Adoptée définitivement juste avant le lancement officiel de la campagne présidentielle et avalisée par le Conseil constitutionnel (1), la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance aura été sans conteste un des textes les plus décriés de la dernière législature. Certaines associations ont même réclamé son abrogation aux candidats aux élections présidentielle et législatives (2).
Constitué à l'origine d'une cinquantaine d'articles, le texte s'est considérablement enrichi au fil de la discussion parlementaire avec notamment l'adoption de nouvelles mesures se révélant pour certaines de nature plus répressive que préventive. Il apparaît au final comme un assemblage de dispositions très diverses, traitant de sujets aussi variés que les troubles de voisinage, les violences conjugales, l'occupation illicite de terrains par les gens du voyage, le service civil volontaire, les « écoles de la deuxième chance » ou encore les chiens dangereux... Une réforme des règles existantes en matière d'hospitalisation d'office et de sortie des établissements psychiatriques aura été également, un temps, à l'ordre du jour avant que le gouvernement ne décide de reculer devant la levée de boucliers provoquée par la présence de telles dispositions dans un texte relatif à la délinquance (3).
La loi aura également fait couler beaucoup d'encre en modifiant, une nouvelle fois, l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante ou encore en ajoutant expressément aux missions d'action sociale du conseil général la prévention de la délinquance, au risque de brouiller les frontières entre celle-ci et la prévention spécialisée. Mais les dispositions les plus contestées auront été celles visant à ancrer la légitimité du maire dans le domaine de la prévention de la délinquance. Le texte ne se contente pas, à cet égard, d'instituer symboliquement le maire comme le coordinateur et l'animateur de la politique de prévention de la délinquance sur le territoire de sa commune, rôle que de nombreux édiles exerçaient déjà dans la pratique auparavant. Il lui offre, en plus, de nouveaux outils afin de mettre en oeuvre concrètement cette compétence. La loi lui confie ainsi les rênes de structures partenariales : le conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance - qui existait déjà mais dont la création est désormais obligatoire dans certaines communes -, mais aussi et surtout le conseil pour les droits et devoirs des familles, nouvelle instance présentée comme un lieu d'échange avec les familles en difficulté.
De nombreux moyens d'information sont par ailleurs donnés aux maires, l'idée étant qu'ils disposent d'une vue d'ensemble sur les problématiques liées à la prévention de la délinquance et puissent proposer des réponses adaptées en amont. La loi place ainsi l'élu au coeur d'un dispositif de secret professionnel partagé, lui ouvrant l'accès à un certain nombre de données confidentielles sur ses administrés. Le texte étoffe également l'information du maire sur l'absentéisme scolaire ou encore sur les troubles à l'ordre public commis sur le territoire de sa commune.
Enfin, la loi accorde encore aux édiles de nouvelles procédures pour leur permettre d'agir tant contre ceux que le gouvernement appelle les « parents défaillants » que contre les fauteurs de trouble eux-mêmes en cas d'incivilités.
En matière de prévention de la délinquance, la coordination et l'échange d'informations au niveau local est « essentiel » dans la mesure où il s'agit d'un domaine « qui engage des acteurs aussi divers que des policiers, des magistrats, des enseignants, des médecins et des travailleurs sociaux », expliquait le Premier ministre, Dominique de Villepin, en 2006 à l'occasion d'un comité interministériel de prévention de la délinquance. Or, pour son gouvernement, le maire est le mieux placé pour jouer le rôle de pilote, puisqu'il est en contact avec tous ces intervenants. C'est la raison pour laquelle la loi du 5 mars 2007 le place au centre de la politique de prévention de la délinquance.
Ce faisant, elle consacre législativement « la forte montée en puissance des municipalités dans le champ de la sécurité locale au cours des 20 dernières années », explique le rapporteur de la loi au Sénat, Jean-René Lecerf (Rap. Sén. n° 132, décembre 2006, Lecerf, page 29). Ainsi, « cette reconnaissance par la loi doit finir d'ancrer la légitimité du maire dans ce domaine vis-à-vis des autres partenaires comme l'Etat et le département ».
La loi prévoit tout d'abord que le maire, par son « pouvoir de police », concourt non plus seulement à l'exercice des missions de sécurité publique mais aussi à celui des missions de prévention de la délinquance (code général des collectivités territoriales [CGCT], art. L. 2211-1 modifié).
Elle lui confie par ailleurs la mission d'animer sur le territoire de la commune la politique de prévention de la délinquance et d'en coordonner la mise en oeuvre (CGCT, art. L. 2211-4 nouveau). Il doit toutefois inscrire son action dans le respect des compétences des autres acteurs, comme :
le procureur de la République, désigné par la nouvelle loi comme l'animateur et le coordonnateur de la politique de prévention de la délinquance dans sa composante judiciaire, dans le ressort du tribunal de grande instance (code de procédure pénale [CPP], art. 39-1 nouveau) (voir encadré, page 18) ;
le procureur général, chargé dorénavant d'animer et de coordonner l'action des procureurs de la République en ce qui concerne tant la répression que la prévention des infractions à la loi pénale (CPP, art. 35 modifié) (voir encadré, page 18) ;
les établissements et les organismes intéressés, comme les autorités organisatrices de transports collectifs des voyageurs, par exemple, qui concourent désormais « aux actions de prévention de la délinquance et de sécurisation des personnels et des usagers dans ces transports » (art. 6 de la loi) ;
les collectivités publiques, comme le conseil général à qui la loi confie de nouvelles compétences puisqu'il concourt dorénavant « aux actions de prévention de la délinquance dans le cadre de l'exercice de ses compétences d'action sociale » (code de l'action sociale et des familles [CASF], art. 121-2 4° nouveau) (voir encadré, page 16).
Au titre de sa mission de coordonnateur de la politique de prévention de la délinquance, le maire préside comme auparavant le conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD). Nouveauté introduite par la loi : la création de cette instance est dorénavant obligatoire dans les communes de plus de 10 000 habitants et dans celles comprenant une zone urbaine sensible (CGCT, art. 2211-4 nouveau). Rappelons que le CLSPD a vu le jour au sein de l'architecture de la sécurité intérieure en juillet 2002 pour remplacer les conseils communaux de prévention de la délinquance, jugés inefficaces. Leur création n'était jusqu'à présent pas une obligation pour les maires.
Certaines dispositions de la loi sont adaptées à « la situation particulière de Paris ». En effet, a rappelé le rapporteur à l'Assemblée nationale, Philippe Houillon, « les pouvoirs de police confiés au maire dans les autres communes de France sont [dans la capitale], pour l'essentiel, de la compétence du préfet de police » (Rap. A.N. n° 3436, Houillon, novembre 2006, page 108). « Par ailleurs, la Ville de Paris a pour autre particularité d'être à la fois une commune et un département. »
Le législateur n'a, en fait, pas voulu « modifier l'équilibre existant entre l'Etat et la Ville de Paris s'agissant des questions de sécurité ». Or « confier au seul maire de Paris le rôle d'animer la politique de prévention de la délinquance, notamment en lui confiant la présidence du CLSPD, aurait constitué un moyen détourné de modifier le statut particulier de la capitale », a expliqué le député.
Au final, la loi prévoit donc une animation conjointe de cette politique par le maire et par le préfet de police (CGCT, art. L. 2512-13-1 nouveau). Tous deux sont également chargés d'en coordonner la mise en oeuvre. De plus, ils président ensemble le CLSPD de Paris. Les modalités d'organisation de cette instance seront fixées par décret.
Les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) peuvent aussi intervenir dans la prévention de la délinquance. « 40 % des CLSPD sont en effet des conseils intercommunaux », a indiqué Philippe Houillon (Rap. A.N. n° 3436, Houillon, novembre 2006, page 109). Afin de tenir compte de cette réalité, la loi précise que, lorqu'un EPCI à fiscalité propre exerce la compétence relative aux dispositifs locaux de prévention de la délinquance, son président, placé à la tête d'un conseil intercommunal de sécurité et de prévention de la délinquance (CISPD), « anime et coordonne, sous réserve du pouvoir de police des maires des communes membres, les actions qui concourent à l'exercice de cette compétence » (CGCT, art. L. 5211-59 nouveau).
Les communes membres d'un EPCI disposant d'un CISPD sont dispensés de créer un CLSPD (CGCT, art. L. 2211-4 modifié). La loi précise également qu'un CISPD peut constituer en son sein un ou plusieurs groupes de travail et d'échange d'informations à vocation territoriale ou thématique. Les informations à caractère confidentiel échangées dans le cadre de ces groupes de travail ne peuvent pas être communiquées à des tiers.
A noter : les actions de prévention de la délinquance conduites par les collectivités territoriales et leurs établissements publics ne doivent pas être incompatibles avec le plan de prévention de la délinquance arrêté par le préfet dans le département (CGCT, art. L. 2215-2 modifié). Et de la même façon, dans la capitale, les actions de prévention de la délinquance conduites par le département de Paris, la commune de Paris et leurs établissements publics ne doivent pas être incompatibles avec le plan de prévention de la délinquance arrêté conjointement par le préfet de Paris et le préfet de police (CGCT, art. L. 2512-15 modifié).
Pour le rapporteur Jean-René Lecerf, « la capacité d'anticiper ou de détecter les évolutions de la délinquance est fondamentale pour la mise en oeuvre d'une politique efficace de prévention ». « Cela implique d'être en situation de rassembler des informations diverses et de les analyser » (Rap. Sén. n° 132, décembre 2006, Lecerf, page 29). La loi du 5 mars 2007 vise à en donner au maire les moyens.
L'article 8 de la loi - qui, d'une part, détermine le cadre dans lequel les professionnels de l'action sociale soumis au secret professionnel peuvent partager entre eux des informations confidentielles et, d'autre part, détermine les conditions de transmission éventuelle de ces informations au maire et au président du conseil général - est l'un de ceux qui aura donné lieu aux débats les plus animés et dont l'application sur le terrain soulève encore aujourd'hui le plus d'interrogations (4). Ce, malgré les « limitations » et les « précautions » (5) dont le législateur a assorti les échanges d'informations qu'il autorise entre les différents intervenants auprès d'une personne ou d'une famille en difficulté.
Après avoir subi plusieurs réécritures en cours de lecture parlementaire, l'article 8 prévoit finalement que « lorsqu'un professionnel de l'action sociale [...] constate que l'aggravation des difficultés sociales, éducatives ou matérielles d'une personne ou d'une famille appelle l'intervention de plusieurs professionnels », il en informe le maire de la commune de résidence et le président du conseil général. Il est autorisé dans ce cadre à révéler à ces derniers - et à eux seuls - « les informations confidentielles qui sont strictement nécessaires à l'exercice de leurs compétences » (CASF, art. L. 121-6-2 nouveau).
Autrement dit, quand un travailleur agit seul auprès d'une personne ou d'une famille, il ne doit donner d'informations au maire de la commune ou au président du conseil général que lorsque l'aggravation des difficultés sociales, éducatives ou matérielles de cette personne ou de cette famille appelle l'intervention de plusieurs professionnels. Les informations confidentielles qu'il est autorisé à leur révéler sont celles « strictement nécessaires à l'exercice de leurs compétences » et ne peuvent être transmises à des tiers sous peine de sanctions pénales (CASF, art. L. 121-6-2 nouveau).
Par ailleurs, dans le cas où plusieurs professionnels de l'action sociale interviennent effectivement auprès d'une même personne ou d'une même famille, la loi prévoit désormais que si « l'efficacité et la continuité de l'action sociale le rendent nécessaire », l'édile - qu'il ait été saisi ou non puisque la loi l'autorise à le faire de sa propre initiative - doit désigner parmi eux un coordonnateur, après accord de l'autorité dont il relève et consultation du président du conseil général. Si les professionnels concernés dépendent tous de l'autorité du président du conseil général, le maire devra choisir le coordonnateur proposé par ce dernier (CASF, art. L. 121-6-2 nouveau).
Le coordonnateur lui-même est autorisé à transmettre au maire et au président du conseil général les informations confidentielles « strictement nécessaires à l'exercice de leurs compétences » (CASF, art. L. 121-6-2 nouveau).
A noter : la loi impose au coordonnateur - ou au professionnel intervenant seul auprès d'une personne ou d'une famille en difficulté - d'avertir sans délai le président du conseil général s'il apparaît qu'un mineur est « susceptible d'être en danger ». Le travailleur social devra aussi informer le maire de cette « transmission » (CASF, art. L. 121-6-2 nouveau).
De manière générale, même en l'absence d'un coordonnateur, des professionnels intervenant auprès d'une même personne peuvent dorénavant échanger des informations confidentielles dans le cadre du secret partagé. Dans quelles conditions ? La loi indique que les personnes qui interviennent auprès d'une même personne ou d'une même famille ne sont autorisées à partager entre elles des informations à caractère secret que dans un seul but : évaluer la situation du ou des intéressés, déterminer les mesures d'action sociale nécessaires et les mettre en oeuvre (CASF, art. L. 121-6-2 nouveau).
En outre, le coordonnateur - s'il y en a un - doit avoir connaissance des informations ainsi transmises et le partage de ces données doit être « limité à ce qui est strictement nécessaire à l'accomplissement de la mission d'action sociale ».
Afin notamment « d'améliorer le suivi de l'obligation d'assiduité scolaire », le maire peut dorénavant enregistrer dans un fichier les informations à caractère personnel sur les enfants en âge scolaire domiciliés dans sa commune qui lui ont été transmises par (code de l'éducation [C. éduc.], art. L. 131-6 modifié) :
les organismes chargés du versement des prestations familiales ;
l'inspecteur d'académie ;
le directeur de l'établissement d'enseignement.
Les premiers, a expliqué Philippe Houillon, doivent lui communiquer plus précisément la liste des enfants en âge scolaire domiciliés dans sa commune et « donnant droit à l'ouverture de prestations familiales, dont le versement est conditionné à la production du certificat de scolarité » (Rap. A.N. n° 3436, Houillon, novembre 2006, page 140).
Les directeurs d'établissements d'enseignement, pour leur part, ont désormais l'obligation de communiquer directement au maire les décisions d'exclusion temporaire et définitive de l'établissement scolaire ainsi que les cas d'abandon de la scolarité (C. éduc., art. L. 131-6 modifié).
De plus, ils doivent encore informer l'édile lorsqu'ils décident de saisir l'inspecteur d'académie afin que ce dernier adresse un avertissement à un élève. (C. éduc., art. L. 131-8 modifié).
Quant aux inspecteurs d'académie, ils ont dorénavant l'obligation de transmettre à l'édile la liste des élèves domiciliés dans sa commune pour lesquels un avertissement pour défaut d'assiduité scolaire a été notifié (C. éduc., art. L. 131-8 modifié).
Un décret doit maintenant préciser notamment la liste des données à caractère personnel collectées par le maire, la durée de conservation de ces données, les modalités d'habilitation des destinataires ainsi que les conditions dans lesquelles les personnes intéressées peuvent exercer leur droit d'accès.
A noter : il est désormais inscrit dans la loi que les écoles, les collèges, les lycées et les établissements d'enseignement supérieur « participent à la prévention de la délinquance » (C. éduc., art. L. 121-1 modifié).
La loi du 5 mars 2007 améliore l'information du maire sur les actes de délinquance commis sur le territoire de sa commune ainsi que sur les suites judiciaires qui leur sont données.
L'article L. 2211-3 du code général des collectivités territoriales imposait déjà auparavant aux responsables de la police et de la gendarmerie d'informer sans délai les édiles des infractions causant un trouble grave à l'ordre public commises sur le territoire de leur commune. « Cette obligation d'information semblant inégalement respectée » (Rap. Sén. n° 132, décembre 2006, Lecerf, page 30), les parlementaires ont souhaité la consolider. Elle concerne désormais l'ensemble des troubles à l'ordre public sans considération de leur gravité (CGCT, art. L. 2211-3 modifié).
Comme avant, cette information doit se faire « dans le respect des dispositions de l'article 11 du code de procédure pénale », qui garantit le secret de l'instruction.
Autre nouveauté : l'information des maires par les parquets est également renforcée. Dans sa rédaction antérieure à la loi relative à la prévention de la délinquance, l'article L. 2211-2 du code général des collectivités territoriales permettait déjà aux édiles d'être informés par le parquet notamment de « toutes les mesures ou décisions de justice, civiles ou pénales, dont la communication paraît nécessaire à la mise en oeuvre d'actions de prévention, de suivi et de soutien, engagées ou coordonnées par l'autorité municipale ou intercommunale ». Désormais, un maire peut également, à sa demande, être informé par le procureur de la République des classements sans suite, des mesures alternatives aux poursuites ou des poursuites lorsque ces décisions concernent des infractions causant un trouble à l'ordre public commis sur le territoire de sa commune (CGCT, art. L. 2211-3 modifié). Il peut aussi, toujours s'il le demande, être informé par le procureur des jugements devenus définitifs ou des appels interjetés lorsque ces décisions concernent de telles infractions ou des crimes et délits signalés par lui (6). Etant entendu que, là encore, les informations transmises au maire par les parquets sont couvertes par le secret de l'instruction.
A noter : les modalités d'échange des informations portant sur les « mesures ou décisions de justice, civiles ou pénales, dont la communication paraît nécessaire à la mise en oeuvre d'actions de prévention, de suivi et de soutien engagées ou coordonnées par l'autorité municipale ou intercommunale », peuvent être définies par les conventions conclues entre les maires et l'Etat (7), que signent dorénavant les procureurs de la République (CGCT, art. 2211-2 modifié).
La loi du 5 mars 2007 crée de nouvelles procédures qui, selon Philippe Houillon, permettront aux maires de « jouer tout leur rôle dans la prévention de la délinquance » (Rap. A.N. n° 3436, Houillon, novembre 2006, page 27). Elle formalise ainsi une pratique déjà mise en oeuvre par certains édiles, celle du rappel à l'ordre verbal fait à l'auteur de troubles mineurs à l'ordre public. Aussi et surtout, la loi met entre les mains des maires de nouvelles mesures pouvant être proposées aux familles qui connaissent des difficultés dans l'éducation de leurs enfants. Et offre la possibilité aux conseils municipaux de créer une nouvelle instance pour examiner ces mesures : le conseil pour les droits et devoirs des familles, présidé par le maire.
Un conseil municipal peut dorénavant décider de créer un conseil pour les droits et devoirs des familles, nouvelle instance dont les rênes sont confiées au maire (ou son représentant). La loi n'est pas extrêmement précise en ce qui concerne sa composition. En effet, elle ne prévoit pas de nombre de membres minimum ou maximum et indique simplement que, présidé par le maire ou son représentant, le conseil pour les droits et devoirs des familles pourra comprendre « des représentants de l'Etat » - dont la liste sera fixée par décret -, « des représentants des collectivités territoriales et des personnes oeuvrant dans les domaines de l'action sociale, sanitaire et éducative, de l'insertion et de la prévention de la délinquance » (CASF, art. L. 141-1 nouveau).
La vocation du conseil sera d'être un « lieu de concertation et d'écoute pour les familles ayant des difficultés à exercer leur autorité parentale », explique Jean-René Lecerf (Rap. Sén. n°132, décembre 2006, Lecerf, page 48).
Ainsi, concrètement, un maire pourra le réunir afin :
d'entendre une famille, de l'informer de ses droits et devoirs envers l'enfant et de lui adresser des recommandations destinées à prévenir des comportements susceptibles de mettre l'enfant en danger ou de causer des troubles pour autrui ;
d'examiner avec la famille les mesures d'aide à l'exercice de la fonction parentale susceptibles de lui être proposées ;
d'examiner avec la famille l'opportunité d'informer les professionnels de l'action sociale et les tiers intéressés des recommandations qui lui sont faites et, le cas échéant, des engagements qu'elle a pris dans le cadre d'un contrat de responsabilité parentale conclu avec le président du conseil général (8).
Le conseil pour les droits et devoirs des familles pourra encore, « lorsque le suivi social ou les informations portées à sa connaissance font apparaître que la situation d'une famille ou d'un foyer est de nature à compromettre l'éducation des enfants, la stabilité familiale et qu'elle a des conséquences pour la tranquillité ou la sécurité publique », proposer au maire de saisir le président du conseil général en vue de la mise en oeuvre de la mesure d'accompagnement en économie sociale et familiale créée par la loi réformant la protection de l'enfance du 5 mars 2007 (9).
Le maire devra par ailleurs réunir l'instance, pour la consulter, chaque fois qu'il envisagera de proposer un accompagnement parental (voir ci-dessous). Le conseil devra, en outre, être informé de la conclusion d'un contrat de responsabilité parentale ou d'une mesure d'assistance éducative ordonnée par la justice à l'encontre d'un mineur en danger.
A noter : la loi prévoit expressément que les informations communiquées, le cas échéant, aux membres du conseil ne peuvent être divulguées à des tiers, sous peine de sanctions pénales (un an d'emprisonnement et 15 000 € d'amende).
Au lendemain de la flambée de violences de l'automne 2005 dans les banlieues, Dominique de Villepin soulignait que « les enseignants ne peuvent faire face seuls aux situations scolaires les plus difficiles » et que, à ses yeux, « les parents ont aussi leur rôle à jouer ». Dans cet esprit, la loi du 31 mars 2006 pour l'égalité des chances a créé le contrat de responsabilité parentale, censé apporter une aide aux parents qui éprouvent de graves difficultés dans l'exercice de leurs devoirs éducatifs.
La loi relative à la prévention de la délinquance va dans la même direction en offrant au maire la possibilité de proposer aux parents d'un mineur - ou à son représentant légal - un accompagnement parental (CASF, art. L. 141-2 nouveau). La mesure consiste en un « suivi individualisé au travers d'actions de conseil et de soutien à la fonction éducative ».
L'élu ne peut toutefois y avoir recours que dans certaines situations. En l'occurrence, s'il constate par lui même que le défaut de surveillance ou d'assiduité scolaire d'un mineur fait peser une menace sur l'ordre, la sécurité ou la tranquillité publics. Ou si on l'informe de cet état de fait. A cet égard, l'accompagnement parental peut également être mis en place à l'initiative des parents ou du représentant légal du mineur.
En tout état de cause, avant de prendre cette décision, l'édile doit toujours vérifier qu'aucune mesure d'assistance éducative n'a été ordonnée par la justice. Il doit également s'assurer qu'un contrat de responsabilité parentale n'a pas été conclu entre les parents à qui il compte proposer la mesure et le président du conseil général. Et une fois l'accompagnement parental mis en place, il doit non seulement en informer l'inspecteur d'académie, le chef d'établissement d'enseignement, le directeur de l'organisme débiteur des prestations familiales et le préfet, mais aussi solliciter l'avis du président du conseil général.
Dans le meilleur des cas, au terme de l'accompagnement, les parents ou le représentant légal du mineur se voient délivrer une attestation comportant leur engagement solennel à se conformer aux obligations liées à l'exercice de l'autorité parentale. En revanche, s'ils refusent sans motif légitime l'accompagnement parental ou l'accomplissent de manière partielle, le maire doit alors saisir le président du conseil général en vue de la conclusion éventuelle d'un contrat de responsabilité parentale.
La loi du 5 mars 2007 offre au maire - ou à son représentant au sein du conseil pour les droits et devoirs des familles - la possibilité de saisir le juge des enfants pour lui signaler les difficultés d'une famille susceptibles de justifier une mesure judiciaire d'aide à la gestion du budget familial (code civil, art. 375-9-2 nouveau).
Rappelons que cette mesure, instaurée par la loi réformant la protection de l'enfance du 5 mars 2007 (10), remplace l'ancienne tutelle des prestations familiales. Elle revient, pour le juge des enfants, à ordonner le versement de tout ou partie des prestations familiales à une personne physique ou morale qualifiée, dite « délégué aux prestations familiales ». Concrètement, le juge peut prendre une telle décision uniquement lorsque les prestations familiales ne sont pas employées pour les besoins liés au logement, à l'entretien, à la santé et à l'éducation des enfants et que l'accompagnement en économie sociale et familiale n'apparaît pas suffisant.
Précision importante : le maire ne peut saisir le juge des enfants à cette fin qu'en agissant conjointement avec la caisse d'allocations familiales. Cela « afin d'éviter les éventuels abus » (Rap. Sén. n° 132, décembre 2006, Lecerf, page 51).
En outre, lorsque l'édile a désigné un coordonnateur parmi les travailleurs sociaux agissant auprès de la famille visée (voir page 18), il doit, après accord de l'autorité dont relève ce professionnel, signaler cette nomination au juge. La loi laisse à ce dernier la liberté de désigner ou non le coordonnateur pour exercer la fonction de délégué aux prestations familiales.
La loi relative à la prévention de la délinquance autorise le maire confronté à des « faits susceptibles de porter atteinte au bon ordre, à la sûreté, à la sécurité ou à la salubrité publiques » à rappeler à l'ordre verbalement leur auteur - c'est-à-dire à lui rappeler « les dispositions qui s'imposent » à lui « pour se conformer à l'ordre et à la tranquillité publics » -, le cas échéant en le convoquant à la mairie (CGCT, art. L. 2212-2-1 nouveau).
« Comme l'ont indiqué l'ensemble des associations des maires, une majorité d'entre eux ont déjà recours à cette pratique qui consiste, pour parler familièrement, «à remonter les bretelles» en cas d'incivilités ou de petites dégradations », a expliqué le rapporteur Jean-René Lecerf (Rap. Sén. n° 132, décembre 2006, Lecerf, page 52).
Le rappel à l'ordre peut être adressé à toute personne, quel que soit son âge. Mais si l'auteur des faits reprochés est un mineur, il doit intervenir, « sauf impossibilité, en présence de ses parents, de ses représentants légaux ou, à défaut, d'une personne exerçant une responsabilité éducative à son égard ».
La pratique a montré que les parents se rendent généralement aux convocations faites par les maires qui procédaient déjà à ce genre de rappel à l'ordre avant son inscription dans la loi, a indiqué Philippe Houillon. Celle-ci « donnera cependant encore davantage de poids à une telle convocation », a-t-il assuré. En outre, pour le parlementaire, si la loi ne prévoit pas de sanction en cas d'absence des parents à cette convocation, « révélant alors une forme de démission de leur part », il faut néanmoins rapprocher cette disposition des autres prérogatives accordées dorénavant à l'élu. Ainsi, « un refus des parents serait pour le maire une information révélatrice d'un défaut de surveillance de leur part, permettant ainsi à [l'édile] de déclencher la [nouvelle] mesure d'accompagnement parental » (Rap. A.N. n° 3436, Houillon, no