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Report sine die de la loi « grand âge et autonomie » : « une faute politique »

Brigitte Bourguignon

Crédit photo DR
Le 13 janvier, lors d’un débat en séance publique à l’Assemblée nationale, la ministre déléguée chargée de l’autonomie, Brigitte Bourguignon, a fait savoir que la loi « grand âge et autonomie » serait discutée « au terme de la crise sanitaire ». Ce qui a vivement fait réagir le secteur.

C’est une véritable arlésienne. Depuis le début du quinquennat d’Emmanuel Macron, la réforme du grand âge est régulièrement évoquée. Mais aucune date n’est fixée. Le texte de loi n’a de cesse d’être remis à plus tard. Si les acteurs du secteur espéraient encore qu’elle serait à l’agenda parlementaire dans les semaines à venir, leurs espoirs viennent d’être douchés par Brigitte Bourguignon. Répondant aux questions insistantes des députés à ce sujet, le 13 janvier, lors d’un débat sur la situation des Ehpad (établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) à l’issue des deux confinements, la ministre déléguée chargée de l’autonomie s’est résignée à avancer la fin de la crise sanitaire comme objectif. « Le gouvernement est déterminé à appliquer la réforme du grand âge et de l’autonomie, volonté érigée en priorité au terme de la crise sanitaire », a-t-elle assuré. Et d’ajouter : « Le gouvernement sera au rendez-vous pour sortir de cette crise sanitaire avec une vraie perspective d’avenir pour ce secteur. »

Face à ces propos, les différents acteurs du secteur ont fait part de leur incompréhension, voire de leur colère. Ainsi, Jérôme Guedj, ancien député socialiste et auteur d’un rapport sur la lutte contre l’isolement des personnes âgées remis l’an dernier à Olivier Véran, a estimé sur Twitter qu’« il n’y aura pas de loi “grand âge et autonomie” d’ici 2022. Point. » Il nous explique : « Au regard du travail de préparation, je ne vois pas comment, dans le calendrier parlementaire, un texte peut être déposé, discuté, débattu, voté. C'est aussi simple que cela. »

Michèle Delaunay, ancienne ministre déléguée aux personnes âgées et à l’autonomie, a aussi déploré cette situation. « Nous le sentions venir, mais aujourd’hui la “suspension” de la loi “grand âge” semble entérinée. Cette loi est, aujourd’hui comme hier, d’une grande urgence car chaque année ce sont des milliers de grands âgés qui n’en bénéficieront pas. »

De son côté, Didier Sapy, directeur de la Fnaqpa (fédération nationale d’établissements pour personnes âgées non lucratifs), se montre perplexe. « Il va falloir que la ministre clarifie ses propos, estime-t-il.  Car s’il y a report de la loi, je serais un peu inquiet pour elle. Elle a quand même été nommée pour faire cette réforme, non ? A sa place, je serais donc inquiet pour mon poste. C'est la finalité même de son ministère qui serait remise en question. »  Si Pascal Champvert, président de l'AD-PA (Association des directeurs au service des personnes âgées) exprime, dans un premier temps, sa « satisfaction de voir la ministre garder le cap de la réforme », il met le président Macron devant ses responsabilités. « Cette loi est indispensable. La crise sanitaire l’a une nouvelle fois prouvé. Il faut donc qu’elle soit votée avant la fin du quinquennat. Si ce n’est pas le cas, nous serions intransigeants. On a supporté un report de Nicolas Sarkozy. On a supporté un report de François Hollande. On ne le supportera pas une troisième fois. »

Le secteur du domicile a également réagi. Et se montre très virulent. « Nous sommes particulièrement inquiets, assure Hugues Vidor, directeur général de la fédération nationale d'aide, d'accompagnement et de soin à la personne Adédom. Entre la revalorisation des salaires, les questions de financement, la gouvernance, l’organisation du secteur, les urgences sont multiples et la réforme devait y répondre. Nous n’allons pas pouvoir continuer très longtemps comme cela. » D’autant que ce report est une véritable surprise pour l’ensemble des acteurs du secteur. En effet, alors qu’ils ont des réunions hebdomadaires avec la ministre, jamais un ajournement n’avait été évoqué. « Jusque-là, madame Bourguignon assurait que la loi serait présentée au premier trimestre 2021, confirme Hugues Vidor. Nous allons rapidement demander à nous entretenir avec la ministre pour pouvoir clarifier la situation. »

Enfin, Antoine Masson, directeur d'Anjou accompagnement, un service de soins à la personne, est particulièrement remonté : « C’est un scandale ! Il n’y a pas d’autre terme. C’est inouï, ce qu’il se passe. Nous attendons des perspectives sur ce sujet depuis des années. Et nous n’avons plus de date. » Sa colère n’est d’ailleurs pas dirigée contre Brigitte Bourguignon (« une ministre extrêmement compétente et à l’écoute »), mais contre l’Etat. « Comment peut-on à ce point manquer à sa parole ? s’insurge-t-il. Comment les décideurs publics peuvent encore être crédibles à l’égard des acteurs du secteur ? Le niveau d’exaspération est impressionnant. Ce n’est plus possible. C’est une faute politique. Nous sommes en train d’éloigner de la parole publique des pans entiers de la société. »

 

Autonomie

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