Les modalités de rupture conventionnelle ne diffèrent pas des conditions prévues habituellement dans le cadre du droit commun. Ainsi, seront rappelés ci-après et pour mémoire les éléments constitutifs d’une procédure classique.
Dans la mesure où la rupture conventionnelle se doit d’être consécutive à un accord entre les parties, il est nécessaire dans un premier temps de bien acter la volonté commune des parties de rompre le contrat de travail. Dans ces conditions, et afin de garantir la liberté de consentement des parties, il peut être utile de prévoir avant le début de la rupture et de l’engagement de la procédure l’envoi d’un courrier (avec accusé de réception ou par lettre remise en main propre contre décharge) afin de préciser par écrit la volonté d’une rupture conventionnelle. À ce titre, si c’est le salarié du particulier employeur qui souhaite mettre fin au contrat de travail par la rupture conventionnelle, le particulier pourra solliciter du salarié qu’il formule sa demande par écrit. À défaut, ou en cas de refus du salarié, le particulier employeur pourra rédiger un courrier accusant réception de la demande du salarié de rompre le contrat de travail par le biais de la rupture conventionnelle. Ce courrier n’est pas obligatoire mais permettra de valider une volonté commune des parties de rupture du contrat de travail.
La procédure de rupture conventionnelle peut être suivie en remplissant un formulaire Cerfa, disponible sur le site gouvernemental (Cerfa 14598*01). Le ministère du Travail met également à disposition des employeurs un site de saisine en ligne directe des éléments concernant la rupture conventionnelle (1).
I. ENTRETIEN(S) PRÉALABLE(S)
La rupture conventionnelle, comme le licenciement, débute nécessairement par un entretien préalable.
Toutefois, spécificité de ce mode de rupture, il pourra y avoir un ou plusieurs entretiens qui doivent permettre aux deux parties au contrat de convenir du principe et des conditions de la rupture conventionnelle (2). Pour précision, si les textes prévoient la nécessité de tenir un entretien au préalable, aucune mention n’est portée quant à l’obligation de tenir plusieurs entretiens. Ainsi, la tenue d’un unique entretien doit suffire pour que la négociation soit considérée comme régulière (3). En pratique, la tenue d’un unique entretien est suffisante pour valider la rupture, sauf à ce que les parties ne parviennent pas à se mettre d’accord lors du premier entretien. Il est important de noter que l’absence totale d’entretien conduira en revanche à la nullité de la rupture conventionnelle et donc à la requalification de la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse (4).
Contrairement au formalisme de l’entretien préalable lors du licenciement, les dispositions légales concernant l’entretien préalable dans le cadre de la rupture conventionnelle ne font pas état d’un formaliste spécifique ni de délai à respecter. Dans ces conditions, l’employeur suivra régulièrement la procédure identique à celle du licenciement afin d’éviter toute contestation ultérieure. Une unique mention est faite par le Code du travail relative à l’assistance au salarié lors du ou des entretiens préalables à la rupture du contrat du travail. Ainsi, l’article L. 1237-12 du Code du travail précise les facultés d’assistance du salarié et, dans le cadre d’un parallélisme, de l’employeur. Comme précédemment évoqué au sein de la présente étude, le particulier employeur n’est pas soumis à l’obligation de proposer au salarié une assistance lors de l’entretien préalable. À ce titre, la convention collective nationale des salariés du particulier employeur exclut expressément l’assistance du salarié par un conseiller lors des entretiens (5). Dans ces conditions, il apparaît que le salarié du particulier employeur ne pourra pas, malgré les prescriptions du Code du travail, bénéficier d’une assistance lors de son entretien. Concernant les délais, et comme précédemment énoncé, aucune mention spécifique n’est prévue par le Code du travail ou la convention collective. Il apparaît utile de suivre, afin de faciliter la validité de la procédure et de garantir surtout le consentement du salarié, de suivre une procédure et des délais identiques à ceux prévus pour la procédure de licenciement.
II. DÉROULEMENT DE(S) L’ENTRETIEN(S)
La rupture du contrat de travail étant effectuée d’un commun d’accord, l’entretien doit permettre aux parties de décider des modalités de rupture. Devront ainsi être fixés impérativement d’un commun d’accord le montant de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle et la date de la rupture du contrat de travail. Il est à relever que la rupture conventionnelle n’induit aucun respect de préavis et que la date de rupture du contrat de travail ne pourra intervenir qu’après les délais relatifs au droit de rétractation et à la demande d’homologation auprès de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte). Il appartient donc ici au particulier employeur de vérifier que la date de fin de contrat projetée, en accord avec le salarié, respecte bien les délais précités.
Dès lors que les parties parviennent à un accord concernant le montant de l’indemnité et la date de fin du contrat de travail, le formulaire Cerfa peut être signé. En pratique, il conviendra d’établir le formulaire en deux exemplaires dont l’un sera remis au salarié après signature par le particulier et l’employeur. La Cour de cassation rappelle régulièrement que la remise du formulaire rempli et signé au salarié constitue une formalité substantielle : à défaut de remise du document au salarié, la convention pourra être considérée comme nulle (6). En effet, l’absence de remise d’un exemplaire au salarié empêche de garantir son consentement libre et éclairé à la cessation de la relation de travail. Dès lors que la rupture conventionnelle est signée lors de l’entretien, le salarié doit obtenir la remise de son exemplaire directement afin de bénéficier du délai de rétractation dans les conditions légales.
En effet, suite à la signature de la rupture conventionnelle entre les parties, le particulier employeur comme son salarié bénéficient d’un délai de quinze jours calendaires pour exercer leur droit de rétractation. Le délai commence à courir au lendemain du jour de signature de la rupture conventionnelle, et le décompte s’effectuant en jours calendaires, la date de fin de délai est fixée au dernier jour à 24 heures. Le Code du travail prévoit expressément que le droit à rétractation est exercé par lettre adressée par tout moyen permettant de garantir la preuve de la réception par l’autre partie (il s’agira donc, à titre d’exemple, d’une lettre recommandée avec accusé de réception ou d’une lettre remise en main propre contre décharge).
Ce n’est qu’une fois le délai de rétractation écoulé, que le formulaire de rupture conventionnelle peut être expédié auprès des services de la Direccte. Le Code du travail prévoit que cette demande peut être effectuée tant par l’employeur que par le salarié et précise qu’il s’agira de la partie la plus diligente. En pratique, afin d’éviter un double envoi au service d’homologation, le particulier employeur et son salarié peuvent convenir lors de l’entretien que l’employeur effectuera la démarche après le délai de rétractation. De nouveau afin de garantir la preuve de l’envoi du formulaire de rupture conventionnelle auprès de la Direccte, le courrier pourra être adressé par lettre recommandée avec accusé de réception ou déposé directement contre un récépissé.
À NOTER :
La Direccte compétente pour homologuer la convention de rupture est celle du lieu où est établi l’employeur. Il s’agira donc pour le particulier employeur de la Direccte dont dépend son domicile privé. À réception de la demande, la Direccte dispose d’un délai de quinze jours ouvrables afin d’homologuer la demande de rupture des parties. Dans la mesure où ce délai est décompté en jours ouvrables, les dimanches, les jours fériés et habituellement chômés ne doivent pas être pris en compte. Il est à relever également que si le délai se termine un samedi, dimanche, jour férié ou chômé, il est prolongé jusqu’au jour ouvrable suivant.
La vérification effectuée par la Direccte afin d’obtenir l’homologation portera sur les éléments suivants :
- vérification de tous les éléments substantiels de la convention (ex. : identité et adresse des parties, ancienneté du salarié, rémunération, existence/réalité d’un entretien, signature de la convention) ;
- montant de l’indemnité de rupture ;
- date de rupture envisagée respectant les délais de rétractation et d’instruction ;
- respect du délai de rétractation.
De plus, il appartiendra à la Direccte de vérifier si les parties ont librement consenti à la rupture conventionnelle et que le mode de rupture n’avait pas pour but de contourner des procédures légales telles que, par exemple, l’engagement d’un licenciement pour inaptitude. Il est à noter que cette vérification demeure en pratique assez peu efficace, dans la mesure où l’autorité administrative ne dispose pas d’éléments spécifiques quant au motif de la rupture.
Au terme du délai de quinze jours ouvrables, la Direccte procédera à la notification par écrit auprès du particulier employeur et du salarié de l’acceptation ou du rejet de la demande d’homologation. En pratique, la décision peut également être implicite, lorsque la Direccte ne donne aucune réponse. Dans ces conditions, le Code du travail précise expressément en son article L. 1237-14 que l’absence de réponse vaudra acceptation de la rupture conventionnelle.
Quid d’un refus d’homologation de la rupture conventionnelle ?
Si l’autorité administrative refuse d’autoriser la rupture conventionnelle, pour les motifs évoqués précédemment, le contrat de travail se poursuit et aucune rupture n’est donc intervenue. Il appartient alors aux parties de renouveler la demande de rupture conventionnelle ou de considérer la rupture annulée.
(2)
C. trav., art. L. 1237-12.
(3)
Cass. soc., 3 juill. 2013, n° 12-19268.
(4)
Cass. soc., 1er déc. 2016, n° 15-21609. On relèvera qu’il appartient au salarié qui souhaite invoquer la nullité de la rupture conventionnelle de prouver qu’il n’y a eu aucun entretien.
(5)
Convention collective nationale des salariés et du particulier employeur, art. 12 – « Licenciement ». V. également dans le même chapitre I, A « La procédure de licenciement ».
(6)
Cass. soc., 7 mars 2018, n° 17-10963.