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Le spectre de l’emploi déguisé

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Le service civique a longtemps traîné derrière lui une image délétère, liée au risque de substitution à l’emploi et au bénévolat dans les missions confiées aux volontaires. Cette crainte de dévoiement du dispositif est-elle encore fondée ?

Dans son rapport de février 2018 relatif au service civique, la Cour des comptes mettait en évidence les risques de dérive, affirmant : « Les possibilités de dévoiement sont réelles en ce qui concerne la non-substitution aux emplois ou stages. » Dans un contexte de baisse des subventions publiques et de suppression des contrats aidés, les associations, principales structures d’accueil de jeunes en service civique, sont-elles tentées d’utiliser le service civique en « emploi déguisé » ? Marie Trellu-Kane, présidente de l’association Unis-Cité, estime que « les erreurs sont rarement intentionnelles » et plaide en faveur de la pédagogie. Myriam Bourgeois-Etienne, chargée de mission « service civique » à l’Uniopss, juge quant à elle que « le développement du service civique ne peut pas aller sans le développement d’une politique de la vie associative de qualité. Il ne peut bien fonctionner que si la vie associative n’est pas fragilisée ». L’Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire (Injep) et l’Agence du service civique ont commandité une étude dans l’optique d’analyser comment l’engagement de service civique s’inscrivait dans le travail associatif.

Zone grise

« Les cas de transfert de l’intégralité des missions d’un salarié ou d’un bénévole vers un jeune en service civique, autrement dit le remplacement d’un salarié ou d’un bénévole par un volontaire, restent toutefois peu fréquents », constate Clothilde Talleu, consultante indépendante. « Ce qui semble prédominer dans l’analyse des pratiques au sein des associations, c’est l’existence d’une zone grise où le risque de substitution, sans être avéré peut être réel, où une partie des missions des volontaires en service civique peut venir se rapprocher de manière plus ou moins fortement et durablement de celles de salariés en poste ou de bénévoles engagés dans la structure ou de celles pouvant être confiées à ces acteurs associatifs, en raison notamment de leur similarité, de leur caractère récurrent ou structurant. »

Pour éviter les abus et l’emploi déguisé, l’Agence de service civique compte au rang de ses missions le contrôle. Dans son rapport de février 2018, la Cour des comptes pointait le fait que cette agence ne parvenait pas « à atteindre l’objectif de 20 % des organismes contrôlés chaque année qu’elle a elle-même fixé ». Elle dispose de 54 équivalents temps plein pour contrôler 11 000 structures d’accueil…

Pour les petites associations, « il y a un besoin d’accompagnement sur les principes fondamentaux du service civique, sur l’accompagnement des jeunes volontaires et sur les aspects administratifs du service civique, qui peuvent être très lourds pour une petite structure. L’avantage de l’intermédiation est de proposer un renfort au suivi ou à l’accompagnement du “projet d’avenir” du jeune volontaire », explique Myriam Bourgeois-Etienne. De son côté, pour limiter les risques d’emploi déguisé, Unis-Cité Relais impose aux structures d’avoir au moins deux volontaires sur une même mission. « On impose que les structures qui accueillent les jeunes les libèrent une fois par mois pour une journée de formation civique et citoyenne et d’accompagnement au projet d’avenir. Cela nous permet de vérifier que ça se passe bien. On oblige les tuteurs à se former, c’est-à-dire à ce qu’ils aient bien conscience de ce qu’est le service civique et de ce qu’il n’est pas, de ce que l’on a droit de faire ou pas avec des jeunes en service civique », détaille Marie Trellu-Kane. « La mission ne suffit pas, c’est la formation et l’accompagnement qui font du service civique une expérience formatrice, enrichissante, citoyenne, différente d’un stage. Dans le cadre du tutorat, la qualité de l’accompagnement apportée au jeune, mais aussi les temps collectifs de débats avec d’autres jeunes sont des temps différents de ceux qu’il peut avoir dans un emploi ou un stage », insiste la présidente d’Unis-Cité.

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