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LA LOI PERBEN II : Les dispositions concernant les détenus et l'aménagement de leur peine

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Parmi les innovations introduites par la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, la systématisation de la réponse judiciaire, une nouvelle architecture des juridictions de l'application des peines et le renforcement du rôle des directeurs des services pénitentiaires d'insertion et de probation en matière d'aménagement des fins de peines d'emprisonnement.

(Loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 et décision du Conseil constitutionnel n° 2004-492 DC du 2 mars 2004, J.O. du 10-03-04)

A l'heure où la surpopulation carcérale atteint des taux records, l'application de la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité va-t-elle permettre de trouver un juste équilibre entre la lutte contre la délinquance et l'amélioration des conditions de vie des détenus ? Car si certaines de ses dispositions favorisant les alternatives aux poursuites et à l'incarcération visent à vider les établissements pénitentiaires, d'autres, en instaurant une réponse pénale plus systématique, risquent d'avoir l'effet inverse.

Quoi qu'il en soit, la loi du 9 mars 2004 dite « loi Perben II » modifie en profondeur les règles en matière d'application des peines, alors même que ce n'était pas son ambition initiale lorsqu'elle fut présentée en conseil des ministres, en avril 2003, par le garde des Sceaux, Dominique Perben.

A l'origine de ce « bouleversement des règles de l'application des peines » (Rap. Sén. n° 441, tome 1, septembre 2003, Zocchetto), le député UMP, Jean-Luc Warsmann, rapporteur du texte à l'Assemblée nationale. S'inspirant de ses propres préconisations, listées dans un rapport remis à la chancellerie en avril 2003 sur les peines alternatives à la détention (1), ce député des Ardennes a donc, avec l'accord du gouvernement, introduit par amendements, repris et complétés par les sénateurs, nombre d'innovations.

En premier lieu, la loi tend à rendre la réponse pénale plus effective et systématique et refond l'application des peines en inscrivant dans le code de procédure pénale les grands principes devant la guider, à savoir la nécessité de l'effectivité des peines et les objectifs d'insertion ou de réinsertion des condamnés ainsi que de prévention des récidives.

Par ailleurs, la loi « Perben II » revoit complètement l'architecture des juridictions de l'application des peines en créant, à côté du juge de l'application des peines, des tribunaux de l'application des peines et une chambre de l'application des peines placée près la cour d'appel. Corrélativement, elle met fin aux juridictions régionales et nationale de la libération conditionnelle.

Toujours dans la perspective de l'effectivité de l'application des peines, le législateur prévoit par ailleurs des mesures en matière d'exécution des courtes peines ainsi qu'une nouvelle procédure d'aménagement des fins de peines d'emprisonnement conférant une large place aux directeurs des services pénitentiaires d'insertion et de probation.

Au-delà, les mesures alternatives aux poursuites sont également modifiées. A cet effet, les modalités du recours à la composition pénale, par exemple, sont simplifiées et la liste des mesures pouvant être proposées dans ce cadre étendue.

Plan du dossier

Dans ce numéro : I - Les nouvelles réponses pénales A - Le principe d'une réponse judiciaire systématiqueB - L'information sur les suites données aux plaintes et signalements II - L'application des peines A - Les grands principes de l'applicationdes peinesB - De nouvelles juridictions d'application des peinesC - L'exécution des courtes peinesD - L'accompagnement des condamnés en fin de peine Dans un prochain numéro : III - Les mesures alternatives aux poursuites IV - Les mesures alternatives à l'incarcération

Les mesures alternatives à l'incarcération sont également renforcées. Pour ce faire, plusieurs dispositions visent à relancer les travaux d'intérêt général et attribuent de nouvelles compétences au juge de l'application des peines pour lui permettre d'adapter la sanction à la situation d'un condamné. Il pourra ainsi substituer au travail d'intérêt général une peine de jours-amende ou convertir une peine d'emprisonnement ferme en un sursis assorti de l'obligation d'accomplir un travail d'intérêt général. Dans le même sens, le sursis avec mise à l'épreuve est également remanié. Là encore, le juge de l'application des peines se voit conférer de nouvelles attributions notamment en cas de non-respect par le condamné des obligations qui accompagnent le sursis. Toujours dans ce cadre, le recours au placement sous surveillance électronique devrait être encouragé par diverses mesures de la loi du 9 mars 2004.

Pour l'essentiel, ces dispositions voient leur entrée en vigueur différée dans le temps. Et des textes d'application ou des circulaires sont attendus pour les mettre en œuvre.

I - LES NOUVELLES RÉPONSES PÉNALES

La loi Perben II introduit plusieurs dispositions dans le code de procédure pénale en vue de rendre la réponse pénale plus effective et systématique. Corrélativement, elle renforce l'information des victimes, des plaignants et de diverses autorités sur les suites données à leurs plaintes et signalements.

A - Le principe d'une réponse judiciaire systématique (art. 68 et 74 de la loi)

Pour ce faire, la loi du 9 mars 2004 maintient tout d'abord le principe de l'opportunité des poursuites inscrit à l'article 40 du code de procédure pénale : « Le procureur de la République reçoit les plaintes et les dénonciations et apprécie la suite à leur donner. » Mais elle prévoit que cette règle devra dorénavant s'exercer dans le respect de l'article 40-1 du code de procédure pénale introduit par la loi du 9 mars 2004 (art. 74 de la loi, code de procédure pénale [CPP], art. 40 modifié ).

Selon cet article 40-1, lorsque le procureur de la République estime que les faits qui ont été portés à sa connaissance constituent une infraction commise par une personne dont l'identité et le domicile sont connus et pour laquelle aucune disposition légale ne fait obstacle à la mise en mouvement de l'action publique, c'est-à-dire à une action en justice déclenchée par les magistrats du parquet, il doit décider :

 soit d'engager des poursuites (information judiciaire, comparution immédiate...)  ;

 soit de mettre en œuvre une procédure alternative aux poursuites (composition pénale, rappel à la loi...)  ;

 soit de classer sans suite la procédure dès lors que les circonstances particulières liées à la commission des faits le justifient (par exemple, en raison de l'extrême faiblesse du trouble causé à l'ordre public).

Autrement dit, lorsque l'auteur des faits est identifié et son domicile connu et qu'aucune disposition légale ne fait obstacle à la mise en mouvement de l'action publique, le procureur de la République ne pourra classer sans suite qu'en présence de « circonstances particulières liées à la commission des faits ». Ainsi, tout en respectant le principe de l'opportunité des poursuites, la loi «  tend à réduire la part des classements sans suite et donc à améliorer la réponse pénale » (Rap. A.N. n° 856, tome I, mai 2003, Warsmann).

Cette disposition est applicable depuis le 12 mars 2004.

B - L'information sur les suites données aux plaintes et signalements (art. 68,74 et 207)

Parallèlement, la loi du 9 mars 2004 reformule les règles en vigueur sur l'information notamment des victimes et des plaignants.

1 - L'INFORMATION EN CAS DE POURSUITES OU DE MESURES ALTERNATIVES

Elle étend, tout d'abord, la liste des personnes que le procureur de la République est tenu d'aviser des poursuites ou des mesures alternatives aux poursuites qui ont été décidées à la suite de leur plainte ou de leur signalement (CPP, art. 40-2, al. 1 nouveau). Sont visés les plaignants, les victimes si elles sont identifiées, ainsi que, désormais, toute autorité constituée, tout officier ou fonctionnaire qui, dans l'exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit et le signale sans délai, en application de l'article 40 du code de procédure pénale, au procureur de la République.

Ainsi, « ce dispositif devrait notamment permettre aux maires qui dénoncent des infractions commises sur le territoire de leur commune d'être informés des suites données à leur intervention », explique le rapporteur au Sénat, François Zocchetto (Rap. Sén. n° 441, tome 1, septembre 2003). A noter que l'article 73 de la loi introduit également un dispositif d'information des maires (voir encadré, ci-contre).

Cette disposition est applicable depuis le 12 mars 2004.

2 - LA MOTIVATION DES DÉCISIONS DE CLASSEMENT SANS SUITE

En outre, lorsque le procureur de la République décidera de classer sans suite la procédure, il devra aviser également les plaignants, les victimes identifiées et les autorités de sa décision « en indiquant les raisons juridiques ou d'opportunité qui la justifient » (CPP, art. 40-2, al. 2 nouveau). Ainsi la loi consacre l'obligation pour le procureur de motiver ses décisions de classement sans suite, que l'auteur des faits soit identifié ou non. Ces dispositions n'entreront toutefois en vigueur qu'à compter du 31 décembre 2007 (art. 207,  VII de la loi).

Auparavant, le code de procédure pénale prévoyait uniquement une telle motivation des classements sans suite et leur notification par écrit lorsque étaient en cause certaines infractions de nature sexuelle commises contre des mineurs (viol, agression sexuelle, corruption de mineur...). Ces dispositions spécifiques sont supprimées par la loi Perben II (art. 74 de la loi, CPP, art. 40 modifié).

En attendant l'entrée en vigueur de cette disposition, la loi du 9 mars 2004 prévoit un régime transitoire pour permettre aux juridictions de s'organiser en conséquence, notamment en termes d'informatisation. Ainsi, jusqu'au 31 décembre 2007, le procureur de la République ne devra aviser les intéressés (plaignants, victime identifiée, autorités) du classement sans suite assorti des raisons juridiques et d'opportunité que si l'auteur des faits est identifié (art. 207, VII de la loi). En outre, toujours pendant cette période intermédiaire, il est prévu que « lorsque la plainte est déposée contre une personne dont l'identité n'est pas connue », la victime sera prévenue qu'elle ne sera informée par le procureur de la République de la suite réservée à sa plainte que dans le cas où l'auteur des faits serait identifié (CPP, art. 15-3 modifié).

Pour finir, la loi prévoit explicitement que toute personne qui a dénoncé au procureur de la République des faits ayant donné lieu à une décision de classement sans suite peut former un recours hiérarchique auprès du procureur général. Celui-ci pourra alors soit enjoindre le procureur de la République d'engager des poursuites, soit informer l'intéressé s'il estime le recours infondé (CPP, art. 40-3 nouveau). Cette disposition est entrée en vigueur le 12 mars 2004.

II - L'APPLICATION DES PEINES

Tout en cherchant à rendre la réponse pénale plus systématique, le législateur refond le droit de l'application des peines. La plupart de ces dispositions entreront en vigueur au 1er janvier 2005 (voire au 31 décembre 2005 ou 2006). Certaines sont toutefois d'application immédiate.

L'information des maires par le parquet en matière de délinquance (art. 73 de la loi)

« Les maires revendiquent depuis longtemps une meilleure information sur les infractions commises sur le territoire de leur commune » (Rap. Sén. n° 441, tome 1, septembre 2003, Zocchetto) . C'est pour répondre à cette attente que la loi contient une disposition permettant d'améliorer l'information de ces élus. Une disposition d'ailleurs inspirée des travaux d'un groupe de travail piloté par la direction des affaires criminelles et des grâces du ministère de la Justice (2). Et qui est entrée en vigueur le 12 mars 2004.

A cet effet, deux articles sont introduits dans le code général des collectivités territoriales  (CGCT). Le premier, l'article L. 2211-2, procède à un rappel des dispositions du code de procédure pénale : « Conformément aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 40 du code de procédure pénale, le maire est tenu de signaler sans délai au procureur de la République les crimes ou les délits dont il acquiert la connaissance dans l'exercice de ses fonctions. » Il est ensuite précisé que le maire est avisé des suites données à ce signalement (poursuites, alternatives aux poursuites, classement sans suite) en application de l'article 40-2 du code de procédure pénale.

La loi Perben II prévoit, en outre, que le procureur de la République peut porter à la connaissance du maire ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale toutes les mesures ou décisions de justice, civiles ou pénales, dont la communication paraît nécessaire à la mise en œuvre d'actions de prévention, de suivi et de soutien, engagées ou coordonnées par l'autorité municipale ou intercommunale.

Les destinataires de cette information sont tenus au secret professionnel garanti par les articles 226-13 et 226-14 du code pénal, sous réserve toutefois de l'exercice de cette mission de prévention, de suivi et de soutien par la municipalité.

En outre, les maires sont désormais informés « sans délai » par les responsables locaux de la police ou de la gendarmerie « des infractions causant un trouble grave à l'ordre public commises sur le territoire de leur commune » dans le respect du secret de l'enquête et de l'instruction (CGCT, art. L. 2211-3 nouveau) . Relevons qu'un décret du 17 juillet 2002 sur les dispositifs territoriaux de sécurité et de coopération pour la prévention et la lutte contre la délinquance prévoyait une telle information des maires mais uniquement à propos des actes graves de délinquance (3).

A - Les grands principes de l'application des peines (art. 159 et 207)

A l'initiative du député UMP Jean-Luc Warsmann, rapporteur de la loi à l'Assemblée nationale et auteur d'un rapport sur les peines alternatives à la détention, la loi Perben II inscrit dans le code de procédure pénale les grands principes de l'application des peines (CPP, art. 707 nouveau).

Cette disposition entrera en vigueur au 1erjanvier 2005 (art. 207, II de la loi).

1 - UNE EXÉCUTION EFFECTIVE

Premier principe devant guider l'application des peines :l'exécution des décisions. Ainsi, sur décision ou sous le contrôle des autorités judiciaires, les peines prononcées par les juridictions pénales doivent «  sauf circonstances insurmontables, être mises à exécution de façon effective et dans les meilleurs délais », est-il désormais inscrit à l'article 707 nouveau du code de procédure pénale.

Il s'agit, pour le rapporteur à l'Assemblée nationale, de réaffirmer que « le traitement de la délinquance ne s'arrête pas au prononcé de la décision » (J.O.A.N. [C.R.] n° 48 du 24-05-03).

2 - UN OBJECTIF DE RÉINSERTION DES CONDAMNÉS

En outre, l'exécution de ces peines doit favoriser, « dans le respect des intérêts de la société et des droits des victimes, l'insertion ou la réinsertion des condamnés ainsi que la prévention de la récidive » (CPP, art. 707, al. 2 nouveau ). Par ce biais, le législateur veut rappeler que l'objectif de l'exécution des décisions de justice, notamment des peines privatives de liberté, est «  d'abord de prévenir la récidive et la commission de nouvelles infractions et ensuite de faire respecter l'intérêt de la société et les droits des victimes, enfin de tendre à l'insertion [...] et à la réinsertion[...] des condamnés » (J.O.A.N. [C.R.] n° 48 du 24-05-03).

3 - L'AMÉNAGEMENT DES PEINES AU COURS DE LEUR EXÉCUTION

Conséquence de l'objectif de réinsertion, les peines peuvent être aménagées en cours d'exécution pour tenir compte de l'évolution de la personnalité et de la situation du condamné, indique en outre la loi du 9 mars 2004. « L'individualisation des peines doit, chaque fois que cela est possible, permettre le retour progressif du condamné à la liberté et éviter une remise en liberté sans aucune forme de suivi judiciaire » (CPP, art. 707, al. 3 nouveau).

« Le législateur doit clairement indiquer que le système de “sortie sèche” est le plus détestable, si l'on entend lutter contre la récidive ou la commission de nouvelles infractions », explique le rapporteur à l'Assemblée nationale (J.O.A.N. [C.R.] n° 48 du 24-05-03).

B - De nouvelles juridictions d'application des peines (art. 159 à 161 et 207)

Toujours sur proposition du rapporteur à l'Assemblée nationale, Jean-Luc Warsmann, complétée au Sénat, la loi du 9 mars 2004 insère dans le code de procédure pénale un chapitre consacré aux « juridictions de l'application des peines ». Dans ce cadre, elle précise les missions du juge de l'application des peines- jusque-là exposées dans un article 722 du code de procédure pénale, jugé complexe, qui est de son côté abrogé. Elle confère une valeur législative à nombre de dispositions en vigueur d'ordre réglementaire et rassemble des règles éparses au sein d'un même chapitre du code de procédure pénale.

Ce dispositif n'entrera toutefois en vigueur que le 1er janvier 2005, le temps de permettre aux juridictions de se réorganiser en conséquence et que les textes d'application paraissent (art. 207, II de la loi). Un décret doit notamment préciser ce dispositif (CPP, art. 712-22 nouveau). Dans l'attente, l'article 722 demeure applicable.

La nouvelle architecture proposée par la loi Perben II repose sur la création, au côté du juge de l'application des peines, de tribunaux de l'application des peines et de la chambre de l'application des peines de la cour d'appel.

Quelques définitions (4)

  Le fractionnement ou la suspension de la peine (emprisonnement, amende) peut être décidée par la juridiction pour des motifs « graves » (médical, familial, professionnel ou social).

  La libération conditionnelle consiste à mettre en liberté anticipée, et sous contrôle du juge de l'application des peines, un condamné qui a purgé une partie de sa peine et a donné des signes d'amendement.

  La permission de sortir autorise un condamné à s'absenter d'un établissement pénitentiaire. Elle a pour objet de préparer la réinsertion professionnelle ou sociale du condamné, de maintenir ses liens familiaux ou de lui permettre d'accomplir une obligation exigeant sa présence.

  Le placement à l'extérieur permet au condamné d'être employé au dehors d'un établissement pénitentiaire à des travaux contrôlés par l'administration.

  Le placement sous surveillance électronique s'adresse à certains condamnés. Concrètement, les intéressés portent au poignet ou à la cheville un bracelet électronique qui transmet des signaux à un récepteur placé sur leur lieu d'assignation (domicile, lieu de travail ou de formation...) et relié par ligne téléphonique à un centre de surveillance.

  La semi-liberté est une modalité d'exécution d'une peine permettant à un condamné d'exercer, en dehors d'un établissement pénitentiaire, une activité professionnelle, de suivre un enseignement ou de bénéficier d'un traitement médical. A l'issue de ces activités, le condamné doit rejoindre le centre de semi-liberté.

1 - UNE NOUVELLE ARCHITECTURE

Avec la loi Perben II, le juge de l'application des peines et le tribunal de l'application des peines constituent les juridictions de l'application des peines du premier degré. Ces dernières sont chargées de fixer les principales modalités de l'exécution des peines privatives de liberté (emprisonnement, placement à l'extérieur, semi- liberté...) ou de certaines peines restrictives de liberté (interdiction de séjour, travail d'intérêt général, libération conditionnelle...), en orientant et en contrôlant les conditions de leur application (CPP, art. 712-1 nouveau). Leurs décisions peuvent être attaquées par la voie de l'appel porté devant la chambre de l'application des peines de la cour d'appel, créée à cet effet. Selon le cas, la décision est prise par le président de la chambre seul ou par la chambre en formation collégiale. Un pourvoi en cassation est ensuite possible.

Plus précisément, la loi Perben II prévoit, en premier lieu, la disparition, à compter du 1erjanvier 2005, de la juridiction régionale de la libération conditionnelle et de la juridiction nationale de la libération conditionnelle. Pour mémoire, actuellement, lorsque la peine d'emprisonnement prononcée est d'une durée inférieure à 10 ans ou que, quelle que soit la peine initialement prononcée, la durée de détention restant à subir est inférieure ou égale à 3 ans, les mesures de libération conditionnelle sont décidées - et le seront jusqu'au 31 décembre 2004 - par le juge de l'application des peines, et susceptibles d'appel devant la chambre des appels correctionnels. Dans les autres cas, les mesures de libération conditionnelle relèvent de la compétence de la juridiction régionale de la libération conditionnelle et, en appel, de la juridiction nationale de la libération conditionnelle placée près la Cour de cassation.

Ainsi, ces deux instances sont appelées à disparaître. La première, la juridiction régionale de la libération conditionnelle, se transformera en tribunal de l'application des peines avec des compétences élargies. Ce dernier interviendra toujours en matière de libération conditionnelle mais également en matière de réexamen des mesures de sûreté et de suspension de peines ne relevant pas de la compétence du juge de l'application des peines. Par ailleurs, la juridiction nationale de la libération conditionnelle est supprimée. C'est la chambre de l'application des peines qui récupère ses attributions en matière de libération conditionnelle, ses décisions étant susceptibles d'un pourvoi en cassation.

Selon le rapporteur du Sénat, François Zocchetto, le dispositif antérieur comportait deux défauts : il ne permettait pas, pour les mesures de libération conditionnelle relevant de la juridiction régionale de la libération conditionnelle, le pourvoi en cassation, dès lors que la juridiction d'appel - la juridiction nationale de la libération conditionnelle - était déjà placée auprès de la Cour de cassation. En outre, l'activité de la juridiction nationale tendait à augmenter régulièrement, ce qui peut, selon lui, justifier un examen des appels au sein des cours d'appel.

Ainsi, au 1er janvier 2005, les affaires pendantes devant les juridictions régionales de la libération conditionnelle et la juridiction nationale de la libération conditionnelle seront respectivement transférées devant les tribunaux de l'application des peines compétents et les chambres de l'application des peines des cours d'appel compétentes (art. 207, II de la loi).

2 - LES JURIDICTIONS DU PREMIER DEGRÉ

La loi du 9 mars 2004 fait du juge de l'application des peines un véritable juge du contrôle de l'application des peines, autorisé à s'assurer de l'exécution des mesures mais aussi, le cas échéant, à les révoquer. Actuellement, en effet, le droit en vigueur réserve à la juridiction ayant prononcé la condamnation la compétence pour révoquer certaines mesures, comme le sursis avec mise à l'épreuve ou l'obligation d'accomplir un travail d'intérêt général (5). « Cette situation n'est pas satisfaisante car le retour devant la juridiction de jugement pour des questions liées à l'inexécution des peines constitue une lourdeur incontestable qui participe de l'inexécution des peines », explique le rapporteur à l'Assemblée nationale (Rap. A.N. n° 1236, novembre 2003, Warsmann).

Outre la fixation de la composition de ces juridictions (CPP, art. 712-2 et 712-3 nouveaux), la loi Perben II prévoit une répartition des compétences entre chacune d'elles ainsi que la procédure à suivre en leur sein.

a - Le juge de l'application des peines

Le juge de l'application des peines est chargé de fixer les principales modalités de l'application des peines (délivrance de permissions de sortir, réductions de peines, placement sous surveillance électronique, placement à l'extérieur, libération conditionnelle des condamnés à une peine d'emprisonnement inférieure à 10 ans ou dont la durée de détention restant à subir est inférieure à 3 années...).

La loi fixe précisément les règles de procédure applicables à ces décisions. Ainsi, les mesures relevant de sa compétence sont accordées, modifiées, refusées, ajournées, retirées ou révoquées par ordonnance ou jugement motivé de ce magistrat (CPP, art. 712-4 nouveau). Celui-ci peut agir d'office, sur la demande du condamné ou sur réquisition du procureur de la République selon une procédure qui varie suivant qu'il y a ou non exigence d'un débat contradictoire (CPP, art. 712-5 et 712-6 nouveaux).

A noter qu'est territorialement compétent le juge de l'application des peines de la juridiction dans le ressort de laquelle est situé soit l'établissement pénitentiaire dans lequel le condamné est écroué, soit, si ce dernier est libre, sa résidence habituelle (CPP, art. 712-10 nouveau). S'il n'a pas en France de résidence habituelle, le juge de l'application des peines compétent est celui du tribunal dans le ressort duquel a son siège la juridiction ayant statué en première instance. Des règles de compétences particulières s'appliquent pour l'exécution d'une mesure de placement à l'extérieur, de semi-liberté, de placement sous surveillance électronique ou de libération conditionnelle.

Les décisions prises sans débat contradictoire

Certaines décisions sont prises par ordonnance motivée sans débat contradictoire mais après avis de la commission de l'application des peines (CPP, art. 712-5 nouveau). Cette règle peut néanmoins être écartée en cas d'urgence. Ces ordonnances sont susceptibles d'appel. Il s'agit des réductions de peine, des autorisations de sortie sous escorte et des permissions de sortir.

La commission est présidée par le juge de l'application des peines. Le procureur de la République et le chef de l'établissement pénitentiaire en sont membres de droit. Elle est réputée avoir rendu son avis si celui-ci n'est pas intervenu dans le délai de un mois à compter du jour de sa saisine.

La loi Perben II innove donc car, actuellement, le juge de l'application des peines statue en ces matières par simple mesure d'administration judiciaire, non susceptible d'appel, prise après avis de la commission d'application des peines. Il y a donc juridictionnalisation de ces mesures. Relevons toutefois que ce droit d'appel entrera en vigueur le 31 décembre 2005 (art. 207, IV de la loi).

Les décisions soumises à débat contradictoire

En revanche, certaines décisions sont prises par jugement motivé à l'issue d'un débat contradictoire (CPP, art. 712-6 nouveau).

Sont visées, dans ce cadre, les mesures de placement à l'extérieur, de semi-liberté, de fractionnement et de suspension des peines, de placement sous surveillance électronique et de libération conditionnelle des condamnés à une peine d'emprisonnement inférieure à 10 ans ou de ceux dont , quelle que soit la peine initialement prononcée, la durée de détention restant à subir est inférieure ou égale à 3 ans .

Cette procédure est également applicable, sauf si la loi en dispose autrement, aux décisions du juge de l'application des peines concernant les peines de suivi socio-judiciaire, d'interdiction de séjour, de travail d'intérêt général, d'emprisonnement assorti de sursis avec mise à l'épreuve ou d'obligation d'accomplir un travail d'intérêt général ou les mesures d'ajournement du prononcé de la peine avec mise à l'épreuve.

Dans ces cas, le juge de l'application des peines rend sa décision après avis du représentant de l'administration pénitentiaire, à l'issue de ce débat, tenu en chambre du conseil. Concrètement, pendant ce débat, le magistrat entendra les réquisitions du ministère public et les observations du condamné ainsi que, le cas échéant, celles de son avocat. Lorsque le condamné est détenu, ce débat peut se tenir dans l'établissement pénitentiaire ou par le biais d'un procédé de visioconférence (CPP, art. 706-71 inchangé).

Toutefois, par souci d'efficacité, le juge de l'application des peines peut, avec l'accord du procureur de la République et celui du condamné ou de son avocat, octroyer l'une de ces mesures sans procéder à un débat contradictoire.

De même, par exception, les décisions modifiant ou refusant de modifier ces mesures ou les obligations en résultant sont prises par ordonnance motivée du juge de l'application des peines sans débat contradictoire. Ce, à moins que le procureur de la République ne demande qu'elles fassent l'objet d'un jugement pris après un tel débat ( CPP, art. 712-8 nouveau).

A noter également que des dispositions spécifiques sont prévues si le condamné non détenu ne se présente pas, sans motif légitime, au débat contradictoire après y avoir été convoqué (CPP, art. 712-9 nouveau).

b - Le tribunal de l'application des peines

De son côté, le tribunal de l'application des peines interviendra pour les libérations conditionnelles des condamnés à une peine supérieure à 10 ans d'emprisonnement, pour l'examen des demandes tendant au relèvement de la période de sûreté et pour la suspension de peines qui ne relèvent pas du juge de l'application des peines.

Ces mesures seront accordées, ajournées, refusées, retirées ou révoquées par jugement motivé du tribunal de l'application des peines saisi sur la demande du condamné, sur réquisition du procureur de la République ou à l'initiative du juge de l'application des peines compétent (CPP, art. 712-7 nouveau).

Ces jugements seront, en outre, rendus, après avis du représentant de l'administration pénitentiaire, à l'issue d'un débat contradictoire au cours duquel la juridiction entendra les réquisitions du parquet et les observations du condamné ainsi que, le cas échéant, celles de son avocat. Lorsque le condamné est détenu, ce débat peut se tenir dans l'établissement pénitentiaire (CPP, art.712-7 nouveau).

Les décisions modifiant ou refusant de modifier les mesures ordonnées

LES POLITIQUES SOCIALES

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