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Protection de l'enfance : « Très cher Monsieur l'ETAT » (EXCLUSIF)

Les délégués régionaux au 44e congrès du Cnaemo à Joué-les-Tours.

Crédit photo DR
Le 27 mars, lors des 44es assises du Cnaemo (Carrefour national de l'action éducative en millieu ouvert), qui se déroulent jusqu'au 29 mars près de Tours, les délégués régionaux ont lu une lettre à l'intention de la puissance publique pour signifier leur détresse sur la crise inédite que traverse la protection de l'enfance. Elle devrait être envoyée à Emmanuel Macron et remise en main propre à la ministre déléguée chargée de l'enfance, de la jeunesse et des familles, Sarah El Haïry. Un moment fort de ces rencontres professionnelles, consacrées cette année à la parentalité. Et une exclusivité ASH.

[Lettre ouverte] « Aujourd’hui, Nous voudrions vous dire, une fois encore, qu’il est bien difficile d’être un professionnel en protection de l’enfance, alors Nous n’imaginons pas ce que cela peut être pour certains enfants d’être dans la Protection de l’enfance. Nous sommes des Travailleurs Sociaux, des Secrétaires, des Chefs de services, des Psychologues, des Directeurs. Nous sommes des professionnels engagés, adhérents d’un mouvement celui du CNAEMO et nous en sommes même des Délégués Régionaux.

Aujourd’hui, Nous voudrions, Monsieur L’ETAT, porter notre voix, celle de nos collègues et, soyons fous, celle de certains jeunes que nous accompagnons. C’est vrai, avec les parlementaires, vous avez créé un réel arsenal législatif. Mais voilà, les lois ne suffisent pas. Il y a besoin, hélas, de moyens pour pouvoir être à la hauteur de vos ambitions. Et vous avez raison d’être ambitieux car les enfants d’aujourd’hui sont les adultes de demain. Ces petits d’Hommes sont les citoyens de demain. Alors parfois, une loi promulguée en 2022 pour laquelle les décrets pointent le bout de leur nez en 2024…, c’est dommageable !

Les situations que nous accompagnons font parfois les gros titres des médias, soulevant l’indignation, la recherche de responsabilités…. Alors, Nous voilà mis au pilori. Pas besoin de cela pour nous remettre en question. Certains soirs, nous rentrons avec les situations dans nos têtes. Nous sommes avant tout humains.

Les enfants parfois sont accueillis dans des lieux qui ne conviennent pas à leur problématique, mais au moins, ils sont accueillis ! Certaines mesures éducatives ne sont pas prises en charge, car il y a des listes d’attente… Ce mot est terrible et tellement paradoxal : attente et danger !!! deux mots qui ne devraient pas cohabiter. D’ailleurs, ils ne cohabitent pas de gaieté de cœur, car aujourd’hui, si l’attente existe, c’est que Nous ne pouvons pas leur offrir une prise en charge de qualité. Est-ce le moment d’aborder le problème des postes vacants dans le secteur ? C’est la goutte d’eau, mais le vase déborde déjà.

Monsieur L’ETAT, nous ne cherchons pas quel Homme ou quelle Femme serait responsable de la situation actuelle de l’enfant nommé Protection de l’Enfance !!! Nous pourrions ainsi égrainer des décennies, et à quoi bon ? Aujourd’hui nous n’interpellons pas les politiques, mais vous Monsieur L’ETAT. Depuis bien des années, Nous tentons de vous alerter, sur les conditions dans lesquelles nous accompagnons ces jeunes, ces enfants. C’est vrai, nous souhaiterions approcher la perfection, nous étions d’ailleurs prêts à vous demander l’impossible. Oui ! Certaines fois nous sommes utopistes pour pouvoir être sûre que demain sera meilleur.

Mais là, avez-vous conscience, qu'en l’état actuel de la réalité, nous ne pouvons pas répondre à l’arsenal parlementaire ? Alors sommes-nous des professionnels assez bons ? Rencontrerions-nous que des situations trop dégradées, inextricables ? Nous vous assurons, Monsieur L’ETAT, que tout le monde fait des erreurs, même nous. C'est pour cela que nous travaillons en équipe et que nous nous ajustons.

Monsieur L’ETAT, il n’y a pas de mal à dire que vous êtes en partie responsable. C’est toujours mieux que de nous laisser croire que nous ne sommes pas assez compétents, ou que certains enfants n’ont pas le droit d’être pris en charge conformément à la loi.

Monsieur L’ETAT, parfois, nous sommes solidaires de nos collègues qui vivent des drames professionnels. Nous restons sans voix et démunis quand nous ne pouvons pas faire plus pour un enfant ou un jeune, car nous rencontrons les limites de nos actions, du territoire, des administrations… Parfois, nous pleurons avec les enfants que nous accompagnons, ou laissons la place au silence… parce qu’il n’y a rien à dire. Souvent, voire toujours, nous coconstruisons en réunion, avec les familles, les enfants, parce que seuls… Nous ne sommes rien.

Quel que soit notre mode d’expression, Vous, Monsieur l’ETAT, vous ne nous écoutez pas, ou ne nous entendez pas ou ne nous voyez pas. En même temps, cela n’est pas si dramatique pour Nous. Mais ça l’est pour tous ces petits d’HOMMES qui vont dormir à l’hôtel, attendre qu’un éducateur soit attribué à la mesure éducative, que de la place existe dans un centre médico-psychologique ou qu’une place adaptée à son projet se libère dans une institution. Si vous n’y prenez pas garde, nous pourrions cesser le travail. Mais vous, Monsieur l’ETAT, vous savez que si la situation persiste, d’autres drames surgiront et nous déserterons, toujours plus face à la perte de sens. Où est passé La Grande Cause Nationale, Monsieur L’ETAT ?

Monsieur L’ETAT, pour appliquer votre arsenal parlementaire, il est nécessaire de pouvoir étendre vos moyens. Et l’annonce de restrictions budgétaires pour votre survie nous inquiète pour la nôtre et surtout pour celle de l’enfant Protection de l’enfance. Nos professions sont surprenantes. Elles sont résilientes. S’il vous plait, Monsieur l’ETAT, aidez-nous à ne pas être rendus responsables de vos échecs ! Aidez-nous à être les outils de vos réussites ! Considérez-Nous comme nous considérons celles et ceux que nous accompagnons ! Considérez-les également !

Nous ne vous demandons pas d’être parfait, mais d’être bienveillant et à la hauteur des attentes que vous avez placées dans nos professions. Dans le cadre de nos interventions, la question de la place de chacun (enfant, parent, professionnel) est posée.

Monsieur L’ETAT, quelle est la vôtre pour l’enfant PROTECTION DE L’ENFANCE ? Notre but n’est pas de vous mettre au pilori, pas plus que d’user d’une voix syndicale, mais de partager avec vous notre désarroi et notre soif de ne rien lâcher pour l’enfant protection de l’enfance et tous ses enfants.

Merci Monsieur L’ETAT d’avoir pris le temps de nous lire, de nous écouter, peut-être de nous entendre, car espérons que ce soir… nous pourrions rêver d’être une véritable équipe.

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