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Ligne d’écoute pour les pédophiles : comment s’organisent les professionnels

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Photo d'illustration.

Crédit photo Luca Ambrosi - stock.adobe.com
Expérimenté dans cinq régions depuis un an, le numéro d’écoute 0806 23 10 63 destiné aux personnes pédophiles doit être déployé officiellement à l’échelle nationale en janvier 2021. Des comités d’éthique et de suivi vont être mis en place pour encadrer au mieux ce dispositif, développé dans le cadre du Pacte pour l’enfance.

C’est pour prévenir de potentiels passages à l’acte que la Fédération française des centres de ressources pour les intervenants auprès des auteurs de violences sexuelles (FFCRIAVS) a souhaité la mise en place d’une ligne d’écoute à destination des pédophiles. Ce numéro, gratuit, renvoie d’abord vers une secrétaire formée à ce type d’entretiens. Les personnes qui appellent, en immense majorité des hommes, sont ensuite mises en contact avec un psychologue, un psychiatre ou un infirmier, avant d’être dirigées vers une offre de soins adaptée sur le territoire.

Annoncé en 2018, le dispositif est testé depuis un an en Provence-Alpes-Côte d’Azur, dans le Centre-Val-de-Loire, en Occitanie, en Auvergne-Rhône-Alpes et en Aquitaine. Cinq régions auxquelles se sont greffées l’Ile-de-France et le Grand-Est lors du premier confinement. A l’issue de ces premiers mois d’expérimentation, les retours d’expériences sont encourageants. « Ce que nous sommes en mesure d’évaluer, c’est l’adhésion aux soins, qui est une victoire en soi, observe Cécile Miele, psychologue au Criavs Auvergne-Rhône-Alpes et référente communication de la FFCRIAVS. S’il y a une adhésion, il y a fort à parier que cela entraîne un mieux-être, qui lui-même sera garant d’une certaine manière d’un non-passage à l’acte. »

« Les patients sont demandeurs. Ils sont contents d’avoir un espace de soin compréhensif, remarque de son côté Daniel Pinède, psychiatre, responsable du Criavs Ile-de-France Nord-Est. Beaucoup nous ont exprimé leur peur d’être jugés ou rejetés, parfois après avoir eu des expériences dans des structures plus généralistes avec des professionnels qui ne savaient sans doute pas faire et tenaient un discours perçu comme jugeant. »

Cadre strict

Convaincus, dans leur ensemble, par l’intérêt de ce dispositif, les professionnels se sont toutefois interrogés sur leurs pratiques. « Evidemment, comme pour tout nouveau programme, il y a eu des questionnements : qu’est-ce qui se passe si je me sens débordé par le discours de la personne, que je ne sais pas comment l’orienter, qu’il me dit des choses qui relèveraient d’un signalement ? », rapporte Daniel Pinède. « Nous observons parfois un sentiment d’incapacité chez les professionnels, qui disent ne pas être suffisamment formés, relève Cécile Miele. C’est bon signe, car ils sont en mesure d’analyser leurs propres limites. Mais, parfois, ces limites ne sont pas seulement cliniques, elles relèvent aussi de l’émotionnel. C’est important d’en être conscient. »

En plus de formations spécifiquement créées pour le lancement de cette ligne d’écoute, la FFCRIAVS planche sur la mise en place d’un comité de suivi, comprenant des personnels des Criavs et des acteurs extérieurs, ainsi que d’un comité d’éthique pour encadrer au mieux le dispositif. Mais Cécile Miele tient à rappeler : « Avant même la question éthique, c’est la question légale qui est fondamentale. C’est notre premier cadre, nous en sommes garants et nous n’y dérogeons pas. Nous agissons dans le respect strict de la loi, qui correspond à la fois au respect du secret, essentiel pour qu’une parole émerge, et au respect des conditions dans lesquelles le signalement peut exister pour protéger les enfants. »

Parallèlement, deux groupes de travail sont développés au sein de la fédération. « Le premier est un groupe de supervision. L’idée est de reprendre avec plusieurs mois de recul des situations qui auraient pu poser des soucis afin d’améliorer à l’avenir la prise en charge de situations similaires », détaille Ingrid Bertsch, psychologue au Criavs Centre-Val-de-Loire et secrétaire de la FFCRIAVS. Le second groupe est, lui, dédié aux situations urgentes qui nécessitent un travail de réflexion à plusieurs.

Parmi les craintes évoquées par les professionnels figure régulièrement celle de ne pas parvenir à rediriger les personnes qui appellent vers des lieux de soins adaptés. « Certes, c’est notre boulot de réaliser cette cartographie du territoire, de connaître les professionnels formés. Mais la démographie soignante est telle en France qu’on a forcément des trous dans la raquette », souligne Daniel Pinède. « Il est bien évidemment plus facile de trouver dans les grandes villes un psychiatre qui prend en charge ces problématiques que dans certaines zones rurales », corrobore Cécile Miele, avant d’ajouter : « Ce manque de moyens est à l’image de la psychiatrie en général. »

 

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