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La loi de financement de la sécurité sociale pour 2015

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La loi de financement de la sécurité sociale pour 2015

Crédit photo Florence Tamerlo
Pas de réformes d’envergure avec ce texte qui doit contribuer à la réduction des dépenses de protection sociale. Deux mesures importantes vont toutefois s’appliquer dès le 1er juillet prochain : la modulation des allocations familiales en fonction des ressources et la généralisation du tiers payant pour les titulaires de l’ACS.

Adoptée définitivement par le Parlement le 1er décembre et validée pour l’essentiel par le Conseil constitutionnel le 18 décembre, la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2015 doit permettre le redressement des comptes sociaux grâce à des « efforts significatifs sur les dépenses », a insisté le gouvernement lors de la présentation des grandes lignes du projet de loi initial en octobre dernier. La loi s’inscrit en effet dans le cadre de son engagement d’économiser 50 milliards d’euros d’ici à 2017, dont 20 milliards portant sur les dépenses de protection sociale(1). L’objectif, cette année, est donc encore de contenir le déficit du régime général de la sécurité sociale (11,6 milliards d’euros en 2014) qui, sans mesures de redressement, pourrait atteindre 14,7 milliards en 2015.

Dans ce cadre, les parlementaires ont fixé à 2,1 % le taux de progression en 2015 de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, soit une autorisation de dépenses de 182,3 milliards d’euros (contre 178,3 milliards en 2014). Pour respecter ce taux d’évolution, seront mises en œuvre des actions de maîtrise médicalisée des dépenses, des réformes structurelles – par exemple, en poursuivant et en amplifiant la prise en charge ambulatoire en amont, pendant et en aval de l’hospitalisation –, ou encore des mesures visant à renforcer la lutte contre la fraude aux prestations sociales et le travail dissimulé. Parallèlement, la LFSS pour 2015 contient plusieurs dispositions visant à améliorer l’équité et l’efficacité du financement de la sécurité sociale, « sans accroître significativement les niveaux de prélèvement », a assuré la ministre de la Santé et des Affaires sociales, Marisol Touraine. Ainsi, par exemple, elle réforme le dispositif d’exonération et d’application du taux réduit de contribution sociale généralisée pour les titulaires de certains revenus de remplacement (allocations de chômage, pensions de vieillesse et d’invalidité).

Avec cette loi, le gouvernement entend aussi continuer à renforcer l’accès aux soins et aux droits. Ainsi, sans attendre la généralisation du tiers payant intégral pour tous à la fin 2017, les bénéficiaires de l’aide à l’acquisition de la couverture complémentaire santé (ACS) pourront en bénéficier dès le 1er juillet prochain, sous réserve de respecter le parcours de soins coordonné.

Au-delà, la LFSS pour 2015 poursuit l’effort de modernisation de la politique familiale menée par le gouvernement depuis 2013, en instaurant une modulation des allocations familiales en fonction des ressources des parents et du nombre d’enfants à charge. Son objectif étant, rappelons-le, de rendre plus juste la politique familiale et de réorienter les aides vers les services aux familles avec un engagement de création de 275 000 solutions d’accueil supplémentaires pour les jeunes enfants.

(A noter) Les dispositions concernant les établissements et services du secteur médico-social ont d’ores et déjà été traitées dans un précédent numéro(2).

I. MODULATION DES ALLOCATIONS FAMILIALES (ART. 85 DE LA LOI)

Depuis 2013, le gouvernement a entrepris des travaux pour rénover la politique familiale afin de la rendre plus juste, notamment en instaurant la modulation de l’allocation de base de la prestation d’accueil du jeune enfant (PAJE) ou en créant une majoration du complément familial. Dans le droit-fil de ces mesures, et à l’initiative du groupe socialiste de l’Assemblée nationale, soutenue par le gouvernement, la LFSS pour 2015 institue une modulation des allocations familiales en fonction des revenus des familles : leur montant variera ainsi à l’avenir en fonction, comme actuellement, du nombre d’enfants dans le foyer, mais aussi des ressources du ménage ou de la personne qui en assure la charge, selon un barème qui sera défini par décret. Le montant de l’allocation forfaitaire – versée pendant 1 an aux familles ayant au moins 3 enfants lorsque l’un d’eux atteint l’âge de 20 ans – et celui des majorations afférentes aux allocations familiales(3) seront aussi modulés en fonction des ressources des parents (code de la sécurité sociale [CSS], art. L. 521-1, al. 3 et 4 nouveaux). Sans changement, la caisse d’allocations familiales ne versera la prestation qu’à compter du deuxième enfant (CSS, art. L. 521-1, al. 1).

Les niveaux des plafonds de ressources varieront en fonction du nombre d’enfants à charge et seront révisés conformément à l’évolution annuelle de l’indice des prix à la consommation, hors tabac (CSS, art. L. 521-1, al. 5 nouveau). En cas de dépassement du plafond, le ou les parents pourront se voir octroyer un complément dégressif, dans la limite de montants déterminés par décret (CSS, art. L. 521-1, al. 6 nouveau). Objectif : éviter les effets de seuil. Les modalités de calcul de ces montants et du complément dégressif seront aussi définies par voie réglementaire.

L’ensemble de ces dispositions s’appliqueront à une date fixée par décret et, au plus tard, au 1er juillet 2015.

Selon les rapporteurs de la loi à l’Assemblée nationale, « dans le but de procurer à la branche famille une économie d’environ 800 millions d’euros en année pleine et de 400 millions d’euros en 2015, les montants d’allocations familiales seront diminués de moitié au-dessus d’un premier plafond de revenu, fixé à 6 000 € pour un ménage ou une personne avec deux enfants à charge, et à nouveau de moitié au-dessus d’un deuxième plafond fixé à 8 000 € par mois dans la même situation familiale » (Rap.A.N. n° 2384, 2014, page 99). Au final, soulignent-ils, cette économie permettra non seulement de maintenir dès l’âge de 14 ans la majoration des allocations familiales – âge qui, dans le projet de loi initial, devait être porté à 16 ans –, mais aussi un montant uniforme de la prime à la naissance ou à l’adoption de la PAJE, qui devait être divisé par trois pour le deuxième enfant et les suivants. Enfin, cette mesure n’entraînera pas non plus, contrairement à ce qui était envisagé, la création d’une quatrième tranche de revenus pour l’octroi du complément de libre choix du mode de garde de la PAJE.

II. DISPOSITIONS RELATIVES A LA SANTÉ

L’accès aux soins est au cœur de la stratégie nationale de santé lancée en septembre 2013(4), rappelle le gouvernement, précisant que c’est la raison pour laquelle il a, depuis 2012, « fait le choix d’écarter toute mesure de désengagement de l’assurance maladie – déremboursement, franchises, forfaits ». Au contraire, il assure avoir favorisé l’accès aux soins des assurés, par exemple en prévoyant la gratuité de la contraception pour les mineures ou en relevant le plafond de ressources à ne pas dépasser pour l’octroi de la couverture maladie universelle complémentaire et de l’aide à l’acquisition d’une couverture complémentaire santé. Pour le gouvernement, « les chiffres traduisent d’ores et déjà cette inflexion : en effet, la part des dépenses de soins à la charge des ménages a reculé depuis 2011, passant de 9,2 % des dépenses de soins à 9 % en 2012, puis à 8,8 % en 2013 ».

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 comporte d’autres dispositions qui tendent à poursuivre cette démarche, en particulier en faveur des bénéficiaires de l’ACS. Toujours dans un souci de meilleur accès aux soins, elle réforme le financement de la prise en charge sanitaire des détenus et des centres de vaccination. Dans un tout autre domaine, elle encadre le champ d’intervention de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux (ONIAM).

A. Accès aux soins des bénéficiaires de l’ACS

1. GÉNÉRALISATION DU TIERS PAYANT (ART. 41)

Pour le gouvernement, « la généralisation du tiers payant intégral constitue un élément essentiel de [sa] démarche en faveur de l’accès aux soins. Il s’agit d’éviter que l’avance des frais par les patients conduise à renoncer aux soins pour des raisons financières. » Ce qui est souvent le cas pour les bénéficiaires de l’ACS, leurs revenus étant inférieurs au seuil de pauvreté. Sans attendre la généralisation du tiers payant intégral pour tous à la fin 2017 prévue par le projet de loi relatif à la santé(5) – et qui dispensera le patient de l’avance de frais auprès des professionnels de santé, aussi bien pour la part prise en charge par l’assurance maladie que pour celle qui est remboursée par les complémentaires santé –, la loi prévoit donc d’en faire bénéficier les titulaires de l’ACS dès le 1er juillet 2015 pour l’ensemble des actes et prestations qui leur sont dispensés par les professionnels de santé. Toutefois, ils ne pourront pas y prétendre s’ils n’ont pas choisi de médecin traitant ou s’ils consultent un médecin en dehors du parcours de soins coordonné (CSS, art. L. 863-7-1 nouveau). Ces assurés pourront aussi bénéficier du tiers payant chez le pharmacien, à condition d’accepter la délivrance de médicaments génériques (CSS, art. L. 162-16-7, al. 3 modifié).

Entre le 1er juillet et le 31 décembre 2015, le tiers payant s’appliquera, s’agissant de la part des dépenses prises en charge par la complémentaire santé, à hauteur non des garanties réelles définies par les contrats « ACS » de ces complémentaires, mais des niveaux minimaux de prise en charge des dépenses fixés par la nouvelle procédure de sélection auxquels ces contrats sont soumis(6).

2. EXONÉRATION DU FORFAIT DE 1 € ET DES FRANCHISES MÉDICALES (ART. 42)

Par cohérence avec les dispositions précédentes, la loi prévoit aussi que les titulaires de l’ACS seront, à compter du 1er juillet prochain, exonérés du paiement de la participation forfaitaire de 1 € sur les actes médicaux, les consultations médicales et les actes de biologie médicale, ainsi que des franchises médicales sur les boîtes de médicaments, les actes des auxiliaires médicaux et les prestations de transport de patient (CSS, art. L. 322-4, al. 1 modifié).

B. Financement des soins aux détenus (art. 46)

Conformément à l’article L. 381-30 du code de la sécurité sociale, les détenus sont affiliés obligatoirement aux assurances maladie et maternité du régime général de la sécurité sociale à compter de la date de leur incarcération. Et sont en principe dispensés de l’avance de frais. Mais la prise en charge des frais afférents aux soins – partagée entre assurance maladie et Etat – « n’est pas des plus lisibles car elle varie selon le lieu de la prise en charge du détenu [en ville, à l’hôpital ou dans l’établissement pénitentiaire] », explique Olivier Véran, rapporteur (PS) de la loi à l’Assemblée nationale. En pratique, « la coexistence de ces circuits [financiers] rend difficile la mise en œuvre du tiers payant en ville », en particulier pour les détenus qui bénéficient d’un aménagement de peine car l’assurance maladie n’a pas connaissance à temps de leur situation (Rap.A.N. n° 2303, tome II, Véran, 2014, pages 88 et 90). Pour faciliter l’application du tiers payant intégral à l’ensemble des soins dispensés aux personnes détenues, quelle que soit leur situation (incarcération ou aménagement de peine, pour les soins dispensés à l’hôpital comme en ville), la LFSS pour 2015 simplifie, à compter du 1er janvier 2016, les circuits de financement entre l’assurance maladie et l’Etat.

C. Politique vaccinale (art. 49)

Lorsque la vaccination est réalisée en médecine de ville, la prise en charge des vaccins est assurée par l’assurance maladie à hauteur de 65 % du tarif indiqué sur la vignette et sur prescription médicale. En revanche, lorsqu’elle est dispensée dans les établissements et les organismes habilités – tels que les centres de santé – la prise en charge incombe à l’Etat ou aux collectivités territoriales. L’absence de prise en charge par l’assurance maladie est « doublement préjudiciable tant du point de vue du financement de la politique vaccinale que de l’égalité d’accès aux soins », estime le rapporteur à l’Assemblée nationale, Olivier Véran (Rap.A.N. n° 2303, tome II, Véran, 2014, page 103). Ainsi, bien que constituant des structures sanitaires de proximité dispensant principalement des soins de premier recours, « les centres de santé ne sont plus en mesure de proposer, faute de financement associé, la totalité des vaccins relevant du calendrier obligatoire ». La loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 prévoit donc que, à compter du 1er janvier 2016, c’est l’assurance maladie qui prendra en charge les dépenses de vaccins de ces centres de santé à hauteur de 65 % (code de la santé publique [CSP], art. L. 3111-11, al. 3 nouveau). « Le restant étant financé par l’Etat directement lorsque le centre de vaccination ne relève pas d’une collectivité territoriale, ou par le biais de la [dotation générale de décentralisation] lorsque la collectivité territoriale a choisi de maintenir sa compétence de vaccination », précise l’élu (Rap. A.N. n° 2303, tome II, Véran, 2014, page 104). Ces dispositions ne concernent pas les patients bénéficiant de l’aide médicale de l’Etat, pour lesquels la prise en charge relève de l’Etat sur la base d’une convention conclue entre ce dernier et la caisse nationale d’assurance maladie.

D. Champ d’intervention de l’ONIAM (art. 70)

Conformément à l’article L. 1142-1, II du code de la santé publique, l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux – essentiellement financé par l’assurance maladie – répare, au titre de la solidarité nationale, les préjudices médicaux non imputables à une faute du professionnel de santé occasionnant une atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique supérieure à 25 %. Dans un arrêt du 5 février 2014, la Cour de cassation a estimé que les actes de chirurgie esthétique ainsi que leurs actes préparatoires constituaient des actes de soins susceptibles d’être ainsi réparés par l’ONIAM au sens de l’article L. 1142-1(7). Mais, pour le rapporteur Olivier Véran, « il ne paraît pas juste d’admettre l’indemnisation par la solidarité nationale au titre de dommages, mêmes graves, consécutifs à des actes relevant de pure convenance personnelle » (Rap. A.N. n° 2303, tome II, Véran, 2014, page 222). Aussi la LFSS pour 2015 prévoit-elle explicitement que, dorénavant, l’ONIAM ne peut indemniser les dommages imputables à des actes dépourvus de finalité préventive, diagnostique, thérapeutique ou reconstructive, y compris dans leur phase préparatoire ou de suivi (CSP, art. L. 1142-3-1, I nouveau). Une formulation qui permet de maintenir l’intervention de l’ONIAM « pour les actes de chirurgie esthétique à visée réparatrice (à titre d’exemple, pour une mastectomie faisant suite à un cancer du sein) », souligne l’exposé des motifs du projet de loi initial.

Les victimes de dommages imputables à des actes dépourvus de finalité préventive, diagnostique, thérapeutique ou reconstructive (actes de soins à visée esthétique, par exemple) peuvent néanmoins solliciter l’intervention des commissions régionales de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux afin de favoriser le règlement amiable de leur litige avec le responsable du dommage (CSP, art. L. 1142-3-1, II nouveau). Elles peuvent également recourir aux dispositifs de droit commun de réparation en responsabilité civile.

Ces dispositions concernent les demandes d’indemnisation présentées à compter du 1er janvier 2015 et ne remettent pas en cause les demandes présentées jusqu’au 31 décembre 2014 sur la base de la qualification retenue par la Cour de cassation, précise le rapporteur Olivier Véran. Soulignant que « l’économie occasionnée pour l’office est estimée, selon l’étude d’impact jointe au projet de loi, à environ 800 000 € par an » (Rap. A.N. n° 2303, tome II, Véran, 2014, page 224).

III. LUTTE CONTRE LA FRAUDE

A. Fraude aux prestations « vieillesse » et « famille » (art. 90, I)

La LFSS pour 2015 entend permettre aux caisses d’allocations familiales (CAF) et aux caisses d’assurance retraite et de santé au travail (Carsat) confrontées à des fraudes aux prestations « vieillesse » et « famille » de prononcer des sanctions en rapport avec la gravité des faits reprochés, en diminuant le seuil minimal des pénalités financières et en introduisant des sanctions spécifiques pour les cas de réitérations d’infractions ou d’obstacles à contrôle(8). Objectif, au final : garantir l’effectivité des sanctions. Selon le rapporteur (PS) à l’Assemblée nationale, Gérard Bapt, avec ces mesures, le régime général de la sécurité sociale – et surtout la branche famille – devrait faire des économies de 6,5 millions d’euros par an, le gain provenant principalement de la création de la sanction pour obstacle à contrôle (Rap. A.N. n° 2303, tome I, Bapt, 2014, page 224)(9).

1. SANCTIONS EN CAS D’OBSTACLE A CONTROLE

Selon le rapporteur à l’Assemblée nationale, « les CAF et les Carsat font face à un nombre important et croissant de situations d’obstacle à contrôle : en 2012, 14 % des contrôles sur place réalisés par les CAF (soit 28 000 cas sur la base d’environ 200 000 contrôles sur place réalisés en 2013) et 18 % de ceux conduits par les Carsat ont été rendus difficiles ou empêchés. Concernant les contrôles sur pièces, le nombre de refus opposés aux contrôles réalisés par les CAF est de l’ordre de 100 000 » (Rap. A.N. n° 2303, tome I, Bapt, 2014, pages 221-222). La loi prévoit donc que sont désormais poursuivies les actions ou omissions ayant pour objet de faire obstacle ou de se soustraire aux opérations de contrôle exercées par les agents des CAF et des Carsat, visant à refuser l’accès à une information formellement sollicitée, à ne pas répondre ou à apporter une réponse fausse, incomplète ou abusivement tardive à toute demande de pièce justificative, d’information, d’accès à une information, ou à une convocation, dès lors que la demande est nécessaire à l’exercice du contrôle ou de l’enquête (CSS, art. L. 114-17, 6 nouveau).

2. ABAISSEMENT DU SEUIL MINIMUM DE PÉNALITÉ

Lorsque l’intention de frauder est établie, le montant de la sanction minimale était jusqu’à présent fixé à 1/10e du plafond mensuel de la sécurité sociale (soit 317 € en 2015). Mais, « en cas de fraude de faible gravité, les caisses se bornent souvent à prononcer un simple avertissement, la sanction minimale pouvant paraître trop élevée. En 2013, 6 709 avertissements ont été prononcés par les caisses d’allocations familiales. » Or ces avertissements ont un caractère peu dissuasif, déplore Gérard Bapt (Rap. A.N. n° 2303, tome I, Bapt, 2014, page 221). La loi porte donc le plafond minimal de pénalité à 1/30e du plafond mensuel de la sécurité sociale (soit 105,66 € pour cette année) (CSS, art. L. 114-17, II modifié). Ainsi, explique le rapporteur à l’Assemblée nationale, « en cas de fraude de faible gravité, la diminution du montant minimal de la pénalité facilitera le prononcé de sanctions financières qui auront un caractère plus adapté que dans le dispositif actuel où les caisses ont le choix entre une pénalité plus élevée et un simple avertissement » (Rap. A.N. n° 2303, tome I, Bapt, 2014, page 223).

3. EXTENSION DE LA NOTION DE RÉCIDIVE

En vertu de l’article L. 114-17, al. 7 du code de la sécurité sociale, le montant de la pénalité est, sans changement, fixé en fonction de la gravité des faits, dans la limite de deux fois le plafond mensuel de la sécurité sociale (soit 6 340 € en 2015). Un montant qui peut être doublé en cas de récidive. Mais, conformément au code pénal, la récidive ne peut être retenue qu’à des conditions restrictives, à savoir qu’il faut justifier du caractère identique des faits pour lesquels une pénalité a été prononcée. « Du fait de la diversité des fraudes existantes, les organismes peuvent être confrontés à des fraudes caractérisées pour des situations différentes – fausse déclaration, omission de déclaration, fraude pour des prestations de nature différente… – qui n’entrent donc pas dans le champ de la récidive au sens pénal », souligne Gérard Bapt (Rap. A.N. n° 2303, tome I, Bapt, 2014, page 222). S’agissant des fraudes aux prestations « vieillesse » et « famille », la loi modifie donc cette disposition pour prévoir que tout fait ayant donné lieu à une sanction devenue définitive peut constituer le premier terme de récidive d’un nouveau manquement.

« Ainsi, explique le rapporteur de la loi, la situation n’a pas besoin d’être identique à la première pour être qualifiée de récidive. Il s’agit d’une réitération d’infractions, quelle que soit leur nature. Cette mesure permettra ainsi de doubler le montant des pénalités financières prononcées dans ce type de cas. La gravité des faits est prise en compte pour fixer le montant de la pénalité » (Rap. A.N. n° 2303, tome I, Bapt, 2014, page 223).

B. Répression de l’incitation à la fraude et du refus d’affiliation (art. 90, II)

Conformément à l’article L. 114-18 du code de la sécurité sociale, toute personne qui, par quelque moyen que ce soit, incite les assujettis à refuser de se conformer aux prescriptions de la législation de sécurité sociale, et notamment de s’affilier à un organisme de sécurité sociale ou de payer les cotisations et contributions dues, est désormais punie d’un emprisonnement de 2 ans (au lieu de 6 mois avant) et d’une amende de 30 000 € (contre 15 000 €) ou de l’une de ces deux peines seulement.

En outre, est dorénavant punie de 6 mois d’emprisonnement et d’une amende de 15 000 €, ou seulement de l’une de ces deux peines, toute personne qui refuse délibérément de s’affilier ou qui persiste à ne pas engager les démarches en vue de son affiliation obligatoire à un régime de sécurité sociale, en méconnaissance des prescriptions de la législation en matière de sécurité sociale.

C. Sanction du travail dissimulé (art. 94)

La LFSS pour 2015 entend mieux lutter contre la fraude aux cotisations sociales en durcissant les sanctions applicables en cas de recours au travail dissimulé, au marchandage(10) ou au prêt illicite de main-d’œuvre avec circonstances aggravantes. Ainsi, lorsqu’une situation de travail dissimulé à l’égard de plusieurs personnes ou d’une personne dont la vulnérabilité ou l’état de dépendance sont apparents ou connus de son auteur, celui-ci encourt 5 ans d’emprisonnement et 75 000 € d’amende (code du travail [C. trav.], art. L. 8224-2, al. 2 nouveau).

Par cohérence, les parlementaires ont modifié les dispositions relatives au prêt illicite de main-d’œuvre et au marchandage, tous deux punis de 2 ans de prison et de 30 000 € d’amende. Ces peines sont en effet portées à 5 ans de prison et à 75 000 € d’amende lorsque ces infractions sont commises à l’égard de plusieurs personnes ou d’une personne dont la vulnérabilité ou l’état de dépendance sont apparents ou connus de l’auteur (C. trav., art. L. 8234-1, al. 2 à 4 nouveaux et L. 8243-1, al. 2 à 4 nouveaux).

Par ailleurs, la loi majore de 40 % le montant du redressement des cotisations et contributions sociales mis en recouvrement à l’issue d’un contrôle ayant constaté le recours au travail dissimulé d’un mineur soumis à l’obligation scolaire, de plusieurs personnes ou d’une personne dont la vulnérabilité ou l’état de dépendance sont apparents (C. trav., art. L. 243-7-7, al. 2 nouveau).

IV. MESURES DIVERSES

A. Forfaitisation du capital-décès (art. 72)

Auparavant, des valeurs minimale et maximale étaient définies pour le versement par la sécurité sociale d’un capital aux ayants droit d’un assuré salarié décédé devant les aider à faire face aux besoins de la vie courante. Ces valeurs étaient fixées en fonction des revenus que percevait l’assuré décédé. « Or, ont admis les députés, l’évolution des modes de vie, les dispositifs de couverture sociale mais aussi de l’utilisation de cette ressource, plus systématiquement allouée à l’organisation des obsèques, a rendu progressivement inadapté et inéquitable un système consistant à verser un capital calculé en fonction du salaire du défunt. La disparité des situations est accrue par le fait que des dispositifs complémentaires ont souvent été mis en place pour accompagner les familles. Ainsi, les cadres sont généralement couverts par une protection complémentaire en matière de décès. En outre, des accords de branche ou d’entreprise couvrent également de plus en plus fréquemment ce risque. Ce sont donc les familles les plus modestes, plus souvent exclues de ces dispositifs complémentaires, qui rencontrent le plus de difficultés à faire face au coût des obsèques » (Rap. A.N. n° 2303, tome II, Véran, 2014, page 233). C’est pourquoi la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 a prévu que le capital-décès serait désormais égal à un forfait d’un montant unique, déconnecté du revenu du défunt et donc plus élevé pour les plus modestes (CSS, art. L. 361-1 modifié). Deux décrets sont venus mettre en application cette mesure(11).

Du 1er janvier au 31 mars 2015, le montant du capital-décès est fixé à 3 400 €. Un montant qui est revalorisé, chaque année, au 1er avril en fonction de l’évolution prévisionnelle en moyenne annuelle des prix à la consommation, hors tabac (CSS, art. D. 361-1 nouveau). Rappelons que le capital-décès est accordé même en cas de décès survenu à la suite d’un accident du travail, pendant la « journée défense citoyenneté » obligatoire, pendant une période d’appel ou de mobilisation, ou au cours d’une période de présence sous les drapeaux comme volontaire en temps de guerre (CSS, art. R. 361-2 modifié).

Selon le rapporteur de la loi à l’Assemblée nationale, Olivier Véran, le montant moyen des capitaux-décès versés s’élève aujourd’hui à 6 500 € pour le régime général. « La forfaitisation aura donc un impact haussier pour les plus modestes et baissier pour les professions dont le salaire moyen est supérieur au SMIC. Cette mesure représente donc, globalement, une économie pour le régime d’assurance décès. Sur la base du versement de 25 000 capitaux-décès chaque année, par le régime général, la mesure occasionnerait une économie annuelle de 82 millions d’euros pour le régime général et de 158 millions d’euros tous régimes confondus » (Rap. A.N. n° 2303, tome II, Véran, 2014, pages 234 et 235).

B. Transfert au père des indemnités « maternité » en cas de décès de la mère (art. 45)

Avant la LFSS pour 2015, en cas de décès d’une femme pendant son congé de maternité, l’indemnité versée au titre de ce congé pouvait être servie au père de l’enfant qui suspendait son activité professionnelle ou, si ce dernier n’exerçait pas son droit, au conjoint, concubin ou partenaire pacsé de la mère. Mais, explique le gouvernement dans l’exposé des motifs du projet de loi initial, les conditions pour en bénéficier étaient trop « restrictives » : il fallait, d’une part, que le décès de la mère résulte de l’accouchement et, d’autre part, que la mère et son compagnon aient été tous deux affiliés soit au régime général de la sécurité sociale soit au régime des salariés agricoles. Selon Olivier Véran, « alors que l’on dénombre chaque année entre 30 et 50 décès de mères directement causés par l’accouchement, et occasionnant un transfert d’indemnités de congé maternité, on estime à un nombre près de deux fois plus élevé les situations où un tel transfert n’a pas lieu, soit en raison de la cause du décès, soit à défaut d’une coordination entre régimes de sécurité sociale » (Rap. A.N. n° 2303, tome II, Véran, 2014, page 84). Aussi les parlementaires ont-ils décidé d’ouvrir le bénéfice de cette indemnisation quelle que soit la cause du décès de la mère et quel que soit le régime d’assurance maladie des parents. Des dispositions qui s’appliquent aux périodes de congés ou de cessation d’activité qui courent depuis le 1er janvier 2015.

Concrètement, en cas de décès de la mère au cours de la période d’indemnisation du congé maternité comprise entre la naissance de l’enfant et, selon le régime d’affiliation, la fin du versement des indemnités journalières ou du maintien de traitement lié à la maternité, le père bénéficie, dans des conditions fixées par décret, d’un droit à indemnisation pour la durée restant à courir entre la date du décès et la fin de la période d’indemnisation dont la mère aurait bénéficié. Ce, sous réserve d’avoir cessé toute activité professionnelle. Lorsque le père de l’enfant ne demande pas à percevoir l’indemnité, le droit à indemnisation est accordé au conjoint de la mère, à son partenaire ou à son concubin. Sans changement, le bénéficiaire peut demander le report de tout ou partie de la période d’indemnisation à laquelle il a droit dans les cas où l’enfant a été hospitalisé pendant les 6 semaines suivant l’accouchement (CSS, art. L. 331-6, al. 2).

Rédigées de façon plus générale, ces nouvelles règles sont ainsi applicables quel que soit le régime de sécurité sociale des parents : régime des salariés (CSS, art. 331-6 modifié), régime des indépendants (CSS, art. L. 613-19-3 nouveau), régime des praticiens et auxiliaires médicaux conventionnés (CSS, art. 722-8-4) et régime des non-salariés agricoles (code rural et de la pêche maritime, art. L. 732-12-2 nouveau).

Par ailleurs, la LFSS pour 2015 garantit aussi aux agents de la fonction publique (territoriale, hospitalière et Etat), en cas de décès d’une femme pendant son congé de maternité, la possibilité au parent survivant de prendre en charge le nourrisson. En pratique, en cas de décès de la mère au cours de la période entre la naissance de l’enfant et la fin de l’indemnisation au titre de la maternité, le père peut désormais prétendre à un droit à congé, avec traitement, pour la durée restant à courir entre la date de ce décès et la fin de la période d’indemnisation dont la mère aurait bénéficié. Il peut, lui aussi, demander le report de tout ou partie de ce congé. Un congé transférable au conjoint de la mère, à son concubin ou à son partenaire si le père ne souhaite pas en bénéficier (art. 57, 5° modifié de la loi du 26 janvier 1984, art. 41, 5° modifié de la loi du 9 janvier 1986 et art. 34, 5° modifié de la loi du 11 janvier 1984).

C. Droit à la retraite des enfants de harkis (art. 79)

Le Premier ministre a, le 25 septembre 2014, présenté un plan national d’action en faveur des harkis et de leurs familles. « Ce plan

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