Recevoir la newsletter

LA SIMPLIFICATION DU DROIT

Article réservé aux abonnés

La loi du 9 décembre 2004 autoriseà nouveau le gouvernement à légiférer par ordonnances pour simplifier le droit dans des domaines très variés comme la sécurité sociale, les aides personnelles au logement, le droit de la filiation, lesétablissements sociaux et médico-sociaux, l'aide juridictionnelle ou encore l'accès aux documents administratifs.

Ce n'est pas la première fois que le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin procède de la sorte. Une précédente loi, celle du 2 juillet 2003, lui a déjà permis de légiférer par ordonnances pour simplifier le droit en matière sociale (1) et s'est traduite par la publication d'ordonnances relatives notamment à l'allégement des formalités pour les petites entreprises et les associations (2), au droit du travail (3), à l'organisation et au fonctionnement des commissions administratives (4), aux relations entre l'administration et les contribuables (5) et au minimum vieillesse (6). La loi du 9 décembre 2004 lui permetà nouveau d'éviter la voie législative classique pour simplifier le droit dans des domaines aussi variés que la sécurité sociale, l'amélioration de l'accès aux documents administratifs, le droit de la filiation, la protection des mineurs accueillis en centre de loisirs, les aides personnelles au logement, les établissements sociaux et médico-sociaux, l'aide juridictionnelle ou le droit relatif aux associations.

Une méthode critiquée par l'opposition parlementaire mais que le Conseil constitutionnel a validée dans sa décision du 2 décembre. Les neufs sages ont en effet rejeté l'argument selon lequel le « jeu des lois d'habilitation multiples » porte en germe un« risque de déséquilibre constitutionnel grave, dénaturant les droits du Parlement et susceptible de priver, in fine, les citoyens et les justiciables des droits reconnus par la Déclaration de1789 ». Selon eux, « les articles d'habilitation figurant dans la loi ne sont ni par eux-mêmes, ni par les conséquences qui en découlent nécessairement contraires aux règles et principes de valeur constitutionnel ». Le conseil a en outre considéré que « l'urgence, en l'espèce motivée par l'encombrement de l'ordre du jour parlementaire » fait partie des motifs que le gouvernement peut invoquer pour avoir recours aux ordonnances dans le domaine de la simplification du droit.

De manière générale, la loi donne entre 6 et 12 mois au gouvernement pour prendre les ordonnances.

I - LES MESURES DE SIMPLIFICATION DANS LE DOMAINE DE L'ACTION SOCIALE (art. 72 de la loi)

Le gouvernement est habilité à simplifier diverses mesures en matière d'action sociale, entendue au sens large. Il en est ainsi des modalités d'admission à l'aide sociale ainsi que des règles régissant l'autorisation, le financement et le contrôle des établissements et services sociaux et médico-sociaux ou encore des dispositions ayant trait aux accueillants familiaux.

Par là, il poursuit l'œuvre de simplification entamée avec la loi d'habilitation du 2 juillet 2003 et l'ordonnance du 4 septembre 2003 portant simplification de l'organisation et du fonctionnement du système de santéainsi que des procédures de création desétablissements ou services sociaux et médico-sociaux soumis à autorisation qui en a découlé (7).

Il s'agit, selon les rapports parlementaires, de « supprimer certaines dispositions obsolètes et d'alléger des procédures trop lourdes ou complexes » (Rap. A.N. n° 1635, juin 2004, Blanc).

En application de l'article 92 de la loi du 9 décembre 2004 de simplification du droit, les ordonnances prises sur le fondement de cet article 72 devront l'être dans un délai de 12 moisà compter de sa publication, soit avant le 11 décembre 2005 (8).

A - Les simplifications en matière d'admission à l'aide sociale (art. 72, 1°)

Les procédures d'admission à l'aide sociale devraient, tout d'abord, être simplifiées, avec notamment la suppression de la commission d'admission à l'aide sociale, dont le champ d'intervention s'est progressivement réduit, la plupart des prestations - telles que le revenu minimum d'insertion ou l'allocation personnalisée d'autonomie- relevant pour la très grande majorité d'entre elles de la compétence du département. « Leurs compétences résiduelles devraient être [alors] attribuées aux présidents de conseils généraux, qui disposent d'une compétence générale en matière d'aide sociale », indique le rapporteur de la commission des affaires sociales, Gérard Dériot, dans son avis pour la commission des affaires sociales du Sénat (Avis Sén. n° 6, octobre 2004, Dériot).

B - La clarification du régime des accueillants familiaux (art. 72, 3°)

L'habilitation vise ensuite la clarification du régime d'autorisation et d'agrément des accueillants familiaux et la précision de l'autorité compétente en matière de formation de ces professionnels.

1 - LE RÉGIME D'AUTORISATION ET D'AGRÉMENT

En premier lieu, la loi autorise le gouvernement àclarifier le régime d'autorisation et d'agrément de ces accueillants familiaux. Rappelons que, pour devenir accueillant familial, c'est-à-dire être habilité àaccueillir habituellement à son domicile à titre onéreux des personnes âgées ou handicapées adultes, une personne ou un couple doit au préalable obtenir un agrément du président du conseil général (code de l'action sociale et des familles[CASF], art. L. 441-1).

Ces dispositions, modifiées par la loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale (9), doivent se conjuguer avec celles issues de la loi du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médico-sociale (CASF, art. L. 313-3). En vertu de ces dernières, les accueillants familiaux recevant plus de 3 personnes âgées ou handicapées adultes sont soumis à autorisation. Laquelle est délivrée, en fonction du public accueilli et des prestations fournies, par le préfet, le président du conseil général ou conjointement par ces deux autorités. Ce qui est le cas lorsque les prestations que ces accueillants dispensent sont susceptibles d'être prises en charge pour partie par l'Etat ou les organismes de sécurité sociale et pour partie par le département.

Ainsi, paradoxalement, l'agrément relève uniquement du président du conseil général alors que l'autorisation de ces accueillants familiaux appartient àplusieurs instances. Il est donc prévu d'harmoniser ces deux dispositifs.

2 - L'AUTORITÉCOMPÉTENTE EN MATIERE DE FORMATION

Par ailleurs, les accueillants familiaux doivent notamment s'engager à suivre une formation initiale et continue (CASF, art. L. 441-1). Or les textes ne désignent actuellement pas l'autorité compétente pour organiser cette formation, contrairement aux dispositions législatives antérieures à la loi de modernisation sociale et issues de la loi du 10 juillet 1989 relative à l'accueil par des particuliers, à titre onéreux, de personnesâgées ou handicapées adultes qui prévoyaient que cette charge incombait au président du conseil général.

Prenant appui sur le fait que la plupart des départements ayant accordé des agréments au titre de l'accueil familial à titre onéreux ont déjà mis en place des formations à destination des accueillants familiaux, la responsabilité de l'organisation d'une telle formation devraitêtre confiée par ordonnance aux départements qui, par ailleurs, gèrent l'ensemble du dispositif d'accueil familial et contrôlent les accueillants familiaux. En conséquence, l'article L. 441-2 du code de l'action sociale et des familles devrait, selon les projets d'ordonnances, être modifié pour prévoir explicitement que c'est le président du conseil général qui organise la formation.

C - La protection des personnes accueillies et les incapacités professionnelles (art. 72, 4°)

L'habilitation prévoit, d'autre part, que le gouvernement pourra clarifier par ordonnance les dispositions ayant trait àla protection des personnes accueillies et aux incapacités professionnelles dans le champ social et médico-social. L'idée étant de regrouper ces dispositions au sein d'un même article du code de l'action sociale et des familles pour mettre un terme à la superposition actuelle de plusieurs articles qui n'ont pas été abrogés explicitement par la loi du 2 janvier 2002, et dont les champs ne se recoupent pas entièrement, tant pour lesétablissements et services visés que pour les infractions prises en considération.

En effet, l'article L. 133-6-1 du code de l'action sociale et des familles édicte une interdiction d'exploiter, de diriger tout établissement, service ou structure sociale et médico-sociale ou d'y exercer une fonction à quelque titre que ce soit ou d'être agréée à l'encontre de toute personne condamnée définitivement pour crime ou pour des délits qui sont énumérés à cet article (10). Sont concernés lesétablissements et services sociaux et médico-sociaux couverts par la loi du 2 janvier 2002, les assistants maternels, les structures de garde collective des enfants de moins de 6 ans ainsi que les établissements soumis à déclaration (personnes physiques ou morales hébergeant à titre gratuit ou onéreux des mineurs ou des adultes). Or, pour ces derniers, des dispositions -- les articles L. 321-2 (accueil des mineurs) et L. 322-5 (accueil des majeurs) du code de l'action sociale et des familles -, non formellement abrogées, comportent également des règles d'interdiction et d'incapacités professionnelles. Le champ de ces dispositions pour ce qui concerne les infractions portant atteinte au respect de l'intégrité de la personne est moins étendu que celui prévu à l'article L. 133-6-1 mais, àl'inverse, ces dispositions visent les infractions relatives aux biens. Ces deux articles devraient donc, selon les avant-projets d'ordonnances, être abrogés.

En outre, les accueillants familiaux de personnesâgées et de personnes handicapées ne sont pas expressément visés par l'article L. 133-6-1 mais font l'objet de dispositions d'interdictions professionnelles àpart (CASF, art. L. 443-2). De même que les centres de vacances et de loisirs qui ne sont pas des établissements et services sociaux et médico-sociaux mais qui peuvent recevoir des mineurs handicapés. Ces structures bénéficient d'un régime d'interdiction professionnelle spécifique (CASF, art. L. 227-7).

Dans ce contexte, le gouvernement pourrait viser expressément les particuliers accueillant des personnesâgées et handicapées, voire intégrerégalement les centres de vacances et de loisirs et les centres de loisirs sans hébergement au sein de l'article L. 133-6-1 du code de l'action sociale et des familles. Les modalités de mise en œuvre pratique de cette disposition, à savoir les moyens dont disposeront les professionnels pour respecter ce régime, notamment en ce qui concerne la communication du casier judiciaire pour les contrats de travail en cours, seraient renvoyées à un décret.

Autre évolution envisagée : compléter l'article L. 133-6-1 par la mention des infractions contre les biens. Corrélativement les dispositions redondantes seraient alors abrogées en tout ou partie (CASF, art. L.443-2, L. 321-2, 1°, L. 322-5, L. 227-7).

Au-delà de cette mesure de simplification et de mise en cohérence, le gouvernement n'écarte pas l'idée d'engager une réflexion plus globale sur le champ des infractions qui entraînent une incapacité d'exercice professionnel dans le secteur social et médico-social. Par exemple, les crimes contre l'humanité, les délits d'expérimentation sur la personne humaine ne sont pas compris dans les infractions visées par l'article L. 133-6-1 alors que les condamnations pour atteintes involontairesà la vie (par maladresse, imprudence, négligence) donnent lieu à une interdiction professionnelle.

D - Le fonctionnement des établissements et services sociaux et médico-sociaux

La loi du 9 décembre comporte par ailleurs une série de mesures touchant au fonctionnement des établissements et services sociaux et médico-sociaux.

1 - LE CONTROLE ET LA FERMETURE DES ÉTABLISSEMENTS (art. 72, 4°)

a - Les procédures de contrôle

L'habilitation prévoit une mise en cohérence de diverses dispositions relatives au contrôle desétablissements et services sociaux et médico-sociaux pour rationaliser les dispositions du code de l'action sociale et des familles issues de lois successives - et, en dernier lieu, de la loi du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médico-sociale -, avec des préoccupations différentes.

Sont plus précisément visées les règles « d'assermentation des personnels en charge du contrôle » et les «  sanctions en cas d'obstacle aux contrôles applicables auxétablissements sociaux et médico-sociaux ».

b - La prévention et les règles de fermeture

Le gouvernement est par ailleurs habilité à clarifier et mettre en cohérence, par ordonnance, les régimes de prévention de fermeture et les règles de fermeture provisoire et définitive.

Dans ce cadre, il s'agirait, selon les rapports parlementaires, de « permettre de prévoir une gradation des mesures à mettre en œuvre avant d'arriver à une fermeture définitive des établissements et de tenir compte de la décentralisation intervenue dans le domaine de l'autorisation et du financement de ces établissements, afin d'en tirer les conséquences en termes de contrôle » (Avis Sén. n° 6, octobre 2004, Dériot).

L'ambition est là encore de mieux articuler des dispositions issues de lois successives. A ce titre, il est prévu de concilier le pouvoir de fermeture de l'autoritécompétente et, plus particulièrement, du président du conseil général, en sa qualité, le caséchéant, de responsable de l'autorisation, et le pouvoir de police du préfet, « en définissant de façon plus satisfaisante les motifs de fermeture définitive et les autorités administratives compétentes en fonction de ces motifs et en distinguant mieux le contrôle des normes techniques et financières de fonctionnement du contrôle au titre de l'ordre public en matière de protection des personnes » (Avis Sén. n° 6, octobre 2004, Dériot).

Toujours dans ce cadre, les modalités de nomination des administrateurs provisoires pouvant être placésà la tête des établissements sociaux et médico-sociaux pourraient également être mises en cohérence. En effet, actuellement, deux régimes coexistent au titre des articles L. 313-14 et L. 331-6 du code de l'action sociale et des familles. Dans le premier cas, désigné par l'autorité compétente, l'administrateur provisoire a pour mission de prévenir et d'éviter la fermeture définitive de l'établissement concerné alors que, dans la seconde hypothèse, nommépar le représentant de l'Etat dans le département, il a au contraire pour objectif de mettre en œuvre la fermeture définitive.

Le gouvernement pourrait également, selon nos informations, décider de modifier l'un des effets de la fermeture desétablissements et services sociaux et médico-sociaux prévu par l'article L. 313-19 du code de l'action sociale et des familles. Selon cette disposition, en cas de fermeture définitive d'un établissement ou d'un service social ou médico-social géré par une association, celle-ci doit reverser les sommes apportées par l'Etat, les collectivités territoriales et leurs établissements publics ou les organismes de sécurité sociale« à une collectivité publique ou unétablissement privé poursuivant un but similaire ». Or une structure sociale ou médico-sociale peut être gérée par une fondation, un organisme de sécurité sociale, un comité d'entreprise, un établissement public ou une collectivité territoriale. En cas de fermeture définitive, il y a, dans ce cas, soit absence de règles, soit application des règles spécifiques (statuts des fondations) ou des règles générales de l'organisme gestionnaire. Lesquelles peuvent parfois sembler inadaptées. Il est donc envisagé d'étendre cette règle à tous les organismes gestionnaires d'établissements sociaux ou médico-sociaux.

c - La sécuritéfinancière

L'habilitation porte, par ailleurs, sur la clarification des différents régimes de sécurité financière. A ce titre, le gouvernement pourrait chercher à mieux articuler, pour les établissements et services sociaux et médico-sociaux, les dispositions du code de l'action sociale et des familles avec celles de l'article L. 612-5 du code du commerce. Cette disposition vise à s'assurer que les conventions passées directement ou par personne interposée entre une personne morale et l'un de ses administrateurs ou l'une des personnes assurant un rôle de mandataire social ne remettent pas en cause le caractère désintéressé de la gestion. Les associations gestionnaires d'établissements sociaux et médico-sociaux sont évidemment concernées par cet article que le gouvernement devrait donc coordonner avec les procédures de contrôle organisées par ailleurs par le code de l'action sociale et des familles.

2 - LES MESURES SPÉCIFIQUESÀ CERTAINES CATÉGORIES DE STRUCTURES (art. 72, 6°)

La loi du 9 décembre 2004 habilite, par ailleurs, le gouvernement à simplifier les règles d'autorisation, d'habilitation et de tarification de certaines catégories d'établissements sociaux et médico-sociaux.

A cet égard, les services d'aide à domicile, lesétablissements pour personnes âgées ou les foyers-logements pourraient être visés.

a - Les services d'aide àdomicile

Alors que la loi du 2 janvier 2002 a inclus dans le champ desétablissements et services sociaux et médico-sociaux les services d'aide à domicile, notamment ceux non médicalisés qui délivrent des prestations d'aide ménagère, en particulier dans le cadre de l'allocation personnalisée d'autonomie, près de 8 000 services devraient être, dans les mois à venir, régularisés (autorisation, habilitation, tarification) par les présidents des conseils généraux (11). Ce qui représente une lourde charge de travail pour ces services.

Dès lors, le gouvernement pourrait, d'après nos sources, autoriser par ordonnance le président du conseil général à conclure une convention spécifique avec un ou plusieurs groupements départementaux d'associations gestionnaires de services d'aide àdomicile. Ceux-ci se verraient déléguer la mise enœuvre des autorisations, habilitations et tarifications de leurs associations adhérentes, avec l'accord de celles-ci. Cette mesure dérogatoire pourrait avoir un caractère expérimental.

b - Les tarifs des établissements pour personnes âgées

Aujourd'hui, dès lors qu'un établissement d'hébergement pour personnes dépendantes accueille une seule personne bénéficiaire de l'aide sociale, il est assujetti aux tarifs fixés par le conseil général pour l'ensemble de ses pensionnaires. De ce fait, les conseils généraux sont amenés à tarifer des milliers d'établissements hébergeant des personnes âgées habilités au titre de l'aide sociale alors que l'aide socialeà l'hébergement des personnes âgées ne finance qu'à titre très accessoire certains de cesétablissements. Aussi le gouvernement envisage-t-il une mesure quelque peu révolutionnaire : étendre, dans le cadre de la future ordonnance et dans certaines conditions, le champ de la tarification contractuelle (partie hébergement) des établissements n'accueillant pas de bénéficiaires de l'aide sociale - c'est-à-dire desétablissements à but lucratif - à ceux qui n'en accueillent qu'une minorité. Cela correspondrait, selon un avant-projet d'ordonnance, aux établissements ayant accueilli en moyenne au cours des trois derniers exercices moins de 50 % des bénéficiaires de l'aide sociale par rapport à leur capacité agréée. L'encadrement des tarifs financés par l'aide sociale pourrait alors être assuré par une référence à la moyenne des tarifs des établissements du département.

c - Les foyers-logements

Autre mesure envisagée : offrir aux foyers-logements pour personnes âgées la possibilité d'opter entre la tarification des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) et le régime de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) à domicile. En effet, les foyers-logements pour personnesâgées sont, selon le gouvernement, « des petites structures peu médicalisées qui accueillent dans des conditions proches du domicile plus de 130 000 personnesâgées dont certaines dépendantes ». Or la réglementation applicable aux EHPAD n'est pas forcément adaptée à ces structures qui privilégient l'hébergement de personnes faiblement dépendantes. Elle générerait pour eux des coûts administratifs et logistiques hors de proportion, voire les contraindrait parfois à la fermeture. Il est doncévoqué de permettre à ces structures de dérogerà la réglementation des EHPAD et d'en tirer les conséquences sur le régime de l'allocation personnalisée d'autonomie de leurs résidents.

3 - LES MESURES EN MATIERE DE TARIFICATION

a - Prévoir les conséquences de l'amendement Creton (art. 72, 5°)

Mesure réclamée de longue date, l'habilitation permet au gouvernement de prévoir les modalités de tarification et de financement du maintien des jeunes adultes handicapés dans les établissements d'éducation spéciale. En effet, l'article L. 242-4 du code de l'action sociale et des familles, dit « amendement Creton », prévoit le maintien des jeunes adultes handicapés dans les institutions pour mineurs en l'absence de possibilité de placement dans un établissement pour adultes vers lequel il a été orienté. Actuellement, le législateur n'a toutefois fixé ni les modalités d'application du principe posé par l'amendement Creton, ni renvoyé à un texte réglementaire le soin de les définir. Or la question de la tarification et du financement des journées de ces jeunes adultes maintenus enétablissement pour mineur a fait l'objet d'un contentieux abondant. Ainsi, le Conseil d'Etat a estimé, en 1993, que« les frais d'hébergement, d'une part, et les frais de soins, d'autre part, à l'exclusion de tous autres frais effectivement occasionnés par le maintien d'une personne handicapée dans un établissement d'éducation spéciale doivent être supportés par la ou les personnes morales qui auraient été normalement compétentes pour prendre en charge les frais de même nature entraînés par le placement de cette personne dans la catégorie d'établissements vers laquelle elle aété orientée par la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel. » Dans un second temps, il a précisé, en mai 2003, que le dispositif législatif ne nécessitait pas de décret d'application pour entrer en vigueur (12).

L'ordonnance devrait légaliser ces décisions jurisprudentielles pour en garantir l'application, notamment par les collectivités territoriales. Il pourrait ainsi être prévu que le tarif journalier de l'établissement dans lequel le jeune adulte handicapé est maintenu est pris en charge par l'aide sociale du département dans lequel il a son domicile de secours, si ce jeune est orienté vers unétablissement relevant de la compétence du conseil général. Dans les autres situations, ce tarif continuerait à être pris en charge par les organismes d'assurance maladie.

b - Donner une base légale à la rétroactivité des tarifs

Le gouvernement devrait également donner une base légale explicite à la mise en œuvre rétroactive des tarifs annuels des établissements sociaux et médico-sociaux lorsque ceux-ci n'ont pas étéarrêtés avant le 1er janvier de l'exercice en cause. En effet, en pratique, ceux-ci ne sont jamais fixés au 1er janvier de l'année concernée. Les établissements fonctionnent alors avec des douzièmes provisoires et les personnes accueillies continuent, pendant plusieurs mois, d'acquitter le tarif fixépour l'année précédente. Lorsque, après plusieurs mois, il faut régulariser cette situation, l'application rétroactive des tarifs fixés peutêtre, selon les départements et en fonction de la sévérité des juges, source de contentieux, d'inégalités de traitement selon les départements, les tarificateurs et les financeurs et d'insécuritéfinancière pour les usagers et les établissements.

c - Le contrôle budgétaire desétablissements publics (art. 72, 8°)

Autre habilitation accordée au gouvernement : celle de clarifier les dispositions relatives au budget exécutoire et au contrôle budgétaire dans lesétablissements publics sociaux et médico-sociaux.

Les rapports parlementaires relèvent en effet la confusion entre, d'une part, le régime d'approbation qui a pour objet de déterminer le financement des établissements publics sociaux et médico-sociaux, d'autre part, le contrôle de légalité qui conditionne le caractère exécutoire du budget et des décisions modificatives, et ce d'autant plus que ce sont les directions départementales des affaires sanitaires et sociales qui sont amenées à assurer ce double rôle.

Toujours dans ce cadre, il est envisagé de clarifier le droit applicable en matière de contrôle budgétaire des chambres régionales des comptes sur lesétablissements publics sociaux et médico-sociaux.

Enfin, dans la lignée de l'ordonnance du 4 septembre 2003 qui a prévu des mesures de simplification des conditions d'investissements immobiliers des établissements publics de santé, il est préconisé d'étendre le bénéfice de ces mesures aux établissements publics sociaux et médico-sociaux.

d - Une seule autorité de tarification pour les EHPAD

Parmi les 11 000 établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes, 10 000 relèvent du code de l'action sociale et des familles et 1 000 autres du code de la santé publique.

Afin de faciliter la mise en œuvre de la réforme de la tarification, le gouvernement pourrait prévoir de faire relever tous les EHPAD d'une même autorité de tarification pour ce qui concerne les dépenses de soins et d'unifier les enveloppes de crédits de l'assurance maladie.

4 - LES AUTRES MESURES

a - Les foyers de jeunes travailleurs (art. 72, 2°)

Actuellement, les foyers de jeunes travailleurs - destinésà assurer une action éducative ou un accompagnement au jeune travailleur de 16 à 30 ans, notamment en lui procurant l'hébergement, la nourriture, des activités culturelles et des loisirs - relèvent à la fois du code de la construction et de l'habitation (art. L. 351-2 et L.353-2) et du code de l'action sociale et des familles. L'article L. 312-1, I, 10° du code de l'action sociale et des familles inclut en effet ces foyers au sein de la catégorie des établissements et services sociaux et médico-sociaux, ce qui les soumet au régime de l'autorisation prévu par ce code. De son côté, le code de la construction les soumet également à des procédures de contrôle. L'objectif est donc de simplifier ce dispositif. Dans ce cadre, il est proposé d'inscrire, au sein du code de l'action sociale et des familles, les foyers de jeunes travailleurs dans une catégorie particulière qui ne devrait respecter que les règles relatives aux usagers des établissements et services sociaux et médico-sociaux et celles relatives aux procédures de contrôle du code de la construction et de l'habitation.

b - L'action alimentaire desétablissements (art. 72, 9°)

L'habilitation demandée permettra, en outre, au gouvernement de rapprocher les règles relatives à la fixation de l'obligation alimentaire dans les établissements publics sociaux et médico-sociaux de celles applicables auxétablissements de santé.

En effet, une réglementation ancienne, aujourd'hui abrogée, permettait aux hôpitaux comme aux hospices de saisir le juge afin d'obtenir de plein droit la fixation de l'obligation des débiteurs alimentaires envers la personne hospitalisée ou hébergée. L'article L. 6145-11 du code de la santé publique n'ouvre désormais cette possibilité qu'aux seuls établissements publics de santé, catégorie distincte des établissements publics sociaux et médico-sociaux qui relevaient auparavant de la catégorie des hospices. Par conséquent, pour faire fixer l'obligation alimentaire par le juge, les directeurs d'établissements sociaux et médico-sociaux doivent engager des procédures plus longues et complexes que dans le cadre des établissements publics de santé et doivent prouver, d'une part, que l'établissement ne dispose d'aucun autre moyen de droit pour obtenir le paiement des frais d'hébergement et, d'autre part, qu'il y a eu appauvrissement de l'établissement et corrélativement enrichissement des débiteurs alimentaires.

L'habilitation devrait donc permettre d'aligner la procédure applicable dans les établissements publics sociaux et médico-sociaux sur celle, plus simple, applicable aux établissements publics de santé.

c - L'exécution des décisions des juridictions de la tarification sanitaire et sociale (art. 72, 10°)

Le gouvernement est également habilité àsimplifier les règles permettant l'exécution des décisions des juridictions de la tarification sanitaire et sociale. En effet, l'article L. 351-6 du code de l'action sociale et des familles dispose aujourd'hui que les décisions de ces juridictions, qui fixent le montant des dotations globales, des remboursements forfaitaires, des prix de journée et autres tarifs, prennent effet « à compter de la date fixée dans la décision donnant lieu au litige ». Cette rédaction rend, selon les rapports parlementaires, « difficile l'action de l'administration en matière d'exécution des décisions de justice et constitue [rait] un frein àune bonne application de ces décisions » (Avis Sén n° 6, octobre 2004, Dériot). En effet, souligne le rapporteur, « selon le Conseil d'Etat, dans un arrêt Stockhausen du 1er juillet 1998, elle emporte pour conséquence qu'en cas d'annulation d'un arrêté de tarification, les tarifs doivent être recalculés à partir de la date fixée dans la décision donnant lieu au litige, de sorte que, dans l'hypothèse d'un transfert de compétence entre la date du litige et la date de la décision, le requérant est renvoyé vers l'ancienne autorité compétente pour le recalcul des tarifs. En outre, la modification du tarif de l'année n, impliquant une correction du résultat comptable de l'année n et donc aussi du résultat àaffecter en n+2, conduit à réformer le tarif n+2 qui, à son tour, entraîne des changements pour les années suivantes. » Au total, avec les délais de jugement, le nombre de retraitements nécessaires pour mettre en œuvre une décision du juge du tarif peutêtre élevé.

L'habilitation devrait donc conduire à modifier les règles de recalcul des tarifs en cas d'annulation d'un arrêté de tarification.

LES POLITIQUES SOCIALES

S'abonner
Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client abonnements@info6tm.com - 01.40.05.23.15