Visage crispé. Mâchoire serrée. Ton incantatoire. Costume sombre de rigueur. C’est à un grand serrage de ceinture collectif qu’a appelé François Bayrou pour 2026 à l’occasion de la présentation des grandes orientations des projets de loi de finance (PLF) et de financement de la sécurité sociale (PLFSS) le 15 juillet. « C’est la dernière station avant la falaise et l’écrasement par la dette », a-t-il prévenu. Une dette qui, au premier semestre, s’élevait à plus de 3 345 milliards d’euros, soit presque 114 % du PIB et dont le projet présenté hier devrait permettre d’engager sa réduction progressive, faisant passer le déficit de 5,4 % aujourd’hui à 2,9 % en 2029, seuil à partir duquel les économistes la considèrent stabilisée.
Année blanche pour les prestations sociales
Depuis plusieurs semaines, l’hypothèse d’une économie de 40 milliards d'euros en 2026 bruissait dans les couloirs des ministères et du Parlement. Au terme des ultimes arbitrages, son montant a été légèrement réévalué à 43,8 milliards.
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Au programme, et parmi les mesures les plus emblématiques, ont donc été annoncés, pêle-mêle :
- une « année blanche » sans revalorisation des prestations sociales – « y compris celles assurées par les départements », a précisé le ministre des Collectivités François Rebsamen lors de son tour de parole ;
- la suppression de deux jours fériés, le 8 mai et le lundi de Pâques, même si sur le choix calendaire le Premier ministre s’est dit « ouvert à toutes les propositions » ;
- la réduction des dépenses de santé par l’autorisation donnée aux médecins de ville de suppléer la médecine du travail pour la reprise du travail après un arrêt-maladie ;
- la réutilisation des instruments d’aide à la mobilité (comme les fauteuils roulants ou les cannes anglaises) pour les personnes à mobilité réduite après un premier usage ;
- l’ouverture de nouvelles négociations sur l’assurance chômage visant à réduire la durée d’indemnisation des demandeurs d’emploi (déjà revue à la baisse depuis 2019) ;
- l’usage des ruptures conventionnelles ;
- la possibilité de monétiser sa cinquième semaine de congés payés auprès de son employeur ;
- une réduction de 5 milliards du budget des collectivités territoriales…
L'allocation unique : un projet de loi "d'ici décembre''
Autre piste d’économies : l’instauration d’une allocation sociale unique en remplacement de celles déjà existantes. L’idée n’est pas neuve : elle avait été soumise en 2016 au gouvernement Valls par le député socialiste Christophe Sirugue sous la forme d’un projet de « couverture socle » en forme de solidarité à la source avant d’être reprise dans le programme présidentiel d’Emmanuel Macron en 2017 (en tant que « revenu universel d’activité ») puis dans la plateforme programmatique de LR quelques années plus tard afin de réduire la fraude aux prestations sociales.
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Lors de son passage à Matignon, Michel Barnier en avait même relancé l’idée en octobre 2024, tout en reconnaissant la difficulté du projet. Car reste à savoir quelles prestations sociales exactement seraient concernées. Revenu de solidarité active (RSA) et prime d’activité vraisemblablement, mais quid des aides au logement ou des allocations familiales ? Pour remettre en route ce nouveau chantier, les services des ministères concernés pourront toujours se baser sur les premiers résultats de la simplification de la déclaration trimestrielle de ressources menées dans cinq départements depuis le 1er mars dernier. Mais le calendrier est serré, puisque le Premier ministre a annoncé la sortie du projet de loi d’ici à décembre 2025…