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Editorial : Tchao Maxence

Crédit photo DR

Parfois, le récit commence par : « C’est l’histoire d’un mec… » et c’est drôle. Là, c’est l’histoire d’un gosse, et c’est triste. Une histoire pas bien longue, puisque Maxence s’est pendu alors qu’il avait à peine 16 ans, dans la nuit du 9 au 10 juin. Peu importe son pedigree de sale gosse, les plus ou moins grosses bêtises qui l’ont conduit à se retrouver en centre éducatif fermé (CEF), à Cambrai, dans le Nord, l’histoire se termine ainsi, sans avoir vraiment commencé.

Vendredi dernier, sa famille a reçu un coup de massue : un coup de fil ou, dans le meilleur des cas, un inconnu qui frappe à la porte quand personne n’est attendu. Quel que fût le messager, le couperet est tombé : plus de Maxence, l’aventure s’arrête là, ses mésaventures aussi, c’était sa dernière. Ses camarades d’infortune, jeunes placés comme lui dans ce CEF, ont décroché son corps au matin, l’ont déposé sur la terre ferme. Cette terre et cette réalité qu’ils vont continuer de vivre.

“Pas en mesure de protéger les mineurs"

Ce sont nos confères du Parisien, les seuls – sauf erreur – qui ont relayé cette information passée inaperçue. Sans manquer de revenir sur les précédents de ce centre : « Dans un courrier datant de fin 2021, que nous avons pu consulter, les éducateurs rédigent une lettre de trois pages aux syndicats pour raconter “les nombreux dysfonctionnements institutionnels”, et les alerter sur “l’urgence de la situation”.

Au sujet de leurs conditions de travail, ils affirment : “Nous ne sommes actuellement pas en mesure de protéger les mineurs qui se font agresser et harceler en permanence par une partie du collectif.” Les éducateurs sont eux-mêmes pris à partie “soit par des tags, soit par du harcèlement, des insultes, menaces, provocations”. Ils notent “un grand sentiment d’insécurité et d’abandon” au sein de l’équipe. Le manque de personnel entraîne par ailleurs une désorganisation des emplois du temps, des activités et “une prise en charge de qualité impossible”. »

15 000€ en petites coupures

Pour mémoire, les centres éducatifs fermés ont été créés en 2002 par Dominique Perben, alors ministre de la Justice sous Raffarin. Pour continuer d’enfermer, mais différemment. Pour contourner les établissements pénitentiaires spécialisés pour mineurs et les quartiers pour mineurs des maisons d’arrêt. Créés, selon les éléments de langage de l’époque, pour éviter « l’incarcération brute », les CEF ont été placés sous l’égide de la protection judiciaire de la jeunesse. A laquelle, pour ainsi dire, aucun moyen n’a été consacré à cet effet.

Pour mémoire également, le 25 septembre 2017, alors qu’il traversait la frontière franco-suisse en touriste, Dominique Perben a croisé inopinément la douane française. Après quelques politesses, l’ex-ministre de la Justice a benoîtement fini par déclarer – il avait oublié – détenir dans sa mallette 15 000 € en billets de 50. Aux dernières nouvelles, ce gentilhomme n’a été enfermé nulle part. Il est même encore bien vivant.

Ce mercredi 15 juin, des milliers d’élèves à peine plus vieux que Maxence ont planché pour le bac philo sur le thème : « Revient-il à l’Etat de décider de ce qui est juste ? » No comment.

 

 

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