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Rétention administrative d’un nourrisson : la France à nouveau condamnée pour violation de la CEDH

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Centre de rétention administrative du Mesnil-Amelot, .

Crédit photo Christophe Archambault / AFP
Une mère et sa fille de 4 mois ont été placées durant onze jours en rétention en vue de leur transfert en Italie. Dans un arrêt rendu jeudi 22 juillet, la Cour européenne des droits de l’Homme applique sa jurisprudence et conclut à une violation de l’article 3 de la Convention, qui interdit les traitements inhumains et dégradants.

« La situation de particulière vulnérabilité de l’enfant mineur est déterminante et prévaut sur la qualité d’étranger en séjour irrégulier de son parent », rappelle la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) dans un arrêt rendu le 22 juillet 2021.

La France est ainsi condamnée, encore une fois, pour des traitements inhumains et dégradants sur un nourrisson de 4 mois. La très jeune enfant était placée au centre de rétention administrative du Mesnil-Amelot avec sa mère pendant onze jours, dans l’attente de leur transfert en Italie.

Violation de l’article 3 de la Convention

Pour conclure à la violation de l’article 3 de la Convention, qui proscrit les traitements inhumains et dégradants, la CEDH se fonde sur sa jurisprudence. Avec deux arrêts de 2016 et de 2017 (1), elle a dégagé trois facteurs : l’âge des enfants mineurs, le caractère adapté ou non des locaux au regard de leurs besoins spécifiques et la durée de la rétention. Elle se fonde également sur l’arrêt A.B. et autres c. France du 12 juillet 2016 (2), en rappelant que le fait que l’enfant soit accompagné par sa mère pendant la période de rétention n’est pas de nature à exonérer les autorités de leur obligation de protéger l’enfant ni de prendre des mesures pour éviter les traitements inhumains et dégradants.

Dan son arrêt du 22 juillet 2021, la CEDH estime que les conditions d’accueil du centre de rétention du Mesnil-Amelot « ne sont pas suffisamment adaptées à la rétention d’un nourrisson et de sa mère » : la cour extérieure de la zone de vie dédiée aux familles n’était séparée que d’un simple grillage de la zone réservée aux hommes, l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle, situé à proximité immédiate du centre de rétention, provoque des nuisances sonores continues et, surtout, les équipements pour enfants et bébés y étaient « sommaires et largement inadaptés aux besoins spécifiques d’un nourrisson ». Même si l’offre de produits alimentaires pour jeunes enfants apparaît suffisante pour la Cour, aucun matériel de change n’y est prévu.

S’agissant de la durée de la rétention (onze jours), la CEDH la juge « excessive » au regard des conditions de rétention. Quant au critère de l’âge de l’enfant, qui avait donc 4 mois au moment de la rétention, il fait très peu débat : dans une affaire précédente, la Cour avait déjà constaté la violation de l’article 3 pour d’autres enfants âgés de 4 mois, de 7 mois et même de 2 ans et demi.

Violation de l’article 5 de la Convention

Dans son arrêt, la Cour européenne des droits de l’Homme conclut également à la violation de l’article 5 de la Convention. La Cour reproche aux autorités françaises de ne pas avoir « effectivement vérifié […] que le placement initial » et la prolongation en rétention de la femme et de son nourrisson ne pouvaient faire l’objet de mesures moins restrictives (3). La CEDH rappelle en effet que le droit français prévoit désormais, en application de la jurisprudence de la Cour, que la rétention d’un enfant mineur ne peut être décidée qu’en dernier ressort.

Dans un communiqué de presse daté du 22 juillet, le Défenseur des droits, qui a témoigné lors de l’audience, va même plus loin que la CEDH en réitérant son opposition à tout placement des enfants étrangers en centre de rétention.

 

(1) R.M. et autres c. France, n° 33201/11, § 70, 12 juillet 2016 ; S.F. et autres c. Bulgarie, n° 8138/16, §§ 78-83, 7 décembre 2017.

(2) A.B. et autres c. France, n° 11593/12, §§ 19-28, 12 juillet 2016.

(3) Voir notamment A.B. et autres c. France, op. cit., § 67.

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