C’est parti ! Le 23 avril 2025, Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée aux Personnes handicapées a lancé le coup d’envoi pour la généralisation à l’ensemble du territoire français du service public départemental de l’autonomie (SPDA).
Préconisé dans un rapport rendu en mars 2022 par l’ancien directeur de la Sécurité sociale Dominique Libault, transcrit dans la loi pour le bien-vieillir du 8 avril 2024, ce nouveau service ne prévoit pas de se substituer à l’existant à l’échelle départementale, mais au contraire de « mettre en synergie des acteurs du soutien à l’autonomie de proximité » afin de « garantir la qualité de service et l’équité, quels que soient les territoires et les situations individuelles ».
En clair, sans aller jusqu’à instaurer un « guichet unique », le SPDA vise à simplifier les démarches des personnes en perte d’autonomie, en leur permettant d’accéder facilement à l’information, aux prestations auxquelles leur situation les rend éligibles ou à bénéficier d’un accompagnement personnalisé. Et ce, sans être promenées de bureau en bureau.
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"Culture SPDA"
« Le SPDA doit fonctionner avec la plus grande fluidité possible. Idéalement, il faudrait même que le public ne se rende pas compte qu’il existe », sourit Stéphane Cadoret, directeur général-adjoint aux Solidarités et à la Santé au Conseil départemental du Loir-et-Cher, l’un des 18 départements à l’avoir expérimenté tout au long de l’année 2024 avant son extension à l’ensemble du territoire.
Il faut dire que dans ce département rural de 330 000 habitants où presque 30% de la population est âgée de plus de 65 ans et qui compte 10 000 personnes prises en charge au titre de la politique du handicap, la prise de conscience ne date pas de loi Bien-vieillir. Dès 2019, l’exécutif départemental a commencé à travail sur un schéma territorial de l’autonomie qui a conduit, dès juillet 2023, à fusionner la direction de l’autonomie du département avec la MDPH (maison des personnes handicapées) afin de rendre leur fonctionnement plus efficient.
L’expérimentation aura permis d’accélérer le mouvement grâce à la constitution d’un consortium réunissant les élus départementaux chargés du handicap et des personnages âgées, le CDCA (conseil départemental de la citoyenneté et de l’autonomie), l’ARS, le DAC (dispositif d’appui à la coordination), la préfecture, les services de l’Education Nationale, la CAF, la CARSAT (Caisse d'assurance retraite et de la santé au travail), les établissements hospitaliers, les autorités de santé et certains partenaires associatif. Un groupement chargé d’élaborer une « feuille de route » départementale pour l’autonomie achevée aux alentours du mois de mai 2024, mais aussi de fédérer l’ensemble des acteurs autour du projet.
« Cette année de préfiguration aura permis de les doter d’une ‘’culture SPDA’’ commune », résume Hugues Gond, chargé de mission au sein du service qualité, pilotage et accompagnement à l'autonomie. Avec au final, des gains qualitatifs réalisés tant au niveau de la fluidité de l’accès au service pour les usagers qu’en termes de réactivité face aux situations d’urgence.
Une dynamique à l'échelon local
Même si un logo commun à tous les acteurs du SPDA est à l’étude afin de leur offrir une cohérence graphique, ce nouveau service public « ne constitue pas un échelon supplémentaire dans le mille-feuilles administratif », assure Florence Thibaudeau-Rainot, vice-présidente en charge des Solidarités au sein du conseil départemental de Seine-Maritime, autre département expérimentateur qui, lui aussi confronté aux problèmes de vieillissement de sa population avait déjà pris un coup d’avance sur le SPDA en créant la première « maison des aidants » au Havre dès 2021 dans le cadre de son schéma territorial des solidarités. Le modèle a essaimé dans tout le département depuis, comme pour préfigurer le futur SPDA.
Là encore, l’expérimentation s’est construite autour de la mise en synergie des différents acteurs concernés, sans nier leurs identités et missions respectives. Ni, surtout, leur dimension de proximité. « La dynamique du SPDA doit se jouer à l’échelon local avec des acteurs qui connaissent parfaitement la situation des personnes en situation de perte d’autonomie sur leur territoire. Le SPDA ne doit pas être un guichet lointain : l’aidant ou le travailleur social doivent en faire partie, le CCAS local, s’il y en a un, doit en faire partie, la mairie doit en faire partie… » détaille l’élue.
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Gouvernance et financement
Pour l’heure, si les départements expérimentateurs disposaient d’un mode d’emploi pour mettre en place le SPDA, le cahier des charges définitif du dispositif que doit encore boucler la CNSA, initialement prévu pour avril, est toujours attendu.
Ce qui laisse toujours la question du financement et de la gouvernance de la mesure en suspens. Pour Stéphane Cadoret, l’identité du pilote dans l’avion ne fait aucun doute : « ce doit être le département, affirme-t-il, il s’agit de la seule instance disposant d’une vision élargie sur les besoins en autonomie de la population ». Quant au financement pérenne du SPDA, le DGA aux Solidarités et à la Santé du Loir-et-Cher l’imagine pris en charge au titre de la cinquième branche de la Sécurité sociale, à partir d’une fraction de la CSG ou de la RDS.
Pour Florence Thibaudeau-Rainot, la question financière se pose moins : « les acteurs impliqués dans le dispositif disposent déjà de leurs budgets. C’est un avantage. L’enjeu du SPDA est moins le financement que la gouvernance », assure l’élue normande pour qui l’efficacité du service sera conditionné à un pilotage au plus près du terrain avec le conseil départemental comme chef d’orchestre. « C’était d’ailleurs la volonté de Dominique Libault dans son rapport qui parlait de service public territorial de l’autonomie ».
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