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LA PRÉVENTION À LA CONTENTION

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Pour limiter les contentions, la prévention reste de loin la meilleure réponse.
La formation des équipes est un facteur structurant de la prévention. Elle porte sur la gestion de la désescalade de la violence, l’écoute des besoins des résidents et leur prise en compte, l’encouragement et l’accompagnement des résidents à reconnaître leurs propres déclencheurs et les signes avant-coureurs de la violence, puis l’apprentissage de techniques de régulation et d’autogestion émotionnelle pour contrôler les expressions verbales et non verbales de l’anxiété ou de la frustration (1).
Pour respecter la liberté des résidents tout en permettant la mise à l’écart de ceux qui ont des comportements à problèmes, l’Anesm a publié une recommandation de bonnes pratiques professionnelles sur la prévention et les réponses aux comportements à problèmes au sein des établissements et services intervenant auprès des enfants et adultes handicapés. Datant de fin 2016, ce document comprend un volet trois centré sur les espaces calme-retrait. Les recommandations invitent les établissements à anticiper ces comportements pour que la réponse à y apporter soit la plus respectueuse des résidents en tenant compte des contraintes de service et en limitant le recours à la contention.
L’aménagement d’espaces d’apaisement non fermés à clé en est une indication. Ces espaces sont conçus pour générer une diminution de la tension. Ils sont utilisés de façon volontaire, le plus souvent sur demande du résident (autogestion) ou sur suggestion de l’équipe soignante. Le résident peut choisir de le quitter quand il le désire.
Ces espaces intérieurs ou extérieurs, clos ou non, peuvent contenir matelas, fauteuils, coussins, duvet, du matériel pour écouter de la musique ou au contraire s’isoler du bruit (casque audio). Ils peuvent également être un lieu de libération des pulsions dans un cadre sécurisant avec des coussins à frapper (salle de détente par exemple).
La chambre peut être utilisée avec l’accord du résident qui pourra en sortir librement.
Depuis un décret du 15 décembre 2016 (2), le médecin coordonnateur s’est vu confier la mission de réunir l’équipe pour proposer au directeur une rédaction collégiale des mesures à faire figurer dans l’annexe au contrat de séjour, qui limite la liberté d’aller et venir d’un résident en Ehpad.
À leur congrès de mai 2018, les médecins coordonnateurs ont constaté que très peu d’entre eux avaient déjà participé à la rédaction d’une telle annexe. Celle-ci n’a pas fait l’objet d’une communication particulière par le ministère de la Santé.
Cette annexe doit trouver sa place dans les écrits échangés entre l’établissement, le résident et son entourage. Certains établissements l’intègrent dans le projet personnalisé. Dans ce cas, la réévaluation est annuelle et non semestrielle, comme préconisé dans le décret. En tout état de cause, l’annexe citée servira pour la limitation de la liberté d’aller et venir sans contention physique comme par exemple une entrée dans une unité protégée, ou un bracelet de géolocalisation. Les mesures de contention physiques passives continueront à répondre à l’impératif qu’elles restent exceptionnelles, pratiquées en dernier recours après l’échec d’autres alternatives.
En pratique, il convient de suivre une procédure complète qui permet à la fois une réponse éthique et la possible production des preuves de la réflexion. Il est avant tout nécessaire d’analyser les causes et de rechercher des alternatives à la contention de la personne âgée.
Avant de poser une contention, il est également nécessaire de bien identifier la problématique ce qui implique une réflexion multifactorielle.
Il faut d’abord éliminer des causes médicales. À titre d’exemple, les douleurs sont à mesurer avec une échelle EVS ou Algoplus en fonction de l’état de la personne. Seront évalués également les éventuels troubles de la glycémie, troubles du sommeil, globe vésical, dépression, déshydratation, pathologies cardio-vasculaires, iatrogénie. Ensuite, il est bon de s’interroger sur de possibles changements dans l’entourage de la personne : soignants ou proches, ou dans les locaux, ou l’organisation de la journée.


A. Les vérifications

En cas de troubles de l’équilibre la première indication est de libérer l’espace en ôtant tout équipement inutile.
Les lunettes et prothèses auditives et leur utilisation seront vérifiées. Si les troubles sont dus à la cataracte, l’éclairage sera augmenté. Les chaussures seront également vérifiées (bonne tenue du pied, taille y compris en largeur, usure) ainsi que les aides à la marche. La personne sera encouragée à prendre appui sur les équipements fixes : barres au mur, rampes. Ces mesures seront accompagnées par une présence accrue du personnel ou des proches pour maintenir une activité physique de marche, et un accompagnement régulier aux toilettes de jour comme de nuit sera anticipé. Pour limiter la désorientation afficher des repères temporels : pendule, calendrier sur lesquels seront indiqués le passage des soignants et autres intervenants, les activités occupationnelles. Ce tableau sera lu et commenté autant que de besoin. Pour le couchage après avoir bloqué les roulettes, il est possible de baisser le lit au maximum, ou d’utiliser un lit surbaissé, voire enlever le matelas du lit et à le poser par terre si c’est le souhait de la personne. Le fauteuil sera positionné en fonction des capacités du résident et de ses choix.
L’inclinaison du fauteuil sera adaptée pour faciliter le passage en position debout, la hauteur des accoudoirs permettra au résident de prendre appui. Devant le fauteuil tous les objets qui gênent les transferts seront ôtés, et les effets personnels et familiers seront à portée de main (téléphone, appel malade, verre d’eau, montre, lunettes, photos, le fonctionnement du système d’appel sera expliqué.) la personne sera confortablement installée (vêtements et position) et ne sera pas laissée trop longtemps en position assise. Lors du transfert, l’accompagnant se placera à côté de la personne et ne la tractera pas il se placera à côté d’elle pour l’aider afin d’éviter le réflexe de rétropulsion.
En cas de déambulation excessive il s’agira d’améliorer et de faciliter l’orientation du résident, de le réorienter calmement. On pourra capter l’attention du résident par des barrières visuelles (marquage au sol, posters évocateurs). Pour limiter les envies de fuite on peut mettre des photos, posters ou miroirs sur les issues, allumer le téléviseur. Installer la personne près d’une fenêtre ou dans un lieu captant son attention.
En cas d’agitation de confusion ou d’agressivité, la première préconisation est d’adapter l’environnement : diminuer les stimuli auditifs, éviter la présence de personnes au comportement perturbateur, corriger l’éclairage de la pièce.
Une autre préconisation est d’accompagner la personne en favorisant des temps de présence des soignants, ou des proches. Il convient également de respecter le rythme de vie (sommeil, habitudes alimentaires, centres d’intérêt) et le maintien de contacts relationnels (chacun adopte une attitude rassurante et calme et rappelle son nom et sa fonction autant que de besoin). C’est seulement si aucune alternative n’est suffisante qu’une réflexion pluridisciplinaire est engagée avec une approche bénéfices/risques afin d’envisager une contention.
Les bénéfices principalement mis en avant lors d’une contention sont la prévention des chutes, des traumatismes, et d’une fugue, mais aussi la limitation de l’agitation et de l’agressivité ainsi que la préservation des autres résidents et soignants.
Les risques ne doivent pas être minimisés : compression (abdominale, artérielle ou neurologique), infections nosocomiales et escarres, aggravation de la confusion ou de l’agressivité, apparition de syndrome d’immobilisation (contractures, troubles trophiques, fausses routes, constipation, déconditionnement musculaire et sarcopénie, complications thrombo-emboliques) qui peuvent entraîner une perte d’autonomie. En cas de mauvaise surveillance, la contention peut induire des chutes et traumatismes graves qui peuvent aller jusqu’au décès (par étouffement notamment).


B. Précautions à prendre lors de recours à la contention

Dans le cadre sanitaire et en hôpital et sous certaines conditions en Ehpad, la contention est soumise à la prescription d’un médecin. Celle-ci doit en préciser les motifs, l’évaluation du rapport bénéfice/risque, le dispositif de contention à utiliser et l’ensemble des conditions et modalités de la contention prescrite. En outre, ces informations doivent être données au résident et/ou à ses proches et/ou à la personne de confiance désignée par le résident lors de son admission. Dans tous les cas, il est obligatoire de rechercher le consentement du résident ou de son représentant légal.
Par ailleurs, les modalités et la périodicité de la mise en place de la contention, les caractéristiques de la surveillance et la durée de la prescription doivent être consignées dans le dossier du résident. L’évaluation et la prescription sont conservées dans le dossier médical du résident.
Les précautions retenues par l’équipe de l’hôpital Local Intercommunal Soultz-Issenheim, dans un protocole établi en 2009, peuvent servir de référence.


I. PARAMÈTRES PHYSIQUES

Il est nécessaire de surveiller :
  • la fonction respiratoire, veiller à l’absence de dyspnée, de cyanose, d’encombrement bronchique, de toux ou de fausses routes lors de l’absorption d’aliment ou d’hydratation. Le cas échéant, le noter sur le dossier. La personne n’étant pas libre de ses mouvements, veiller à ce que sa respiration ne soit pas entravée ;
  • l’état cutané : aspect visuel du ou des membre(s) entravé(s). Veiller à l’absence de rougeurs et de friction au niveau des points d’appui ou de contention et d’attache. Veiller à l’absence de plis au niveau de la literie et des vêtements. Veiller au bon positionnement et à la mobilisation du patient/résident ;
  • l’hydratation : s’assurer de l’hydratation de la personne. Aider à la prise de boisson. Il est nécessaire d’établir une feuille de surveillance des entrées et des sorties si la gestion personnelle des besoins n’est pas possible ;
  • l’élimination : l’accompagnement aux toilettes, l’utilisation du bassin doivent être prévus dans l’organisation du service (tournées, sonnettes, sollicitation de la personne ou de la famille). Ces soins doivent être notés sur le diagramme de soins ;
  • la locomotion : accompagnement régulier à la marche pour préserver les capacités restantes.


II. PARAMÈTRES PSYCHOLOGIQUES ET ENVIRONNEMENTAUX

Il est essentiel, de donner au patient des explications sur :
  • les raisons qui ont motivé la contention ;
  • les critères qui permettraient sa levée ;
  • ce qui va se passer durant la période d’isolement ou de contention (surveillance, examens médicaux, traitement, toilettes, repas, boisson) ;
  • la possibilité de prévenir sa personne de confiance ou un proche. S’il donne suite, on recherchera les moyens les mieux adaptés pour transmettre cette information.
Par ailleurs, la périodicité de la surveillance peut être décidée en équipe et modifiée au besoin en fonction de l’évolution de la situation. Le raisonnement clinique des professionnels de santé doit permettre de limiter au maximum les effets indésirables liés à la contention.
Toute modification du comportement du résident doit être appréciée dès lors qu’elle est à mettre en lien avec la contention. Les éléments observés doivent être consignés dans le dossier et permettre une réévaluation des modalités de contention.
Il faut se rappeler sans cesse que les familles et le personnel jouent un rôle de premier plan dans le maintien d’un contact relationnel de qualité avec la personne bénéficiant de la contention (3).
Il est remarquable qu’il y a très peu de signalements d’événements indésirables graves (EIG) liés à la contention en Ehpad (4). La plupart d’entre eux portent sur une trop faible sécurité des résidents ou des patients (chutes, fugues, défenestration).
Dans le même ordre, il y a très peu de plaintes des familles sur des contentions ou des limitations de la liberté de peur proche. Cependant, les familles attendent des établissements auxquels elles confient leur proche une mise en sécurité de celui-ci. Elles n’hésitent pas à engager la responsabilité des établissements (5).


C. La réévaluation de la prescription

Il convient de veiller au confort du patient à toutes les étapes pendant la contention. La pertinence de la contention doit être réévaluée constamment après sa mise en place par l’équipe soignante.
S’il n’y a pas de modification de l’état de santé du résident ou de la tolérance de la contention celle-ci sera réévaluée au maximum au bout de six mois par l’équipe soignante et le médecin.
En cas de besoin, la prescription de contention peut être réévaluée à tout moment.
Le résident ou la personne chargée de sa protection ou sa personne de confiance peuvent demander par écrit la révision de la prescription (6).


(1)
Reco Anesm dec 2016 bonnes pratiques professionnelles sur la prévention et les réponses aux comportements à problèmes au sein des établissements et services intervenant auprès des enfants et adultes handicapés


(2)
Décret n° 2016-1743 du 15 décembre 2016 relatif à l’annexe au contrat de séjour dans les établissements d’hébergement sociaux et médico-sociaux pour les personnes âgées.


(3)
Op. Cit. extraits annotés du protocole de contention précité.


(4)
Afssaps 2011 et Erage


(5)
Cour administrative d’appel de Bordeaux 9 janvier 2018


(6)
Adaptation de la recommandation Anaes 2000 par le centre hospitalier Jura Sud.

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