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Réforme de la dépendance : les propositions des groupes de travail gouvernementaux

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Garantir un large socle de financement public de la dépendance, réaffirmer la priorité du maintien à domicile et diminuer le reste à charge des personnes âgées accueillies en établissement. Telles sont les principales pistes ouvertes par les groupes de travail installés en début d’année par la ministre des Solidarités. Présentation détaillée des différents scénarios de réforme avancés, sur la base desquels le président de la République rendra ses arbitrages courant juillet.

Près de 6 mois après leur installation, les quatre groupes de travail nationaux sur la réforme de la dépendance ont remis leurs rapports le 21 juin à Roselyne Bachelot (1). Sur cette base, la ministre a fait ses propositions au président de la République, qui pourra aussi s’appuyer sur les débats qui ont eu lieu dans les départements et les régions, sur deux rapports parlementaires rendus publics sur le sujet (2), sur l’avis du Conseil économique, social et environnemental de juin dernier (3), ainsi que sur le récent avis du Haut Conseil de la famille et le rapport du Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie (voir respectivement encadrés pages 56 et 54).

Les rapports des quatre groupes de travail – « Société et vieillissement », « Perspectives démographiques et financières de la dépendance », « Accueil et accompagnement des personnes âgées en perte d’autonomie », « Stratégie pour la couverture de la dépendance des personnes âgées » – abordent des thématiques parfois très proches et se recoupent donc souvent aussi bien sur leurs constats que sur leurs propositions. Au final, pas vraiment de grandes nouveautés ni de choix très tranchés, mais plutôt un ensemble de recommandations et de scénarios, desquels il ressort toutefois trois pistes d’action qui semblent faire consensus : maintenir, en l’améliorant, le socle actuel de financement public de la dépendance ; réaffirmer la priorité du maintien à domicile avec, pour corollaires, la mise en place d’un véritable parcours coordonné adapté à la personne âgée et une politique de soutien aux aidants familiaux ; réduire le reste à charge des résidents d’établissements.

Nicolas Sarkozy doit rendre ses arbitrages courant juillet. Lors d’une rencontre organisée par l’Association des journalistes de l’information sociale le 27 juin, la ministre des Solidarités et de la Cohésion sociale a évoqué la possibilité que les décisions élyséennes soient ensuite traduites dans « trois types de texte ». Des mesures financières, qui correspondraient à « quatre éléments d’urgence » – le reste à charge trop élevé, les problèmes financiers des services d’aide à domicile et des départements et le soutien aux aidants familiaux –, seraient ainsi introduites dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 et « pourquoi pas dans le projet de loi de finances », deux textes traditionnellement présentés courant septembre. Quant aux mesures organisationnelles, certaines pourraient figurer dans un texte spécifique sur la dépendance « présenté à la rentrée et examiné en fonction du calendrier parlementaire », mais qui, dans tous les cas, sera « abouti sous cette mandature », a assuré Roselyne Bachelot. D’autres pourront faire l’objet d’un plan, par exemple. Enfin, une loi de programmation pourrait être un élément de la campagne présidentielle, a-t-elle ajouté.

I. LE RAPPORT « STRATÉGIE POUR LA COUVERTURE DE LA DÉPENDANCE DES PERSONNES ÂGÉES »

Le groupe de travail confié à Bertrand Fragonard, conseiller maître à la Cour des comptes et président du Haut Conseil de la famille, devait plancher sur des scénarios visant à mieux prendre en charge la perte d’autonomie des personnes âgées classées en groupe iso-ressources (GIR) 1 à 4 et à trouver des sources de financement. Une nécessité au regard des chiffres qu’il avance. En 2010, les dépenses liées à la prise en charge de la dépendance étaient estimées à environ 24 milliards d’euros (4), dont l’essentiel (42 %) étaient des dépenses de soins (5). Près de 70 % de ces dépenses étaient couvertes par la puissance publique, notent les membres du groupe de travail (6). Soulignant que l’Etat prend surtout à sa charge celles relatives à la perte d’autonomie et des soins, les coûts liés à l’hébergement étant souvent assumés par les personnes ou leurs familles. Autre point notable : le taux de couverture est meilleur pour les dépenses à domicile (86 %) qu’en établissement (72 %).

Le groupe de travail propose trois scénarios de réformes possibles : la consolidation du système actuel (scénario n° 1) ; la création d’une assurance universelle, obligatoire et gérée par répartition (scénario n° 2) ; l’instauration du principe d’une assurance privée obligatoire (scénario n° 3). Toutefois, considérant que la France est dotée d’un « socle puissant de couverture de la dépendance », sa préférence va à la consolidation du système existant tout en le rendant « plus juste et plus efficient ».

A. CONSOLIDER LE SYSTÈME ACTUEL (SCÉNARIO N° 1)

Dans leur premier scénario, les membres du groupe de travail proposent d’améliorer la couverture publique de la dépendance, tant à domicile qu’en établissement. Cela passerait, en particulier, par une réforme de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) ou encore par le recours à de nouvelles recettes financières.

1. INSTAURER UN GAGE PATRIMONIAL POUR L’APA À DOMICILE

Dans leurs rapports de 2008 et de 2011 (7), les sénateurs (UMP) Alain Vasselle et Philippe Marini ont préconisé de moduler l’APA à domicile en fonction du patrimoine du bénéficiaire, rappelle le groupe de travail « Fragonard ». Concrètement, il s’agirait, à partir d’un certain montant de patrimoine, estimé entre 150 000 et 200 000 €, de proposer aux bénéficiaires de l’APA à domicile de faire le choix entre :

 une aide à taux plein, sous réserve d’accepter que les sommes versées soient récupérées sur leur succession dans la limite de 20 000 € ;

 une aide partielle s’ils ne souhaitent pas que leur patrimoine soit engagé.

Les économies réalisées sont estimées entre 0,8 et 1,3 milliard d’euros, indique le groupe de travail, tout en relevant l’existence d’« hypothèses plus prudentes [qui] conduisent à retenir un rendement plus faible ». Aussi rappelle-t-il une « alternative » proposée par le rapport « Rosso-Debord » (8) qui « consisterait en un régime commun d’option pour l’APA en établissement et à domicile ». Concrètement, la solution de la députée (UMP) entend, à partir d’un patrimoine de 100 000 €, proposer au demandeur de faire le choix enre une APA à taux plein à condition d’accepter une récupération des sommes versées sur sa succession plafonnée à 20 000 € ou une APA à taux réduit, sans reprise sur succession.

Mais, de l’avis même des membres du groupe de travail, « une telle évolution n’est pas souhaitable ».

2. RÉFORMER L’APA À DOMICILE

En 2010, 727 000 personnes bénéficiaient de l’APA à domicile, pour un coût total de 3,4 milliards d’euros. Cette prestation a connu un taux de croissance annuel moyen de 12,8 % sur la période 2002-2010 notamment du fait de l’augmentation du nombre de personnes relevant du GIR 4 (+ 10,7 % en moyenne annuelle, contre + 4,4 % en établissement). En outre, en 2007, 26 % des plans d’aide étaient saturés, c’est-à-dire d’un montant égal au plafond, la saturation de ces plans étant supérieure pour les personnes en GIR 1 et 2 (respectivement 44 % et 36 %). Pour le groupe de travail, « ce phénomène de “saturation” pourrait suggérer, pour certaines catégories de GIR, que le calibrage de l’APA ne permet pas de financer toutes les aides à domicile ». Aussi propose-t-il plusieurs pistes de réforme « afin d’assurer plus longtemps l’exercice effectif du libre choix » entre le maintien à domicile et le placement en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD).

a. Augmenter les plafonds des plans d’aide

Si les plans d’aide sont saturés, c’est parce qu’ils sont « insuffisants au regard des besoins », estime le groupe de travail. Il suggère donc de relever les plafonds d’aide selon trois modalités :

 selon le GIR. Coût de la mesure : 365 millions d’euros pour une augmentation homogène de 50 % des plafonds, 300 millions pour une hausse différenciée (50 % en GIR 1, 40 % en GIR 2, 30 % en GIR 3 et 20 % en GIR 4), 170 millions pour une hausse de 50 % des seuls GIR 1 et 2 et 138 millions pour une augmentation de 50 % du GIR 1 et de 30 % du GIR 2 ;

 pour les seules personnes isolées. « Ce ciblage serait cohérent avec la forte fréquence des plans saturés des allocataires isolés », souligne Bertrand Fragonard. Coût estimé : environ 270 millions d’euros pour une hausse de 50 % de tous les GIR ;

 pour les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer. La dépense publique pourrait s’établir entre 110 et 365 millions d’euros en cas de relèvement du plafond de 50 %.

Au-delà, le groupe de travail recommande de faire évoluer les plafonds de façon à « être plus conformes avec la réalité de l’évolution des facteurs ». En effet, explique-t-il, « les plafonds étant revalorisés comme les prix, le maintien de cette règle pourrait conduire de nouveau à une augmentation de la fréquence de la saturation des plans d’aide ». Afin de l’éviter, les membres avancent deux solutions, avec une préférence pour la première qu’ils jugent « plus logique et cohérente » :

 indexer les plafonds sur les salaires ;

 maintenir l’indexation des nouveaux plafonds sur les prix et évaluer de nouveau la situation dans 5 ans.

Le groupe de travail estime enfin opportun d’étudier la possibilité de « moduler les plafonds par zones géographiques pour tenir compte de la relative hétérogénéité des coûts d’intervention selon les territoires ».

b. Diminuer le taux d’effort dans les GIR élevés

« Actuellement, la participation du bénéficiaire de l’APA augmente, d’une part, avec son revenu et, d’autre part, avec le montant de son plan, qui augmente lui-même avec son GIR », relève le groupe de travail, qui demande « qu’on abaisse le taux d’effort au moins pour les GIR 1 et 2 ».

c. Elargir les dépenses éligibles dans les plans d’aide

Rejoignant le groupe de travail « Société et vieillissement » (voir page 59), Bertrand Fragonard propose notamment que les plans d’aide prennent mieux en compte les dépenses d’aménagement du logement. Pour les GIR 1 à 4, la responsabilité de ces aménagements pourrait être confiée aux caisses de retraite ou aux départements. Si tel était le cas, précise l’auteur, « il faudrait explorer des pistes spécifiques d’aménagement de la gestion de l’APA », telles que :

 augmenter la durée – aujourd’hui de 4 mois – pendant laquelle une dépense d’aménagement du logement peut être incluse dans le plan ;

 étudier un système dans lequel le département ferait l’avance des frais qui seraient amortis sur l’APA, pour une durée légèrement supérieure à 4 mois.

3. RÉDUIRE LE RESTE À CHARGE EN EHPAD

« Les restes à charge élevés subis par les personnes dépendantes en établissement appellent un renforcement de l’aide publique », estime Bertrand Fragonard, qui avance plusieurs pistes en ce sens.

a. Modifier la tarification des EHPAD

Parallèlement à la mise en œuvre d’ actions visant à diminuer le tarif des EHPAD, via notamment des gains de productivité, certains membres du groupe de travail « Fragonard » proposent de modifier la répartition des charges entre les trois sections tarifaires (hébergement, soins, dépendance), rejoignant ainsi certaines préconisations du groupe de travail « Accueil et accompagnement des personnes âgées » (voir page 57). L’idée avancée serait de :

 rectifier le périmètre actuel des sections tarifaires afin d’obtenir une répartition plus conforme à la nature des dépenses ;

 alléger le reste à charge des familles, en transférant des masses financières significatives des sections les moins socialisées (hébergement et dépendance) vers la section la mieux socialisée (soins) (9).

Cette proposition soulève toutefois des difficultés techniques détaillées en annexe 8 du rapport, qui pourraient notamment se traduire par une augmentation de la dépense à la charge de l’assurance maladie et, dans une moindre mesure, des départements, alertent les membres.

b. Augmenter l’allocation de logement en EHPAD et en USLD

Pour permettre une réduction ciblée des restes à charge, le groupe de travail propose d’augmenter l’allocation de logement en EHPAD et en unité de soins de longue durée (USLD). Plus précisément, il préconise :

 de n’entamer la baisse de la prestation qu’au niveau de l’allocation de solidarité aux personnes âgées (742,27 € par mois pour une personnes seule et 1 181,77 € pour un couple en 2011) ;

 de relever le point de sortie de l’aide au niveau de revenu où la prestation est inférieure à 15 € par mois, ce qui accroîtrait le nombre des bénéficiaires des classes moyennes. Ce point de sortie s’établirait ainsi à 1 700 € par mois, contre actuellement 1 220 € pour l’aide personnalisée au logement et 940 € pour l’allocation de logement sociale.

Toutefois, estiment les membres, « afin d’éviter que la nouvelle aide ne soit captée par les établissements via des augmentations de tarif, le nouveau barème pourrait être subordonné à une convention tarifaire ».

c. Instaurer un « bouclier-dépendance »

« Même si une éventuelle réforme de l’aide à l’hébergement diminuait les charges des résidents, un certain nombre de ménages continueront de subir des restes à charge élevés en cas de durée de séjour “anormalement” longue par rapport à la moyenne » (10), estiment certains membres du groupe de travail, qui préconisent donc l’instauration d’un mécanisme de « bouclier » afin de limiter les dépenses exposées des résidents, un mécanisme selon eux « pleinement justifié et cohérent avec notre modèle de protection sociale ». D’autres y sont toutefois réticents au motif que cette mesure pourrait « affecter de façon négative les comportements d’épargne et d’assurance ».

Plusieurs types de mécanismes pourraient concourir à mettre en œuvre ce bouclier. Quel que soit le mécanisme retenu, « il posera des difficultés techniques [et juridiques] de conception et de mise en œuvre importantes, mais non insurmontables », admettent les membres du groupe de travail. Si le gouvernement choisissait de mettre en œuvre ce dispositif, certaines questions préalables devront être traitées, avertissent-ils, au rang desquelles : la nature du risque couvert (les restes à charge ou les durées longues), le lieu de vie et les types de dépenses couverts (au moins sur les dépenses en établissement), les limites éventuelles au mécanisme. Sur ce dernier point, le groupe de travail estime qu’« il pourrait ainsi être envisagé de plafonner le “bouclier” en fonction des revenus ou du patrimoine, afin de cibler le mécanisme sur les personnes âgées les plus fragiles, ou en fonction des dépenses couvertes, afin d’éviter que celui-ci ne serve à solvabiliser des dépenses somptuaires en établissement ».

En tout état de cause, insiste Bertrand Fragonard, la mise en place d’un « bouclier-dépendance » ne pourra « pas être indépendante des autres mesures d’amélioration du système actuel, notamment en établissement ».

1. Un mécanisme se déclenchant lorsque le reste à charge dépasse un certain montant exprimé en valeur absolue

L’inconvénient de cette formule, indique le groupe de travail, est qu’elle ne prend pas en compte les ressources (ou le patrimoine) du bénéficiaire potentiel. Elle conduirait en effet à ce que les personnes dépendantes aux revenus les plus élevés soient davantage protégées par le bouclier que les plus modestes (celles-ci atteindraient en effet le montant maximum de reste à charge pour des durées en dépendance beaucoup plus faibles que les classes moyennes).

Cette piste semble avoir été écartée par les membres.

2. Un mécanisme se déclenchant lorsque le reste à charge dépasse une certaine proportion de revenus

Le principe est de considérer, par exemple, qu’une personne âgée dépendante n’ait pas à consacrer plus de N années de son revenu au financement de sa dépendance. « Si un tel mécanisme permettrait de corriger partiellement le défaut du précédent en prenant en compte les ressources du bénéficiaire, reconnaît l’auteur du rapport, cette correction pourrait n’être qu’imparfaite : en effet, pour la dépendance à domicile, il bénéficierait fortement aux personnes ayant les ressources les plus élevées. »

3. Un mécanisme se déclenchant lorsque la durée en dépendance dépasse un certain seuil

Le groupe de travail propose trois modalités, à commencer par la suppression du reste à charge au-delà d’une certaine durée de dépendance, de telle sorte que la personne dépendante n’ait pas besoin de liquider son patrimoine, ou de faire appel davantage à ses enfants. Il conviendrait alors de prévoir une aide égale au reste à charge. Ce mécanisme aurait « l’avantage de la simplicité de mise en œuvre et de la clarté du principe (si la dépendance est un risque assurable par mutualisation qui tolère une participation de la personne dépendante, la dépendance longue est, elle, un risque catastrophique qui doit être intégralement pris en charge par la solidarité nationale) », estiment les membres. Un point noir toutefois : ce mécanisme introduirait « un saut brutal d’un système à l’autre (effet de seuil au-delà d’une certaine durée) ».

Une autre option consisterait à limiter de façon relative le reste à charge dans la durée. Ainsi, explique le groupe de travail, « au-delà d’une certaine durée de dépendance, le reste à charge pourrait être plafonné (mais non annulé), de façon à ce que la personne dépendante n’ait besoin de faire appel à une ponction supplémentaire sur son patrimoine ou à ses enfants que pour une partie de son reste à charge. L’aide serait alors inférieure [à ce dernier] ».

Dernière option : éteindre progressivement le reste à charge avec la durée de dépendance. « Par exemple, précise le groupe de travail, le reste à charge pourrait être divisé par le nombre d’années en dépendance au-delà d’une certaine durée. » Cette solution maintiendrait les principes actuels de variation du reste à charge en fonction des revenus, mais en le diminuant pour tous selon la même proportion, de façon progressive avec la durée en dépendance.

4. MIEUX RÉGULER LES CONTRATS D’ASSURANCE DÉPENDANCE

Pour le groupe de travail, l’assurance dépendance doit rester un mode de financement complémentaire à l’aide publique. Le gouvernement pourrait chercher à « faciliter leur développement en s’assurant que les contrats sont réellement protecteurs des intérêts des souscripteurs ». Dans tous les cas, estiment ses membres, la création d’une incitation fiscale à la souscription à ces contrats (crédits d’impôts) devrait être écartée car très coûteuse pour les finances publiques.

a. Assurer la stabilité des critères d’évaluation de la dépendance

L’Etat doit, entre autres, s’attacher à garantir « la robustesse et la stabilité des critères d’évaluation de la dépendance ». Cela pourrait passer par l’« adoption d’une grille, reposant sur des indicateurs exogènes et objectivés, par tous les acteurs de l’évaluation de la dépendance ». Une grille qui devra être stabilisée sur une longue période. En outre, la stabilité de ces critères pourrait être assurée par une « opposabilité des évaluations du conseil général aux assureurs ».

b. Créer un label public

« La trop forte diversité des contrats actuels, ainsi que certaines faiblesses dans la protection des assurés sont une limite au développement des contrats d’assurance dépendance », estiment les membres du groupe. Pour y remédier, ils recommandent de définir une garantie socle dans ces contrats, qui pourrait prendre la forme d’une labellisation publique. Labellisation qui permettrait de « s’assurer d’une qualité d’offre minimale, réellement protectrice des souscripteurs ».

c. Garantir un mode protecteur de revalorisation des rentes

Selon le rapport, « compte tenu de la durée des contrats d’assurance-dépendance, les méthodes de revalorisation des rentes sont fondamentales pour assurer un maintien de leur pouvoir d’achat ». Aussi souligne-t-il que, « a minima, une indexation sur les résultats techniques des contrats peut être envisagée ». « Une indexation plus dynamique serait sans doute souhaitable, avouent les membres du groupe, puisque les coûts de la dépendance évoluent, sur le moyen terme, comme les salaires et non comme l’inflation. » Mais, une telle indexation est, de l’avis des assureurs, impossible en l’état actuel de la législation. En revanche, estime le groupe de travail, « le principe d’une indexation offrant un taux fixe (par exemple, 1,8 % par an) et/ou d’une participation aux résultats techniques et financiers pourrait être adopté ».

Par ailleurs, le mode de revalorisation des cotisations pourrait être encadré afin d’éviter des modifications trop importantes d’une année sur l’autre. « Par exemple, indique le groupe de travail, un plafond annuel d’augmentation pourrait être institué. »

5. S’ASSURER DE L’OUVERTURE DES DROITS SOCIAUX EN MARGE DE L’APA

Afin de s’assurer d’une complète prise en charge des personnes dépendantes, le groupe de travail demande que les services instructeurs de l’APA vérifient « systématiquement » qu’elles bénéficient d’une aide au logement, de la couverture maladie universelle complémentaire ou de l’aide à l’acquisition d’une couverture complémentaire santé, ou encore de l’allocation de solidarité aux personnes âgées.

6. TROUVER DES RECETTES SUPPLÉMENTAIRES

Au-delà des mesures présentées ci-dessus, le groupe de travail indique qu’il faut trouver de nouvelles sources de financement. Il propose notamment :

 comme le Conseil économique, sociale et environnemental (11), une taxe sur les mutations à titre gratuit (donations, successions…). Au taux de 1 %, son rendement peut être évalué à 1,5 milliard d’euros ;

 l’extension de la journée de solidarité ;

 l’alignement de la contribution sociale généralisée (CSG) applicable aux retraités (6,6 %) sur celle des actifs (7,5 %). Une proposition accueillie favorablement par une « très grande majorité des membres du groupe », souligne le rapport ;

 l’imposition des majorations de retraite attribuées aux familles nombreuses. Sur la base d’un taux de 10 %, cette mesure pourrait rapporter 750 millions d’euros ;

 la suppression de la réduction de l’impôt sur le revenu des personnes dépendantes au titre de leurs dépenses d’hébergement et de dépendance. Aux yeux des membres, cette mesure – qui dégagerait une économie de 175 millions d’euros – paraît justifiée au motif qu’elle « ne bénéficie qu’aux ménages les plus aisés, pour une valeur unitaire moyenne de 46 € et une perte maximale de 208 € par mois ».

B. CRÉER UNE ASSURANCE UNIVERSELLE, OBLIGATOIRE ET GÉRÉE PAR RÉPARTITION (SCÉNARIO N° 2)

Certains membres du groupe de travail souhaitent que le risque « dépendance » soit intégré dans la sécurité sociale et géré par la branche maladie, ce qui correspond à la notion de « cinquième risque ». Ils estiment en effet que ce dispositif pourrait « permettre une gestion mieux intégrée de l’offre de soins et de services dès lors que les prestations sont “dans la même main” », de « réduire les disparités locales de pratique, tant en matière d’attribution de la prestation que de disponibilité de l’offre » et d’« éviter qu’on adopte des plans d’aide inférieurs aux besoins ».

Concrètement, il s’agirait de créer une « assurance universelle, obligatoire et gérée par répartition » en faveur de tous les assurés, quels que soient leur âge et leur état de santé. En contrepartie, ces derniers devraient s’acquitter de cotisations proportionnelles à leurs revenus. La plupart des membres ayant avancé ce scénario souhaite que la nature de la prestation à domicile mise en œuvre dans ce cadre reste proche de celle de l’APA. Ils plaident donc pour une « prestation personnalisée et non pour une rente uniforme », prestation « qui soit le support d’un accompagnement social des personnes dépendantes et de leurs proches » et « dont l’usage serait orienté vers des intervenants qualifiés avec un contrôle de l’emploi des sommes versées ». Tous s’accordent aussi pour que la prestation ne donne lieu ni à récupération sur succession ni à un recours à l’obligation alimentaire.

En matière de gouvernance, le groupe de travail estime que les caisses de sécurité sociale devraient jouer un rôle central dans la gestion du dispositif, en lien avec la caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA).

C. INSTAURER LE PRINCIPE D’UNE ASSURANCE PRIVÉE OBLIGATOIRE (SCÉNARIO N° 3)

Autre scénario étudié par le groupe de travail : celui d’une « assurance privée universelle, obligatoire et en capitalisation ». Cette assurance aurait vocation à se substituer aux prestations publiques destinées aux personnes âgées dépendantes ou, du moins, à une partie très substantielle de ces prestations. Les personnes âgées seraient protégées par une rente servie par les assureurs, qui serait d’un montant suffisant pour garantir des prestations de qualité. Pour cela, elles devraient cotiser entre un âge plancher de souscription (l’âge de 40 ou 50 ans est fréquemment évoqué) et un âge maximal à l’adhésion (souvent 70 ans). La cotisation serait librement fixée par l’assureur, indépendante du revenu et proportionnelle au montant de la rente payée en cas de dépendance. Quant à la rente, dans le scénario central présenté par le groupe de travail, elle couvrirait tous les assurés relevant des GIR 1 à 4 (alors que les contrats actuels ne concernent le plus souvent que les GIR 1 et 2), varierait avec le GIR et serait supérieure au montant moyen de l’APA actuel (700 € par mois en GIR 1 et 2, 475 € en GIR 3 et 300 € en GIR 4). Elle aurait un caractère libératoire, assurant ainsi une liberté de choix à la personne dépendante ou à sa famille : soit rester à domicile ou aller en institution (rente identique) ; soit percevoir une partie de la rente (ou la totalité en numéraire) et une partie sous forme des services (ou encore la totalité de la rente convertie en services). Au final, dans le scénario central du groupe de travail, « une cotisation de 33 € par mois souscrite à 50 ans ouvrirait un droit à une rente comprise entre 300 € et 700 €. »

Une aide à la souscription à ce type d’assurance pourrait être ici justifiée, selon le rapport : « elle varierait, pour un niveau de rente donné, avec le revenu et, le cas échéant, serait croissante selon l’âge à la souscription ».

II. LE RAPPORT « ACCUEIL ET ACCOMPAGNEMENT DES PERSONNES ÂGÉES EN PERTE D’AUTONOMIE »

Piloté par Evelyne Ratte, conseiller maître à la Cour des comptes, le groupe de travail « Accueil et accompagnement des personnes âgées en perte d’autonomie » a planché sur les thèmes suivants : l’état des lieux de l’offre d’hébergement et du secteur de l’aide à domicile ; le parcours coordonné de la personne âgée en perte d’autonomie ; les perspectives en termes de programmation et de planification de l’offre ; la qualité de l’accueil et de l’accompagnement ; la politique tarifaire et l’évolution des coûts de prise en charge. Au final, ses orientations, dont toutes ne font pas consensus, s’organisent autour des « idées simples » suivantes :

 le dispositif doit avoir pour axe « le parcours de vie » des personnes concernées ;

 la règle doit être le respect du libre choix de la personne, ce qui induit la préférence donnée au maintien à domicile, compte tenu des souhaits des Français de rester à domicile le plus longtemps possible ;

 si les coûts médicaux et d’aide à la personne sont correctement couverts, ceux de l’hébergement restent trop élevés pour beaucoup ;

 à quelques ajustements près, l’offre quantitative est à la mesure du problème. L’effort principal est à porter sur la qualité du service rendu et l’efficience du dispositif. L’urgence n’est donc pas de créer, mais de mieux organiser et de mieux piloter.

A. ORGANISER ET AMÉLIORER L’OFFRE DE SERVICE

Certes, relève le rapport, « les politiques publiques menées ces 20 dernières années ont fortement renforcé la solidarité en faveur des personnes âgées en perte d’autonomie, tant par la mise en place de mécanismes de solvabilisation (APA, dépenses fiscales) que par l’augmentation et la diversification de l’offre de soins et de services d’accueil et d’accompagnement ». Mais ces efforts ne doivent pas « occulter les problématiques restantes et à venir », telles que :

 la complexité et les difficultés de pilotage et de régulation que connaît le secteur de l’aide à domicile ;

 l’adaptation de l’offre de service aux besoins futurs, dans un contexte de fort vieillissement de la population et de changement culturel générationnel ;

 l’insuffisance de la coordination des acteurs du champ de la dépendance autour de la personne âgée, notamment entre le secteur sanitaire et le secteur médico-social. Une situation qui pèse sur la qualité de la prise en charge et sur les coûts de celle-ci ;

 le taux d’encadrement tant en établissement qu’à domicile.

1. L’ACCOMPAGNEMENT À DOMICILE

a. Mieux informer les personnes âgées et leurs familles

Pour améliorer l’accompagnement à domicile des personnes âgées en perte d’autonomie, le groupe de travail recommande :

 de réaffirmer le principe du libre choix de l’intervenant, mais d’éclairer ce choix par la mise en place d’un système d’information rendu public. Il ne peut être question, selon le rapport, d’imposer à la personne âgée dépendante un intervenant ou un type de service (emploi direct, recours à un service mandataire ou prestataire). « Il faut cependant trouver un équilibre entre la liberté de choix et l’intérêt de la personne âgée en termes de soins et de type d’accompagnement au regard de ses besoins. » Ce qui suppose une bonne information sur les coûts et les prestations offertes. Pour cela, estime le

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