A l’Assemblée nationale, dans le cadre de l'examen du projet de loi bioéthique les députés ont rejeté, le 9 octobre, après une seconde délibération, l’amendement d’un député LREM, qui visait à reconnaître automatiquement la filiation « d’intention » des enfants nés par GPA (gestation pour autrui) à l’étranger, c'est-à-dire par mère porteuse, dans des pays où le procédé est autorisé. Le gouvernement a motivé ce nouveau vote par le refus d' « ouvrir une brèche dans la prohibition de la GPA, prohibition qu'(il) souhaite absolument maintenir ».
Pour rappel, la Cour de cassation a consenti à l’entière transcription en droit français des actes de naissance de jumelles Mennesson nées il y a 19 ans d'une GPA en Californie. Dans son arrêt du 4 octobre 2019, l'assemblée plénière rappelle tout d'abord qu'en droit français, les conventions de GPA sont interdites. (1) Toutefois, au regard de l’intérêt supérieur de l’enfant, et pour ne pas porter une atteinte disproportionnée au respect de sa vie privée, une GPA réalisée à l’étranger ne peut faire, à elle seule, obstacle à la reconnaissance en France d’un lien de filiation avec la mère d’intention La plus haute juridiction judiciaire explique avoir considéré que l'adoption n'était pas satisfaisante en l'espèce, notamment « au regard du temps écoulé depuis la concrétisation du lien entre les enfants et la mère d'intention ».
« Ligne rouge infranchissable »
« La GPA reste une ligne rouge infranchissable », a commenté Agnès Thibault-Lecuivre, la porte-parole du ministère de la Justice contactée par France Info. « La prohibition de la GPA reste la règle, mais l’intérêt de l’enfant est pris en compte », précise-t-elle. En septembre, le gouvernement avait indiqué être « suspendu » à cette décision afin de clarifier « l'état du droit » pour les enfants nés à l'étranger d'une mère porteuse. Une circulaire interministérielle sera prochainement émise.
« L'arrêt de la Cour de cassation du 4 octobre, qui tranche un cas d'espèce [celui des jumelles Mennesson, ndlr], réaffirme la conformité du droit français actuel aux dispositions de la Convention européenne des droits de l'Homme », a assuré Nicole Belloubet, le 9 octobre. La ministre de la Justice a rappelé la doctrine du gouvernement sur la reconnaissance des enfants nés par GPA : une retranscription du lien de filiation avec le père biologique à l’état civil et un processus d’adoption pour l’autre parent ou parent « d’intention ». Elle s’est engagée à « trouver des solutions pour simplifier le recours à l’adoption et pour améliorer les délais de traitement des procédures d’adoption ».
Les députés se prononceront lors d’un scrutin solennel, le 15 octobre, sur l’ensemble du projet de loi sur la bioéthique, qui porte la mesure phare d’ouverture de la procréation médicalement assistée (PMA) à toutes les femmes.
(1) Arrêt n°648 du 4 octobre 2019 (10-19.053) - Cour de cassation - Assemblée plénière