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Violences conjugales : sanctionner et responsabiliser les auteurs

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Johanna Rolland, maire de Nantes, le 25 novembre aux Assises nationales de lutte contre les violences sexistes.

Crédit photo Romain Boulagner I Nantes Métropole
Le 25 novembre, journée dévolue à la lutte contre les violences conjugales, Emmanuel Macron a annoncé la mise en place d'un « Pack nouveau départ » pour permettre aux femmes de se reconstruire. Dans le même temps, la première édition des Assises nationales de lutte contre les violences sexistes était lancée à Nantes. Plus de 800 professionnels ont partagé le même enjeu : briser ce fléau.

« Nous sommes là pour nous révolter, décortiquer les dysfonctionnements, pour nous dire comment améliorer nos pratiques et travailler ensemble les changements, pour que chacun puisse prendre des engagements et c’est une bonne nouvelle que nous soyons là », clament en chœur l’avocate Anne Bouillon et l’artiviste Diariata N’Diaye. Il est à peine 10 heures, vendredi 25 novembre, et le ton de ces premières Assises nationales de lutte contre les violences sexistes est donné.

Dans la salle, archi-comble, de la cité des Congrès de Nantes, travailleurs sociaux, acteurs de la santé, étudiants, enseignants, intervenants associatifs, collectivités, personnalités politiques sont rassemblés pour s’informer, s’outiller, échanger, favoriser la mise en réseau dans un seul objectif : briser le fléau des violences sexistes et sexuelles. « En 2021, 122 femmes sont mortes sous les coups de leur conjoint ou ex-conjoint. Chaque année, ce sont près de 100 000 femmes qui déclarent avoir subi un viol ou une tentative de viol et seulement 1 % des auteurs condamnés. Ces violences ne sont pas des drames privés », clame Johanna Rolland, maire de Nantes, qui s’est engagée à faire de la cité des Ducs la première ville non sexiste d’ici 2030.

Un milliard annuel

Urgente, cette réaction doit aussi être plurielle. Il s’agit en effet d’intervenir très en amont sur le caractère systémique des violences. En favorisant le travail collectif par des espaces de coordination, en rendant obligatoire et effective, d’un côté, la formation des professionnels au contact d’enfants, et de l’autre, celle des professionnels susceptibles de rencontrer des femmes victimes de violences. A cette fin, le développement de lieux d’accueil, d’écoute et d’accompagnement des victimes doit être encouragé. C’est ce qu’appelle de ses vœux Johanna Rolland, signataire, comme une vingtaine d’élus locaux, du manifeste « Face aux violences sexistes, ouvrons la voix » : « Nous demandons à l’Etat d’être enfin au rendez-vous, comme l’est l’Espagne qui a réduit de moitié les féminicides. Pour cela, un budget annuel de 1 milliard d’euros doit être consacré à cette lutte pour agir plus efficacement et plus vite. »

Prévenir les récidives

Parmi les priorités, la prise en charge des auteurs. Aujourd’hui essentiellement policière et judiciaire, celle-ci peine à apporter une réponse adaptée. Ainsi, 76 % des plaintes pour violences sexuelles sont classées sans suite (source : ministère de la Justice, 2017), avec pour conséquence directe une profonde défiance des victimes vis-à-vis de la justice. Plus préoccupant encore : le taux de récidive qui s’élève à 19 % parmi les condamnés pour délit sexuel (source : Insee, 2021). « Il faut repenser la manière dont le dispositif pénal prend en charge les victimes, les éduquer sur ce qu’elles peuvent attendre ou pas vis-à-vis de la justice, mais aussi déployer d’autres types de sanctions qu’elles soient sociales, professionnelles ou médiatiques », prône Marine Turchi, autrice de Faute de preuves. Enquête sur la justice face aux révélations #MeToo (éd. Seuil, novembre 2021).

Dans une logique comparable, l’Adaes 44 propose depuis 2007 des alternatives aux mesures judiciaires en direction des auteurs de violences conjugales. Groupes de parole, stages de responsabilisation ou séances de justice restaurative... « Nos actions n’ont en aucun cas la prétention d’être la réponse à ce passage à l’acte. Notre but est d’aider ces personnes à s’inscrire dans une démarche de responsabilisation afin de permettre la construction de nouveaux comportements pour, idéalement, prévenir la récidive », explique Guillaume Jouis, directeur du service pénal socio-judiciaire de l’association nantaise.

Un accompagnement global

Encore balbutiant, cet accompagnement ne fait pas l’unanimité. « Deux jours, c’est la durée de ces stages et c’est beaucoup trop court pour adhérer à l’éventualité d’un changement, observe la sociologue Cristina Oddone. Il faudrait revoir ces dispositifs en s’inspirant des programmes internationaux qui s’échelonnent sur plusieurs mois, pour laisser aux auteurs le temps de cheminer réellement. En France, ils perçoivent souvent cette mise en cause comme un complot féministe. Or l’efficacité de ces programmes dépend de leur adhésion et de leur implication volontaire. »

Le 26 novembre, Isabelle Rome, ministre déléguée chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, a détaillé le dispositif expérimental « Pack nouveau départ », annoncé la veille par Emmanuel Macron. Destiné à aider les femmes à changer de vie, il propose un accompagnement global comprenant « allocation, système coupe-file pour la garde des enfants, une insertion professionnelle et une formation, un hébergement d'urgence si besoin, un accompagnement psychologique ». L'expérimentation démarrera en janvier 2023 à Dijon.

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