Je me souviens de sa voix rendue pâteuse par l’alcool, sa voix éraillée qui chantait à tue-tête, sa voix sanglotante les soirs de dispute conjugale. Mais sa voix normale, je l’ai oubliée. Je me souviens de son odeur. Mélange de tabac froid et d’un parfum entêtant, haleine chargée de trop d’alcool dont les pastilles de menthe ne viennent jamais à bout, illusion de fraîcheur dont personne n’est dupe. Je me souviens de son allure. Son corps trop maigre perché sur des talons trop hauts, démarche hésitante du matin et titubante du soir. Ses longues mains fines qui secouent négligemment la cendre de sa gitane, sa peau trop pâle, ce corps entier si fragile.J’ai oublié son rire et sa douceur. Les souvenirs se sont envolés.Je voudrais composer son numéro, laisser sonner, et l’entendre prononcer une fois encore le surnom mignon qu’elle me donnait. Lui parler, rien qu’une minute, raconter ma dernière bourde au boulot et les projets du week-end.Et puis, ouvrir la porte d’entrée, retrouver les odeurs mélangées, même celles de ses défauts, même celles qui me faisaient ouvrir grand les fenêtres.Je voudrais la regarder marcher, précautionneusement, sur le sable brûlant de nos vacances ou fièrement…
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