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La réforme du droit d’asile (suite)

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La réforme du droit d’asile (suite)

Notre présentation de la loi du 29 juillet 2015 et de ses principaux textes d’application se poursuit avec les conditions d’accueil des demandeurs d’asile. Au menu : l’évaluation de leurs besoins, leur hébergement et l’allocation à laquelle ils ont droit.
II. L’accueil des demandeurs d’asile

A la faveur de la transposition de la « directive accueil », le législateur a opéré une réforme profonde du système d’hébergement des demandeurs d’asile, afin de mettre un terme à leur répartition déséquilibrée sur le territoire – la région Ile-de-France accueillant près de 40 % d’entre eux – et d’unifier les conditions d’hébergement et de prise en charge.

Cette réforme repose sur la mise en place d’un schéma national des places d’hébergement, décliné par région et accompagné d’un système d’orientation contraignant des demandeurs vers les places disponibles, avec un retrait des conditions d’accueil en cas de refus de leur part.

Avant l’orientation vers un hébergement, l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) doit examiner les causes de vulnérabilité du demandeur d’asile pouvant avoir une incidence sur la localisation et l’environnement du futur hébergement.

Enfin, l’allocation temporaire d’attente est remplacée, s’agissant des demandeurs d’asile, par une nouvelle allocation pour demandeur d’asile (ADA), qui tient compte de la situation familiale des demandeurs.

(A noter) L’article L. 744-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda) prévoit que les conditions matérielles d’accueil du demandeur d’asile, au sens de la directive « accueil » – autrement dit les prestations d’accueil et la nouvelle allocation –, sont proposées à chaque demandeur d’asile par l’OFII après l’enregistrement de la demande d’asile par l’autorité administrative compétente(1). Comme c’était le cas auparavant, l’OFII peut toutefois déléguer à des personnes morales, par convention, la possibilité d’assurer certaines prestations d’accueil, d’information et d’accompagnement social et administratif des demandeurs d’asile pendant la période d’instruction de leur demande (Ceseda, art. L. 744-1 nouveau).

A. L’évaluation des besoins du demandeur

La prise en compte des besoins particuliers des demandeurs d’asile est une obligation prévue par les articles 21 et 22 de la directive « accueil ». La loi du 29 juillet 2015 a procédé à leur transposition.

Désormais, à la suite de la présentation d’une demande d’asile, l’OFII est dans un premier temps chargé de procéder, « dans un délai raisonnable et après un entretien personnel avec le demandeur d’asile », à une évaluation de la vulnérabilité de ce dernier afin de déterminer, le cas échéant, ses besoins particuliers en matière d’accueil. Ces besoins particuliers sont également pris en compte s’ils deviennent manifestes à une étape ultérieure de la procédure d’asile. Par la suite, dans la mise en œuvre des droits des demandeurs d’asile et pendant toute la période d’instruction de leur demande, il doit être tenu compte de la situation spécifique des personnes vulnérables (Ceseda, art. L. 744-6 nouveau).

Cette évaluation vise, en particulier, « à identifier les mineurs, les mineurs non accompagnés, les personnes en situation de handicap, les personnes âgées, les femmes enceintes, les parents isolés accompagnés d’enfants mineurs, les victimes de la traite des êtres humains, les personnes atteintes de maladie grave, les personnes souffrant de troubles mentaux et les personnes qui ont subi des tortures, des viols ou d’autres formes graves de violence psychologique, physique ou sexuelle, telles que des mutilations sexuelles féminines » (Ceseda, art. L. 744-6 nouveau).

L’appréciation de la vulnérabilité est effectuée par des agents de l’OFII ayant reçu une formation spécifique,à l’aide d’un questionnaire dont le contenu a été fixé par un arrêté du 23 octobre 2015 (voir encadré ci-dessous) (Ceseda, art. L. 744-6 nouveau). L’échange ne peut pas porter sur les motifs de la demande d’asile. Ceux-ci relèvent en effet de l’examen effectué par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) (arrêté du 23 octobre 2015).

Le demandeur d’asile doit être informé lors de l’entretien visant à mesurer sa vulnérabilité de la possibilité de bénéficier d’un examen de santé gratuit s’il le souhaite (Ceseda, art. L. 744-6 nouveau).

S’il présente des documents à caractère médical en vue de bénéficier de conditions matérielles d’accueil adaptée à sa situation, ceux-ci sont examinés par un médecin de l’OFII, qui émettra alors un avis (Ceseda, art. R. 744-14 nouveau). L’étranger doit en outre avoir été informé des règles de protection du secret médical et de la confidentialité ainsi que de l’usage qui sera fait de ces pièces, « dans son strict intérêt (évaluation de la prise en charge médicale, adaptation de l’hébergement si nécessaire) » (arrêté du 23 octobre 2015).

Par ailleurs, l’intéressé doit être informé que ses réponses au questionnaire font l’objet d’un recueil sur support informatique (arrêté du 23 octobre 2015).

Les informations attestant d’une situation particulière de vulnérabilité sont transmises, après accord du demandeur d’asile, par l’OFII à l’OFPRA. Etant précisé que « l’évaluation de la vulnérabilité par l’OFII ne préjuge pas de l’appréciation par l’OFPRA de la vulnérabilité du demandeur ou du bien-fondé de sa demande » (Ceseda, art. L. 744-6 nouveau).

Ces informations peuvent, par ailleurs, faire l’objet d’un « traitement automatisé ». Un décretest attendu sur le sujet. Il doit notamment préciser les modalités de transmission à l’OFPRA des données relatives à la vulnérabilité et aux besoins particuliers des demandeurs d’asile, la durée de conservation et les conditions de mise à jour des informations enregistrées, les catégories de personnes pouvant y accéder et les modalités d’habilitation de celles-ci, ainsi que, le cas échéant, les conditions dans lesquelles les personnes intéressées peuvent exercer leur droit d’accès (Ceseda, art. L. 744-6 nouveau).

B. La réforme du dispositif d’hébergement

1. Le schéma national d’hébergement

Un schéma national d’accueil des demandeurs d’asile doit fixer la répartition des places d’hébergement destinées aux demandeurs d’asile sur le territoire national. Il est arrêté par le ministre chargé de l’asile – après avis des ministres chargés du logement et des affaires sociales – et transmis au Parlement (Ceseda, art. L. 744-2 nouveau).

A l’échelle locale, un schéma régional doit être établi par le préfet de région, après avis du comité régional de l’habitat et de l’hébergement concerné et en conformité avec le schéma national. Il fixe les orientations en matière de répartition des lieux d’hébergement pour demandeurs d’asile sur le territoire de la région et présente le dispositif régional prévu pour l’enregistrement des demandes ainsi que le suivi et l’accompagnement des demandeurs d’asile. Il doit tenir compte du plan départemental d’action pour le logement et l’hébergement des personnes défavorisées et être annexé à ce dernier (Ceseda, art. L. 744-2 nouveau).

2. La définition des lieux d’hébergement

Le nouvel article L. 744-3 du Ceseda définit les lieux d’hébergement pour demandeurs d’asile, en distinguant :

→ les centres d’accueil pour demandeurs d’asile mentionnés à l’article L. 348-1 du code de l’action sociale et des familles ;

→ « les autres structures bénéficiant de financements du ministère chargé de l’asile pour l’accueil de demandeurs d’asile et soumises à déclaration, au sens de l’article L. 322-1 du même code ». Cette seconde catégorie de lieux d’hébergement vise les structures d’hébergement d’urgence des demandeurs d’asile (HUDA).

« Le regroupement des CADA [centres d’accueil pour demandeurs d’asile] et de l’HUDA au sein de la notion de “lieux d’hébergement pour demandeurs d’asile” traduit la volonté d’unifier la gestion de l’hébergement des demandeurs d’asile, qui feront désormais l’objet de dispositions communes au sein du Ceseda », a expliqué la rapporteure (PS) à l’Assemblée nationale, Sandrine Mazetier (Rap. A.N. n° 2407, Mazetier, novembre 2014, page 283).

Afin, d’ailleurs, d’aller « jusqu’au bout de cette logique d’harmonisation et d’assurer l’égalité de traitement des demandeurs, quel que soit leur lieu d’hébergement », il est précisé que les demandeurs d’asile accueillis dans les lieux d’hébergement bénéficient d’un accompagnement social et administratif (Ceseda, art. L. 744-3 nouveau). Une manière de s’assurer que les demandeurs d’asile accueillis dans le dispositif HUDA bénéficient eux aussi, s’ils en ont besoin, d’un accompagnement juridique et social, comme ceux qui sont accueillis en CADA.

3. Les décisions d’admission, de sortie et de changement de lieu d’hébergement

C’est l’Office français de l’immigration et de l’intégration qui est dorénavant chargé de prendre les décisions d’admission dans un lieu d’hébergement pour demandeurs d’asile, de sortie de ce lieu et de changement de lieu, sur la base du schéma national d’hébergement (Ceseda, art. L. 744-3 nouveau). Jusqu’alors, les décisions d’admission et de sortie de centre d’accueil pour demandeurs d’asile étaient prises par le gestionnaire dudit centre avec l’accord de l’autorité administrative compétente de l’Etat.

Ces décisions doivent être prises après consultation du directeur du lieu d’hébergement et « en tenant compte de la situation du demandeur » (Ceseda, art. L. 744-3 nouveau). Sa vulnérabilité éventuelle, sa situation familiale et ses besoins en termes d’accueil sont ainsi pris en compte.

Si le demandeur accepte l’offre d’hébergement, l’OFII doit informer du lieu qu’il doit rejoindre. Ce lieu peut se situer dans la région où l’intéressé s’est présenté pour l’enregistrement de sa demande d’asile mais aussi dans une autre région, en application du schéma national d’accueil. Si le demandeur ne s’est pas présenté au gestionnaire de ce lieu dans les 5 jours suivant la décision de l’office, il sera considéré comme ayant refusé l’offre d’hébergement (Ceseda, art. R. 744-7 nouveau).

Le préfet peut s’opposer pour des motifs d’ordre public à la décision d’admission d’un demandeur d’asile dans un lieu d’hébergement de son territoire dans un délai de 48 heures à partir de la date de la décision d’admission. A cet effet, il a accès au traitement automatisé des données géré par l’OFII concernant les entrées et sorties dans les lieux d’hébergement pour demandeurs d’asile situés dans le département. Si le préfet fait jouer ce pouvoir d’opposition, l’office est tenu de prendre une nouvelle décision d’admission (Ceseda, art. L. 744-3 et R. 744-8 nouveaux).

(A noter) L’OFII doit s’assurer de la présence dans les lieux d’hébergement des personnes qui y ont été orientées pour la durée de la procédure (Ceseda, art. L. 744-3 nouveau).

4. Le financement de l’hébergement

Il revient à l’Etat de prendre en charge les frais d’accueil et d’hébergement dans les lieux d’hébergement destinés aux demandeurs d’asile, sans préjudice toutefois de la participation financière demandée aux demandeurs d’asile en fonction de leurs ressources (Ceseda, art. L. 744-2 nouveau).

Les personnes dont le niveau de ressources mensuelles est égal ou supérieur au montant du revenu de solidarité active (RSA) doivent en effet s’acquitter d’une participation financière à leurs frais d’hébergement et d’entretien. Le montant de cette participation est fixé par le préfet sur la base d’un barème établi par arrêté ministériel. La décision est notifiée à l’intéressé par le directeur du lieu d’hébergement. Ce barème tient compte notamment des ressources de la personne ou de la famille accueillie et des dépenses restant à sa charge pendant la période d’accueil (Ceseda, art. R. 744-10 nouveau).

La personne accueillie doit acquitter directement sa contribution au directeur du lieu d’hébergement qui lui en délivre récépissé (Ceseda, art. R. 744-10 nouveau).

Le montant de la participation financière perçu par la structure d’hébergement vient en déduction pour le calcul de sa dotation globale de financement (Ceseda, art. R. 744-10 nouveau).

5. La coordination de la gestion des lieux d’hébergement par l’OFII

Dans le cadre de sa mission d’accueil des demandeurs d’asile, l’OFII est dorénavant chargé de « coordonner la gestion des lieux d’hébergement pour demandeurs d’asile » (Ceseda, art. L. 744-4 nouveau). Cette mission de coordination se limitait jusqu’alors aux seuls CADA. Par cette formulation, elle est étendue désormais à l’hébergement d’urgence pour demandeurs d’asile.

Pour accomplir cette mission de coordination, l’OFII conçoit, met en œuvre et gère – dans les conditions prévues par la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés – un traitement automatisé de données relatives aux capacités des lieux d’hébergement, à l’utilisation de ces capacités et aux demandeurs d’asile qui y sont accueillis(Ceseda, art. L. 744-4 nouveau). Ce traitement automatisé existe déjà : il s’agit du système d’information, de gestion et de pilotage du dispositif d’hébergement des demandeurs d’asile – le DN@ –, qui a été mis en place en 2009 par l’OFII afin de permettre le suivi des demandeurs d’asile hébergés en CADA et d’améliorer le pilotage du dispositif national d’accueil. La nouveauté, c’est que le système sera dorénavant étendu à l’HUDA.

Les gestionnaires des lieux d’hébergement doivent déclarer, dans le cadre de ce traitement automatisé de données, les places disponibles dans les lieux d’hébergement (il s’agit là encore de la reprise d’une disposition ancienne, étendue à l’HUDA). Ils sont également tenus d’alerter l’autorité administrative compétente en cas d’absence injustifiée et prolongée des personnes qui y ont été orientées pour la durée de la procédure et en cas de comportement violent ou de manquement grave au règlement du lieu d’hébergement (Ceseda, art. L. 744-4 nouveau).

6. La durée de l’hébergement

Il est dorénavant indiqué que les lieux d’hébergement – et non plus les seuls CADA – accueillent les demandeurs d’asile pendant la durée d’instruction de leur demande d’asile ou jusqu’à leur transfert effectif vers un autre Etat membre s’il s’agit d’un demandeur d’asile relevant de la procédure « Dublin ». Et que leur mission prend fin à l’expiration du délai de recours contre la décision de l’OFPRA ou à la date de notification de la décision de la Cour nationale du droit d’asile ou à la date du transfert effectif vers un autre Etat membre si sa demande relève de la compétence de cet Etat (Ceseda, art. L. 744-5 nouveau).

Les personnes s’étant vu reconnaître la qualité de réfugié ou accorder le bénéfice de la protection subsidiaire et les personnes ayant fait l’objet d’une décision de rejet définitive de leur demande d’asile peuvent toutefois être maintenues dans un lieu d’hébergement « à titre exceptionnel et temporaire ». Ainsi (Ceseda, art. R. 744-12 nouveau) :

→ si elle en fait la demande, la personne ayant eu notification d’une décision définitive favorable est maintenue dans le centre jusqu’à ce qu’une solution d’hébergement ou de logement soit trouvée, dans la limite d’une durée de 3 mois à compter de la date de la notification. Durant cette période, elle prépare avec le gestionnaire du lieu les modalités de sa sortie. Le gestionnaire prend toutes mesures utiles pour lui faciliter l’accès à ses droits, au service intégré d’accueil et d’orientation, ainsi qu’à une offre d’hébergement ou de logement adaptée. A titre exceptionnel, cette période peut être prolongée pour une durée maximale de 3 mois supplémentaires avec l’accord de l’OFII ;

→ si elle en fait la demande, la personne ayant eu notification d’une décision définitive défavorable est maintenue dans le lieu d’hébergement pour une durée maximale de 1 mois à compter de la date de cette notification. Durant cette période, elle prépare avec le gestionnaire les modalités de sa sortie. Elle doit être informée par le gestionnaire qu’elle peut, dans le délai de 15 jours à compter de la notification, saisir l’OFII en vue d’obtenir une aide au retour et éventuellement une aide à la réinsertion dans son pays d’origine. Si elle présente une telle demande, elle peut, à titre exceptionnel, être maintenue dans un lieu d’hébergement pour une durée maximale de 1 mois à compter de la décision de l’office.

Les personnes morales qui assurent la gestion du lieu d’hébergement peuvent exiger le versement d’une caution (dans des conditions qui restent à définir par arrêté). Le montant de la caution est restitué à la sortie du lieu d’hébergement, déduit le cas échéant des sommes dues par le bénéficiaire au titre de l’hébergement (Ceseda, art. L. 744-5 nouveau).

(A noter) Les CADA peuvent conserver les dossiers des personnes accueillies pendant « 2 années civiles après leur sortie ». Etant précisé que les dossiers ainsi conservés « peuvent à tout moment faire l’objet d’un contrôle sur place diligenté par le préfet » (Ceseda, art. R. 744-13 nouveau).

7. Un nouveau dispositif d’expulsion des lieux d’hébergement

Le législateur a créé un nouveau dispositif juridictionnel relatif à l’expulsion des personnes séjournant indument dans les lieux d’hébergement après une décision de rejet définitive, une fois dépassé le délai de maintien accordé à titre exceptionnel et temporaire (voir ci-dessus).

Concrètement, dans cette situation, l’autorité administrative compétente – c’est-à-dire le préfet du département dans lequel se situe le lieu d’hébergement – peut dorénavant, après une mise en demeure restée infructueuse, saisir le président du tribunal administratif afin qu’il soit enjoint à ces occupants sans titre d’évacuer le lieu. Deux cas sont plus précisément envisagés (Ceseda, art. R. 744-12-II nouveau) :

→ la personne ne dispose pas d’un titre de séjour et n’a pas sollicité d’aide au retour volontaire ou a refusé l’offre d’aide au retour volontaire qui lui a été présentée par l’OFII ;

→ la personne bénéficie d’un titre de séjour en France et a refusé une ou plusieurs offres de logement ou d’hébergement qui lui ont été faites en vue de libérer le lieu d’hébergement occupé.

En outre, le gestionnaire du lieu d’hébergement doit dorénavant signaler, « dans les meilleurs délais », toute absence injustifiée et prolongée, tout comportement violent et tout manquement grave au règlement du lieu d’hébergement à l’OFII et au préfet du département dans lequel se situe le centre (Ceseda, art. R. 744-11 nouveau). Sur signalement du gestionnaire du lieu ou de l’OFII, et après une mise en demeure de partir restée infructueuse, ce même préfet peut saisir le président du tribunal administratif afin qu’il ordonne l’expulsion du lieu d’hébergement du demandeur d’asile qui a eu un comportement violent ou a commis des manquements graves au règlement (Ceseda, art. L. 744-5 et R. 744-12-II nouveaux).

C. Une orientation directive des demandeurs d’asile

1. Le bénéfice des conditions matérielles d’accueil

Le bénéfice des conditions matérielles d’accueil – c’est-à-dire l’hébergement et l’allocation pour demandeurs d’asile – est dorénavant subordonné à l’acceptation par le demandeur d’asile de l’hébergement proposé, déterminé en tenant compte de ses besoins, de sa situation au regard de l’évaluationopérée par l’OFII (voir page 49) et des capacités d’hébergement disponibles (Ceseda, art. L. 744-7 nouveau).

Le demandeur doit être, à cet égard, préalablement informé, dans une langue qu’il comprend ou dont il est raisonnable de penser qu’il la comprend, des conséquences de l’acceptation ou du refus de l’hébergement proposé (Ceseda, art. L. 744-7 nouveau).

En cas de refus ou d’abandon de l’hébergement proposé, le demandeur d’asile ne peut pas bénéficier de l’hébergement généraliste d’insertion et de veille sociale, l’hébergement dans un établissement mentionné au 8° du I des articles L. 312-1 et L. 322-1 du code de l’action sociale et des familles étant exclu, ni bénéficier de l’application du droit à un logement décent et indépendant, prévu par l’article L. 300-1 du code de la construction et de l’habitation. Cette exclusion n’empêche toutefois pas l’application de l’article L. 345-2-2 du code de l’action sociale et des familles, qui garantit l’inconditionnalité de l’accueil en cas de situation de détresse (Ceseda, art. L. 744-7 nouveau).

(A noter) Un décret est attendu pour déterminer les informations qui doivent être fournies par l’OFII au service intégré d’accueil et d’orientation pour mettre en œuvre l’exclusion des demandeurs ayant refusé la proposition d’hébergement qui leur a été faite des établissements et du dispositif précités (Ceseda, art. L. 744-7 nouveau).

2. La suspension et le retrait des conditions matérielles d’accueil

Le nouvel article L. 744-8 du Ceseda prévoit dans quelles conditions l’autorité administrative peut limiter ou suspendre le bénéfice des conditions matérielles d’accueil. Le dispositif prévu s’inspire directement de celui qui est autorisé par l’article 20 de la directive « accueil ».

Concrètement, le bénéfice des conditions matérielles d’accueil peut être (Ceseda, art. L. 744-8 nouveau) :

→ suspendu si, sans motif légitime, le demandeur d’asile a abandonné son lieu d’hébergement – tel sera le cas s’il s’en absente plus d’une semaine sans justification valable, ce dont le gestionnaire du lieu devra informer « sans délai » l’OFII (Ceseda, art. R. 744-9 nouveau) –, n’a pas respecté l’obligation de se présenter aux autorités, n’a pas répondu aux demandes d’informations ou ne s’est pas rendu aux entretiens personnels concernant la procédure d’asile ;

→ retiré si le demandeur d’asile a dissimulé ses ressources financières ou a fourni des informations mensongères relatives à sa situation familiale ou en cas de comportement violent ou de manquement grave au règlement du lieu d’hébergement ;

→ refusé si le demandeur présente une demande de réexamen de sa demande d’asile ou s’il n’a pas sollicité l’asile, sans motif légitime, dans le délai prévu au 3° du III de l’article L. 723-2 du Ceseda (cas du demandeur qui est entré irrégulièrement en France ou s’y est maintenu irrégulièrement et qui n’a pas présenté sa demande d’asile dans un délai de 120 jours à compter de son entrée en France).

La décision de suspension, de retrait ou de refus des conditions matérielles d’accueil doit être écrite et motivée. En outre, elle doit prendre en compte la vulnérabilité du demandeur et doit être prise après que l’intéressé a été mis en mesure de présenter ses observations écrites dans les délais impartis (Ceseda, art. L. 744-8 nouveau).

(A noter) Lorsque le bénéfice des conditions matérielles d’accueil a été suspendu, le demandeur d’asile peut en demander le rétablissement à l’OFII (Ceseda, art. L. 744-8 nouveau).

D. L’allocation pour demandeur d’asile

Depuis le 1er novembre 2015, une aide unique – l’allocation pour demandeur d’asile (ADA) – est attribuée aux demandeurs d’asile le temps que leur dossier soit étudié. Pour en bénéficier, les intéressés doivent avoir accepté les conditions matérielles d’accueil qui leur ont été proposées et satisfaire à des critères d’âge et de ressources (Ceseda, art. L. 744-9 nouveau). Son montant dépend des ressources, des conditions d’hébergement et de la taille du foyer. Auparavant, les demandeurs d’asile bénéficiaient :

→ soit, s’ils n’étaient pas hébergés en centre d’accueil pour demandeurs d’asile, de l’allocation temporaire d’attente (ATA). Versée par Pôle emploi – et ouverte aussi à d’autres catégories de personne que les demandeurs d’asile –, cette allocation ne tenait pas compte de la situation familiale du demandeur. Son montant était le même pour un demandeur d’asile isolé ou accompagné d’une famille. Peu importait le nombre d’enfants à charge(2) ;

→ soit, s’ils étaient hébergés en CADA, l’allocation mensuelle de subsistance (AMS), aux modalités de calcul complexes.

L’ATA a fait l’objet de nombreuses critiques, portant à la fois sur l’insuffisance de son montant, la sous-budgétisation chronique dont elle fait l’objet, les dérives et les abus constatés dans sa gestion et l’absence de prise en compte de la situation familiale du demandeur. Plusieurs rapports récents ont ainsi appelé à une réforme complète de cette allocation(3). Une réforme opérée par la loi du 29 juillet 2015 et son décret d’application du 21 octobre 2015. Un texte contre lequel la FNARS (Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale) et la Cimade ont déposé un recours au Conseil d’Etat.

1. Les personnes éligibles

Sont admis au bénéfice de l’allocation pour demandeur d’asile (Ceseda, art. D. 744-17 et D. 744-19 nouveaux) :

→ les demandeurs d’asile qui ont accepté les conditions matérielles d’accueil proposées par l’OFII et qui sont titulaires de l’attestation de demande d’asile désormais remise à ceux dont la demande d’asile a été enregistrée(4). L’ADA est alors versée jusqu’à la décision définitive statuant sur la demande ou jusqu’au transfert effectif de l’intéressé vers un autre Etat responsable de l’examen de sa demande ;

→ les ressortissants étrangers admis au séjour au titre de la protection temporaire (5), pour qui l’ADA est versée pendant la durée du bénéfice de la protection ;

→ les ressortissants étrangers victimes de traite ou de proxénétisme, auxquels a été délivrée une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » après qu’ils ont déposé plainte ou témoigné contre les auteurs de ces infractions. La durée de versement est dans ce cas celle de la durée de détention de la carte.

En tout état de cause, pour pouvoir bénéficier de l’allocation, toutes ces personnes doivent être âgées de 18 ans révolus (Ceseda, art. D. 744-18 nouveau). Une condition d’âge qui écarte, par conséquent, les mineurs demandeurs d’asile. C’est un des points contestés devant le Conseil d’Etat par les associations qui font valoir que l’exclusion du bénéfice de l’allocation des mineurs demandeurs d’asile n’est pas prévue par le droit européen. Et en particulier par la directive « accueil » qui, en plus, affirme que les mineurs sont des personnes vulnérables.

Le demandeur de l’allocation doit faire connaître à l’OFII toutes informations relatives à son domicile, à sa situation de famille, à ses activités professionnelles, à ses ressources et à ses biens ainsi qu’à ceux des membres du foyer. Il doit également signaler à l’office tout changement intervenu dans l’un ou l’autre de ces éléments, le cas échéant sous couvert de l’opérateur d’hébergement ou de la structure chargée de son accompagnement (Ceseda, art. D. 744-24 nouveau).

(A noter) Au sein du foyer, le bénéficiaire de l’ADA est celui qui a déposé la demande. Toutefois, le bénéficiaire peut être désigné d’un commun accord. Ce droit d’option peut être exercé à tout moment. L’option ne peut être remise en cause qu’au bout de 1 an, sauf changement de situation, sur demande motivée. Lorsqu’un même foyer compte plusieurs demandeurs d’asile, une seule allocation peut être versée au foyer, même si plusieurs demandes d’allocation sont déposées (Ceseda, art. D. 744-25 nouveau).

2. Les conditions de ressources

Pour bénéficier de l’ADA, la personne doit justifier de ressources mensuelles inférieures au montant du RSA (6) (Ceseda, art. D. 744-20 nouveau).

Les ressources prises en considération comprennent celles de l’intéressé et, le cas échéant, de son conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin, telles qu’elles doivent être déclarées à l’administration fiscale pour le calcul de l’impôt sur le revenu avant déduction des divers abattements. Est retenu le douzième du total des ressources perçues pendant les 12 mois précédant celui au cours duquel les ressources sont examinées (Ceseda, art. D. 744-21 nouveau).

Ne sont pas prises en compte (Ceseda, art. D. 744-23 nouveau) :

→ les prestations familiales ;

→ les allocations d’assurance ou de solidarité, les rémunérations de stage ou les revenus d’activité perçus pendant la période de référence lorsqu’il est justifié que leur perception est interrompue de manière certaine à la date de la demande et que le bénéficiaire de ces ressources ne peut prétendre à un revenu de substitution.

En outre, la pension alimentaire ou la prestation compensatoire fixée par une décision de justice devenue exécutoire est déduite des ressources de celui qui la verse (Ceseda, art. D. 744-23 nouveau).

(A noter) La condition relative aux ressources peut faire l’objet d’un contrôle ultérieur par l’OFII (Ceseda, art. D. 744-22 nouveau).

3. Le montant de l’ADA

A Le barème de l’allocation

L’ADA est composée d’un montant forfaitaire, dont le niveau varie en fonction du nombre d’adultes et d’enfants composant la famille du demandeur d’asile et accompagnant celui-ci, ainsi que, le cas échéant, d’un montant additionnel dans le cas où le demandeur d’asile n’est pas hébergé(7) (Ceseda, art. D. 744-26 nouveau).

Il s’agit d’une allocation différentielle. Les ressources perçues par le demandeur sont déduites du montant déterminé en prenant en compte la composition de son foyer et le fait qu’il est ou non hébergé (Ceseda, art. D. 744-26 nouveau).

Le montant de l’aide, déterminé par l’OFII, est versé mensuellement par l’Agence de services et de paiement pour le compte de l’office, par alimentation d’une carte de retrait. Toutefois, de manière transitoire ou par dérogation, notamment dans les départements d’outre-mer, l’allocation peut être versée par virement sur un compte bancaire du bénéficiaire (Ceseda, art. D. 744-31 à 744-33 nouveaux).

L’aide va de 6,80 € par jour pour une personne seule à 37,40 € par jour pour une famille de 10 personnes. Elle s’établit comme suit (Ceseda, annexe 7-1) :

Quant au montant additionnel versé lorsque le demandeur d’asile n’est pas hébergé, il s’élève à 4,20 € par jour (Ceseda, annexe 7-1).

Le montant de l’ADA est révisé, le cas échéant, une fois par an, en fonction de l’évolution des prix, hors tabac, prévue dans le rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances de l’année (Ceseda, art. L. 744-9 nouveau).

Certains demandeurs hébergés ailleurs que dans un CADA peuvent continuer à percevoir l’allocation temporaire d’attente qu’ils touchaient au 1er novembre 201

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