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Animateur de médiations restauratives
« La justice restaurative permet à toute personne, auteur ou victime, de s’exprimer et d’échanger autour des répercussions liées à une infraction. Le rôle de l’animateur est d’offrir cet espace de dialogue dans un cadre sécurisé, sécurisant et confidentiel », Emilie Le Port, coordinatrice de l’antenne réunionnaise de l’Institut français pour la justice restaurative (IFJR)
Missions
Pratique récente dans le système judiciaire contemporain, la médiation en justice restaurative vise à instaurer un dialogue entre les personnes touchées par une infraction. La mission de l’animateur qui permet la rencontre entre la victime, l’auteur de l’infraction et parfois leurs proches, est de favoriser la compréhension, la réparation et la prévention de la récidive.
L’animateur de médiations restauratives accompagne les parties dans une démarche volontaire et confidentielle. Dans le cadre d’une médiation directe, il va rencontrer individuellement chaque participant afin de s’assurer de leur consentement libre, de leur capacité à s’exprimer et de leur compréhension du processus. Cette phase préparatoire est essentielle pour garantir la sécurité émotionnelle de chacun et poser les bases d’un échange constructif. Au cours de ce dernier, l’animateur veille à ce que la parole de chacun soit respectée et entendue. Il facilite l’expression des ressentis, des besoins et des attentes, tout en maintenant un cadre neutre et sécurisé. Il ne prend pas parti et n’impose aucune solution, son rôle étant de permettre aux parties de trouver, si elles le souhaitent, des voies de réparation ou de compréhension mutuelle.
En justice restaurative, l’animateur peut également organiser des rencontres collectives entre groupes de victimes et groupes d’auteurs, appelées rencontres détenus-victimes (RDV) ou condamnés-victimes (RCV). Ces rendez-vous, qui se déroulent en milieu ouvert ou fermé, concernent des personnes n’ayant pas de lien direct mais ayant vécu ou commis des infractions similaires. L’animateur sélectionne, forme et accompagne les bénévoles qui composent le cercle autour de la personne condamnée. Il veille à ce que chacun comprenne le cadre et les objectifs du cercle et s’assure que la parole circule de façon équilibrée.
Au sein des cercles de soutien et de responsabilisation (CSR), destinés à accompagner des auteurs d’infractions à caractère sexuel, il coordonne des rencontres régulières entre l’auteur et des membres bénévoles de la communauté, afin de soutenir la réinsertion et de prévenir la récidive. Un dispositif similaire, appelé cercle d’accompagnement et de ressources (CAR), existe pour les auteurs d’autres types d’infractions.
Enfin, l’animateur de médiations restauratives peut conduire des cercles restauratifs, particulièrement adaptés aux situations où l’action publique n’est pas possible (prescription, non-lieu, relaxe, acquittement). Ces cercles offrent un espace de parole et de réflexion à ceux qui, bien que n’ayant pas accès à la justice pénale, ressentent le besoin d’exprimer et de comprendre les conséquences de faits vécus.
Profil et compétences
Pour exercer en tant qu’animateur de médiations restauratives, il faut avant tout faire preuve d’une grande capacité d’écoute active, de neutralité et d’empathie, afin de permettre à chaque partie de s’exprimer librement dans un cadre sécurisant et respectueux. L’animateur doit savoir créer un climat de confiance et gérer des émotions parfois intenses, tout en restant impartial. Des compétences en communication non violente, en gestion des conflits et en animation de dialogue sont indispensables pour faciliter la compréhension mutuelle entre les personnes concernées. Enfin, l’animateur doit faire preuve d’un sens aigu de l’éthique, de discernement et de confidentialité, car il intervient souvent dans des situations sensibles, où la recherche de réparation et de reconnaissance prime sur la logique punitive.
Formation
La fonction d’animateur de médiations restauratives n’est pas encadrée par un diplôme unique obligatoire. Elle est souvent exercée en complément d’un autre métier. Elle requiert toutefois un haut niveau de qualification et une spécialisation. L’accès à cette mission se fait généralement à partir d’un niveau Bac+3 à Bac+5 dans des domaines tels que le droit, la psychologie, la criminologie, le travail social ou les sciences humaines. Toutefois, ce n’est pas tant le diplôme initial qui fait la différence, mais bien la formation spécifique à la justice restaurative, qui permet d’acquérir les compétences et les savoir-faire indispensables à l’exercice de cette fonction.
Il s’agit le plus souvent de formations continues ou de certifications professionnelles, destinées à des professionnels déjà en activité (juristes, éducateurs, psychologues, travailleurs sociaux, etc.) ou à des personnes en reconversion. Ces formations peuvent être courtes (quelques semaines) ou plus longues (plusieurs mois) selon le niveau de spécialisation recherché. Certaines incluent des stages pratiques ou de la supervision professionnelle, éléments très valorisés dans ce domaine.
En France, plusieurs structures proposent des formations en justice restaurative. France Victimes offre des modules axés sur l’accompagnement des victimes, tandis que l’IFJR (Institut français pour la justice restaurative) dispense des formations certifiantes et coordonne des dispositifs sur le terrain. Certaines universités comme Paris 8 ou Lyon 2 proposent des diplômes universitaires en médiation ou justice restaurative. Des organismes spécialisés, tels que l’Ifomene (Institut de formation à la médiation et à la négociation), intègrent également des modules dédiés à ces pratiques dans leurs cursus.
Les enseignements théoriques comprennent généralement :
- Le cadre légal de la justice restaurative en France (loi du 15 août 2014 notamment)
- Les principes fondamentaux de la justice restaurative (volontariat, sécurité, impartialité)
- La victimologie et la compréhension des impacts du traumatisme
- Les techniques de médiation et de communication (écoute active, posture neutre, gestion des émotions)
- La gestion des dynamiques de groupe et l’animation de rencontres restauratives (individuelles ou collectives)
- L’éthique et la déontologie de l’animateur
Débouchés
Les débouchés se développent progressivement en France à mesure que la médiation en justice restaurative gagne en reconnaissance dans le système judiciaire. L’animateur intervient généralement dans les associations d’aide aux victimes et structures spécialisées dans la médiation, qui mettent en œuvre des dispositifs de justice restaurative à destination des victimes, des auteurs d’infractions et parfois de leurs proches. La protection judiciaire de la jeunesse sollicite également ces professionnels pour accompagner des démarches de dialogue et de réparation entre victimes et auteurs, y compris en détention ou dans le cadre de la réinsertion. Le secteur associatif habilité justice recrute aussi des animateurs pour préparer et conduire des rencontres restauratives, des cercles de soutien ou des conférences restauratives.
Evolution de carrière
Avec de l’expérience et une formation complémentaire, l’animateur de médiations restauratives peut choisir de se spécialiser dans différents dispositifs. Un animateur chevronné peut également accéder à des fonctions de coordination d’équipes d’animateurs ou de pilotage de dispositifs locaux ou régionaux. Il peut alors organiser, superviser et évaluer les pratiques de justice restaurative au sein de structures associatives ou institutionnelles. Certains animateurs expérimentés s’orientent vers la formation de nouveaux professionnels ou l’accompagnement méthodologique des équipes, contribuant ainsi à la diffusion et à l’amélioration continue des pratiques.
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