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Pauvreté : un taux stable mais une misère persistante

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La crise sanitaire a été un révélateur de la pauvreté en France.

Crédit photo Hans Lucas via AFP
Le 6 décembre, l'Observatoire des inégalités a publié son rapport 2022-2023 sur l'état de la pauvreté en France. Si le nombre de personnes pauvres semble stagner depuis vingt ans, la misère demeure et pourrait s'accentuer encore avec l'inflation.

Tous les deux ans, l’Observatoire des inégalités publie un rapport sur la pauvreté en France. Un rendez-vous qui permet de « mettre un peu d’ordre dans un débat quelque peu encombré par l’exagération ou l’aveuglement », a expliqué Louis Maurin, directeur de l’organisme indépendant, lors de la présentation à la presse de l’édition 2022-2023, le 6 décembre dernier. Premier constat : 8 % de la population vit avec moins de 900 € mensuels, mais malgré la crise sanitaire, qui a servi de révélateur, la pauvreté semble se stabiliser. « La protection sociale, renforcée notamment par la prise en charge du chômage partiel pendant les confinements, a tenu bon », indique le rapport. Et de préciser qu’il y avait moins d’allocataires du RSA (revenu de solidarité active) en juin 2022 que deux ans plus tôt.

« Pour autant, la misère persiste en France », souligne Anne Brunner, co-directrice de l’observatoire. Si la pauvreté a diminué jusqu’au milieu des années 1980, depuis les années 2000, « le niveau de vie mensuel des 10 % les plus pauvres stagne » et des milliers d’individus continuent à vivre dans des conditions indignes.

Une exposition très inégale

La moitié des personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté de 940 € par mois ont moins de 30 ans, 19 % sont des familles monoparentales et 26 % des demandeurs d’emploi. L’activité professionnelle ne protège pas : 1,2 million de travailleurs vivent dans le dénuement. Plus globalement, 60 % des personnes pauvres sont ouvriers ou employés contre 2 % des cadres et 80 % ont au mieux le baccalauréat. Les immigrés sont surreprésentés. « La pauvreté des personnes handicapées est très peu visible dans le débat public mais leur nombre s’évaluerait à 840 000 », considère Anne Brunner. Les habitants des grandes villes, des banlieues, des zones prioritaires et des DOM sont les plus touchés. Les actions mises en place par l’Etat dans le cadre de la politique de la ville auraient-elles échoué ? « Dans 20 quartiers parmi les plus défavorisés de France, le taux de pauvreté dépasse 60 % », pointe le rapport. Sans surprise, la pauvreté touche d’abord les locataires.

Incertitudes pour l'avenir

Selon Louis Maurin, contrairement aux prévisions les plus alarmistes, « le chômage a repris sa marche à la baisse, une situation que la France n’avait pas connue depuis trente ans ». Mais les inquiétudes demeurent dans un contexte d’inflation. « En moyenne, l’Insee prévoit une hausse des prix de l’ordre de 5 % pour 2022, du jamais vu depuis quarante ans. Tous ceux dont les revenus ne sont pas augmentés vont donc perdre, en moyenne, 5 % de pouvoir d’achat », détaille Louis Maurin. Si l’épargne des catégories les plus aisées est élevée (elle représente 30 % des revenus des 20 % les plus riches), elle est inexistante pour les plus précaires. Mais tant que les ressources, et en particulier les minima sociaux et le Smic, sont indexés sur les prix, les risques que les pauvres deviennent encore plus pauvres sont limités. Dans le cas contraire, les inégalités vont se renforcer et la pauvreté s’aggraver. Rien ne dit, par ailleurs, que les salaires vont suivre la hausse des prix, notamment dans les petites et moyennes entreprises.

Une politique publique « dissonante »

« Nos politiques publiques continuent à faire des ristournes tous azimuts, y compris aux ménages les plus à l’aise, mais cela a ses limites », prévient le directeur de l’observatoire. En clair, l’Etat peut-il continuer à faire bénéficier les plus riches du bouclier tarifaire et, par là même, à financer leurs factures d’essence et de chauffage ? Pour rappel, la précarité énergétique touche un ménage sur dix en France, soit plus de six millions de personnes. Et, chaque année, près de 600 000 ménages font l’objet d’une coupure ou d’une limitation de puissance en électricité ou en gaz. « On est plutôt dans une politique d’accompagnement avec des dissonances importantes en termes d’action publique, commente Louis Maurin. D’un côté, l’Etat signe des chèques tous azimuts. De l’autre, il diminue les aides personnalisées au logement et supprime la taxe d’habitation pour tous. » A partir de février prochain, la réforme de l’assurance chômage va réduire les revenus des demandeurs d’emploi, principalement des plus jeunes. Or, en dessous de 25 ans, ils ne bénéficient pas du RSA.

 

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