Annoncée dans le cadre du plan triennal de lutte contre les exclusions (1), la loi du 27 juillet 1999 portant création d'une couverture maladie universelle (CMU) permet à tout résident stable et régulier, qui n'a pas de droits ouverts auprès d'un régime de sécurité sociale, de bénéficier, sur seule justification de sa résidence, des prestations en nature du régime général. L'affiliation estimmédiate, dès le dépôt de la demande, et automatique.
« Plus on est modeste, plus on est précaire, plus le bénéfice d'une garantie complémentaire est essentiel. La réalité est pourtant inverse :plus vous êtes exposé moins vous êtes protégé », déclarait Martine Aubry, le 27 avril, lors de l'ouverture de la discussion sur le projet de loi à l'Assemblée nationale. Aussi, au-delà de la couverture de base, la loi prévoit, pour les personnes répondant à une condition de ressources, la prise en charge du ticket modérateur et du forfait journalier, ainsi que des modalités de remboursement adaptées pour les prothèses, notamment en matière dentaire et optique. Ce droit est assorti de la dispense d'avance de frais.
Pour leur couverture complémentaire, les bénéficiaires peuvent choisir entre les caisses primaires d'assurance maladie (CPAM), l'adhésion à une mutuelle ou la souscription d'un contrat auprès d'une institution de prévoyance ou d'une société d'assurances.
Au total, 6 millions de personnes en situation précaire pourront se faire soigner gratuitement, pour un coût global chiffré, par le gouvernement, à 9 milliards de francs en année pleine. Le financement de cette nouvelle protection repose sur des transferts financiers consécutifs à la disparition de l'aide médicale départementale et de l'assurance personnelle, une augmentation de la participation de l'Etatet l'instauration d'une taxe nouvelle sur le chiffre d'affaires santé des mutuelles et des sociétés d'assurances.
Qualifié de « grande avancée sociale » par la ministre de l'Emploi et de la Solidarité, ce texte n'aura pourtant pas réussi à rassembler les parlementaires, bien que personne n'en ait contesté l'objectif : permettre un réel accès de tous aux soins. Pour certains élus, comme pour les associations de solidarité, l'effet de seuilinstitué par la loi constitue une nouvelle source d'exclusion (2). De même, le choix d'une gestion partenariale, par les CPAM et les organismes complémentaires, du volet protection complémentaire a été vivement contesté. Accusant le gouvernement de créer une« pseudo-complémentaire », les sénateurs de l'opposition avaient, alors, opposé à la couverture maladie universelle la création d'une allocation personnalisée à la santé. Calquée sur l'aide personnalisée au logement, cette prestation dégressive aurait permis d'aider les plus démunis à payer eux-mêmes leurs cotisations auprès des organismes de protection complémentaire.
Par ailleurs, les députés de l'opposition (groupes DL, RPR et UDF) ont saisi le Conseil constitutionnel (3), dénonçant la rupture d'égalité entre les assurés sociaux, du fait de l'effet de seuil. En outre, ils considéraient que le monopole donné aux CPAM, pour gérer le régime de base, plaçait ces dernières en situation de concurrence déloyale, vis-à-vis des mutuelles et des sociétés d'assurances, pour la gestion de la couverture complémentaire. Des arguments que le Conseil constitutionnel a rejeté, le 23 juillet. De son côté, la Fédération nationale interprofessionnelle des mutuelles a, dès le 19 juillet, déposé 2 plaintes auprès de la Commission européenne. La première pour « aide d'Etat non notifiée » à la Commission et la seconde pour « abus de position dominante ».
L'entrée en vigueur de la CMU est fixée au1er janvier 2000, sous réserve de certaines dispositions particulières aux dates d'effet spécifiques. Il reste donc moins de 6 mois au gouvernement pour publier l'ensemble des textes d'application et à la caisse nationale d'assurance maladie pour conclure avec les professionnels de santé les accords indispensables à sa mise en œuvre effective.
Enfin, sous le titre V du texte, se cache une« miniloi portant diverses mesures d'ordre sanitaire et sociale » (Rap. A. N. n° 1518, tome II, Recours). Le calendrier parlementaire n'ayant pas permis d'inscrire un tel texte à l'ordre du jour, le gouvernement a saisi l'opportunité de rattacher diverses mesures de « modernisation sanitaire et sociale » à la CMU, pour les faire voter par le législateur. Celles-ci feront l'objet d'une étude dans un prochain numéro.
La sécurité sociale a été créée par une ordonnance du 4 octobre1945. A l'époque, trois principes fondamentaux sont affirmés : la généralisation de la sécurité sociale à toute la population, l'unité des institutions et l'universalité des risques. Toutefois, l'affiliation à la sécurité sociale étant liée à l'exercice d'une activité professionnelle ou assimilée, la généralisation complète du système ne pourra jamais être atteinte.
La loi du 2 janvier 1978 crée l'assurance personnelle facultative. Là encore, la généralisation de la sécurité sociale reste théorique : les personnes les plus démunies demeurent en dehors du champ. En 1988, un nouveau pas est franchi : le bénéfice du RMI ouvre le droit à une affiliation automatique à l'assurance personnelle, c'est-à-dire à la sécurité sociale de base pour les allocataires non couverts par un régime obligatoire d'assurance maladie. En1992, une réforme de l'aide médicale protège davantage les allocataires du RMI en instaurant une prise en charge à 100 % de leurs dépenses maladie, c'est-à-dire en couvrant aussi la part complémentaire.
Aujourd'hui, quelque 150 000 personnes sont toujours exclues du système. La CMU leur donne, enfin, une couverture pour leurs frais de santé. L'idée d'une assurance maladie généralisée, conforme à l'ambition proclamée en 1945, se trouve désormais concrétisée. Même si on peut encore déplorer, à l'instar de certaines associations de solidarité (4), l'effet de seuil induit par la loi, ainsi que l'exclusion des étrangers en situation irrégulière de ce nouveau dispositif.
La loi garantit à tous un droit à être affilié au régime général de sécurité sociale sur critère de résidence. Cette affiliation confère à son bénéficiaire un droit immédiat et personnel à la prise en charge de ses frais de santé. Le régime facultatif de l'assurance personnelle est, par conséquent, supprimé.
Le droit à l'affiliation au régime général est ouvert à tous, sur le seul critère de résidence stable et régulière. Les personnes dont les revenus sont inférieurs à un certain montant sontexonérées de cotisation.
Toute personne, quelle que soit sa nationalité, résidant de façon stable et régulière en France ou dans un département d'outre-mer, est obligatoirement affiliée au régime général de sécurité sociale, dès lors qu'elle n'a droit, à aucun autre titre, aux prestations en nature d'un régime d'assurance maladie et maternité.
Le critère de résidence stable et régulière sera précisé par décret. Le code de la sécurité sociale exigeant une durée de résidence en France de 3 mois pour prétendre au bénéfice du régime de l'aide sociale, « il est possible que cette durée soit celle retenue par le décret », a indiqué Jean-Claude Boulard, rapporteur du projet de loi devant l'Assemblée nationale (5) (Rap. A. N. n° 1518, Boulard).
Les contrats d'assurance privés souscrits par les personnes qui, n'étant pas couvertes par un régime obligatoire, n'avaient pas fait le choix de l'assurance personnelle, seront résiliés de plein droit à compter de la date d'affiliation au régime général. Les cotisations ou primes serontremboursées au prorata de la durée du contrat restant à courir.
Si la garantie offerte par ces contrats est supérieure à celle qu'assure le régime général, le contrat pourra être maintenu en vigueur par un avenant et avec une réduction de prime.
Selon le rapporteur du projet de loi, Jean-Claude Boulard, en 1995, 61 000 personnes avaient souscrit une assurance au premier franc, dont 61 % de frontaliers et 6, 3 %d'expatriés.
Les demandeurs sans domicile fixe doivent élire domicile auprès d'un organisme agréé à cet effet par l'autorité administrative ou d'un centre communal ou intercommunal d'action sociale.
Les modalités d'application de cet article sont renvoyées à un décret.
Les pupilles de l'Etat qui, jusqu'à présent, relevaient de l'aide médicale, sont affiliés au régime général sur critère de résidence.
Bien qu'elles résident ou séjournent en France, certaines personnes n'ont pas vocation à être affiliées au régime général sur critère de résidence.
Il s'agit, outre des membres du corps diplomatique ou consulaire, des personnes en séjour sur le territoire national pour suivre un traitement médical ou une cure, dont la prise en charge relève du système de protection sociale de leur pays, et des travailleurs frontaliers résidant en France. Ces derniers peuvent, en effet, choisir d'être affiliés dans le pays où ils travaillent.
Par ailleurs, le législateur a également expressément exclu de la CMU :
• les étudiants. Les étudiants de l'enseignement supérieur, des écoles techniques supérieures, des grandes écoles et des classes du second degré préparatoires à ces écoles, « qui ne sont ni assurés sociaux ni ayants droit d'assuré social demeurent affiliés obligatoirement à leurs régimes d'assurance sociale spécifiques et ce, même s'ils sont ayants droit d'une personne affiliée au régime général sur la base du nouveau critère de résidence » ;
• les ministres des cultes
• et les membres des congrégations et collectivités religieuses.
Ces trois catégories de personnes conservent leurs régimes spécifiques. Afin d'harmoniser leur situation avec celle des bénéficiaires de la CMU, la loi supprime le lien existant entre le versement des prestations et le paiement régulier des cotisations.
Les personnes dont les ressources sont inférieures à un plafond, qui sera fixé par décret, seront affiliées gratuitement au régime général.
Ce plafond devrait, selon les indications données par le ministère de l'Emploi et de la Solidarité aux parlementaires (Rap. A. N. n° 1518, Boulard), s'établir à :
• 3 500 F par mois pour une personne isolée
• 5 200 F pour 2 personnes
• 6 300 F pour 3 personnes
• 7 700 F pour 4 personnes
• et 1 400 F en plus par personne supplémentaire.
Il sera révisé chaque année, pour tenir compte de l'évolution des prix.
En revanche, les intéressés dont les ressources sont supérieures à ce seuil devrontacquitter une cotisation. Son montant sera fixé en pourcentage des revenus, en prenant pour référence le mode de calcul utilisé pour l'appréciation du seuil déclenchant l'exonération du paiement de la CSG. Un décret déterminera le taux et les modalités de calcul de cette cotisation, ainsi que les obligations déclaratives incombant aux assujettis.
La question de l'effet de seuil a fait l'objet de vives polémiques, autant au Parlement que dans la société civile. Rappelons que, dans un premier temps, la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale avait adopté un amendement destiné, d'une part, à relever le seuil à 3 800 F pour une personne seule (qui est le seuil de pauvreté fixé par l'INSEE) et, d'autre part, à instaurer une cotisation dégressive jusqu'au SMIC. Cette mesure aurait permis d'étendre le dispositif à 2 millions de personnes supplémentaires. Son coût a été chiffré par le gouvernement à 2 milliards de francs.
Saisi par les députés de l'opposition, qui dénonçaient l'effet couperet induit par le plafond de ressources, le Conseil constitutionnel a indiqué dans un communiqué en date du 23 juillet que « eu égard au but que s'est fixé le législateur- assurer la prise en charge intégrale des dépenses de santé des personnes disposant de faibles ressources et les dispenser d'avance de frais - il lui était loisible de fixer le principe d'un plafond de ressources pour déterminer les bénéficiaires du nouveau régime ». Toutefois, cette instance a émis une réserve quant aux montants des plafonds de ressources qui seront fixés par décret. Ceux-ci devront, en effet, « respecter les dispositions du préambule de la Constitution de 1946 » (6).
A noter : les personnes handicapées,titulaires de l'allocation aux adultes handicapés(3 540, 41 F/mois), ne sont pas concernées par l'effet de seuil. Elles bénéficient, en effet, des prestations maladie et maternité au titre de l'article L. 381-27 du code de la sécurité sociale. En outre, les personnes prises en charge à 100 % en raison d'une affection de longue durée, continueront à bénéficier de la gratuité des soins pour cette pathologie.
Désormais sans objet, le chapitre du code de la sécurité sociale relatif à l'assurance personnelle est abrogé. Créée par la loi du 2 janvier 1978, cette assurance concerne les personnes résidant en France dans des conditions régulières depuis 3 mois et susceptibles de n'être couvertes par aucun des régimes obligatoires existants. L'affiliation est facultative. Elle ouvredroit aux prestations du régime général, moyennant le paiement d'une cotisation (7). Les cotisations des personnes dont les ressources se situent au-dessous d'un plafond peuvent être prises en charge par le fonds de solidarité vieillesse (pour les personnes âgées), par les caisses d'allocations familiales ou, en dernier ressort, par l'aide médicale de l'Etat ou des départements.
Toutefois, ces dispositions demeurent en vigueur pour la répartition du solde des opérations de recettes et de dépenses du régime de l'assurance personnelle afférent à l'exercice 1999.
Le versement des prestations n'est plus subordonné à l'acquittement des cotisations. En conséquence, les dispositions du code de la sécurité sociale liant le paiement des cotisations à l'ouverture du droit aux prestations en nature de l'assurance maladie et maternité sont supprimées.
Cependant, il est prévu « qu'en cas demauvaise foi du bénéficiaire », le versement des prestations en nature de l'assurance maladie pourra être suspendu, dans des conditions qui seront fixées par décret. Néanmoins, est-il précisé, « cette sanction n'affecte pas les ayants droitde la personne convaincue de mauvaise foi ». Selon Jean-Claude Boulard, « cette disposition, qui déroge au schéma général de la loi, répond à la situation particulière des régimes telles la CANAM et la MSA, qui sont confrontés à des campagnes d'appel au refus de cotiser » (Rap. A. N. n° 1518, Boulard).
Toute personne qui s'adresse à une caisse de sécurité sociale peut, sur justification de sa résidence et de son identité, prétendre immédiatement aux prestations en nature du régime général.
Toute personne déclarant, auprès d'une caisse primaire d'assurance maladie, ne pas bénéficier des prestations en nature d'un régime de maladie et de maternité est immédiatement affiliée au régime général. Cette affiliation est conditionnée par le critère de résidence stable et régulière en France métropolitaine ou dans un DOM et par la production d'un document faisant foi de l'identité du demandeur.
L'affiliation est immédiate puisque lebénéfice des prestations en nature estouvert dès le dépôt de la demande. La caisse pressentie ne recherche qu'a posteriori si la personne concernée est susceptible de relever d'un autre régime existant. Une disposition qui« répond à la situation de personnes se trouvant en position d'extrême précarité et ignorantes de leur situation au regard de l'assurance maladie ou trop marginalisées pour entreprendre certaines démarches à caractère administratif » (Rap. A. N. n° 1518, Boulard).
A noter : la loi ne vise que les prestations en nature du régime général.
L'automaticité résulte, notamment, de l'implication, dans le dispositif, des associations et des acteurs institutionnels. A ce titre, le texte prévoit la possibilité pour les services sociaux, les associations ou les organismes à but non lucratif agréés par le préfet et les établissements de santé d'accompagner les personnes dans leurs démarches d'affiliation au régime général. Ceux-ci sont également habilités à transmettre les documents à l'organisme compétent, avec l'accord de l'intéressé.
La loi crée le statut d'ayant droit autonome, qui permet aux ayants droit de l'assuré social d'être personnellement remboursés de leurs frais de santé. Désormais, dès l'âge de 16 ans et non plus de 18 ans, les enfants d'un assuré social peuvent devenir ayants droit autonomes. Le législateur répond ainsi à la situation des jeunes vivant chez leurs parents et qui souhaitent avoir accès à certains soins ou actes de prévention, de façon autonome, et à ceux en rupture de liens familiaux. Sont visés les enfants non salariés à la charge de l'assuré ou de son conjoint, qu'ils soient légitimes, naturels, reconnus ou non, adoptifs, pupilles de la nation dont l'assuré est tuteur, ou enfants recueillis, et :
• placés en apprentissage, jusqu'à 18 ans
• qui poursuivent leurs études, jusqu'à 20 ans
• qui, par suite d'infirmités ou de maladies chroniques, sont dans l'impossibilité de se livrer à un travail salarié, jusqu'à 20 ans.
En outre, sauf refus exprès de leur part, les conjoints et ascendants de personnes affiliées au régime général acquièrent automatiquement le statut d'ayant droit autonome. Il s'agit :
• du conjoint de l'assuré
• de l'ascendant, du descendant, du collatéral jusqu'au troisième degré ou de l'allié au même degré de l'assuré social, qui vit sous le même toit que celui-ci et se consacre exclusivement aux travaux du ménage et à l'éducation des enfants à charge de l'assuré
• de la personne qui vit maritalement avec un assuré social et se trouve à sa charge effective, totale et permanente. A cet égard, la proposition de loi relative au pacte civil de solidarité (PACS) (8) reconnaît les mêmes droits aux personnes liées à un assuré social par un PACS
• de la personne qui vit de façon non maritale avec l'assuré social depuis 12 mois consécutifs et se trouve à sa charge effective, totale et permanente.
Par ailleurs, les enfants mineurs pris en charge par lesservices de l'aide sociale à l'enfance peuvent, à la demande des personnes ou établissements qui en assument l'accueil ou la garde, être identifiés de façon autonome au sein du régime de l'assuré. Ces personnes ou établissements perçoivent alors les prestations en nature pour le compte de ce dernier.
Dans tous les cas, les personnes concernées demeurent ayants droit, mais peuvent être personnellement remboursées de leurs dépenses de santé, sans avoir à passer par le compte de l'assuré social dont elles relèvent. « Le lien qui lie l'ayant droit autonome au régime maladie et maternité demeure la première affiliation de l'assuré social. Il n'y a donc pas lieu, au plan administratif, de procéder à une affiliation et une immatriculation nouvelle ce dispositif dispense les intéressés de démarches souvent vécues comme dissuasives et ne crée pas de surcharge de gestion de dossiers pour les caisses », a expliqué Jean-Claude Boulard (Rap. A. N. n° 1518, Boulard).
La continuité des droits constitue, après l'immédiateté et l'automaticité, le troisième principe posé par le législateur. Il est défini a contrario, puisque la loi précise qu' « une personne ne peut perdre le bénéfice des prestations en nature des assurances maladie et maternité que si elle cesse de remplir la condition de résidence ou si elle est présumée absente [au sens du code civil] » (9).
S'il s'avère que l'assuré relève en fait d'un autre régime d'assurance maladie que celui versant les prestations, ce dernier ne peut interrompre ses versements tant que l'organisme compétent ne s'est pas effectivement substitué à lui. Le législateur a voulu, ainsi, éviter toute possibilité de rupture ou d'interruption de prise en charge.
Les personnes résidant de manière stable et régulière en France métropolitaine ou dans un DOM et dont les revenus sont inférieurs à un plafond de ressources bénéficient également d'une couverture complémentaire en matière de santé et de la dispense d'avance de frais. Elles peuvent s'adresser à la CPAM dont elles dépendent, à une mutuelle ou une société d'assurances.
La loi pose le principe du droit à une couverture complémentaire gratuite en matière de santé, pour les personnes dont les revenus sont les plus faibles. Le plafond de ressources, qui sera révisé chaque année pour tenir compte de l'évolution des prix, varie selon la composition du foyer et le nombre de personnes à charge.
Les personnes dont les ressources sont inférieures à un plafond, fixé par décret, ont droit à une couverture complémentaire en matière de santé. Son montant devrait s'établir à :
• 3 500 F par mois pour une personne isolée
• 5 200 F pour 2 personnes
• 6 300 F pour 3 personnes
• 7 700 F pour 4 personnes
• et 1 400 F en plus par personne supplémentaire.
Selon l'étude d'impact, le plafond de ressources permet de couvrir :
• les bénéficiaires du revenu minimum d'insertion, de l'allocation de solidarité spécifique ou de l'allocation d'insertion, dès lors qu'ils ne cumulent pas cette prestation avec d'autres ressources
• les bénéficiaires de l'allocation de parent isolé, dès lors qu'ils ne perçoivent plus l'allocation pour jeune enfant
• la plupart des ménages composés de plusieurs personnes dont les ressources sont constituées par le minimum de l'allocation unique dégressive à taux plein
• les actifs isolés : sans enfants, percevant au plus 60 % du SMIC avec un enfant, percevant au plus 87 % du SMIC avec deux enfants de moins de 10 ans, percevant au plus 73 % du SMIC avec deux enfants de plus de 10 ans, percevant au plus 91 % du SMIC
• les couples actifs : sans enfants, percevant au plus 87 % du SMIC avec un enfant, percevant au plus 103 % du SMIC et pas d'allocations familiales avec deux enfants de moins de 10 ans, percevant au plus 92 % du SMIC avec deux enfants de plus de 10 ans, percevant au plus 110 % du SMIC.
En revanche, seront exclus du champ de la couverture complémentaire : les bénéficiaires du minimum vieillesse et les personnes seules titulaires de l'allocation aux adultes handicapés. Tout en considérant que leur situation pose un réel problème, Jean-Claude Boulard s'est« opposé à un relèvement du seuil au niveau de ces minima sociaux ».
Les conditions d'âge, de domicile et de ressources permettant de déterminer si une personne est à la charge d'un foyer sont renvoyées à un décret.
La loi ouvre un droit personnel à la couverture complémentaire aux mineurs de 16 ans ou plus en situation de rupture familiale, qui en font expressément la demande. Ils bénéficieront ainsi de cette couverture en leur nom propre. Toutefois, pour éviter les fraudes et les abus, l'organisme prestataire choisi par le mineur a la faculté d'exercer une action en récupération à l'encontre des parents qui disposent de ressources supérieures au plafond.
« Il conviendra par ailleurs que le décret d'application de cette disposition précise la notion de “rupture familiale” qui doit être mieux définie pour être pleinement applicable », a souligné Jean-Claude Boulard(Rap. A. N. n° 1518, Boulard).
Les allocataires du RMI ont, d'office, droit à la protection complémentaire en matière de santé. Il ne s'agit pas d'un avantage supplémentaire accordé à ces personnes, qui bénéficient d'ailleurs déjà de l'aide médicale gratuite,« mais plutôt d'une disposition pragmatique qui permettra d'accélérer les demandes d'ouverture au droit à la couverture complémentaire CMU » (Rap. A. N. n° 1518, Boulard).
Les titulaires de l'aide médicale au 1er janvier 2000 (date d'entrée en vigueur de la CMU) ont accès, de plein droit, à la couverture complémentaire, jusqu'à l'expiration de leur droit à l'aide médicale et, en tout état de cause, jusqu'au 31 mars 2000.
Ces délais permettront de « mieux gérer la transition entre l'ancien régime de l'aide médicale et celui de la CMU ». Pour renseigner les personnes concernées par l'un ou l'autre de ces régimes, « des campagnes d'information seront menées en leur direction, à l'initiative, notamment, des caisses d'assurance maladie et des conseils généraux » (Rap. A. N. n° 1518, Boulard).
Les caisses primaires d'assurance maladie sont chargées d'apprécier les ressources du postulant à la protection complémentaire en matière de santé.
L'ensemble des ressources du foyer est pris en compte pour la détermination du droit à la complémentaire,après déduction des charges consécutives aux versements des pensions et obligations alimentaires. Sont toutefois exclues : certaines prestations à objet spécialisé et tout ou partie des rémunérations de nature professionnelle, lorsque celles-ci ont été interrompues.
La liste des prestations et des rémunérations, les périodes de référence et les modalités particulières de détermination des ressources provenant d'une activité non salariée seront précisées par décret. « Celui-ci pourrait reprendre les règles actuellement applicables pour apprécier le droit au revenu minimum d'insertion », a précisé Jean-Claude Boulard (Rap. A. N. n° 1518, Boulard). Ainsi, seraient exclues des ressources à prendre en compte :l'allocation parentale d'éducation, l'allocation de rentrée scolaire, l'allocation pour jeune enfant ou encore la majoration pour tierce personne. Les aides forfaitaires au logement seraient, pour leur part, évaluées à un taux forfaitaire identique à celui prévu pour l'attribution du RMI.
Les caisses d'assurance maladie, saisies d'une demande de couverture complémentaire, peuvent contrôler le niveau de ressources du demandeur auprès des Assedic, afin de vérifier que l'indemnité chômage, éventuellement perçue, ne place pas celui-ci au-dessus du plafond de ressources.
Les informations demandées doivent être strictement limitées aux données nécessaires à l'accomplissement de cette mission, les personnes intéressées devant être informées de la possibilité de ces échanges d'information.
Les personnes qui remplissent les conditions requises ont droit à une protection complémentaire gratuite en matière de santé. La prise en charge des dépenses, au titre de cette couverture, n'intervient que d'une façon subsidiaire.
Les bénéficiaires de la protection en matière de santé, affiliés au régime général sur critère de résidence, sont expressément exonérés de cotisation. La question de la rupture du lien entre cotisation et droit aux prestations a fait l'objet de nombreux débats. « Devant le coût du recouvrement d'une cotisation de faible montant et la difficulté de sanctionner le non-versement de cette cotisation par la fermeture des droits sociaux ouverts, le choix a été fait de la gratuité en dépit de l'avantage que pourrait présenter une contribution modeste », a expliqué Jean-Claude Boulard. Toutefois, a-t-il reconnu, « celle-ci correspondrait sans doute mieux à une logique d'insertion, tout en rapprochant les bénéficiaires de la CMU du droit commun » (Rap. A. N. n° 1518, Boulard).
La couverture complémentaire est définie comme un droit qui s'exerce « sans contrepartie contributive ». Elle joue sous réserve de l'application des dispositions plus favorables dont certaines personnes sont susceptibles de bénéficier (régimes spéciaux, régime local d'Alsace-Moselle, certains accords obligatoires de prévoyance d'entreprise, règles relatives aux affections de longue durée...).
La protection complémentaire ouvre droitgratuitement à la prise en charge :
• du ticket modérateur, dans la limite des tarifs de responsabilité des prestations couvertes par les régimes obligatoires
• du forfait hospitalierexigé des personnes admises dans les établissements hospitaliers ou médico-sociaux, sans limitation de durée
• des frais concernant les soins dentaires prothétiques ou d'orthopédie dento-faciale
• et des dispositifs médicaux (10). Les conditions de prise charge de ces frais (liste des dispositifs et limite du montant des frais pris en charge) seront précisées par arrêtés. Ces textes « devront “cibler” les soins et les dispositifs les plus essentiels à l'amélioration de l'état de santé de ces personnes » (Rap. A. N. n° 1518, Boulard).
Pour permettre un accès effectif aux soins, les bénéficiaires de la protection complémentaire sont dispensés de l'avance de frais pour les dépenses prises en charge par les régimes obligatoires des assurances maladie et maternité, ai