Apparu à la faveur d'une circulaire de la direction générale de l'action sociale du 18 mai 2006 (1), le contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens (CPOM) suscite des débats. Hormis les maisons de retraite déjà pourvues de leurs conventions tripartites, il devait, selon ses concepteurs, permettre aux établissements sociaux et médico-sociaux volontaires d'alléger leur procédure budgétaire annuelle et de passer d'une tutelle administrative a priori à un contrôle d'efficience a posteriori. La cible visée est celle des associations gestionnaires ou des groupements de coopération comptant au moins 200 salariés et cinq ou six établissements, capables de mutualiser certains moyens techniques ou humains.
Si une organisation comme la Fegapei (Fédération nationale des associations de parents et amis employeurs et gestionnaires d'établissements et services pour personnes handicapées mentales) (2) se montre très favorable à une démarche susceptible d'apporter « lisibilité et pluriannualité », au travers d'« un réel dialogue avec les pouvoirs publics », Andicat (Association nationale des directeurs et cadres de centres d'aide par le travail) (3) se déclare fermement opposée « non pas au principe » du CPOM mais aux « conditions qui l'accompagnent ». Elle n'a pas de mots assez durs pour qualifier ce « contrat léonin », où l'Etat n'est pas en mesure de s'engager pluriannuellement sur de nombreux points, qui n'est ni « révisable, ni opposable au financeur, ni résiliable » et qui s'accompagne, en outre, de la suppression des recours contentieux. Pour l'association, les CPOM imposent aussi une « logique centralisée » de pilotage associatif, qui « efface le rôle des directeurs d'établissements et de services », logique qui est, de plus, « exclusivement financière ». Andicat dénonce encore les pressions qui s'exercent « ici et là » sur les organisations gestionnaires pour entrer dans le système « à marche forcée ». Elle appelle à des expérimentations susceptibles de mesurer les effets du CPOM et à une discussion avec les pouvoirs publics pour trouver « les correctifs nécessaires ».
Beaucoup plus mesurée, l'Uniopss (Union nationale interfédérale des oeuvres et organismes privés sanitaires et sociaux) (4) s'interroge néanmoins sur les « limites » de cette nouvelle possibilité de contractualisation. « La plus importante porte sur l'opposabilité des engagements des financeurs : comment avoir une assurance sur les recettes puisque le processus de fixation annuelle des tarifs permet aux autorités de réviser leurs engagements ? » Ainsi, chaque année, le projet de loi de financement de la sécurité sociale peut remettre en cause les crédits d'assurance maladie. Comment, par ailleurs, anticiper les évolutions sur trois à cinq ans quand un avenant peut à tout moment venir doper une convention collective ? Comment prévoir l'inflation ? ou la hausse des taux d'intérêt des emprunts ?
Pour autant, l'Uniopss reconnaît que la démarche donne au gestionnaire une marge de manoeuvre pour organiser des « redéploiements internes » et espère que l'allégement des procédures permettra une « discussion de meilleure qualité » avec les pouvoirs publics. Au total, l'engagement dans la démarche doit être « sérieusement préparé, étudié, négocié », préconise-t-elle, l'organisme gestionnaire devant s'assurer qu'il entre bien dans « la logique gagnant-gagnant prônée par la DGAS ».
Même à la Fegapei, on insiste sur le « changement de culture » qu'implique la volonté de contractualiser, changement qui doit intervenir « de part et d'autre » pour passer de la défiance partagée à la « confiance réciproque ». « Et un changement de culture, cela ne s'opère pas en un an ! »
(2) Fegapei : 7-9, rue La Boétie - 75008 Paris - Tél. 01 43 12 19 19.
(3) Andicat : 1, avenue Marthe - 94500 Champigny-sur-Marne - Tél. 01 45 16 15 15.
(4) Dans son document « Rentrée sociale 2007-2008 » -Uniopss : 15/17, rue Albert - 75013 Paris - Tél. 01 53 36 35 00.