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Banlieues ou l’échec programmé

A l’été 1981, quelques semaines après l’élection de François Mitterrand, la France découvre qu’elle a des banlieues à la périphérie de ses belles villes. A Vaulx-en-Velin, à côté de Lyon, des voitures brûlent, des jeunes crient leur révolte d’être marginalisés, discriminés, mis de côté.

Ces « quartiers difficiles » – selon la pudique expression consacrée – sont la conséquence d’un déni politique et social qui remonte aux années 1960. Les barres et les tours HLM qui marquent le paysage de ces cités ont été édifiées à la va-vite pour donner des logements à la nouvelle classe moyenne montante des Trente Glorieuses. Profitant rapidement du boom économique, ces « Français moyens » ont peu à peu déserté ces lotissements pour se rapprocher des villes et accéder à la propriété et ont été remplacés par des populations issues de l’immigration. Le piège s’est refermé.

Etymologiquement, « banlieue » signifie « mis au ban, bannissement ». C’est bien le triste sort qui a frappé ces cités, oubliées de l’Etat, des collectivités et de la société. Tant que le plein emploi a joué son rôle d’intégrateur, le mal était caché. Mais tout s’est déréglé à partir de 1975, avec la crise et la montée du chômage. Le poison de la marginalisation et de la ghettoïsation a fait son lent travail de sape jusqu’à l’explosion du début des années 1980.

Depuis, aucun gouvernement n’a échappé au « rituel » du plan « banlieue ». Des ministres – parfois forts en gueule comme Bernard Tapie ou Jean-Louis Borloo – se sont succédé au chevet de ces cités (que l’on ne sait plus comment nommer pour ne pas avoir l’air de les stigmatiser), des milliards ont été investis dans la rénovation urbaine (qui n’a jamais vu une tour ou une barre exploser sous le regard fier des élus ?), des aides fiscales ont été multipliées pour attirer des entreprises et susciter des créations d’emplois. Pour quels résultats ? Les « técis », comme disent les jeunes, n’ont jamais été si mal en point. Le chômage y atteint des niveaux record, la délinquance y explose, les trafics en tout genre y tiennent lieu d’activité économique et le radicalisme y a trouvé un terreau favorable.

Pourquoi cet échec ? Sans doute parce qu’on a pris le problème à l’envers. Les fameux plans « banlieue » visaient à changer la physionomie des cités, à améliorer leur image, à y implanter de la vie mais ne s’intéressaient pas à ce qui est, pourtant, l’essentiel : les habitants.

Le sujet, c’est que ces populations sont du très mauvais côté de la fracture sociale, enfermées dans un terrifiant cercle vicieux qui va d’une école de la République qui a déserté ces territoires, ce qui interdit aux jeunes d’accéder à un emploi et donc de sortir du ghetto, et ce schéma se reproduit de génération en génération.

Dans une société où 90 % de la plus-value va aux actionnaires et où la richesse atteint un niveau de concentration jamais atteint, il y a peu de chance que le fameux ruissellement – l’argent qui descend du haut vers l’économie réelle – vanté par le président de la République atteigne jamais les cités.

Emmanuel Macron, qui a sans douté théorisé l’échec du plan que lui avait proposé Jean-Louis Borloo, a préféré présenter une autre approche mais avec des mesures et des moyens dont l’insuffisance a été unanimement pointée.

La question qui se pose est de savoir si le président de la République a un autre plan dans sa manche ou s’il a baissé les bras face à un défi trop immense.

Éditorial

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