Les décisions du juge des tutelles et les délibérations du conseil de famille sont susceptibles d’appel. L’exercice du recours et le déroulement de la procédure sont encadrés.
A. LES ACTES SUSCEPTIBLES D’APPEL
1. LES DÉCISIONS DU JUGE DES TUTELLES
[Code de procédure civile, articles 1239, 1239-1, 1239-2 et 1240]
Les décisions du juge des tutelles (hors les mesures d’administration judiciaire) sont susceptibles d’appel par toutes les personnes habilitées à saisir le juge pour ouvrir une mesure de protection juridique en vertu de l’article 430 du code civil (le majeur lui-même, les membres de la famille, les proches, la personne chargée de la protection...), même si elles ne sont pas intervenues à l’instance.
Toutefois, l’appel contre le jugement qui refuse d’ouvrir une mesure de protection à l’égard d’un majeur n’est ouvert qu’au requérant.
Le ministère public peut former un appel jusqu’à l’expiration d’un délai de 15 jours suivant la remise de l’avis qui lui a été donné de la décision rendue. Enfin, dans le cadre d’un partage à l’amiable des biens de la personne protégée sous tutelle sur autorisation du juge des tutelles, l’appel contre cette décision du juge est ouvert au tuteur, aux membres du conseil de famille et aux autres parties intéressées. Rappelons qu’à l’inverse, le placement sous sauvegarde de justice par décision du juge ne peut faire l’objet d’aucun recours (C. civ., art. 433 ; C. proc. civ., art. 1249, al. 2) (1).
A noter :
seule une décision juridictionnelle, ordonnance ou jugement, est susceptible d’appel. Une simple lettre ne l’est pas. Toutefois, rappelle une réponse ministérielle (2), si l’une de ces personnes habilitées à saisir le juge des tutelles par requête le fait et précise l’objet de sa demande, le magistrat a l’obligation de statuer « sauf, ainsi que le prévoit l’article 1229 du code de procédure civile, si la demande nécessite le recueil d’éléments d’information, la production de pièces complémentaires, le recours à une mesure d’instruction ou toute autre investigation. Dans ce cas, le juge en avertit le requérant et sollicite ces éléments complémentaires par courrier. Il rend ensuite sa décision, laquelle est en principe notifiée, notamment au requérant, notification qui précise les voies de recours qui lui sont ouvertes ».
2. LES DÉLIBÉRATIONS DU CONSEIL DE FAMILLE
[Code de procédure civile, articles 1239, 1239-1, 1239-3 et 1240]
En ce qui concerne les délibérations du conseil de famille lorsqu’il est constitué, l’appel est ouvert à tous ses membres et au juge des tutelles, quel qu’ait été leur avis lors de la délibération. Ce recours ne vaut, par principe, que dans le cadre de la tutelle.
Toutefois dans le cadre d’un partage à l’amiable des biens de la personne protégée sous tutelle sur autorisation du conseil de famille, l’appel contre cette délibération du conseil est ouvert au tuteur, aux membres du conseil de famille et aux autres parties intéressées.
Là encore, le ministère public peut former un recours jusqu’à l’expiration d’un délai de 15 jours suivant la remise de l’avis qui lui a été donné de la délibération prise.
A noter :
les tiers peuvent informer le juge des actes ou omissions du tuteur qui leur paraissent de nature à porter préjudice aux intérêts de la personne protégée. Mais la tierce opposition – c’est-à-dire la possibilité pour des tiers de saisir le juge à propos d’une décision qui leur fait grief, prise au cours d’une instance à laquelle ils n’étaient pas parties – contre les autorisations du conseil de famille ou du juge ne peut être exercée que par les créanciers de la personne protégée et en cas de fraude à leurs droits (C. civ., art. 499).
B. L’EXERCICE DU RECOURS
1. LE DÉLAI D’APPEL
[Code de procédure civile, article 1239]
Les décisions du juge des tutelles et les délibérations du conseil de famille sont susceptibles de recours dans les 15 jours devant la cour d’appel, sauf disposition contraire.
2. LE POINT DE DÉPART DU DÉLAI
[Code de procédure civile, articles 1241, 1241-1 et 1241-2]
Le délai d’appel contre un jugement prononçant une mesure de protection à l’égard d’un majeur court :
- à l’égard du majeur protégé, à compter de la notification de la décision (C. proc. civ., art. 1230-1) ;
- à l’égard des personnes à qui le jugement doit être notifié, à compter de cette notification ;
- à l’égard des autres personnes, à compter du jugement.
Le délai d’appel contre les ordonnances rendues par le juge des tutelles court à compter de leur notification pour les personnes à qui l’ordonnance doit être notifiée et à compter de l’ordonnance pour les autres personnes.
Le délai d’appel contre une délibération du conseil de famille court à compter de cette délibération. Si la délibération du conseil a été rendue sans qu’une réunion formelle ne se soit tenue (C. proc. civ., art. 1234-4), le délai ne court contre les membres du conseil qu’à partir du jour où la délibération leur est notifiée (cf. supra, section 4, § 3, A, 3, d).
3. LE CONTENU DU RECOURS
[Code de procédure civile, articles 1239, 1242, 1242-1 et 1243]
L’appel est formé par déclaration faite ou adressée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception au greffe de la juridiction de première instance. Le greffier enregistre alors l’appel à sa date. Il délivre ou adresse, par lettre simple, récépissé de la déclaration. Il transmet ensuite « sans délai » une copie du dossier à la cour. Les parties ne sont pas tenues de constituer avocat. Lorsque l’appel est formé par le juge des tutelles (contre une délibération du conseil de famille), celui-ci joint au dossier une note exposant les motifs de son recours.
Si l’auteur de l’appel restreint celui-ci à l’un des chefs de la décision autre que l’ouverture de la mesure de protection, il le précise.
C. LE DÉROULEMENT DE LA PROCÉDURE
[Code de procédure civile, articles 1244 à 1246]
Une date d’audience est ensuite arrêtée. Le greffier de la cour convoque à l’audience prévue pour les débats :
- l’avocat du requérant, par tout moyen, s’il en a constitué un ;
- l’auteur de l’appel et les personnes auxquelles la décision ou la délibération a été notifiée, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, ainsi que, le cas échéant, leurs avocats.
Ces dernières ont le droit d’intervenir devant la cour. La convocation est adressée, dès la fixation de l’audience prévue pour les débats et au moins 15 jours à l’avance, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Une copie de la convocation est adressée aux personnes concernées par lettre simple.
La convocation vaut citation.
L’appel est ensuite instruit et jugé en chambre du conseil, la procédure étant orale. Toutes les prétentions des parties ou la référence qu’elles font aux prétentions qu’elles auraient formulées par écrit sont notées au dossier ou consignées dans un procès-verbal.
Au cours de l’audience, la cour entend :
- l’auteur de l’appel ;
- le majeur à protéger ou protégé, sauf si cela est de nature à porter atteinte à sa santé ou s’il est hors d’état d’exprimer sa volonté en application des disposi-tions du second alinéa de l’article 432 du code civil ;
- le cas échéant, le ministère public. Les observations des avocats des parties, lorsqu’elles en ont constitué un, sont également formulées.
A moins que l’affaire ne soit jugée dès la première audience, le greffier avise de la date des audiences ultérieures les personnes convoquées qui ne l’auraient pas été verbalement.
La cour peut, même d’office, substituer une décision nouvelle à celle du juge des tutelles ou à la délibération du conseil de famille.
D. LES CONSÉQUENCES DU RECOURS
[Code de procédure civile, articles 1246 et 1247]
Jusqu’à la clôture des débats devant la cour, le juge des tutelles et le conseil de famille demeurent compétents pour prendre toute décision ou délibération nécessaire à la préservation des droits et intérêts de la personne protégée. Le greffe de la juridiction de première instance transmet immédiatement copie de cette décision ou délibération au greffe de la cour d’appel. Si l’appel formé contre une décision du juge des tutelles ou une délibération du conseil de famille est rejeté, celui qui l’a introduit, à l’exception du juge, peut être condamné à régler les frais engagés (les dépens) et des dommages-intérêts.
E. LA NOTIFICATION DE LA DÉCISION
[Code de procédure civile, article 1246-1]
La décision de la cour est notifiée par le biais du greffe.
Le dossier, auquel est jointe une copie certifiée conforme de l’arrêt, est alors renvoyé sans délai au greffe de la juridiction de première instance.
(1)
Pour une illustration de ce principe, cf. Cass. civ. 1re,29 juin 2011, requête n° 10-18960, accessible sur www.legifrance.gouv.fr
(2)
Question écrite n° 15576, Rép. min. JO Sénat du 13-01-11, p. 96, consultable sur www.senat.fr