L’ avenir se joue-t-il dans les quartiers pauvres ? C’est la thèse de l’Institut Montaigne, qui a publié le 2 juin son dernier rapport, dirigé par Hakim El Karoui, essayiste, et Olivier Klein, maire de Clichy-sous-Bois et président de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU). Objectif : apporter des réponses concrètes à la concentration de la pauvreté, des flux migratoires et des difficultés économiques dans les quartiers prioritaires des politiques de la ville (QPV), en se positionnant à l’échelle du quotidien de leurs habitants. « Nous avons cherché à traiter les problématiques actuelles des QPV en partant non pas des politiques publiques existantes ou projetées, mais des témoignages des habitants, collectés dans les quartiers. »
Sous-investissement public dans les quartiers pauvres
Car le constat est sans appel : loin de s’améliorer, la situation se dégrade, « faisant courir le risque d’une “archipélisation de notre pays” ». Un état de fait que les chercheurs confrontent au sous-investissement public dans les zones défavorisées, qui pénalise les habitants : il y aurait 45 % de professionnels de santé libéraux de moins dans les QPV qu’en moyenne en France, trois fois moins d’équipements sportifs, 40 % de familles sans crèche.
Un bilan qui vient contredire la fausse idée reçue selon laquelle ces territoires recevraient davantage que les autres, tout en contribuant peu à la richesse nationale. Ainsi, la Seine-Saint-Denis, département le plus démuni du pays, en est le dernier bénéficiaire. Mais il est le huitième contributeur au financement de la protection sociale en France, et participe pleinement au dynamisme économique, ayant augmenté sa masse salariale de 30 % en dix ans.
Réhabiliter la promesse républicaine
Pour répondre aux besoins des habitants de ces 1296 quartiers pauvres, et y « réhabiliter la promesse républicaine », l’institut propose « une nouvelle méthodologie d’action publique » inspirée de la méthode contractuelle initiée par Jean-Louis Borloo, ex-ministre de la Ville et de la Rénovation urbaine, qu’ils nomment « ANRU des habitants ». En bref, une contractualisation pluriannuelle, avec des objectifs, moyens budgétaires et pilotage au long cours, coordonnés avec les élus locaux et les acteurs associatifs.
A cette méthodologie, les chercheurs associent 31 propositions développées et chiffrées, issues des échanges avec les habitants des QPV, incluant notamment l’accueil de la petite enfance, l’investissement massif dans l’éducation, les petits-déjeuner gratuits, la refonte de l’orientation scolaire et le renforcement du lien avec les entreprises et l’amélioration de l’accès à la santé.
Un plan qui représenterait, d’après l’équipe de l’Institut Montaigne, un coût de 300 millions d’euros en investissement, et 2 milliards annuels en fonctionnement, pour compenser le sous-investissement public dans ces quartiers.