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Logement-hébergement : Les associations poussent un cri d'alarme

Alors qu'une "fenêtre" de concertation s'ouvre sous la pression des "gilets jaunes", le Collectif des associations unies pour une nouvelle politique publique du logement des personnes sans abri et mal logées cherche à renforcer son action auprès du gouvernement et de l'opinion publique. La situation des mal-logés et des sans-abris est critique, malgré le plan "logement d'abord", et à cause des coupes budgétaires drastiques.

"Nous [les associations] ne sommes plus capables de dire aux gens dans la rue que leur situation va s’améliorer…", déclarait, ce mercredi 19 décembre, en conférence de presse, le délégué général de la Fondation Abbé Pierre, en tant que porte-parole du Collectif des associations unies pour une nouvelle politique publique du logement des personnes sans abri et mal logées (CAU). Des témoignages venus du Samu social de Lyon, du SIAO (service intégré de l'accueil et de l'orientation" de Haute-Garonne, ou encore de Médecin du monde sur la question spécifique des personnes exilées à Paris, ont appuyé cet aveu d’impuissance sur le terrain.

"On passe nos journées à dire ‘on est désolé, on n’a pas de solution’ ", raconte Valérie Gratias, assistante sociale de SIAO, à Toulouse. Au 115, le "taux de décrochés" (appels décrochés par un opérateur) est inférieur à 10 %. Et seules 5 % des personnes sans-abris ayant un interlocuteur au bout du fil se voient proposer une solution. "Concrètement, à Toulouse, c’est une cinquantaine d’hommes par jour auxquels on ne peut donner de solution, entre 15 et 20 femmes et entre 50 et 70 familles…", énumère la travailleuse sociale. Quant à la gestion hivernale, ajoute-t-elle, "contrairement à Paris, elle n’a pas du tout été anticipée : les services de l’Etat ont lancé des appels à projet fin octobre. Le plan hivernal n’a donc pas encore débuté…".

Plus de mise à l’abri, moins d’accompagnement

Travailleuse au Samu social de Lyon, Maud Bigot décrit une situation tout aussi critique. "S’il n’y a pas de mort dans la rue cet hiver, ça relèvera du miracle et non de l’organisation des pouvoirs publics, ironise-t-elle. 2 000 personnes appellent le 115, en vain, tous les jours et il faut compter en moyenne 15 mois pour obtenir une place en hébergement d’urgence, hors dispositif hivernal". Ce dernier prévoit l’ouverture de 880 places cet hiver, mais à ce jour, seule 390 sont ouvertes. "Les hôtels sont saturés, l’Etat cherche des lieux…"

En attendant, souligne-t-elle : "aujourd’hui, à Lyon, il est possible de rencontrer une femme avec son bébé de 28 jours à la rue". Pourquoi ? "Parce qu’elle n’a pas été pas été 'labellisée' 'avérée dans la rue’", dénonce la professionnelle. "Nous dépensons beaucoup d’énergie à faire du tri des publics : pour être ‘avéré à la rue’, il faut appeler le 115 et être signalé par un travailleur social, un militant, une association…" C’est ainsi qu’une liste des "avérés à la rue" est progressivement constituée, forcément plus petite que la liste établie à partir des seuls appels au 115. "C’est un système révoltant. Le 115 ne peut plus attribuer de place directement. Il doit attendre que la personne soit avérée à la rue, comme si les gens s’amusaient à appeler le 115", explique Maud Bigot. Selon elle, pour l’heure, seules 42 personnes sur les 354 "avérées à la rue" se sont vu proposer un logement.

En somme, a résumé Florent Gueguen, délégué général de la Fédération des acteurs de la solidarité, lui aussi porte-parole du Collectif des associations unies, "il y a certes plus de places d’hébergement mais les crédits restent les mêmes". Résultat : "on fait de plus en plus de mise à l’abri et de moins en moins d’accompagnement de long terme, d’insertion", constate Florent Gueguen. "La situation des personnes ne s’améliore pas".

Un plan "logement d’abord" sous-dimensionné

Pourtant, reconnaissent les 36 membres du CAU, les associations ont gagné quelques avancées. Elles se traduisent par une meilleure anticipation globale du plan hivernal qui a permis d’ouvrir de nouvelles places plus tôt que les années précédentes – 7 000 places déjà ouvertes sur les 14 000 prévues -, des crédits supplémentaires pour les maraudes mais également, selon Florent Gueguen, un travail collaboratif plus important avec les pouvoirs publics.

Les mesures envisagées dans le cadre du "plan quinquennal pour le logement d’abord et la lutte contre le sans-abrisme" offrent également des réponses. Cependant, selon les associations, les objectifs fixés par le gouvernement ne seront probablement pas atteints pour l’année en cours, voire, pour les sorties d’hébergement d’urgence vers un logement pérenne, dépasseront à peine les résultats de l’année 2017. "Nous avons soutenu la philosophie initiale du plan. Mais les objectifs fixés ne suffiront pas à inverser la tendance, affirme Christophe Robert. Le "logement d’abord" ne peut pas fonctionner si, en même temps, on n’augmente pas les aides personnelles au logement, le nombre de logements très sociaux, etc". Raison pour laquelle, dès le mois de juin dernier, le CAU avait sollicité une rencontre auprès du Premier ministre.

Rencontre avec le Premier ministre

Cette rencontre s’est déroulée le 28 novembre dernier. Le collectif s’y est présenté avec des demandes précises à inscrire dans le projet de loi de finances pour l’années 2019 : un moratoire sur le plan d’économie imposée aux centres d’hébergement et de réinsertion sociale (CHRS), la pérennisation à la sortie de l’hiver d’au moins 7 000 des 14 000 places ouvertes dans le cadre du plan hivernal d’hébergement, la revalorisation des aides personnelles au logement, un abondement d’au moins 30 millions d’euros supplémentaires du Fonds national d'accompagnement vers et dans le logement (FNAVDL), la revalorisation du revenu de solidarité active (RSA) et l’octroi de titres de séjour aux "dizaine de milliers de personnes aujourd’hui coincées dans des chambre d’hôtel et des centres d’hébergement faute de pouvoir travailler", afin de libérer des places d’hébergement.

Les associations demandent également un moratoire sur les expulsions après la trêve hivernale, associé à un dédommagement des propriétaires et des moyens supplémentaires pour accompagner les personnes en difficultés afin de prévenir les mises à la rue. Elles estiment également nécessaire de renforcer la part des attributions de logements sociaux en faveur des personnes les plus précaires et d’accroître les moyens de la construction de logements très sociaux. "Le gouvernement a fait des économies incroyables sur le logement social, a souligné Christophe Robert. Nous demandons qu’il renonce à ces économies et qu’il réoriente les sommes en jeu dans le logement des plus mal logés".

Christophe Robert résume la réponse apportée par le Premier ministre : "nous avons fait des priorités budgétaires et nous allons tenir nos choix". Des choix que les associations estiment inacceptables et contre lesquels, sans préciser quelles en seront les modalités, elles souhaitent se mobiliser plus "durement", en même temps qu'elles multiplient les rencontres avec les différents ministères, notamment dans le cadre de la concertation nationale ouverte par le gouvernement en réaction au mouvement des" gilets jaunes".

"Dans le discours gouvernemental, il existe une volonté de récompenser les 'pauvres méritants', ceux qui travaillent, en les différenciant des autres. Pourquoi la hausse de la prime d’activité et pas la hausse du RSA, interroge Florent Guéguen. Notre rôle est d’empêcher cette mise en concurrence des publics pauvres".

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