Les questions migratoires sont sans conteste l’une des priorités du gouvernement en cette fin d’année. Après avoir récemment envoyé aux préfets une instruction très directive leur fixant des objectifs en matière de lutte contre l’immigration irrégulière, le ministère de l’Intérieur a rendu public une information relative à l’évolution du parc d’hébergement des demandeurs d’asile et des réfugiés. Une circulaire prévoyant le déploiement d'équipes mobiles au sein des centres d'hébergement pour contrôler la situation des étrangers accueillis devrait également paraître dans les prochains jours, malgré la vive opposition des associations. En attendant, le document d'information prévoit la création de 12 500 nouvelles places en 2018 et 2019. Le plan migrant présenté par le gouvernement à l’été dernier en prévoyait 7 500. L'ouverture de 3 000 places en centres provisoires d’hébergement (CPH) pour "réfugiés les plus vulnérables" d’ici à l’automne prochain est confirmée.
Un dispositif d’hébergement plus homogène
Outre l’ouverture de places supplémentaires, Gérard Collomb souhaite faire évoluer le dispositif d’hébergement "afin qu’il soit plus réactif et mieux adapté à la crise migratoire". Cela doit passer par un renforcement de "la lisibilité, l’efficacité et la fluidité des dispositifs de prise en charge". Les préfets sont donc invités à réorganiser l’existant "pour un traitement administratif plus rapide, au plus près du terrain, et une orientation plus en adéquation avec le statut des personnes".
A cet effet, ils doivent créer, dans chaque département et au plus tard au 31 janvier 2018, 200 places d’hébergement en centres d’accueil et d’évaluation des situations (CAES) pour permettre une mise à l’abri des demandeurs d’asile, pour une période maximale d’un mois, avec une évaluation immédiate de leur situation administrative avant une orientation rapide vers d’autres dispositifs d’hébergement. Un dispositif spécifique sera mis en place en Ile-de-France, indique le texte.
Vers une fermeture progressive des centres d’accueil et d’orientation
Pour les "dublinés" en attente de transfert vers un autre Etat européen et pour les personnes faisant l’objet d’une procédure accélérée, car ressortissantes d’un "pays d’origine sûr", Gérard Collomb prône une "plus grande unité des conditions d’accueil, de prise en charge et à un coût plus maîtrisé". Sont ici particulièrement visés les centres d’accueil et d’orientation (CAO), créés dans l’urgence à la suite du démantèlement de la "jungle" de Calais. Au nombre de 381 pour environ 10 000 places, ils sont "très hétérogènes tant dans leur coût que dans leurs modalités de prise en charge".
Le ministre suggère donc leur transformation en centres provisoires d'hébergement. Si 8 000 places pourront être maintenues en 2018 pour assurer la "continuité de l’action des opérateurs", les CAO dont le coût à la place est jugé trop élevé (le coût de référence étant de 24 euros par personne et par nuit) devront être fermés. Dans le même esprit, il est demandé aux préfets de réduire le nombre de nuitées hôtelières "qui offrent un accompagnement de très bas seuil non satisfaisant et à des coûts souvent excessifs". S’agissant des centres d’accueil pour demandeurs d’asile (CADA), le pensionnaire de la place Beauvau estime qu’ils doivent demeurer "l’hébergement de référence pour les demandeurs d’asile en procédure normale". 2 000 places doivent être créées d’ici à septembre 2018.
Renforcer la fluidité des sorties du parc d’hébergement
Le document appelle également à améliorer la fluidité des sorties du parc d’hébergement par le biais de l’éloignement des déboutés et des personnes en attente de transfert vers un autre Etat membre de l'Union européenne. A ce titre, il est demandé aux préfets de recourir à l’ensemble des outils et procédures à leur disposition pour assurer le transfert et l’éloignement effectif de ces personnes, détaillées dans l’instruction du 20 novembre dernier. Il s’agit, notamment, des aides au retour, de l’expulsion de l’hébergement, par la voie du référé mesures-utiles, ou encore du placement en rétention administrative.
Plus généralement, c’est toute la gouvernance de l’asile que le ministre appelle à revoir. Au niveau national, il doit revenir à la direction générale des étrangers en France du ministère de l’Intérieur de définir la stratégie de la politique de l’asile et d’animer les différents acteurs via, notamment, un "comité stratégique de l’asile" qui réunit l’ensemble des administrations et juridictions concernées (voir note de bas de page).
Au niveau régional, échelon peu mobilisé en matière d’asile, les préfets de région animeront des comités de pilotages et s’attacheront en particulier à veiller à l’intégration des réfugiés et leur accès au logement. Au niveau départemental, les préfets réuniront un comité opérationnel associant les services de l’Etat et les acteurs associatifs "aux fins notamment de gestion des situations et orientations individuelles". Enfin, des coordinateurs régionaux et départementaux asile devront être nommés "idéalement parmi les membres du corps préfectoral" pour coordonner les actions de l’administration "et nouer les partenariats avec les élus, le secteur associatif et la société civile".
Direction générale des étrangers en France, Office français de protection des réfugiés et des apatrides, Office français de l’immigration et de l’intégration, direction générale de la cohésion sociale, délégation interministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement et Cour nationale du droit d’asile.