Recevoir la newsletter

Marie-Jeanne Panciullo : « Le confinement me fait plus peur que le virus »

Illustration

Photo d'illustration

Crédit photo DR
Marie-Jeanne Panciullo est assistante familiale depuis dix-neuf ans à Marseille. A ce titre, elle accueille Cynthia, 20 ans, sa sœur Khésia, 18 ans, et Maïssa, 5 ans. Comme pour la majorité des assistants familiaux, ce confinement pose de réelles difficultés.

 

Actualités sociales hebdomadaires : Quelles sont les répercussions de ce confinement au quotidien ?

Marie-Jeanne Panciullo : Le confinement est très compliqué à gérer avec la fermeture des écoles, car nous avons les enfants avec nous à la maison en permanence. Comme toutes les familles, nous devons gérer le quotidien, mais également les problèmes psychologiques des enfants, voire psychiatriques pour certaines de mes collègues. Ce confinement attaque, de plus, les liens d’attachement, l’équilibre qui est plus ou moins établi. Les enfants que nous accueillons n’ont pas des racines bien ancrées. Par conséquent, cela les ébranle énormément. Les grandes se questionnent beaucoup sur l’avenir et les liens qu’elles ont avec nous. Mon mari et moi échangeons souvent avec elles pour les rassurer. Pour Maïssa, les difficultés sont différentes. A 5 ans, elle se lève à 7 h, et jusqu’au soir à 20 h, je n’ai pas un instant de libre, elle est scotchée à moi. Je ne peux même plus aller faire mes courses. Depuis le début du confinement, quand je dors quatre heures, je suis contente. Ne pas voir ses copines, ni sa maîtresse, ne pas aller au parc… Son rythme est bouleversé et les angoisses sont bien présentes.

Vous avez reçu des consignes nationales spécifiques pour les assistants familiaux. Est-ce que cela vous a aidée ?

M.-J. P. : Lorsque j’ai pris connaissance de ces premières consignes, je me suis dit que cela n’avait pas été rédigé et pensé par des personnes qui ont conscience de ce que signifie accueillir un enfant, et d’autant plus des gamins qui sont perturbés par leur histoire. Il y est notamment question de garder ses distances avec les enfants, mais ce n’est pas possible. Entre la crainte du Covid-19 et l’angoisse qu’ils portent en eux, je fais le choix qui s’impose… Je prends ma gamine dans mes bras, je lui fais le câlin qu’elle demande parce que cela ne peut pas être autrement. Si, malheureusement, elle l’attrape, je la soignerai.

Vous dites craindre davantage le confinement que le Covid-19. Pourquoi ?

M.-J. P. : Mes collègues et moi, nous avons les enfants 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. En temps normal, ils sont à l’école et, pendant les vacances, ils peuvent aller au centre aéré. Nous avons donc du temps pour nous ressourcer et prendre du recul. Aujourd’hui, ce n’est pas le cas. Je ne serai pas surprise si, à la fin du confinement, il y a des cas de maltraitances de part et d’autre. Entre un ado qui n’en peut plus d’être enfermé et un autre qui fait des crises, même si nous faisons tampon pour éviter que cela dérape, comment faire pour contenir sur la durée une éventuelle violence ? C’est le cas également de notre côté. Nous sommes humains, la fatigue physique peut entraîner une mauvaise gestion de la fatigue morale.  

Avez-vous le sentiment que les assistants familiaux sont les oubliés de cette crise ?

M.-J. P. : Aujourd’hui, rien n’est prévu si nous sommes atteintes du Covid-19. J’ai des collègues qui l’ont eu, et elles ont dû gérer les enfants accueillis avec la maladie. Un simple portage de repas, cela peut soulager une famille. Epargner la personne du souci de savoir ce que vont manger les enfants alors qu'elle est au fond du lit avec 39.9 de fièvre, même cela n’est pas envisagé. De plus, rien n'est prévu pour éviter la contamination des autres membres de la famille si une personne est malade dans la maison. Parmi toutes les professions qui existent, quelle est celle qui nécessite une présence constante, de nuit comme de jour, si ce n’est celle d’assistant familial ? Aujourd’hui, nous sommes très inquiets. Allons-nous pouvoir tenir sur la durée ?

En cette période de confinement, la crainte grandit et la venue de personnes extérieures chez les assistants familiaux n’est pas forcément souhaitée. Qu’en pensez-vous ?

M.-J. P. : C’est vrai que la maladie fait peur. Mais si, demain, ma cheffe de service me dit qu’il y a un enfant à prendre en charge, nous sommes prêts avec mon mari à l’accueillir. Il est hors de question qu’un petit bout ou même un plus grand se retrouve sans personne à cause de ce virus. Entre la peur d’être contaminés et accueillir un jeune, notre choix est fait. C’est une maladie qui peut être grave, mais pas au point de laisser quelqu’un au bord de la route.

 

Protection de l'enfance

S'abonner
Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client 01.40.05.23.15

par mail

Recruteurs

Rendez-vous sur votre espace recruteur.

Espace recruteur