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Violences sexuelles des mineurs : 7 raisons de maintenir la Ciivise

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160 000 enfants victimes de violences sexuelles. Photo prise lors d'une manifestation du collectif enfantiste devant le Sénat. Ce collectif dénonce les violences faites aux enfants.

Crédit photo Hans Lucas via AFP
Deux ans après le lancement de son appel à témoignages et deux mois avant sa disparition programmée, la Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise) tire les enseignements des propos recueillis.

Briser le silence. Un silence si bruyant. Celui « du secret qui étouffe la voix de cette petite fille », héroïne de la nouvelle campagne de sensibilisation aux violences sexuelles lancée par le gouvernement en septembre. Celui des « flash-back traumatiques qui assaillent les victimes » de ces maltraitances. Celui dans lequel ces dernières se sont murées à force d’incompréhension de l’entourage devant « les conduites d’évitement, les reviviscences, la dissociation, l’hypervigilance, les douleurs inexpliquées » qu’elles subissent.

Titre du documentaire sur l’inceste dans lequel Emmanuelle Béart dévoilera, le 24 septembre prochain, en compagnie d’autres victimes ce qu’elle a vécu enfant, ce silence si bruyant est repris comme une litanie par la Ciivise (commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants). Tel un appel à ne pas fermer comme prévu, en décembre 2023, l’organisme chargé de collecter les paroles des victimes d’inceste met à jour l’ampleur de ce phénomène et établit des préconisations pour le combattre.

Deux ans jour pour jour après avoir amorcé son appel à recueillir les propos des victimes, la Ciivise publie un document pour dresser un bilan à partir de 27 000 témoignages engrangés. Et pointe les lacunes de leur prise en charge adaptée par la société. Une preuve supplémentaire de la nécessité de continuer à rompre ce silence si bruyant qui touche 160 000 enfants chaque année. « Qui peut sérieusement penser que trois années suffiraient pour lutter contre un déni qui nous habite tous depuis toujours ? », rappelle la commission. 

1. Plus de la moitié des victimes ne parviennent pas à révéler cette maltraitance avant l’âge adulte

En raison de la peur, la honte, la culpabilité et l’incompréhension qu’ils ressentent, et de l’isolement que leur impose leur agresseur, les enfants ne parviennent souvent à dévoiler les sévices subis qu’à l’âge adulte, au moment où ils se sentent en sécurité. Seuls 13 % les révèlent immédiatement, contre 58 % plus de dix ans après les faits. En cas d’inceste, la révélation est encore plus tardive, puisque 62 % attendent au moins dix ans avant d’en parler.

2. L’immense majorité des confidents ne recueille toujours pas la parole des victimes de façon appropriée

Plus de 9 victimes sur 10 (92 %) n’ont pas bénéficié d’un soutien social positif, résumé par la commission en une phrase : « Je te crois, je te protège ». Pour réussir à surmonter la peur de révéler les violences, les enfants concernés doivent sentir que les adultes comprennent ce qu’ils vivent et qu’ils vont les mettre en sécurité. La plupart des proches ou des professionnels qui reçoivent la révélation – les fratries à 23 %, les mères à 66 %, les professionnels à 15 % – n’ont pas de réaction appropriée, soit parce qu’ils inversent la culpabilité en rejetant la faute sur eux (« je te crois mais… »), soit parce qu’ils mettent en doute leurs propos (« tu mens »).

3. Même quand l’enfant est cru, tout n’est pas toujours fait pour le protéger

Alors que 70 % des enfants sont crus lorsqu’ils parlent, près d’un confident sur deux (45 %) ne fait rien, que ce soit pour faire cesser les violences (3 8% d’inactions) pour sécuriser l’enfant (64 % d’inactions), ou le faire bénéficier de soins (75 % d’inactions). Quelque 27 % lui demandent même de ne pas en parler et 22 % rejettent la faute sur lui. Même les professionnels n’agissent pas toujours en conséquence, puisqu’ils sont encore près de 6 sur 10 à ne pas protéger les mineurs une fois les faits révélés. En revanche, lorsqu’ils prennent les choses en main, ils sont bien plus nombreux à recourir aux institutions publiques, puisque 62 % portent plainte, contre 38 % des confidents en général.

4. Recevoir un soutien adapté réduit l’impact du traumatisme

Lorsqu’elle n’a pas été protégée, une victime sur 2 développe des troubles alimentaires (contre 4 sur 10 en cas de prise en charge appropriée), 4 sur 10 des addictions (contre deux fois moins dans le cas contraire), 4 sur 10 des problèmes gynécologiques (contre 2 sur 10 dans le cas contraire). Lorsqu’elles ne sont pas crues, 15 % des victimes commettent des faits de délinquance (contre 8 % dans le cas inverse).

5. Ne pas être correctement pris en charge augmente par 3,5 le risque d’être victime de violences conjugales

Si 31 % des femmes ayant subi des violences sexuelles dans l’enfance connaissent des violences conjugales une fois adultes, le pourcentage grime à 52 % quand elles ont été culpabilisées ou confrontées à l’incrédulité par leur confident.

6. Trop de mères ne sont pas soutenues quand elles agissent

Accusées de négligence ou de complicité quand elles se taisent, elles sont soupçonnées de mensonges ou de manipulations quand elles parlent.

7. Les violences sexuelles faites aux enfants sont une affaire publique

La Ciivise rappelle que la pédocriminalité n’est pas qu’un simple face à face entre la victime et son agresseur. Mais suppose toujours l’intervention d’un tiers – mère, professeur, éducatrice, psychologue, oncle – dont l’attitude adaptée pourra mettre un terme à la souffrance des mineurs concernés. Mieux former l’ensemble des professionnels en lien avec l’enfance afin de fournir une réponse de la société en adéquation avec les besoins des victimes, systématiser le parcours de soins spécifiques au psychotraumatisme, diminuer l’impunité des agresseurs (seules 13 % des plaintes aboutissent à une condamnation) sont autant de recommandations de la Ciivise qui n’ont pas encore été prises en compte par les pouvoirs publics.

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