicaud a repris le principe adopté par les partenaires sociaux : renforcer le compte personnel de formation (CPF), en place depuis le 1er janvier 2015. Toutefois, les modalités diffèrent : alors que les partenaires sociaux avaient opté pour une hausse du nombre d'heures de formation acquis annuellement (35 heures de formation au lieu de 24 heures) et du plafond de cumul de ces heures (400 heures au lieu de 150 h), le gouvernement a choisi de monétiser ce droit.

Ainsi, chaque salarié accumulera un droit à la formation de 500 euros par an, quel que soit son temps de travail, qui sera cumulable à concurrence de 5000 euros. Les salariés non qualifiés, pour leur part, bénéficieront d'un droit plus élevé : 800 euros par an, cumulable jusqu'à 8000 euros.

La ministre a insisté sur le fait que l'expression du droit à la formation en euros est à la fois plus "lisible" et plus "égalitaire", constatant que les heures de formation n'avaient pas le même coût selon le niveau de qualification visé. Mais, pour les organisations syndicales, la fin de la mutualisation du coût des formations - en général déjà régulé par les OPCA et OPACif (organismes paritaires collecteurs) - est de mauvaise augure. "En érigeant une individualisation totale" du droit à la formation, les travailleurs se retrouvent "désormais seuls responsables de leur employabilité", a réagi par exemple la CGT. La CFDT de son côté craint un "affaiblissement des droits des salariés".

Quant au congé individuel de formation, utilisé pour financer les formations de longue durée visant en général une reconversion, il doit disparaître et être remplacé par un "CPF de transition". Un système d'abondement du CPF pourra être déclenché sous réserve que le projet de formation soit validé en commission paritaire.

Appli et CEP pour renforcer l'autonomie

Côté outil, les salariés et demandeurs d'emploi auront à leur disposition une "application mobile CPF" qui leur offrira "la liberté de choisir [leur] vie professionnelle". Avec, ils pourront notamment s'inscrire à une formation et la payer directement sans passer par un intermédiaire. Parallèlement, suivant la mesure adoptée par les partenaires sociaux, le "conseil en évolution professionnel" (CEP) sera renforcé. Ce dispositif d'accompagnement individuel bénéficiera d'un financement dédié.

Bien qu'il dépende du "plan d'investissement dans les compétences" (PIC), la ministre intègre dans son projet de réforme le programme visant à former 1 million de demandeurs d'emploi peu qualifiés et autant de jeunes éloignés de l'emploi en 5 ans. Le PIC doit également favoriser "les expérimentations et l'innovation pour améliorer la qualité des formations" et "généraliser ce qui est vraiment efficace". La priorité sera donné aux demandeurs d'emploi handicapés dont Muriel Pénicaud a rappelé qu'ils étaient 500 000 actuellement en France, aux demandeurs d'emploi des quartiers prioritaires de la ville, aux jeunes "décrocheurs" et aux personnes en parcours d'inclusion dans l'emploi.

Financement et gouvernance chamboulés

Sur la gouvernance et le financement, le gouvernement propose un modèle tout à fait différent de l'actuel qui, même si la ministre s'en défend, place les partenaires sociaux en retrait du pilotage qu'ils assumaient depuis plus de 40 ans. Ainsi, les cotisations versées par les entreprises au titre de la formation continue et de l'apprentissage seront fusionnées dans une cotisation unique et, désormais, récoltée par les Urssaf.

D'ailleurs, les OPCA et OPACIF (organismes paritaires collecteurs) laisseront place à des "opérateurs de compétences" chargés de financer les centres de formation des apprentis et de soutenir les branches et les entreprises pour "anticiper la transformation des métiers, bâtir une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences et construire leur plan de formation". Les trois instances nationales de gouvernance actuelles (Fpspp, Cnefop, Copanef), quant à elles, fusionneront dans une agence nationale appelée "France compétence" qui comprendra trois collèges : Etat, partenaires sociaux et régions.

Ce "big bang" du système de la formation, s'il fait en effet exploser le schéma actuel, ne se traduira pas en revanche par une explosion des financements, puisqu'il sera mis en oeuvre à moyens constants.

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