« Les présidents de départements sont des coupables faciles quand tout le monde tourne les yeux », tonne François Sauvadet, président de Départements de France, dans le communiqué. Derrière cette déclaration, une réalité : les structures départementales sont à bout de souffle. Et les défaillances ne sont pas là où on le croit, aux yeux de l’association.
Des structures ASE détournées de leur vocation
75 % des 400 000 enfants suivis par les services de l'ASE le sont sur décision judiciaire rappellent Départements de France « au vu des dangers que fait courir aux enfants la défaillance de leurs cellules familiales ». Pourtant, une fois placés, de nombreux enfants ne reçoivent pas l’accompagnement dont ils auraient besoin.
Ce qui préoccupe aujourd’hui les départements, c’est l’évolution du profil des jeunes accueillis. Parmi les 80 000 enfants placés, « il n’y a, hélas, pas que des enfants en danger, mais également des enfants qui sont une cause de danger pour eux-mêmes ou pour les autres. »
Le communiqué pointe notamment « l'indigence de la psychiatrie en général et de la pédopsychiatrie en particulier », qui contraint les services sociaux à accueillir des enfants présentant des troubles psychiques lourds, sans pouvoir leur offrir une prise en charge thérapeutique adéquate : « Faute de structures adaptées, on nous demande de garder des enfants atteints de pathologies lourdes alors que nos équipes ne sont pas formées à cela ».
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Même constat pour les mineurs délinquants : la Protection Judiciaire de la Jeunesse (PJJ) ne peut plus accueillir, faute de places. Alors que la PJJ se trouve elle aussi en tension, « les juges placent dans nos structures, là aussi faute d’alternative d’État », des jeunes dont le suivi relève normalement de dispositifs judiciaires spécialisés. Résultat : des établissements de l’ASE accueillent des publics très hétérogènes, parfois violents, sans encadrement adapté ni formation spécifique du personnel.
Des contrôles, mais avec quels moyens ?
Face aux récents scandales, le ministère de la Justice a annoncé un renforcement des contrôles dans les établissements accueillant des enfants placés. Une mesure que Départements de France dit comprendre, tout en doutant de son applicabilité : « Départements de France prend note de la volonté du Garde des Sceaux […], mais émet des doutes sur la capacité des juges des enfants à mener de telles opérations, alors qu’ils sont déjà débordés, ou de la PJJ, alors même qu’elle peine à remplir sa mission première. »
L’association attire également l’attention sur les violences et les dérives qui peuvent traverser les foyers – prostitution, agressions – en soulignant que ces structures ne sont pas coupées de la société mais au contraire « le reflet de tous les travers de notre époque ».
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Un appel à un réengagement structurel de l’État
Pour les présidents de départements, le problème dépasse largement les conditions de fonctionnement des foyers. Ils estiment que seule une politique de réinvestissement de l’État dans « ses fonctions régaliennes » peut enrayer la dégradation du dispositif global. Bien que saluant « la prise de conscience des difficultés que traversent les services de la protection de l’enfance, grâce au travail et à l’implication du Parlement [...], plus que d’indignations légitimes ou sélectives, la protection de l’enfance a besoin d’être confortée », insistent les départements.
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