« Même si les aménagements de peine se sont fortement accrus depuis 3 ans, une marge importante de progression demeure », estime la chancellerie, qui considère que « l'aménagement de la fin de peine des condamnés est le meilleur outil de lutte contre la récidive ». Aussi, afin d'insuffler une nouvelle dynamique à la politique des aménagements de peine, le projet de loi prévoit-il un certain nombre de dispositions renforçant les possibilités d'y recourir et simplifiant les modalités procédurales de leur prononcé.
Depuis l'entrée en vigueur du nouveau code pénal en 1994, et des réformes qui sont intervenues depuis cette date, plusieurs dispositions incitent les juridictions, en matière correctionnelle, à ne prononcer des peines d'emprisonnement ferme qu'en dernier recours, notamment en exigeant que la peine soit spécialement motivée et en permettant des aménagements dès son prononcé. « Le caractère subsidiaire de l'emprisonnement ferme n'est toutefois pas expressément affirmé par la loi », explique le gouvernement dans l'exposé des motifs. Aussi le projet de loi complète-t-il l'article 132-24 du code pénal afin d'affirmer clairement que, en matière correctionnelle, l'emprisonnement ferme ne doit être prononcé qu'en cas de nécessité, en fonction de la gravité de l'infraction et de la personnalité de son auteur, et lorsque toute autre sanction est inadéquate. Dans ce cas, ajoute-t-il, la peine d'emprisonnement doit, dans la mesure du possible, lorsque les conditions légales le permettent, faire l'objet d'un placement sous surveillance électronique ou d'une des mesures d'aménagement de peine suivantes : semi-liberté, placement à l'extérieur ou fractionnement de la peine.
Le texte entend mieux affirmer le principe de la nécessité des aménagements de peine avant ou au cours de son exécution. Ainsi, il précise que, à l'avenir, les peines seront aménagées non seulement en cours d'exécution - comme le prévoit déjà aujourd'hui l'article 707 du code de procédure pénale - mais aussi avant leur mise à exécution si la personnalité et la situation du condamné ou son évolution le permettent, et notamment s'il justifie « de garanties ou d'un projet sérieux d'insertion ou de réinsertion », indique l'exposé des motifs.
Afin de développer le recours aux aménagements de peine, le projet de loi étend de plusieurs façons les possibilités de recourir, lors du prononcé de la peine, au placement à l'extérieur, au placement sous surveillance électronique ou à la semi-liberté. Tout d'abord, il élargit les critères de recours à ces mesures à l'existence d'un « projet sérieux d'insertion ou de réinsertion ». A l'heure actuelle, en effet, l'article 132-25 du code pénal prévoit que les aménagements de peine peuvent être décidés lors du prononcé de la peine uniquement lorsque le condamné justifie :
soit de l'exercice d'une activité professionnelle, d'un stage ou d'un emploi temporaire, ou encore de son assiduité à un enseignement, à la recherche d'un emploi ou à une formation professionnelle ;
soit de sa participation essentielle à la vie de sa famille ;
soit de la nécessité de suivre un traitement médical.
Par ailleurs, le projet de loi porte de 1 à 2 ans la durée maximale des peines pouvant faire l'objet d'un tel aménagement de peine.
Dans tous les cas, ces dispositions pourront s'appliquer aussi en cas d'emprisonnement partiellement assorti du sursis ou du sursis avec mise à l'épreuve, lorsque la partie ferme de la peine sera inférieure ou égale à 2 ans.
Le projet de loi élargit également les critères d'octroi des libérations conditionnelles, qui pourront aussi être accordées lorsque les condamnés justifient de « tout projet sérieux d'insertion ou de réinsertion ». A l'heure actuelle, selon l'article 729 du code de procédure pénale, elles peuvent être décidées seulement lorsque l'intéressé justifie :
soit de l'exercice d'une activité professionnelle ou de son assiduité à un enseignement, à une formation professionnelle, à un stage ou à un emploi temporaire ;
soit de sa participation essentielle à la vie de sa famille ;
soit de la nécessité de suivre un traitement médical ;
soit de ses efforts en vue d'indemniser ses victimes.
En outre, le texte facilite la libération conditionnelles des personnes âgées de plus de 75 ans, sauf si cette mesure est susceptible de causer un trouble grave à l'ordre public. Le projet de loi les dispense en effet de remplir la condition du temps d'épreuve normalement requis pour bénéficier d'une libération conditionnelle (1). Toutefois, pour pouvoir bénéficier de cette mesure, les condamnés devront apporter la preuve que leur insertion ou leur réinsertion est assurée, ce qui sera le cas, en particulier, s'ils font l'objet d'une prise en charge adaptée à leur situation à leur sortie de l'établissement pénitentiaire ou s'ils justifient d'un hébergement, indique le projet de loi.
Le projet de loi prévoit que, en matière correctionnelle, lorsqu'il reste à subir par la personne condamnée une peine d'emprisonnement inférieure ou égale à 2 ans - et non pas 1 an comme actuellement -, cette peine pourra, pour motif grave d'ordre médical, familial, professionnel ou social, et pendant une période n'excédant pas 3 ans, être suspendue ou exécutée par fractions, aucune de ces fractions ne pouvant être inférieure à 2 jours.
S'agissant plus particulièrement de l'état de santé du détenu, pour l'heure, sauf s'il existe un risque grave de renouvellement de l'infraction, une suspension de peine peut être accordée, quelle que soit la nature de cette peine ou la durée restant à subir, et pour une durée qui n'a pas à être déterminée, aux condamnés dont il est établi qu'ils sont atteints d'une pathologie engageant leur pronostic vital ou que leur état de santé est durablement incompatible avec le maintien en détention (2). Une mesure qui, stipule l'article 720-1-1 du code de procédure pénale, ne peut être ordonnée que si 2 expertises médicales distinctes établissent de manière concordante la gravité de l'état de santé du condamné. Le projet de loi modifie ce dernier point : il prévoit en effet que, en cas d'urgence, lorsque le pronostic vital est engagé, la suspension de peine peut désormais être ordonnée sans expertise, sur la base d'un simple certificat médical établi par le médecin responsable de la structure sanitaire dans laquelle le détenu est pris en charge ou son remplaçant.
Actuellement, selon l'article 712-8 du code de procédure pénale, les décisions modifiant ou refusant de modifier le contenu des mesures d'aménagement de peine, ou des obligations en résultant ordonnées par le tribunal de l'application des peines, sont en principe prises par ordonnance motivée du juge de l'application des peines (JAP), à moins que le procureur de la République demande qu'elles fassent l'objet d'un jugement pris après débat contradictoire.
Le projet de loi modifie cette règle en permettant aux chefs d'établissement pénitentiaire et aux directeurs des services pénitentiaires d'insertion et de probation (SPIP), lorsque le condamné fait l'objet d'un placement à l'extérieur, d'une semi-liberté ou d'un placement sous surveillance électronique, de modifier ses horaires d'entrée ou de sortie, ou de sa présence en un lieu déterminé, dès lors qu'il s'agit de modifications favorables au condamné et ne touchant pas à l'équilibre de la mesure (3). Toutefois, cette possibilité tombe si le JAP, lors du prononcé de la mesure, s'est expressément réservé la possibilité de statuer sur ses modifications.
Le projet de loi donne également la possibilité au JAP ou au tribunal de l'application des peines, lorsqu'ils se prononcent sur l'octroi d'une des mesures d'aménagement de peine prévues aux articles 712-6 et 712-7 du code de procédure pénale (semi-liberté, fractionnement de peine, libération conditionnelle...), et à la demande du condamné, de le relever en tout ou partie, dans le même jugement, d'une interdiction professionnelle résultant de plein droit d'une condamnation pénale ou prononcée à titre de peine complémentaire, interdiction qui peut constituer un frein à un aménagement de peine. Cette mesure évitera ainsi au condamné d'engager une procédure distincte à cette fin, explique l'exposé des motifs.
Cette décision pourra aussi, selon le texte, être prise préalablement à l'octroi d'une mesure d'aménagement de peine afin de permettre ultérieurement son prononcé. Et les juridictions de l'application des peines pourront exclure l'inscription de cette condamnation du bulletin n° 2 du casier judiciaire.
Depuis la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, les articles 723-15 à 723-28 du code de procédure pénale prévoient des procédures spécifiques destinées à faciliter le recours aux aménagements de peine pour les courtes peines d'emprisonnement lorsqu'ils concernent des personnes non encore incarcérées ou des personnes en fin de peine. Le projet de loi réécrit en profondeur ces dispositions afin de rendre leur mise en oeuvre plus aisée et de les étendre à toutes les peines et reliquats de peines inférieurs ou égaux à 2 ans. Dans cet objectif, il institue deux procédures simplifiées d'aménagements de peine, « dont l'objet est de permettre le prononcé de ces mesures en l'absence de débat contradictoire », explique l'exposé des motifs.
Actuellement, et préalablement à la mise à exécution à l'encontre d'une personne non incarcérée d'une condamnation à une peine égale ou inférieure à 1 an d'emprisonnement, ou pour laquelle la durée de la détention restant à subir est inférieure ou égale à 1 an (4), le ministère public communique au JAP, afin de déterminer les modalités d'exécution de la peine, un extrait de la décision accompagné, le cas échéant, de toutes informations utiles. Le projet de loi modifie ces dispositions, en portant de 1 à 2 ans les durées de détention restant à subir pour pouvoir bénéficier d'un aménagement de peine, mais aussi en incluant désormais les services pénitentiaires d'insertion et de probation dans la procédure.
Le condamné sera ainsi convoqué successivement devant le JAP et le SPIP - la saisine de ce dernier n'étant actuellement qu'une possibilité dans des délais qui ne sauraient dépasser respectivement 30 et 45 jours à compter de leur information par le ministère public de l'éventualité d'un aménagement de peine. Objectif : vérifier pendant ce délai la situation matérielle, familiale et sociale du condamné afin de déterminer et de mettre en oeuvre la mesure d'aménagement de peine la mieux adaptée à sa personnalité. Selon l'exposé des motifs, cette disposition devrait permettre une « meilleure articulation et une meilleure coordination dans les interventions du juge et du service ». A l'issue de la convocation, le juge de l'application des peines aura alors trois possibilités :
soit, si la situation de la personne le permet, il ordonne immédiatement, sauf opposition du parquet, sans débat contradictoire, une mesure d'aménagement de peine et en informe le SPIP pour qu'il la mette en oeuvre. Si ce dernier constate qu'il n'est pas possible d'exécuter cette mesure, il en avise immédiatement le juge qui peut alors décider de retirer sa décision, et de faire application des dispositions qui suivent ;
soit il informe le SPIP de la mesure qu'il envisage d'ordonner afin que, avant son prononcé, ce service en prépare l'exécution, le cas échéant en recherchant les moyens permettant de rendre cette mesure réalisable, ou qu'il adresse au juge toutes observations utiles concernant cette mesure ;
soit il demande au SPIP de réaliser ou de poursuivre les vérifications sur la situation matérielle, familiale et sociale du condamné afin de proposer une mesure d'aménagement après avoir recherché les moyens permettant de la réaliser.
Dans ces deux derniers cas, le SPIP, dans un délai fixé par le juge qui ne pourra excéder 2 mois à compter de sa saisine, devra adresser au juge de l'application des peines un rapport motivé qui, selon la demande initiale :
soit précisera les modalités pratiques de la mesure envisagée par le JAP ;
soit comportera une ou plusieurs propositions d'aménagement de peine, le cas échéant, une ou plusieurs obligations et interdictions de l'article 132-45 du code pénal (se soumettre à un traitement médical, s'abstenir de paraître en tout lieu spécialement désigné, réparer en tout ou partie, en fonction de ses facultés contributives, le dommage causé par l'infraction, même en cas d'absence de décision sur l'action civile...) ;
soit indiquera pourquoi la situation du condamné ne permet pas de proposer un aménagement de peine et les raisons qui justifient ce choix.
Si, au vu de ce rapport, le JAP estime devoir prononcer une mesure d'aménagement de peine (semi-liberté, placement à l'extérieur ou sous surveillance électronique, libération conditionnelle), il en informera le procureur de la République et, après avoir le cas échéant convoqué à nouveau le condamné, octroiera cette mesure par jugement, sans qu'il soit nécessaire de procéder à un débat contradictoire. Au contraire, si le juge pense que la mesure est injustifiée, et s'il est saisi d'une demande du condamné, il devra (sans changement) rendre un jugement après un débat contradictoire et après avoir entendu le représentant de l'administration pénitentiaire, le parquet, le condamné et, le cas échéant, son avocat.
A défaut de décision du JAP dans les 4 mois suivant la communication de la copie de la condamnation, le ministère public pourra demander l'exécution de la peine. Même issue si, sauf motif légitime ou exercice des voies de recours, la personne ne se présente pas aux convocations du juge de l'application des peines ou du service pénitentiaire d'insertion et de probation.
Enfin, si le condamné rejette une mesure d'aménagement de sa peine, le juge de l'application des peines pourra fixer une date d'incarcération.
Le projet de loi permet aussi aux détenus condamnés à de courtes peines de bénéficier « dans la mesure du possible, lorsque les conditions en sont remplies », d'une semi-liberté, d'un placement à l'extérieur, d'un placement sous surveillance électronique ou d'une libération conditionnelle selon une procédure simplifiée. Sont concernés les détenus condamnés à une ou des peines d'emprisonnement dont le cumul est inférieur ou égal à 2 ans, ou à 5 ans et dont le reliquat de peine est inférieur ou égal à 2 ans.
En pratique, selon le texte, le directeur du SPIP examinera « en temps utile » le dossier de chacun des condamnés en fin de peine afin de déterminer, après avis du chef de l'établissement pénitentiaire, la mesure d'aménagement de peine la plus adaptée à sa personnalité. « Sauf en cas d'absence de projet sérieux de réinsertion ou d'impossibilité matérielle de mettre en place une mesure d'aménagement », le directeur du SPIP, après avoir obtenu l'accord du condamné à la mesure qui lui est proposée, adressera au procureur de la République, en vue de la saisine du JAP, une proposition d'aménagement, comprenant le cas échéant une ou plusieurs obligations et interdictions de l'article 132-45 du code pénal (s'abstenir d'exercer l'activité professionnelle dans l'exercice ou au cours de laquelle l'infraction a été commise, s'abstenir de paraître en tout lieu spécialement désigné, accomplir un stage de citoyenneté...). A défaut, il lui adressera, ainsi qu'au JAP, un rapport motivé expliquant pourquoi il n'est pas possible de proposer un aménagement de peine. S'il estime la proposition justifiée, le procureur de la République la transmettra pour homologation au juge de l'application des peines, qui disposera alors d'un délai de 3 semaines à compter de la réception de la requête le saisissant pour décider de la suite à donner à cette demande (5). S'il pense que la proposition d'aménagement est injustifiée, le procureur de la République en informera également le JAP - ainsi que le condamné - en lui transmettant cette proposition. Toutefois, le juge de l'application des peines pourra quand même ordonner un aménagement de peine, d'office ou à la demande du condamné, à la suite d'un débat contradictoire.
Un an après l'envoi de la proposition ou du rapport refusant un aménagement de peine, et au plus tard 6 mois avant la date d'expiration de la peine, la situation du condamné devra être réexaminée par le service pénitentiaire d'insertion et de probation.
A noter : s'il reste 4 mois d'emprisonnement à subir - au lieu actuellement de 3 mois d'emprisonnement en exécution d'une ou de plusieurs peines d'une durée d'au moins 6 mois mais inférieure à 2 ans -, ou si, pour les peines d'emprisonnement d'une durée inférieure ou égale à 6 mois, il reste les deux tiers de la peine à exécuter - contre 6 mois en exécution d'une ou plusieurs peines d'une durée supérieure ou égale à 2 ans mais inférieure à 5 ans -, le condamné sera soumis de droit à une mesure de placement sous surveillance électronique. Et non plus à une « mesure d'aménagement de peine la mieux adaptée à la personnalité » de l'intéressé, comme le prévoit aujourd'hui l'article 723-21 du code de procédure pénale. Cette mesure pourra toutefois ne pas être mise en oeuvre en cas d'impossibilité matérielle, de refus du condamné, d'incompatibilité entre la personnalité du condamné et la nature de la mesure ou de risque de récidive. Dans tous les autres cas donc, « la surveillance électronique deviendra le mode d'exécution de droit commun de la fin des peines d'emprisonnement », souligne l'exposé des motifs.
Signalons enfin que pour préparer la mesure d'aménagement de peine, le directeur du SPIP pourra, d'après le projet de loi, adresser au procureur de la République, aux fins de saisine du juge de l'application des peines, une proposition de permission de sortir. Et ce, selon la nouvelle procédure instaurée pour une proposition d'aménagement de peine.
Le projet de loi crée une nouvelle alternative à la détention provisoire « permettant une surveillance plus efficace de la personne qu'en cas de placement sous surveillance judiciaire », explique l'exposé des motifs.
Ainsi, le texte réaffirme que toute personne mise en examen, présumée innocente, demeurera libre pendant le déroulement de l'information judiciaire. Toutefois, en raison des nécessités de l'instruction ou à titre de mesure de sûreté, elle pourra être astreinte à une ou plusieurs obligations du contrôle judiciaire ou, si celles-ci se révèlent insuffisantes - et c'est là la nouveauté -, être assignée à résidence avec surveillance électronique et non plus placée en détention provisoire (6). Cette dernière ne devrait donc être prononcée qu'à titre exceptionnel, si les obligations du contrôle judiciaire ou de l'assignation à résidence avec surveillance électronique ne permettent pas d'atteindre ces objectifs. L'assignation à résidence avec surveillance électronique apparaît comme une « modalité intermédiaire », souligne l'exposé des motifs, entre le contrôle judiciaire et la détention provisoire.
Plus précisément, le juge d'instruction ou le juge des libertés et de la détention pourront, par ordonnance motivée, et après un débat contradictoire avec assistance obligatoire d'un avocat, assigner l'intéressé à résidence avec surveillance électronique, avec son accord ou à sa demande, s'il encourt une peine d'emprisonnement correctionnel d'au moins 2 ans ou une peine plus grave. Cette mesure sera prononcée pour une durée qui ne pourra excéder 6 mois renouvelables, la durée totale du placement ne pouvant dépasser 2 ans.
Cette mesure obligera ainsi la personne à demeurer à son domicile ou dans une résidence fixée par les magistrats et de ne s'en absenter qu'aux conditions et pour les motifs qu'ils auront déterminés. En outre, pendant cette période, le mis en cause pourra être astreint aux obligations ou interdictions du contrôle judiciaire prévues à l'article 138 du code de procédure pénale (ne pas sortir des limites territoriales définies par le juge, ne pas se rendre dans certains lieux, s'abstenir de rencontrer des personnes spécialement désignées...). En cas de non-respect de ces obligations, il sera alors placé en détention provisoire (7). Avec l'accord préalable du juge d'instruction, les horaires de présence au domicile ou dans les lieux d'assignation pourront être modifiés par le chef d'établissement pénitentiaire lorsqu'il s'agit de modifications favorables à la personne mise en examen ne touchant pas à l'équilibre de la mesure de contrôle.
En cas de non-lieu, relaxe ou acquittement, la personne assignée à résidence avec surveillance électronique pourra demander la réparation du préjudice subi devant la commission nationale de réparation des détentions.
Le projet de loi modifie l'article 716 du code de procédure pénale qui pose le principe de l'encellulement individuel des personnes placées en détention provisoire.
Actuellement, il est prévu que, sauf exceptions limitativement énumérées (voir page 20), les personnes mises en examen, les prévenus et les accusés (8) placés en détention provisoire sont soumis au « régime de l'emprisonnement individuel de jour et de nuit ». Or, selon le gouvernement, « il n'est en rien démontré que ce mode d'hébergement soit conforme à la demande réelle même des détenus et à leur intérêt. A l'inverse, il est constaté que beaucoup de détenus ne souhaitent pas être seuls en cellule, notamment dans les maisons d'arrêt où les périodes d'incarcération sont relativement courtes. » En outre, poursuit-il, « l'analyse des expériences [européennes] sur ce point conduit au constat que seule la France dispose d'une obligation légale imposant l'encellulement individuel des prévenus ». Et de conclure : « l'encellulement individuel pour tous ne doit plus être considéré comme l'objectif à atteindre absolument ».
Aussi, le projet de loi prévoit que, à l'avenir, « les personnes mises en examen, prévenus et accusés soumis à la détention provisoire sont placés soit en cellule individuelle, soit en cellule collective ». Et que, pour être placés en cellule individuelle, ils devront en faire la demande. Une demande qui ne pourra être refusée que dans trois cas (voir ci-dessous).
Le texte précise que lorsque les personnes en détention provisoire sont placées dans une cellule collective, celle-ci doit être adaptée au nombre de détenus qui y sont hébergés, que ces derniers doivent être aptes à cohabiter et que leur sécurité doit être assurée. Objectif de cette disposition : transcrire dans le droit français la règle pénitentiaire européenne n° 18-6 qui prévoit qu'une « cellule doit être partagée uniquement si elle est adaptée à un usage collectif et doit être occupée par des détenus reconnus aptes à cohabiter ».
Reprenant deux des dérogations actuelles au principe de l'encellulement individuel, le projet de loi stipule que le placement en cellule individuelle pourra être refusé :
si la personnalité du détenu justifie, dans son intérêt, qu'il ne soit pas laissé seul ;
s'il a été autorisé à travailler ou à suivre une formation professionnelle ou scolaire et que les nécessités d'organisation l'imposent.
En outre, il prévoit qu'il pourra être dérogé, pendant 5 ans(9), aux dispositions relatives au placement en cellule individuelle au motif tiré de ce que la distribution intérieure des maisons d'arrêt ou le nombre de détenus ne permet pas leur application. Une telle mesure avait déjà été prise en 2003 et a expiré le 12 juin 2008 (10). Pour justifier ce nouveau moratoire de 5 ans, le gouvernement affirme, dans l'exposé des motifs, que malgré les « efforts considérables [...] développés depuis 2002 grâce au programme de constructions de 13 200 places qui permettra d'atteindre en 2012 une capacité de 63 000 places », l'administration pénitentiaire « n'a pas la capacité opérationnelle suffisante pour permettre de respecter » le droit à l'encellulement individuel. « En effet, les nouveaux établissements pénitentiaires comportent de manière systématique des cellules collectives. Il en va de même pour les établissements plus anciens. »
Le projet de loi modifie aussi les règles relatives à l'encellulement individuel des condamnés qui, selon l'exposé des motifs, ne laissent « aucune place à [leur] intérêt ».
Actuellement, l'article 717-2 du code de procédure pénale prévoit qu'il ne peut être dérogé au principe de l'encellulement individuel des condamnés (11) qu'en raison de la distribution intérieure des locaux de détention ou de leur encombrement temporaire ou des nécessités d'organisation du travail.
Le projet de loi supprime ce dernier cas de dérogation. Et prévoit qu'il pourra être également dérogé au principe de l'encellulement individuel « si les intéressés en font la demande ou si leur personnalité justifie que, dans leur intérêt, ils ne soient pas laissés seuls ».
Pour le gouvernement, il faut en effet « laisser à un détenu la possibilité de demander à partager sa cellule avec un autre ou, pour l'administration pénitentiaire, d'en décider dans son intérêt, notamment quand il faut prévenir les risques suicidaires. Cette souplesse qui existe déjà pour les prévenus, doit être étendue à l'ensemble des condamnés incarcérés en maison d'arrêt ou en établissement pour peines. Une telle modification permettra en outre de satisfaire aux règles pénitentiaires européennes. »
Le projet de loi étend les cas de maintien en maison d'arrêt de personnes condamnées à une peine d'emprisonnement qui, en principe, doivent la purger dans un établissement pour peines.
Ainsi, à l'avenir, les condamnés dont la peine n'excède pas 2 ans - et non plus 1 an - pourront, à titre exceptionnel, être maintenus en maison d'arrêt et incarcérés, dans ce cas, dans un quartier distinct lorsque les conditions tenant à la préparation de leur libération, leur situation familiale ou leur personnalité le justifient.
En outre, les condamnés ayant un reliquat de peine supérieur à 2 ans pourront aussi être maintenus en maison d'arrêt lorsqu'ils bénéficient d'aménagement de peine ou sont susceptibles d'en bénéficier rapidement.
Selon le gouvernement, deux raisons majeures commandent une telle mesure. Tout d'abord, « une meilleure prise en compte des souhaits des détenus : certains condamnés souhaitent être maintenus à proximité de leur résidence afin de favoriser le maintien des liens familiaux, lequel est parfois compromis par l'éloignement vers un établissement pour peines, alors même que la durée d'incarcération restant à subir reste réduite ». Le second argument avancé par l'exposé des motifs est « le développement des aménagements de peine pour les courtes peines d'emprisonnement [...] : la rupture occasionnée par un changement d'établissement est souvent la cause d'un retard dans l'élaboration et la concrétisation des projets de sortie. Par conséquent, mieux vaut favoriser le maintien en maison d'arrêt d'un condamné engagé dans un projet d'aménagement de peine que de compromettre un tel projet favorable à sa réinsertion en l'affectant dans un autre établissement pénitentiaire ».
Près de 2 600 condamnés qui exécutent une peine ou un reliquat de peine compris entre 1 et 2 ans seront concernés, estime le ministère de la Justice.
Le projet de loi prévoit que, pour les condamnés, un parcours d'exécution de la peine est élaboré par le chef d'établissement et le directeur du SPIP dès que leur condamnation est devenue définitive. A cette fin, les intéressés font l'objet d'un bilan de personnalité à l'issue d'une période d'observation. Le projet initial de ce parcours et ses modifications ultérieures sont portés à la connaissance du juge de l'application des peines. Le texte porté par Rachida Dati étend ainsi à tous les condamnés le bénéfice de ce parcours que la loi du 25 février 2008 relative à la rétention de sûreté et à la déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental avait instauré uniquement au profit des condamnés à une peine de réclusion criminelle d'au moins 15 ans pour les crimes d'assassinat ou de meurtre, de torture ou actes de barbarie, de viol, d'enlèvement ou de séquestration commis sur une victime mineure.
Selon l'exposé des motifs, « ce dispositif permet de suivre, avec le détenu, l'évolution de son parcours carcéral et les efforts réalisés pour donner un sens à la peine et, par voie de conséquence, préparer une sortie sans récidive ». Et, à chaque dé