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Logement : des injustices pour les étudiants du parc social universitaire

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Selon un étude de la Fondation Abbé Pierre, le logement correspond au 1er poste de dépenses des étudiants : 60 % de leur budget en 2022.

Crédit photo Claire Serie / Hans Lucas / AFP
Le rapport de la fondation Abbé Pierre sur les expulsions des étudiants résidents de logements universitaires du Crous pointe un traitement expéditif des dossiers par la justice, ainsi qu’une forte proportion de non-recours.. 

Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Sur les 2,7 millions d’étudiants* que compte la France, 20 % vivent sous le seuil de pauvreté. Le déficit de l’offre de logements dédiée à ce public dans un contexte d’augmentation des loyers sur les marchés privés, accentuent leur précarité économique. Telles sont les premières observations relevées par la fondation Abbé Pierre dans son rapport "Silence, on expulse : exception juridique et précarité locative dans les résidences universitaires" publié le 7 septembre.

Menée par la fondation et par des étudiants de l’Université Paris 1, l’étude rappelle que l’offre sociale gérée par les Crous [Centres régionaux des œuvres universitaires et sociales], qui s’élève à 175 000 logements, assure une habitation à environ 25 % des élèves boursiers, soit à 6 % de l’ensemble des étudiants. Par ailleurs, 60 000 places sont disponibles via d’autres réseaux sociaux : organismes HLM(1) ou associations.

Dans ce contexte, l’étude décrypte le régime locatif singulier que constitue le contingent des Crous. « L’objectif est de caractériser les procédures d’expulsion mises en œuvre par les Crous et les tribunaux, de comprendre leurs déterminants ainsi que leurs effets sur les trajectoires sociales et résidentielles des résidents », souligne le document.

Pas de trêve hivernale

En substance, pour les situations de contentieux avec ces usagers, l’enquête pointe un traitement sévère de la justice. Par exemple, sur 221 requêtes du Crous à l'encontre de résidents à des fins d'expulsion étudiées entre janvier 2022 et février 2023, les tribunaux administratifs ont prononcé l'expulsion de 193 résidents (soit 87 %) dont 127 sans délai (soit 57 %). Et ce, sans tenir compte de la situation individuelle des individus : état médical, santé mentale, solution de relogement,…

« Les étudiants qui ne parviennent plus à payer leur loyer, qui ont perdu leur statut étudiant ou n’ont pas renouvelé à temps leur contrat de résidence, peuvent être expulsés de leur chambre universitaire dans des délais très courts y compris durant la période hivernale, contrairement au droit commun des expulsions locatives. Les étudiants disposent parfois de moins de quinze jours pour partir », détaille la fondation Abbé Pierre dans un communiqué.

Disparités territoriales

Les pratiques propres des Crous entrainent, de plus, une rupture du principe d’égalité devant le service public pour les étudiants. Les décisions d’expulsions peuvent, en effet, se voir multiplier par 2.5, selon les territoires. Ce qui, de fait, génère, des complications dans le travail d’accompagnement des travailleurs sociaux.

Autre fait marquant : les résidents menacés d’expulsion quittent majoritairement leur chambre sous la pression avant leur passage au tribunal. Très peu de recours contre les décisions des Crous sont ainsi déposés.
Face aux inégalités recensées, la fondation souhaite voir « réintégrer les procédures d’expulsions des résidences étudiantes dans le droit commun des expulsions locatives pour que les étudiants bénéficient des mêmes protections et des mêmes droits que l’ensemble de la population ».

Contraintes budgétaires

En parallèle, 60 % des contrats d’occupation ne se voient pas renouvelés. En cause, un déficit de logements et des Crous dont le budget s’avère fragile par le manque de moyens générés par leur activité. Pour aller plus loin, les auteurs de l’enquête mettent en évidence l’importante proportion de non-recours aux services sociaux des étudiants « les plus isolés et précaires ». Le sous-effectif structurel des services de travail social contraint les jeunes à attendre de longues semaines avant d’obtenir un rendez-vous avec une assistante sociale.

Parcours de vie entravé

« La question posée est dès lors celle de la transition entre le Crous et un logement du parc social ou privé [...] En raison de toutes ces difficultés de relogement, certains résidents expulsés par le Crous connaissent un passage à la rue », dénoncent les auteurs du rapport.

Enfin, l’enquête montre que l’expulsion ne concerne pas tous les profils d’étudiants. Les résidents expulsés interrogés sont plutôt isolés socialement et éloignés géographiquement de leur famille. Les effets générés sur le parcours des personnes concernées s’avèrent, quant à eux, délétères sur le plan psychologique, générant un stress intense, un sentiment de honte accentuant le non-recours,… « Les expulsions en cours d’année nuisent par exemple à la poursuite du parcours universitaire, avec un relogement parfois distant du lieu d'études. Elles peuvent aussi conduire à une insertion anticipée sur le marché du travail, sans avoir pu terminer leurs études », conclut le rapport.

Face aux constats répertoriés dans l’enquête, la fondation Abbé Pierre préconise :

  • d’accorder aux étudiants menacés d’expulsion les garanties du code des procédures civiles d’exécution et faire respecter a minima sur tout le territoire le bénéfice de la trêve hivernale ;
  • de mieux prévenir les risques d’expulsion et assurer le suivi social des étudiants les plus précaires ;
  • d’augmenter la capacité d’accueil structurellement insuffisante des résidences étudiantes Crous ;
  • de développer des solutions pour favoriser le relogement.

(*) Chiffres de l’Observatoire de la vie étudiante (OVE)
(1) HLM :Habitation à loyer modéré

>> Le rapport Silence, on expulse : exception juridique et précarité locative dans les résidences universitaires.

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