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Lignes à haute tension

Voilà juste un an, presque jour pour jour, le Défenseur des droits lançait sa ligne d’appel Antidiscrimination. Géré par des juristes-écoutants, le numéro d’écoute 39 28 dédié aux signalements et à l’accompagnement des victimes a enregistré pas moins de 11 000 appels depuis le 12 février de l’an dernier(1). Les travailleurs sociaux comme le personnel soignant mesurent combien l’attention prêtée de façon générale à la personne, au patient, revêt une importance primordiale. Ecouter, particulièrement en matière d’accompagnement social ou médico-social, représente un tout premier soin. La sémantique ne s’y trompe d’ailleurs pas : le verbe « écouter » vient bien du latin auscultare, qui enfanta également son proche « ausculter ».

Qu’il s’agisse d’injustices, de maltraitances ou de violences, l’anonymat et l’absence de regard porté sur les victimes favorisent le recours aux numéros d’écoute. Professionnelle comme bénévole, la voix qui accueille s’efface rapidement pour laisser place à celle qui a besoin de se confier, de partager une souffrance secrète, et qui ainsi osera peut-être, plus tard, sortir de l’ombre. Même anonymement, certaines victimes ne parviennent pas à appeler, à produire un son, à articuler leur douleur. Les outils modernes de communi­cation se révèlent alors salutaires. « Ecrire, c’est aussi ne pas parler. C’est se taire. C’est hurler sans bruit », formulait avec talent Marguerite Duras, en connaissance de cause. Les messageries instantanées savent recueillir les confidences mutiques, et les mains sur les claviers y apporter des réponses.

Mais ces mains, ces voix, dans une tout autre mesure, souffrent parfois elles aussi. Formés à recevoir la détresse, à rester empathiques tout en gardant une juste distance, de nombreux écoutants pâtissent malgré tout du manque de retour qu’induit l’anonymat : que devient l’enfant désespéré qui avait appelé ? Et cette femme étouffant ses sanglots ? Sans compter la frustration de ne pas pouvoir répondre à tous les appels.

Pour préserver le moral des équipes, l’analyse des pratiques et la supervision permettent de précieux échanges en guise de soupapes. Mais le renouvellement des effectifs demeure élevé lorsque les écoutants « auscultent » à plein temps. Eléments majeurs de la prévention et du soin, ces numéros d’appel nationaux méritent que les pouvoirs publics posent sur eux un regard singulièrement bienveillant. Et qu’ils leur donnent les moyens de livrer bataille.

Notes

(1) Un chiffre auquel s’ajoutent 1 500 000 consultations du site Antidiscriminations.fr et plus de 3 000 messages tchat. Source : defenseurdesdroits.fr.

Éditorial

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