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La loi de simplification et de clarification du droit

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Reconnaissance des PACS conclus à l'étranger, déclenchement d'office du solde bancaire insaisissable, dématérialisation du bulletin de paie... La loi du 12 mai 2009 tend à simplifier de nombreuses démarches pour les citoyens et les entreprises. Mais elle aménage aussi sur plusieurs points la législation relative à la protection juridique des personnes vulnérables et comporte des dispositions spécifiques aux établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux.

Le Parlement a définitivement adopté, le 28 avril dernier, la proposition de loi de simplification et de clarification du droit et d'allégement des procédures, portée par le député (UMP) Jean-Luc Warsmann. Déjà, en décembre 2007, une première loi de simplification du droit née d'une initiative parlementaire avait vu le jour (1). Et, sous la précédente législature, ce sont deux autres lois du même type, mais d'origine gouvernementale, qui avaient été votées (2).

La loi « Warsmann » a été élaborée notamment « grâce aux contributions des citoyens » qui ont été transmises par la voie du site Internet http://simplifionslaloi.assemblee-nationale.fr, mis en place en septembre 2007 par la commission des lois de l'Assemblée nationale, et par de nombreux courriers, explique son exposé des motifs. Contributions qui ont mis en évidence de nombreuses difficultés d'interprétation ou d'application de certains textes. Jean-Luc Warsmann a par ailleurs mené des consultations auprès d'institutions, telles que le médiateur de la République, ainsi qu'auprès de représentants d'associations et de professionnels. Il a aussi travaillé en collaboration avec le gouvernement « pour permettre de faire adopter [...] un certain nombre de mesures dont les démarches engagées depuis juin 2007 de révision générale des politiques publiques et de mesure et réduction des charges administratives ont révélé la nécessité et parfois l'urgence », explique le rapporteur de la loi à l'Assemblée nationale, Etienne Blanc (Rap. A.N. n° 1145, Blanc, page 11).

Très amendé au cours de son examen parlementaire, le texte est passé de 49 à 140 articles, regroupés autour de quatre axes : des mesures de simplification en faveur des citoyens et usagers des administrations ; des mesures de simplification en faveur des entreprises et des professionnels ; des mesures de simplification des règles applicables aux collectivités territoriales et aux services publics ; des dispositions de clarification du droit en matière pénale.

Présentation des principales dispositions de la loi.

I. LES SIMPLIFICATIONS EN FAVEUR DES CITOYENS ET DES USAGERS

A. LA RECONNAISSANCE DES PACS CONCLUS À L'ÉTRANGER (ART. 1 DE LA LOI)

Jusqu'à présent, en France, il était impossible de se prévaloir d'un partenariat civil enregistré à l'étranger. En effet, le code civil français ne contenait aucune disposition permettant d'apprécier la validité des partenariats civils conclus à l'étranger et l'étendue de leurs effets sur le territoire français. Les intéressés étaient alors obligés de le rompre pour pouvoir signer un pacte civil de solidarité (PACS) en France et bénéficier des droits afférents. Aussi, sur la recommandation du médiateur de la République (3), la loi prévoit-elle désormais que les conditions de formation et les effets d'un pacte enregistré, ainsi que les causes et les effets de sa dissolution, sont soumis aux règles de l'Etat de l'autorité qui a procédé à son enregistrement (code civil [C. civ.], art. 515-7-1 nouveau). Ainsi, illustre Etienne Blanc, rapporteur de la loi à l'Assemblée nationale, « si un Français et un Belge souscrivent un partenariat au consulat de Belgique à Londres, c'est la loi belge et non les lois française ou britannique qui sera applicable ». Toutefois, précise-t-il, « conformément aux règles de droit international privé, la loi étrangère ainsi désignée sera écartée si elle est contraire à l'ordre public français » (Rap. A.N. n° 1578, Blanc, page 18).

A noter : s'agissant d'une règle de conflit de lois de portée générale, cette nouvelle disposition ne s'appliquera pas dans les matières soumises à des règles de conflit spéciales, comme par exemple en matière de succession, d'obligation alimentaire ou de filiation, explique le rapporteur (Rap. A.N. n° 1578, Blanc, page 18).

B. L'EXTENSION DES COMPÉTENCES DU JAF EN MATIÈRE DE DIVORCE ET DE SÉPARATION (ART. 14)

A l'heure actuelle, une fois le divorce prononcé par le juge aux affaires familiales (JAF), c'est le tribunal de grande instance qui est compétent pour connaître du contentieux relatif à la liquidation du régime matrimonial des époux. Reprenant une proposition du rapport « Guinchard » sur la répartition des contentieux (4), la loi confie au JAF la suite de la procédure de divorce qu'est la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux, ainsi que, dans un souci de cohérence, les autres procédures attachées au régime matrimonial comme, notamment, le changement de régime matrimonial nécessitant l'intervention du juge. Par analogie, le JAF se voit aussi confier le contentieux relatif au fonctionnement et au partage des indivisions entre concubins ou entre partenaires liés par un PACS.

Ainsi, pour les demandes en justice formées à compter du 1er janvier 2010, le juge aux affaires familiales connaîtra (code de l'organisation judiciaire, art. L. 213-3 modifié) :

de l'homologation judiciaire du changement de régime matrimonial, des demandes relatives au fonctionnement des régimes matrimoniaux et des indivisions entre personnes liées par un PACS ou entre concubins, de la séparation de biens judiciaire, sous réserve des compétences du président du tribunal de grande instance et du juge des tutelles des majeurs ;

du divorce, de la séparation de corps et de leurs conséquences, de la liquidation et du partage des intérêts patrimoniaux des époux, des personnes liées par un PACS et des concubins, sauf en cas de décès ou de déclaration d'absence. Dans ces deux derniers cas, il est apparu en effet « plus cohérent de confier au tribunal de grande instance, appelé à connaître du règlement de la succession, le soin de procéder au préalable à la liquidation et au partage des intérêts patrimoniaux du couple » (Rap. Sén. n° 209, Saugey, page 79) ;

des actions liées :

- à la fixation de l'obligation alimentaire, de la contribution aux charges du mariage ou du PACS et de la contribution à l'entretien et à l'éducation des enfants,

- à l'exercice de l'autorité parentale,

- à la révision de la prestation compensatoire ou de ses modalités de paiement,

- au changement de prénom.

L'objectif de ces dispositions « est que le juge aux affaires familiales connaisse l'ensemble des conséquences patrimoniales du divorce qu'il prononce. Etant compétent sur l'ensemble de la procédure, il pourra ainsi mieux prévenir les conflits postérieurs au prononcé du divorce » (Rap. A.N. n° 1578, Blanc, page 28). « On peut également attendre de ce transfert une gestion plus rationnelle et efficace des dossiers, qui pourront être suivis par le même magistrat d'un bout à l'autre de la procédure », souligne le rapporteur au Sénat, Bernard Saugey (Rap. Sén. n° 209, Saugey, page 79).

C. LA RÉCEPTION ET L'ENREGISTREMENT DES DÉCLARATIONS DE NATIONALITÉ FRANÇAISE (ART. 12)

1. LES DÉCLARATIONS DE NATIONALITÉ FRANÇAISE HORS MARIAGE

Suivant l'une des préconisations du rapport « Guinchard » sur la répartition des contentieux (5), la loi transfère, à compter du 1er janvier 2010, du juge d'instance au greffier en chef du tribunal d'instance la réception et l'enregistrement des déclarations d'acquisition de la nationalité française hors mariage souscrites en France (6). Le greffier en chef sera donc aussi chargé de refuser d'enregistrer les déclarations qui ne satisfont pas aux conditions légales. Les formes suivant lesquelles ces déclarations sont reçues sont déterminées par décret en Conseil d'Etat (C. civ., art. 26, 26-1 et 26-3 modifiés).

Pour Bernard Saugey, rapporteur de la loi au Sénat, la réforme est « cohérente » dans la mesure où « les greffiers en chef ont [déjà] la charge de la constitution des dossiers de déclaration [et où], depuis 1996 [...], ils sont compétents pour la délivrance des certificats de nationalité française » (Rap. Sén. n° 209, Saugey, pages 69 et 70). Cette « centralisation entre les mains du greffier en chef de la souscription et de l'enregistrement de la déclaration permettra aux usagers d'avoir un interlocuteur unique et une prise de décision plus rapide ». En outre, « le juge d'instance se recentrera sur son activité juridictionnelle, et le greffier en chef dans les tribunaux d'instance verra sa compétence en droit de la nationalité renforcée » (Rap. A.N. n° 1145, Blanc, page 39).

2. LES DÉCLARATIONS DE NATIONALITÉ FRANÇAISE SOUSCRITES EN RAISON DU MARIAGE

Reprenant encore une recommandation du rapport « Guinchard », la loi transfère du juge d'instance aux préfectures le soin de recevoir les dossiers de déclaration d'acquisition de la nationalité française par mariage. Ainsi, à compter du 1er janvier 2010, les déclarations de nationalité souscrites en France en raison du mariage avec un conjoint français seront reçues par le représentant de l'Etat dans le département (7) (C. civ., art. 26 modifié). « Actuellement en effet, les greffes des tribunaux d'instance sont chargés de recevoir la déclaration, de constituer le dossier, de commander les enquêtes, d'adresser le dossier complet à la sous-direction de l'accès à la nationalité française du ministère de l'Immigration, de l'Intégration, de l'Identité nationale et du Développement solidaire, qui prend seule la décision d'enregistrement des déclarations et assume la responsabilité des enquêtes qui s'y rapportent, puis, au retour de la déclaration, de la notifier à l'intéressé. Les enquêtes sont réalisées par les préfectures : elles consistent en un entretien avec les époux, un test de langue, parfois des visites domiciliaires. Il paraît donc cohérent de donner compétence [à ces dernières] pour constituer les dossiers. Ainsi, les conjoints de Français n'auront plus à se déplacer en plusieurs lieux différents » (Rap. Sén. n° 209, Saugey, pages 70 et 71).

Les déclarations de nationalité française par le mariage continueront, en revanche, à être enregistrées par le ministre chargé des naturalisations (C. civ., art. 21-2, al. 4 supprimé et art. 26-1 modifié).

D. L'ORGANISATION DE LA COUR NATIONALE DU DROIT D'ASILE (ART. 15)

La loi tend à renforcer la professionnalisation des juges de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA), « dans le prolongement de la proposition du Premier ministre, inscrite dans la loi de finances pour 2009, de créer 10 postes de magistrats permanents ». Cette professionnalisation « doit permettre d'améliorer la cohérence des activités de la cour et de réduire les délais de jugement », explique Etienne Blanc, soulignant qu'« un délai d'un mois dans le traitement des demandes d'asile coûte environ 13 millions d'euros, qui correspondent aux frais d'hébergement et de prise en charge des demandeurs d'asile » (Rap. A.N. n° 1578, Blanc, page 29).

Pour mémoire, la CNDA est une juridiction administrative chargée de statuer sur les recours formés par les demandeurs d'asile contre les décisions prises à leur encontre par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides. Elle est organisée en sous-sections dont les membres, y compris leur président, ne sont pas affectés à titre permanent auprès de la cour mais apportent ponctuellement leur collaboration, selon une fréquence variable. « Sans remettre entièrement en cause ce mode de fonctionnement », il est apparu souhaitable aux parlementaires, soutenus par le gouvernement, « que certains des présidents de section puissent être affectés de façon permanente auprès de la cour, afin d'être à même, au-delà de la présidence d'audiences, de participer à la vie collective, juridique et administrative de cette juridiction » (Rap. A.N. n° 1578, Blanc, page 30). La loi prévoit ainsi que, parmi les personnes qui peuvent être nommées présidents de section à la CNDA, seuls les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, ainsi que les magistrats de l'ordre judiciaire en détachement, peuvent être désignés président de section de la Cour à titre permanent, pour une durée de 3 ans, renouvelable une fois (code de justice administrative, art. L. 234-3 et L. 233-5 modifiés).

E. LA DÉSIGNATION D'UN TGI SPÉCIALISÉ EN MATIÈRE D'ADOPTION INTERNATIONALE (ART. 17)

Reprenant, là encore, une proposition du rapport « Guinchard » (8), la loi prévoit que des tribunaux de grand instance (TGI) spécialement désignés connaissent des actions aux fins d'adoption ainsi que des actions aux fins de reconnaissance des jugements d'adoption rendus à l'étranger, lorsque l'enfant résidant habituellement à l'étranger a été, est ou doit être déplacé vers la France (code de l'organisation judiciaire, art. L. 211-12 nouveau).

A l'initiative de cette disposition, le rapporteur Etienne Blanc rappelle que « le dispositif actuel de l'adoption internationale est essentiellement articulé autour de la compétence du procureur de la République de Nantes et du tribunal de grande instance du domicile des adoptants. Le procureur de la République de Nantes dispose d'une compétence exclusive pour ordonner la transcription directe des jugements étrangers d'adoption plénière sur les registres du service central de l'état civil du ministère des Affaires étrangères [...]. Le tribunal de grande instance du domicile des candidats à l'adoption est compétent pour prononcer l'adoption simple ou plénière de tout mineur, qu'il soit étranger ou français. Il peut également prononcer l'adoption simple d'un majeur étranger ou reconnaître les effets d'une décision étrangère d'adoption. » Or « on observe ces dernières années que les adoptants pourvus de décisions d'adoption obtenues dans des pays non parties à la convention de La Haye de 1993 sur l'adoption internationale (9) ont tendance à faire abstraction de la décision étrangère, en saisissant directement le tribunal de grande instance de leur domicile d'une nouvelle requête en adoption » (Rap. A.N. n° 1145, Blanc, page 42). « Si l'on peut corréler la diminution du nombre de dossier soumis au parquet de Nantes à la baisse des adoptions internationales, cette évolution s'explique aussi également par une méconnaissance du cadre juridique de l'adoption, voire surtout par une volonté d'éviter le contrôle vigilant de la régularité de l'adoption étrangère par le parquet de Nantes », complète le rapporteur au Sénat, Bernard Saugey (Rap. Sén. n° 209, Saugey, page 82). Etienne Blanc résume ainsi les raisons qui ont poussé les parlementaires à regrouper le traitement des dossiers d'adoption internationale au sein de certaines juridictions (Rap. A.N. n° 1145, Blanc, page 43) :

le nombre et la complexité des législations étrangères applicables, qui impliquent de pratiquer régulièrement la matière afin d'en avoir la maîtrise mais aussi de disposer d'un fonds documentaire suffisant pour puiser les informations nécessaires ;

la technicité de cette matière, notamment en matière d'adoption internationale (règles de conflits de lois, conditions de reconnaissance d'un jugement étranger en France) ;

les fraudes parfois constatées, qui justifient un contrôle accru des parquets locaux sur le contenu et la validité des pièces produites par les adoptants ;

la nécessité d'éviter les divergences de jurisprudence, s'agissant en particulier de l'interprétation des législations étrangères relatives à l'adoption.

« Le regroupement de cette activité au sein d'un tribunal par cour d'appel permettra une rationalisation des moyens par la spécialisation accrue des magistrats chargés de ces procédures, qui aboutira in fine à une plus grande efficacité dans le traitement des dossiers et à l'amélioration de la qualité des décisions rendues au bénéfice du justiciable », ajoute le rapporteur (Rap. A.N. n° 1145, Blanc, page 43).

Il appartiendra au gouvernement de désigner par décret le tribunal de grande instance spécialisé en matière d'adoption internationale dans chaque cour d'appel, précise Bernard Saugey (Rap. Sén. n° 209, Saugey, page 84).

F. LE DÉCLENCHEMENT D'OFFICE DU SOLDE BANCAIRE INSAISISSABLE (ART. 20)

La loi rend automatique le déclenchement du solde bancaire insaisissable (SBI) pour les comptes bancaires faisant l'objet d'une saisie.

Pour mémoire, institué par un décret du 31 juillet 1992 (10), le SBI est la somme minimale qui doit être laissée au détenteur d'un compte bancaire qui fait l'objet d'une saisie. Elle est au plus égale, dans la limite du solde créditeur du compte bancaire faisant l'objet de la mesure de saisie, au montant du revenu minimum d'insertion (RMI) pour une personne seule. Pour en bénéficier, le titulaire du compte doit en faire la demande auprès de l'établissement bancaire dans les 15 jours suivant la saisie. Or, selon une étude du Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie (Credoc) de janvier 2008, le taux de demandes déposées varie de 2 à 15 % des saisies sur compte. Pour le rapporteur Etienne Blanc, « cette sous-utilisation tient à la méconnaissance du dispositif et à l'absence d'automaticité dans le déclenchement de la mesure, notamment en raison des freins culturels qui limitent fortement chez [les populations en situation de précarité sociale] les démarches visant à faire valoir leurs droits. Actuellement, l'information sur le solde bancaire insaisissable est dispensée par l'huissier, qui doit adjoindre le formulaire de demande à l'acte de dénonciation de la saisie. Les obstacles de langue, de lecture et de bonne compréhension d'un acte administratif sont évoqués comme facteurs de non-recours. Les banques, quant à elles, n'ont pas d'obligation légale d'information sur le solde bancaire insaisissable, hormis le fait qu'elles doivent tenir à disposition de leurs clients ce formulaire » (Rap. A.N. n° 1145, Blanc, page 52). Un constat partagé par le médiateur de la République qui, déjà en 2007, proposait donc de « rendre automatique la mise à disposition du solde bancaire insaisissable dès la saisie, sans qu'une demande préalable du titulaire du compte soit nécessaire » (Rap. Sén. n° 209, Saugey, page 87).

Inspirés par cette proposition, les parlementaires ont donc décidé de rendre automatique le SBI. En outre, « l'objet même d'un tel dispositif [étant] de permettre à des personnes physiques de bénéficier de sommes limitées leur permettant d'assurer leur subsistance nonobstant les mesures de saisie pratiquées », ils ont précisé qu'il était limité aux seules personnes physiques (Rap. Sén. n° 209, Saugey, page 88).

Par ailleurs, pour tenir compte de l'entrée en vigueur, le 1er juin prochain, du revenu de solidarité active (RSA), qui remplacera le RMI, ils ont remplacé la référence au RMI par celle au RSA.

Au final, la loi dispose que le tiers saisi, c'est-à-dire l'établissement bancaire, doit laisser à la disposition du débiteur personne physique, dans la limite du solde créditeur du ou des comptes au jour de la saisie, une somme à caractère alimentaire égale au montant forfaitaire de base du RSA pour un allocataire seul (11) (loi n° 91-650 du 9 juillet 1991, art. 47-1 nouveau).

Le rapporteur de la loi au Sénat, Bernard Saugey, explique que, en plaçant ce dispositif à l'article 47-1 de la loi du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution, les parlementaires l'ont rendu applicable à l'ensemble des procédures d'exécution, à savoir celles relevant tant de la procédure civile que des procédures fiscales, et notamment à l'avis à tiers détenteur (12).

G. L'INSAISISSABILITÉ DE LA MAJORATION SPÉCIALE POUR TIERCE PERSONNE DES FONCTIONNAIRES (ART. 44)

La loi rend insaisissable la majoration spéciale pour tierce personne octroyée au fonctionnaire bénéficiaire d'une pension d'invalidité qui est dans l'obligation d'avoir recours de manière constante à l'assistance d'une tierce personne pour accomplir les actes ordinaires de la vie. Elle énonce ainsi que la majoration spéciale versée aux fonctionnaires invalides est insaisissable, sauf pour le paiement des frais d'entretien du bénéficiaire, des rémunérations dues aux personnes assurant son assistance ou des cotisations sociales obligatoires attachées à ces rémunérations (code des pensions civiles et militaires de retraite, art. L. 56 complété).

Ce faisant, elle aligne le régime de la majoration spéciale pour tierce personne des fonctionnaires invalides sur celui de la majoration pour tierce personne versée aux personnes invalides relevant du régime général de la sécurité sociale. En effet, « pour les personnes relevant du régime général, la Cour de cassation considère de longue date, et en l'absence de précisions dans le code de la sécurité sociale, que cette majoration est insaisissable, sauf pour le paiement des frais d'entretien du bénéficiaire. La Haute Juridiction estime que cette majoration n'est pas l'accessoire de la pension d'invalidité - qui, elle, est saisissable - dans la mesure où elle n'a pas pour objet de compenser la perte d'un salaire mais de faire face à une dépense supplémentaire ». En revanche, jusqu'à présent, « pour les personnes relevant du régime des fonctionnaires, cette majoration [était] considérée comme saisissable par les services du Trésor, en l'absence de texte contraire » (Rap. A.N. n° 1145, Blanc, page 52).

H. LES RÈGLES DE COMPÉTENCES JURIDICTIONNELLES EN MATIÈRE DE CMU-C ET D'ACS (ART. 90)

1. POUR LA CMU-C

Jusqu'alors, l'article L. 861-4, IV du code de la sécurité sociale prévoyait que les caisses primaires d'assurance maladie, les mutuelles, les institutions de prévoyance et les sociétés d'assurance pouvaient obtenir le remboursement des prestations de couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C) qu'elles avaient versées à tort. Et que, en cas de précarité de la situation du demandeur, la dette pouvait être remise ou réduite sur décision de l'autorité administrative compétente. Mais « la juridiction compétente pour examiner les contestations susceptibles d'intervenir à l'occasion de l'application de cette disposition n'[était] nulle part précisée. En conséquence de ce silence du texte, les juridictions ont fait application des règles générales de répartition des compétences : les contestations d'indus émanant d'organismes privés (caisses d'assurance maladie et organismes de protection sociale complémentaire) agissant pour leur propre compte relèvent de la compétence des juridictions civiles de droit commun, tandis que les recours contre les décisions de l'autorité administrative relatives aux demandes de remise ou de réduction de dette relèvent de la compétence des tribunaux administratifs », explique le rapporteur Etienne Blanc (Rap. A.N. n° 1145, Blanc, page 89). Dans un souci de bonne administration de la justice et de simplification de l'accès au juge, la loi confie à une seule juridiction la compétence pour se prononcer sur les litiges relatifs au remboursement des prestations versées à tort par les organismes qui versent la CMU-C, ainsi que sur les litiges relatifs aux demandes de remise ou de réduction de dette par les bénéficiaires de prestations indues. Cette juridiction est la commission départementale d'aide sociale, déjà compétente pour se prononcer sur les recours formés contre les refus d'attribution de la CMU-C, en application de l'article L. 861-5 du code de la sécurité sociale (code de la sécurité sociale [CSS], art. L. 861-10, IV modifié).

2. POUR L'ACS

La loi modifie l'article L. 863-3 du code de la sécurité sociale afin d'attribuer expressément à la commission départementale d'aide sociale la compétence pour statuer sur les décisions de refus d'attribution de l'aide à l'acquisition d'une couverture complémentaire santé (ACS).

En application de l'article L. 863-3, la décision accordant le droit à l'ACS est prise par le directeur de la caisse d'assurance maladie dont relève le demandeur. Mais aucun texte ne prévoit quelle est la juridiction compétente en cas de contestation du refus du directeur d'accorder cette aide. Dans une décision en date du 19 mai 2006 (13), le Conseil d'Etat a attribué le contentieux contre les décisions de refus d'attribution de l'ACS aux commissions départementales d'aide sociale, considérant que « la compétence donnée par l'article L. 861-5 du code de la sécurité sociale aux juridictions de l'aide sociale pour connaître des recours contre les décisions prises par l'autorité administrative en matière de [CMU-C] s'étend aux recours contre les décisions par lesquelles cette même autorité se prononce sur les demandes tendant à bénéficier [de l'ACS] au titre des contrats d'assurance complémentaire de santé individuels ».

« En donnant un fondement législatif à cette compétence des commissions départementales d'aide sociale, [la loi] clarifie le dispositif législatif existant et facilitera pour le justiciable l'exercice effectif de son droit d'accès au juge », estime Etienne Blanc (Rap. A.N. n° 1145, Blanc, page 90).

I. L'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MÉDICAUX (ART. 112)

1. REDÉFINITION DES POSTES DE PRÉJUDICE INDEMNISABLES

Issu de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé (14), l'article L. 1142-1 du code de la santé publique énonce que, lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme réalisant des actes de prévention, de diagnostic ou de soins ou encore d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvrent droit à la réparation des préjudices du patient et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables aux actes réalisés, ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'incapacité permanente ou de la durée de l'incapacité temporaire de travail. Afin d'harmoniser les prises en compte des différents postes de préjudice corporel par les commissions régionales ou interrégionales de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux, le législateur a souhaité conférer aujourd'hui « valeur législative aux catégories de préjudices proposées en 2005 par le rapport du groupe de travail présidé par Jean-Pierre Dintilhac chargé d'élaborer une nomenclature des préjudices corporels. Bien que cette nomenclature soit déjà largement utilisée comme référence par les juridictions, les assureurs et les autres instances d'indemnisation des dommages corporels, explique Etienne Blanc, des disparités d'application subsistent en raison des références législatives aux notions aujourd'hui insuffisamment précises de «taux d'incapacité permanente» et d'«incapacité temporaire de travail» » (Rap. A.N. n° 1145, Blanc, page 120).

Ainsi, la loi remplace, dans l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, ces deux notions par celles d'« atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique », de « durée de l'arrêt temporaire des activités professionnelles » et de « durée du déficit fonctionnel temporaire ». Des notions « plus précises, plus protectrices des droits des victimes d'accidents médicaux et plus conformes à la conception actuelle des éléments constituant un dommage », estime Etienne Blanc (Rap. A.N. n° 1145, Blanc, page 120). La loi fait de même dans les articles L. 1142-1-1 (définition des dommages ouvrant droit à réparation au titre de la solidarité nationale) et L. 1142-17-1 (offre d'indemnisation en cas d'aggravation des dommages causés par une infection nosocomiale) du même code.

2. POSSIBILITÉ DE CRÉER PLUSIEURS COMMISSIONS DE CONCILIATION ET D'INDEMNISATION DANS UNE MÊME RÉGION

Pour mieux adapter le dispositif des commissions régionales de conciliation et d'indemnisation (CRCI) aux réalités démographiques, la loi permet la création de plusieurs de ces commissions dans une même région (code de la santé publique [CSP], art. L. 1142-5 modifié).

Pour mémoire, ces commissions sont chargées de faciliter le règlement amiable des litiges relatifs aux accidents médicaux, aux affections iatrogènes et aux infections nosocomiales, ainsi que des autres litiges entre usagers et professionnels de santé, établissements de santé, services de santé ou organismes ou producteurs de produits de santé.

« Certaines régions, notamment l'Ile-de-France, concentrent un grand nombre de demandes, du fait de la démographie régionale : la CRCI francilienne regroupe ainsi 20 % de l'ensemble des demandes d'indemnisation. Tandis que les CRCI se réunissent, au niveau national, en moyenne 9 fois par an, la CRCI d'Ile-de-France s'est réunie à 42 reprises en 2007 », souligne le rapporteur Etienne Blanc. « De cette scission des CRCI les plus chargées résultera pour les usagers une réduction des délais d'examen des demandes, qui sont actuellement de 13 mois en Ile-de-France, alors que la moyenne nationale est de 10 mois », estime-t-il (Rap. A.N. n° 1145, Blanc, page 121).

J. LA MODERNISATION DE LA TERMINOLOGIE JURIDIQUE (ART. 10)

La loi substitue à des mots et des expressions désuets contenus notamment dans le code civil et le code général des impôts « un vocabulaire actualisé et plus facilement compréhensible par les usagers et les justiciables » (Rap. A.N. n° 1145, Blanc, page 32). Ainsi, par exemple :

le mot « succession » est substitué au mot « hérédité » dans les articles 758, 767, 812-2, 898, 1672, 1696 et 1697 du code civil ;

le mot « diverti » est remplacé par le mot « détourné » dans les articles 778 et 1477 du code civil ;

le mot « impenses » est remplacé par le mot « dépenses » dans les articles 815-13, 861, 862 et 2470 du code civil ;

l'expression « habile à » est remplacée par l'expression « capable de » dans l'article 1398 du code civil ;

les expressions « tradition réelle » et « tradition feinte » sont remplacées respectivement par les expressions « remise réelle de la chose » et « remise fictive de la chose » dans les articles 1606

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