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Une personne en détention provisoire dans des conditions indignes doit être libérée

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Dans un arrêt rendu mercredi 8 juillet, la Cour de cassation tire immédiatement les conséquences d’un arrêt rendu fin janvier par la Cour européenne des droits de l’Homme, en rappelant qu’il appartient au juge judiciaire de veiller à ce que la détention provisoire soit mise en œuvre dans des conditions respectant la dignité des personnes. Cette mise en liberté n’est cependant pas automatique.  

Le 30 janvier 2020, la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) avait sévèrement condamné la France pour les conditions indignes de vie en détention de 10 détenus dans plusieurs établissements pénitentiaires. Pour la première fois dans son histoire, elle imposait au gouvernement français de prendre des dispositions pour que cessent ces violations répétées à l’article 3 de la Convention.

Mais le pouvoir judiciaire n’a pas attendu que les pouvoirs exécutif ou législatif prennent ces dispositions ni que le Conseil constitutionnel réponde (voir encadré) pour appliquer immédiatement cet arrêt de la CEDH. En effet, dans une décision rendue ce mercredi 8 juillet, la Cour de cassation écrit : « Il appartient au juge national, chargé d’appliquer la Convention, de tenir compte de ladite décision sans attendre une éventuelle modification des textes législatifs ou réglementaires. » Il s’agit du contrôle de conventionnalité – c’est-à-dire de la vérification de la conformité des textes internes au regard du droit international – qui existe dans la justice judiciaire depuis l’arrêt “Jacques Vabre” (ass. plén., 15 mai 1975, n° 73-13556).

Exerçant ce contrôle, la Cour de cassation applique le principe selon lequel « le juge judiciaire a l’obligation de garantir à la personne placée dans des conditions indignes de détention un recours préventif et effectif permettant d’empêcher la continuation de la violation de l’article 3 de la Convention ». La Cour ajoute qu’il incombe au juge judiciaire « de veiller à ce que la détention provisoire soit, en toutes circonstances, mise en œuvre dans des conditions respectant la dignité des personnes et de s’assurer que cette privation de liberté est exempte de tout traitement inhumain et dégradant ».

La chambre de l’instruction, poursuit la Cour de cassation, doit faire procéder à des vérifications complémentaires au cas où la description des conditions de détention par une personne détenue est « suffisamment crédible, précise et actuelle, de sorte qu’elle constitue un commencement de preuve de leur caractère indigne ». Ensuite, une fois ces vérifications effectuées, si la chambre « constate une atteinte au principe de dignité à laquelle il n’a pas été entre-temps remédié, elle doit ordonner la mise en liberté de la personne, en l’astreignant, le cas échéant, à une assignation à résidence avec surveillance électronique ou à un contrôle judiciaire ».

Dans l’affaire jugée ce 8 juillet, la Cour de cassation a cependant conclu que la décision de la chambre de l’instruction de ne pas procéder à la libération de la personne en détention provisoire ne pouvait encourir la censure. En effet, les allégations formulées par celle-ci « ne faisaient état que des conditions générales de détention au sein de la maison d’arrêt » dans laquelle elle est détenue, sans précisions sur sa situation personnelle, et notamment sur la superficie et le nombre des occupants de la cellule, son agencement intérieur et le nombre d’heures journalières d’occupation ». La Cour de cassation donne ici des éléments pratiques qui devront être présentés devant la chambre de l’instruction pour obtenir la libération d’une personne maintenue en détention provisoire dans des conditions indignes.

 


Une QPC renvoyée au Conseil constitutionnel

Ce même 8 juillet, la Cour de cassation a renvoyé au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) portant sur les articles 137-3, 144 et 144-1 du code de procédure pénale. Cette QPC pointe le fait que ces articles ne prévoient pas « que le juge d’instruction ou le juge des libertés et de la détention puisse, de manière effective, redresser la situation dont sont victimes les détenus dont les conditions d’incarcération constituent un traitement inhumain et dégradant afin d’empêcher la continuation de la violation alléguée devant lui », alors même que la Cour européenne des droits de l’Homme l’avait recommandé dans son arrêt du 30 janvier. Le demandeur souhaite savoir si cela porte atteinte au principe de sauvegarde de dignité de la personne humaine.

Mais, encore une fois, la Cour de cassation n’a pas attendu la décision du Conseil constitutionnel pour appliquer directement l’arrêt de la CEDH.

 

Juridique

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