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« Il faut changer la logique d’accompagnement »

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Ancienne professionnelle en Ehpad et en structure pour adultes handicapés, ex-formatrice pour APF France handicap à la problématique des personnes handicapées vieillissantes, la psychologue Danielle Michelet Coutama explique pourquoi il est nécessaire de changer de paradigme dans l’approche de ce public.
Quelle est la spécificité de l’avancée en âge des personnes en situation de handicap ?

Alors que l’action médico-sociale s’est construite en suivant une logique éducative, le vieillissement est venu questionner cette approche. Les institutions n’ont pas compris que celui-ci ne devait pas être envisagé au moment où il est constaté mais en amont. C’est un processus qui nécessite prévention et éducation. Ce qui implique que les structures du handicap reconsidèrent la question du soin et que les professionnels revoient leurs représentations du handicap. Or ce n’est actuellement pas la priorité. Le vieillissement de ce public représente un défi pour notre société. Une personne handicapée vieillissante est doublement exclue : en raison de son âge et de son handicap.

Comment mieux conjuguer les deux secteurs du grand âge et du handicap ?

On s’y intéresse de plus en plus, mais beaucoup de freins demeurent. Ces deux champs ont évolué en parallèle sans vraiment se rapprocher. Les travailleurs sociaux peuvent intervenir de 0 à 99 ans, les formations initiales ne contiennent que rarement des cours enseignant ce qu’implique le vieillissement dans le champ du handicap. De même, l’offre de travail doit être repensée. Il serait judicieux de proposer des postes du secteur éducatif en Ehpad et d’intégrer dans le champ du handicap des professionnels ayant travaillé en amont dans le grand âge. A ce jour, il n’existe pas de personnel éducatif en Ehpad. Un autre sujet, plus délicat, est à aborder : la mort. Nombre de professionnels n’ont pas envie de travailler avec un public vieillissant pour ne pas être confrontés à cet événement. Mais il arrive qu’on leur impose. Il faut donc pouvoir redéfinir le cadre d’intervention, le centrer sur la personne, la relation, le soin… C’est possible. Quand les équipes sont accompagnées, qu’elles peuvent interroger leurs représentations du grand âge et leurs craintes, elles sont capables de créativité et d’imaginer des pratiques plus adaptées aux personnes vieillissantes.

Est-il encore possible d’avoir le souci du « care » envers ces publics ?

Les structures médico-sociales doivent trouver le juste milieu. La prise en charge de ces personnes nécessite beaucoup de soins, mais pas seulement. Elles ont aussi besoin de socialisation. Quand une personne souffre physiquement, ce n’est pas qu’elle refuse de faire. Elle ne peut tout simplement pas. Le travailleur social doit malgré tout continuer à la mobiliser, à la maintenir dans un projet personnalisé. L’inactivité ne doit pas être vécue comme un échec. Elle est normale. Il faut juste changer la logique d’accompagnement. Les équipes y sont favorables. Sur le terrain, je n’ai jamais rencontré de professionnels qui s’opposaient à l’idée du changement. Ils ont surtout besoin de repères, de formations sur le vieillissement, et de revenir à un raisonnement plus clinique de la quotidienneté.

La création d’une 5e branche « autonomie » peut-elle changer quelque chose ?

Je ne sais pas si l’avenir sera plus radieux mais je suis confiante. La création de cette branche « autonomie » doit permettre une meilleure reconnaissance de ce public. Jusqu’à présent, il y a un flou. La première réforme à mener serait de mettre fin à la barrière d’âge des 60 ans. Actuellement, jusqu’à 59 ans et 364 jours, vous recevez la PCH [prestation de compensation du handicap] et le lendemain l’APA [allocation personnalisée d’autonomie]. Cette distinction ne tient pas. Une personne en situation de handicap peut être « vieille » à 40 ans. S’attaquer à ce schéma permettrait de repenser les offres de soutien aux besoins spécifiques de ces personnes. Créer quelque chose de commun, c’est reconnaître qu’il existe « des » vieillissements. Cela permettrait aussi d’avoir plus de mixité chez les professionnels, des personnes venant d’horizons divers pour une meilleure prise en charge. On n’aura jamais les moyens de tout réinventer, mais il revient aussi aux directions d’être proactives. A défaut, l’acculturation ne pourra pas s’accomplir.

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