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Résidences services seniors et résidences autonomie, les oubliées du gouvernement

Photo d'illustration

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Crédit photo Pixabay
Entre domicile et Ehpad, des solutions d’hébergement alternatives existent pour les personnes âgées. Ainsi, des milliers de Français de plus de 75 ans, fragiles mais valides, vivent dans ces habitats intermédiaires. Sans que les pouvoirs publics ne les prennent en considération depuis le début de la crise sanitaire.

La crise sanitaire que traverse le pays permet déjà de tirer quelques enseignements. Avant le début de cette pandémie, les solutions intermédiaires aux établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) étaient régulièrement mises en avant. Il fallait multiplier la construction de ces habitats « alternatifs ». Une solution entre le domicile et l’Ehpad nommée résidence services seniors, résidence autonomie ou encore Ehpad hors les murs, résidence intergénérationnelles ou habitat groupé. Quel que soit leur nom, ces logements ont fleuri ces dernières années sur le territoire. Ainsi, au-delà des 700 000 résidents en Ehpad, la France compte déjà plus de 110 000 places en résidences autonomie et plus de 50 000 en résidences services seniors. Préconisés, entre autres, par le rapport « Libault », ces habitats intermédiaires devaient normalement être consacrés par la future loi « grand âge et autonomie ». Mais le seront-ils vraiment ? Eu égard aux événements liés à cette crise, la question mérite d’être posée. Car ils font partie des grands oubliés du moment.

Il est d’abord à souligner que les résidences services seniors, comme les résidences autonomie, ne font pas partie du « plan bleu » qui permet aux établissements sociaux et médico-sociaux « la mise en œuvre rapide et cohérente des moyens indispensables pour faire face efficacement à une situation exceptionnelle, quelle qu’en soit la nature ». « Le plan bleu ne s’applique que dans les établissements médicalisés, donc par définition les Ehpad et non les résidences autonomie, confirme Benoît Calmels, directeur général de l’Unccas (qui gère 60 % du parc des résidences autonomie en France). Pour autant, nous appliquons les mêmes principes de précaution. » Cependant, les populations accueillies ne sont pas les mêmes. En Ehpad, les résidents sont moins mobiles, plus habitués à ne pas se déplacer. Le confinement s’est donc fait assez naturellement. La principale difficulté étant de gérer l’arrêt des contacts avec l’extérieur (familles, proches). « En résidences autonomie [comme en résidences services seniors, ndlr], la majorité des personnes étant autonomes, le confinement a été moins bien vécu, souligne Benoît Calmels. Un directeur de structures nous a ainsi fait savoir qu’il avait parfois l’impression de faire face à de grands ados. Les résidents établissant des stratégies pour éviter le confinement. »

Un approvisionnement en masques « sans aucune aide de l’Etat »

Si les publics accueillis sont plus autonomes qu’en Ehpad, ils restent fragiles et à risques, particulièrement en raison de leur âge. Au-delà des mesures-barrières, de la distanciation sociale, il a donc fallu prendre des mesures strictes de protection. Si le confinement s’est fait de manière progressive, toutes les structures sont désormais fermées sur l’extérieur. Mais comme pour la plupart des services d’aide à domicile ou des Ehpad, elles doivent faire face à la problématique des masques. « Comme nous ne faisons partie d’aucun groupe de travail gouvernemental, nous n’avons pas eu accès aux stocks de masques des ARS [agences régionales de santé], déplore Benjamin Misery, président de Senioriales, l’un des leaders du secteur des résidences services pour seniors. Nous avons donc mis en place notre propre opération “masques solidaires” en allant chercher notre propre fournisseur en Chine. Ainsi, nous avons reçu, la semaine dernière, une première commande de 250 000 masques chirurgicaux. Et autant de masques FFP2 arriveront la semaine prochaine. » Et d’ajouter : « Tout ça sur nos propres fonds. Sans aucune aide de l’Etat. Ce n’est que de la débrouille. Il paraît que nous sommes “en guerre” donc nous avons fait au mieux. »

Car, si chaque structure adopte les principes de précaution, les mesures-barrières, pour faire en sorte que l’accompagnement des aînés se passe de la meilleure façon, de nombreux acteurs du secteur regrettent le manque de considération de la part des pouvoirs publics. « En réalité, c’est nous, la fédération nationale des Marpa [maisons d’accueil et de résidences pour personnes agées] qui érigeons les directives à suivre, affirme ainsi Jean-Christophe Billou, son responsable. A l’échelle des pouvoirs publics, nous recevons toutefois régulièrement les recommandations de la DGCS [direction générale de la cohésion sociale]. Celles-ci sont précieuses et nous les préconisons à notre tour aux structures, non sans les avoir adaptées à la réalité du terrain. Il y a souvent un écart important entre les deux versions, d’autant que la DGCS prend ces mesures à travers le seul prisme, très déformant, des Ehpad. »

« Nous sommes marginalisés »

« Je pense que le gouvernement nous a gentiment écoutés mais qu’il ne nous a pas entendus, reproche Benjamin Misery. Il n’a pas pris la mesure que l’on pouvait être utile, à l’instar des Ehpad, pour lesquels je trouve qu’il a d’ailleurs réagi très tard. A partir du moment où les pouvoirs publics avaient enfin décidé d’agir pour les personnes âgées, ils auraient dû mettre tout le monde dans le même lot. Nous y compris. » Pour l’instant, dans ces établissements, la situation est plutôt bien gérée. Il n’y a que très peu de cas confirmés de Covid-19 chez les résidents comme chez les professionnels. Malgré ce manque de considération, les résidences services seniors et les résidences autonomie ont réussi à s’adapter. Mais plus la situation perdure, plus il y aura de difficultés. « Depuis la fin du mois de mars, nous avons informé le ministère de l’épuisement du personnel, assure Benoît Calmels. La situation peut donc potentiellement s’aggraver dans les prochains jours. D’autant qu’à cette fatigue physique s’ajoute une fatigue psychologique liée au caractère anxiogène de la situation. La crainte d’un décès est de plus en plus grande. Le gouvernement doit surveiller cela de près. »

Jean-Christophe Billou va encore plus loin dans la critique. « A l’heure actuelle, l’accompagnement de la personne âgée dans les résidences autonomie n’est pas reconnu, pas considéré par le gouvernement. Nous sommes une zone non couverte, une zone d’ombre, estime le responsable de la Fédération nationale des Marpa. Nous avons le sentiment d’être abandonnés des pouvoirs publics. Ils ne parlent que des Ehpad, jamais des établissements intermédiaires tels que les nôtres, alors même que les risques existent. » C’est pourquoi Benoît Calmels met en garde le gouvernement. « Il y a des personnes âgées qui vivent en dehors du domicile et des Ehpad. Il faut les prendre en compte, les considérer, insiste le délégué général de l’Unccas. Si demain, dans une résidence autonomie, il y a une dizaine de cas, il va falloir trouver une solution pour éviter une hécatombe. Or il n’y a aucune directive gouvernementale à ce sujet. »

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